20 | 'DE SA FAUTE'
Éberlué, j'ai regardé Clara et tout un groupe de filles me regarder avec insistance.
— Euh ... De quoi ? ai-je fini par bredouiller, plus que perdu.
Elles s'étaient ramenées vers moi avec des flyers et des affiches dans les mains, des drapeaux arc-en-ciel sous les yeux, en maquillage. On aurait dit des militantes, et c'était sûrement le cas, seulement je n'avais pas tout compris à ce qu'elles venaient de me raconter.
— Le mariage pour tous ! me répéta Clara, me crachant presque au visage, Tu regardes pas les infos ? Tu vis sous un rocher ?
— Le mariage pour tous c'est pas le mariage pour les LGBT de base ? Il est où le problème ?
— Oh mon dieu c'est un cas désespéré, se plaint Candice.
— Le mariage pour tous, c'est une sorte de groupe qui a comme devise « né d'un papa et d'une maman ». Ils vont faire une manifestation contre le mariage homosexuel et on veut que tu viennes contre manifester avec nous !
J'ai cligné des yeux, puis me les suis frottés.
— Je ne sais pas si c'est une–
Clara claqua une feuille sur mon bureau, me faisant sursauter. En voyant que c'était un flyer de la dite association, je n'ai pu empêcher une grimace de répulsion.
— Deux homosexuels se sont embrassés devant eux, et les policiers les ont violemment arrêtés, soit disant c'était un trouble à l'ordre publique ! Comme avec Lucas, vous êtes le seul couple gay du lycée, on veut que vous veniez manifester !
J'avais quand même envie de rire jaune. La photo de Joëlle n'avait pas fuité que dans la classe, bien évidemment, venant d'elle c'était sûr, et maintenant, tout le lycée nous considérait officiellement comme en couple. Pas que ça change d'avant, mais maintenant, j'ai même perdu toute la confiance de mes amis qui croyaient que je le leur avais caché. Seul Alexandre est assez intelligent pour se rendre compte que c'est n'importe quoi. Enfin, parlant d'Alexandre, je ne le vois plus beaucoup, et il ne me parle plus trop, ça m'inquiète.
Je me suis fait couper dans mes pensées par les filles qui m'ont secoué dans tous les sens.
— ARRÊTE DE RÊVASSER ! TU VIENS OU NON ?!
J'ai entrouvert la bouche, me sentant assez agressé sur le coup et un peu perdu, puis j'ai entendu Ambre gueuler à l'autre bout du self. Tournant la tête, j'ai vu Lucas l'air vraiment mal à l'aise et assez frustré, pris au piège entre un groupe de terminales.
— Les filles je ne pense pas que ce soit une bonne idée, je n'ai pas envie de me faire lyncher pour la troisième fois de ma vie.
Alors qu'elles restaient silencieuses, se demandant probablement où et comment je m'étais fait soit disant lyncher, j'ai soupiré et me suis levé.
— Désolé, mais je viens à peine de me rétablir d'un genou déboité, je n'ai pas envie de me retrouver avec des béquilles pendant encore deux mois à cause d'un policier un peu con.
— Tu vas où ? bredouilla Clara, confuse.
— Je sors ! me suis-je exclamé en croisant mes bras derrière ma tête, Il me reste deux heures avant ma prochaine heure de cours, et j'ai pas envie que vous veniez me les ruiner en essayant de me forcer !
— Mais–
— Cherche pas, Clara, l'ai-je coupée en riant, Je te connais trop bien, et on sait tous les deux parfaitement que j'ai raison.
Sur ces mots, je leur ai toutes fait un au revoir vague de la main sans me retourner, et j'ai enfoncé mes mains dans mes poches avant de me diriger vers la sortie. Avant même que j'arrive au beau milieu du couloir, j'ai senti quelqu'un m'attraper par l'épaule, manquant de me faire tomber en arrière.
— Uaaaah ?!!
— Calme toi, lapin, c'est que moi, grogna Lucas en arrivant à côté de moi, balançant son bras autour de mes épaules, ce que j'ai d'ailleurs regardé étrangement, Moi non plus j'ai pas envie de faire leur manifestation, juste parceque je suis bisexuel, ça ne veut pas dire que j'ai envie de m'exposer comme une sorte de statue.
— Toi ? Une statue ? Laisse moi rire un peu.
Il fit la moue et j'ai senti son regard sceptique me percer entièrement.
— J'ai fait quelque chose de mal pour que tu paraisses aussi chiant ou c'est juste toi au naturel ?
Le temps d'une seconde, j'ai eu envie de le lui crier en plein visage, que, effectivement c'était entièrement sa faute si j'étais soit disant aussi chiant. Je me suis par contre calmé assez rapidement et ai décidé de ne rien dire.
— Si tu assumes que ça c'est mon moi au naturel, alors tu te goures sévèrement Laguion.
— Hm. Donc c'est moi, grogna-t-il, audiblement exaspéré par la tournure de la situation, Sérieusement, je pensais que vu que t'étais un mec, je te comprendrai facilement, mais non, tu réagis exactement comme une nana.
À ce point là, on était déjà à l'extérieur du lycée, et j'ai d'ailleurs profité de notre solitude pour finalement lui dire clairement ce que je pensais.
— Arrête de me comparer à une gonzesse, enfoiré ! Si t'arrives pas à me comprendre, ni moi, ni les filles, c'est juste de ta faute et entièrement de ta faute ! Tu es borné comme pas possible et con comme mes pieds– et même ça c'est une insulte envers mes pieds ! Tu traites tout le monde comme des moins que rien, tu te crois supérieur c'est ça ?! Et bien laisse moi te remémorer que ce n'est pas le cas !
Pour me faire taire, il me tapa violemment le crâne. J'ai sursauté et grimacé de douleur : bon, sa technique avait réussi, j'avais bien fermé mon clapet, et j'étais d'ailleurs en train de me masser le cuir chevelu pour essayer de calmer ma douleur.
— Écoute moi mon lapin, si t'as un problème clair, alors fais le comprendre au lieu de causer dans les généralités.
Bizarrement, au lieu de l'insulter pas très glorieusement, je suis resté silencieux et assez étonné. Il n'avait même pas l'air énervé, juste ennuyé – et on parlait quand même de Lucas, là. Alors, je suis resté silencieux, et ai décidé de baisser la tête.
J'ai l'impression qu'il a un peu changé autour de moi.
— T'es calmé ? finit-il par soupirer.
J'ai simplement hoché la tête en silence, oubliant momentanément ma frustration par rapport à ce qu'il s'était passé le vendredi passé.
— Lapin, sérieux, viens pas tourner autour du pot avec moi, si t'as quelque chose à me dire, dis le moi clairement, parceque je suis pas du genre à aller chercher les indices et les sous-entendus pour te comprendre.
J'ai fait la moue et ai hoché la tête en silence une nouvelle fois. Le problème ici, c'était bien que je ne puisse pas lui dire clairement ce que j'avais sur le cœur – tout simplement parceque je n'en avais pas le courage.
— Tu veux venir chez moi le temps de la permanence ?
Là, j'ai finalement relevé les yeux, une lueur amusée trônant dans mes pupilles.
— Ohoh, et que me vaudrait cet honneur ?
— Ta gueule, pouffa-t-il.
Il repassa son bras autour de mes épaules, pour me garder près de lui, sûrement par réflexe. Et quand je dis que c'est un réflexe, je ne sais absolument pas si c'est le fait de me garder proche de lui ou le simple geste de son bras sur mes épaules. Encore une chose que je découvrirai avec le temps, je suppose.
J'aime pas ce chapitre, j'arrive même plus à en voir le sens, TuEz-MoI
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