La photo que tu tiens entre tes doigts est atroce.
L'agent de police assis en face toi te dévisage avec cet air de dégoût qu'ont tous ceux qui savent ce que tu as fait. Sauf que généralement, tu es en assez bonne posture pour te permettre de les éliminer.
Là, les poignets attachés à cette table en piteux état, tu es incapable de tenter quoi que ce soit.
- Où est-ce qu'il est ?
Ton sourire s'agrandit, il s'impatiente, pourtant ça ne fait pas si longtemps que l'interrogatoire a commencé. Tu aurais pensé les flics plus patients.
Il répète sa question en tapant du poing sur la table, et ça ne te fait même pas sursauter.
Tu replonges ton attention sur la photo.
Sur l'image, il ne regarde pas la caméra. Son regard est dirigé sur le côté, et son sourire est sûrement adressé à la personne qu'il regarde. Ses cheveux sont assez longs sur la photo, ils lui arrivent presque aux épaules, et ils sont un peu gras. Son visage est couvert d'imperfections, et il paraît si jeune. Ce n'est pas lui, c'est certain. Tu reposes la photo sur la table, adressant un regard cynique au flic.
- Je ne connais pas cette personne.
- Je te jure que si tu ne me réponds pas, ça va mal aller.
Qu'est-ce que tu ne donnerais pas pour pouvoir croiser les bras, juste pour le faire enrager davantage ! Au lieu de ça, tu lèves les yeux au ciel, et reprends d'une voix agacée ;
- Vous avez l'air bien décidé sur mon sort, donc ça va mal aller de toute façon, non ?
Son visage entier devient rouge, et il plaque les deux mains sur la table, se penche vers toi. Son haleine te fait froncer le nez.
- Je ne vais pas me répéter davantage. L'endroit, maintenant.
Tu ne résistes pas, et agrandis ton sourire.
- Je n'en sais. Foutrement. Rien.
Rageur, l'homme envoie sa chaise de l'autre côté de la pièce, ayant totalement perdu son calme. Tu ricanes, ça n'a même pas duré dix minutes. Ton regard le suit alors qu'il quitte la pièce, et quand la porte claque, tu observes de nouveau la photo.
Si elle ne le représente absolument pas, celle que tu as dans la poche, si.
Tu résistes à l'envie de la sortir, alors tu fermes les yeux, te la remémorant.
Sur l'image, il ne regarde pas la caméra. Son regard est dirigé dans le vide, vers un point qu'il ne fixe pas vraiment, et sa bouche est figée dans une expression terriblement nostalgique. Ses cheveux sont disposés comme une couronne autour de sa tête, ses joues sont couvertes de petites cicatrices qui ne saigneront plus jamais. Il a le teint blafard, l'expression triste, il a l'air d'un ange à tes yeux. Un ange délicieusement corrompu.
Tu rouvres les yeux. Cette photo-là est vraiment parfaite.
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