6 | 'NETTOYAGE AUX MOUCHOIRS'

Je me suis réveillé de mon inconscience un laps de temps plus tard – une minute, trente secondes, cinq minutes, je n'en avais aucune idée – pour tomber nez à nez avec deux grands yeux bleu glacé. J'ai sursauté immédiatement, juste avant de réaliser qu'il ne s'agissait que de Lucas.

Qu'est-ce que ... ai-je fini par bredouiller en me redressant toujours dans l'herbe avec difficulté.

Il avait arrêté de pleuvoir, et il avait retiré sa veste et son t-shirt pour nettoyer ses blessures avec un mouchoir mouillé. J'ai esquivé du regard la ligne de ses abdominaux bien tracés pour regarder ailleurs.

Tu t'es évanoui, me fit-il remarquer en se rasseyant à quelques centimètres de moi pour continuer de nettoyer le sang coagulé sur ses bras, Ça fait quatre minutes.

— Merde, ça va ?

— C'est plutôt à moi de demander ça, siffla-t-il, Tu ne sais pas tenir la baston ?

— C'est la première fois que je me bats réellement.

J'ai essayé de m'essuyer le visage pour retirer un peu de sang, seulement pour remarquer que je n'avais pas autant de sang que prévu.

J'ai commencé à enlever un peu du sang coagulé que t'avais sur le menton.

— Quel gentleman, me suis-je moqué, bien que mon cœur se soit légèrement emballé face à cette attention nouvelle de sa part, ce que je n'ai pas vraiment apprécié. C'était nouveau ça.

Arrête de te faire des films, t'étais en mauvais état.

— Je vois que tu fais des efforts pour rester à côté de moi malgré mon odeur nauséabonde de noix de coco, ai-je fait remarquer en riant.

Hmhm.

Je suis resté silencieux, retirant mon sweatshirt trempé pour regarder si j'avais d'autres blessures. À part quelques hématomes et des traces rouges, rien de bien grave.

Dis, pourquoi tu n'es pas parti quand j'étais inconscient ?

— Mon parapluie a dû s'envoler. Et puis je n'allais pas laisser un cadavre traîner, j'ai un minimum de bon sens.

— Wow, la surprise du millénaire, ai-je cinglé.

En toute réponse, il me claqua l'arrière de la tête.

Ta gueule sale faible !

— T'aurais d'autres mouchoirs ?

Il sortit de son sac un paquet encore fermé et me le balança au visage. Je l'ai réceptionné rapidement et à peine avais-je essayé de l'ouvrir que je me suis pris quelque chose d'autre droit dans le nez.

Aïe ! Mais ça va pas– ai-je commencé à me plaindre, juste pour remarquer qu'il s'agissait d'une barre chocolatée.

J'ai cligné des yeux, confus, ma phrase restant en suspense.

Tu vas bien devoir retourner chez toi, et j'ai pas envie que tu t'écroules au beau milieu de la route car tu manques de sucre.

— Je croyais que tu me détestais ?

Ça sonnait plus comme une question que ce que je l'avais voulu, mais tant pis. Dans tous les cas, quand j'ai vu la tête qu'il me tirait, les sourcils froncés, le nez retroussé, l'air plus que répugné, je me suis douté que question ou affirmation, ça ne changeait pas grand chose.

Mais je te déteste ! Tu es probablement la pire personne que je connaisse ! Tu me tapes sur les nerfs à longueur de journée, toujours avec ce sourire stupide, ton odeur de noix de coco nulle et ton incapacité à fermer ton clapet ! s'exclama-t-il, Seulement même si je te hais plus que tout le monde, je n'ai pas non plus envie de te voir en pleurs ou en véritable danger.

Encore une fois, je n'ai pas trouvé mes mots alors qu'il sortait sa bouteille d'eau pour mouiller un autre mouchoir et l'appuyer sur mon front.

Aïe ! À quoi tu joues ? Appuie pas trop fort, ça fait mal !

— Arrête de te plaindre, tu as du sang séché, c'est dégueulasse.

— D'accord, ai-je soupiré, Je ne m'attendais pas à ce que tu me dévoile tous tes sentiments, pétasse. C'était mignon comme tout, cette petite déclaration.

J'ai eu le droit à une pichenette là où nos fronts s'étaient cognés, me faisant grimacer douloureusement.

Ta gueule putain !

— Je m'attendais pas à autant de sincérité venant d'un mec hystérique, qui hurle pour un rien, se croit supérieur au reste du monde et qui s'énerve dès qu'on le regarde de travers.

— Tu veux vraiment que je te démonte encore une fois, Delbot ?!

— Je croyais que tu ne voulais pas me voir en danger ? me suis-je moqué en riant.

La gifle que je me suis pris m'a finalement fait taire instantanément, et j'ai fermé les yeux, le laissant me nettoyer le visage calmement. Bizarrement, je me sentais assez apaisé de le savoir aussi proche et en train de me laver un peu.

Si j'avais gardé les yeux ouverts, j'aurais remarqué ses joues rosir légèrement à notre nouvelle situation.

Notre bref moment de paix fut brutalement interrompu quand une sonnerie de téléphone qui n'était pas la mienne retentit. J'ai sursauté et ait rouvert les yeux vivement pour voir le noiraud attraper son téléphone au fond de son sac avant de décrocher.

Qu'est-ce que tu me veux, grosse vache ? cracha-t-il.

Toujours aussi charmant. Il avait beau ne pas avoir mis le haut-parleur, je pouvais très bien entendre une voix féminine hurler dans l'appareil, le faisant d'ailleurs grimacer.

TU FAIS QUOI ?! D'HABITUDE TU ES RENTRÉ AVANT DIX-HUIT HEURES QUINZE, IL EST DIX-HUIT HEURES QUARANTE-CINQ ! MAMAN EST MORTE D'INQUIÉTUDE FILS INDIGNE !!

Je pense que hurler, c'était dans leurs gènes. Il devait habiter assez près du lycée pour rentrer en moins de quinze minutes. Je me demande comment c'est possible que je ne l'ai jamais vu auparavant.

J'arrive connasse, grogna-t-il.

NE M'APPELLE PAS COMME ÇA, TU ES–

Elle n'eut pas le temps de répondre qu'il avait déjà raccroché.

Il enfonça dans son sac son t-shirt trempé, le reste de ses affaires ainsi que les mouchoirs usagés, avant d'enfiler rapidement sa veste en jean. Je l'ai fixé en mastiquant la barre chocolatée qu'il m'avait donné, ou plutôt ses abdominaux. Il était stupide de remettre sa veste mais pas son t-shirt, tout était trempé dans tous les cas.

Arrête de me mater pervers, tu vas baver.

— Je vais te laisser croire que je te regardais, ai-je marmonné, De toute façon, ton ego est déjà tellement gros, ce n'est pas cette affirmation qui va le faire grossir encore plus.

Il claqua sa langue contre son palet, et j'ai bien remarqué que l'idée de me gifler le tentait bien. Seulement, il se leva, balança son sac sur son épaule droite et me regarda simplement de haut.

On se voit demain l'hystérique, l'ai-je salué.

Oh comme j'ai hâte Boucles D'or, siffla-t-il sarcastiquement.

On sait tous les deux que tu ne peux pas te passer de moi.

— C'est drôle venant de celui qui disait que mon ego était énorme.

Je lui ai simplement tiré la langue et lui ai montré mon plus beau doigt d'honneur. Il a fait de même avant de tourner les talons. Je suis resté là, mâchouillant en silence les derniers morceaux de la nourriture, me demandant au juste ce que j'allais pouvoir raconter à mes parents pour éviter la punition.

Non, c'était définitif, dans tous les cas, même le meilleur, j'allais me faire priver de sortie. Quelle idée de me battre comme ça avec lui.

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