Chemin de Lumière
3 jours plus tard
Emma et moi avons gardé contact, avec l'accord de mon patron et l'aide de Julie, je fomente depuis peu un plan pour l'aider. Avec quelques ajustements et l'implication de ses bouts de chou de mômes, je devrais pouvoir arranger un peu leur train de vie compliqué.
Emma m'a demandé de garder ses enfants ce soir, je suis ravie de me retrouver à nouveau avec ces petits anges. Je passe la soirée à leur concocter des jeux et fini par les coucher morts de fatigue. Axelle ne bouge pas. Plantée à la fenêtre elle n'a presque pas parlé de la soirée. Je m'approche doucement d'elle et lève le regard vers la voûte céleste, derrière la vitre salie par le temps, les étoiles brillent toujours plus fort.
— Tu sais, tu peux me parler Axelle... Je ne suis peut-être pas ta mère mais je pourrais devenir ton amie.
Elle tourne vers moi ses yeux tristes et dans un élan incertain, à travers un faible geste peu assuré, je l'invite à se dévoiler à la lueur de la nuit.
— J'ai toujours espéré qu'un jour quelqu'un voit au-delà de l'image qu'on a construit autour de moi, aujourd'hui je n'y crois plus. Tu sais, j'ai vraiment cru qu'un jour les gens allaient se rendre compte que les autres étaient cachés derrière des murs de préjugés et qu'ils allaient passer outre ce mur pour voir la vérité... Mais ce monde est trop superficiel pour comprendre à quel point un sourire peut être un masque de douleur.
Son regard se perd dans la lumière de la lune, et comme un chemin céleste, j'ai l'impression que ses paroles montent en poussière lumineuse jusque dans les étoiles.
— Sous prétexte que je suis une bonne élève on m'a classée comme « Une intello ». J'ai eu beau attendre, m'ouvrir, essayer ; je suis toujours restée celle qui n'avait pour seul intérêt que de donner les cours je crois. On me l'a dit un jour, je me souviens de ces paroles-là. Il m'avait dit « Tu es vraiment superbe en fait... Moi aussi je te voyais comme « L'intello », et puis j'ai appris à te connaître. J'ai compris que tu étais quelqu'un de génial en réalité et je regrette de ne pas l'avoir su avant. Je crois que les gens ne voient que cette facette de toi, ils ne savent pas qui tu es réellement et ne cherchent pas à le savoir. Je crois qu'ils ont tort... Je crois que nous avons tous tort. » Chacun de ses mots est resté encré en moi, il me semble qu'il a raison, on ne cherche pas à savoir. Jamais. On reste sur un mensonge, car on pense la vérité plus cruelle alors qu'elle est mille fois plus belle... Je crois que chaque personne part un jour, j'essaie de ne pas m'attacher et peu à peu c'est moi qui m'éloigne alors que je ne veux juste pas souffrir lorsque cette personne partira. On a parfois voulu me persuader que jamais cela n'arrivera, aujourd'hui je sais que j'ai eu raison de croire que chaque personne partait un jour. Chaque relation est éphémère et j'estime qu'on ne se rends pas assez compte de ce qu'on perd à essayer de garder l'autre au lieu de profiter au maximum du temps qui s'écoule. Les gens ne tentent jamais de voir plus loin que leurs idées conçues, et moi non plus je n'y arrive plus...
Sur ces dernières paroles elle se détourne de la nuit et il me semble voir le ciel s'assombrir. A pas décidés elle s'en va vers sa chambre et vers le sommeil.
— Bonne nuit Léna.
— Bonne nuit Axelle...
Je reste encore quelques instants à tourner en rond dans la salle à manger et à remuer mes pensées jusqu'au retour d'Emma. Changer, s'engager, devenir meilleur. On dirait un slogan... Enfin, ce n'est pas exactement ce que je recherche, il me faudrait quelque chose de plus doux, plus joyeux. Quelque chose de cotonneux comme un nuage, léger comme une plume, fluide comme une rivière.
Emma à peine de retour, je fuis vers mon appartement d'un simple « Bonsoir » subtil. En entrant je me précipite dans le salon, me saisis d'une feuille et déverse mes crayons de toutes couleurs sur chaque espace de la table. Il est temps de faire quelque chose d'utile !
Le bruit seul de l'horloge rompt le souple glissement des feutres sur la feuille. Peu à peu, la pâle couleur triste et blanche se teint de couleurs pastel ou fluorescentes qui laissent un goût amer à l'œil mais si agréable à la bouche. Je ne peux m'empêcher de scander à qui veut l'entendre dans toute la pièce, les quelques mots inscrits là et témoignant de la force que je sais mettre dans un projet qui me tient à cœur.
Durant mon adolescence, avec ma sœur ainée, nous aimions faire des bracelets brésiliens. Rien de plus simple que ces petits nœuds alignés dans des couleurs chaudes et apaisantes, nous avons rapidement eu de nombreuses demandes de la part de nos amies et avons même failli ouvrir un véritable petit commerce ! Enfin, nous aurions pu si l'on n'avait pas abandonné au bout d'un mois...
Ce fut ma première idée. Réaliser des bracelets et les vendre à la bibliothèque en utilisant l'argent récolté pour aider Emma et sa famille. Après avoir obtenu la permission de réaliser mon projet hier matin, je ne pouvais plus tenir en place et ne cessait de rêvasser à de nouvelles idées. Ainsi, me voilà à réaliser une affiche dans l'optique de ramener le plus de monde possible autour de filaments de temps tissés pour ne pas oublier.
Les mots en vrac lancés dans des nuées arc-en-ciel, je colore les grains de neige papier dans une organisation quelque peu personnelle... Plus brouillon qu'affiche, l'excitation me gagne tout de même et réussi presque à m'emmener crier dans toute la rue. Les idées s'agglutinent dans des bulles volatiles et éclatent dans mon esprit avant de venir se figer sur la feuille. L'affiche finale prends peu à peu forme dans mon esprit et je l'imagine déjà accrochée devant l'immeuble, sur la porte de la bibliothèque et à bien d'autres endroits encore.
Est-il raisonnable de l'accrocher tout de suite ? Comme dit l'un de nos proverbes français : « La précipitation est la plus grande ennemie de la véritable activité. » Et si je commençais par l'afficher dans le hall de l'immeuble ? En plus d'aider Emma, je pourrais peut-être permettre aux habitants de se rencontrer ! On pourrait organiser une fête d'immeuble, accrocher des décorations partout, repeindre la façade, aménager le jardin extérieur, créer une chorale d'immeuble... Bon peut-être pas ce dernier point, mais ça pourrait être un vraiment beau projet, pour peu que chacun y mette du sien !
Toujours songeant à mes idées de reconquête du monde et prête à appeler les petits hommes verts à la rescousse, je plonge sous ma couette. Les yeux pleins d'étoiles, j'aspire le firmament dans une vague de souvenirs d'enfant. La petite fille en moi frappe à la porte de mon cœur et dans ses mains, des papillons dansent à l'idée de mettre enfin à l'œuvre le projet qui l'a tant bercée : rassembler...
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Bonjour ! J'espère que vous allez bien ^^
Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ?
Il est plus axé sur la pensée que sur l'action mais j'espère qu'il ne vous a pas trop ennuyé quand même ;)
J'ai d'ailleurs pris ma décision ! A partir de la semaine prochaine je ne publierai plus le mercredi mais uniquement le samedi ^^
Bonne journée à vous !
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