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Je sais que tu es là. Je sais que tu m'entends, qu'importe la strate de ton esprit atteinte, qu'importe si tu ne me réponds pas pour l'instant. Fais nous juste un petit signe pour qu'ils ne t'enlèvent pas tous les fils qui te nourrissent, qui te soignent. J'ai essayé de leur dire que tu avais probablement besoin d'un peu plus de temps, mais tu avais déjà donné tes volontés aux parents si une situation de la sorte se présentait. Qui pense à ça à seulement dix-neufs ans? Qui pense à dire qu'il ne veut pas être maintenu en vie plus de six mois si aucune amélioration n'est visible? Personne ne le fait. Personne sauf toi.

Tu es quelqu'un de spécial et tu le sais si bien. Mais merde Auriane, pourquoi tu n'as pas pu te contenter d'un peu de normalité pour une fois! Juste ne pas aller à cette soirée pour préparer une manifestation contre votre professeur de géographie qui avait agressé ces étudiantes, juste ne pas accepter de monter sur cette moto pour ne pas avoir à prendre de taxi alors que vous alliez être trois sur l'engin, juste dire au conducteur de freiner au feu rouge au lieu de rire de cette folie. Tu n'as jamais eu peur du danger et à cet instant j'aurais tellement aimé que tu aies été une fille peureuse, juste pour une fois. Une fille qui cri quand une araignée grimpe sur son épaule, une fille qui hurle devant les films d'horreur au cinéma ou une fille qui sursaute dès qu'on arrive derrière son dos.

Mais je ne t'en veux pas, non. J'en veux à ceux qui t'ont emmenés là dedans et qui s'en sont sortis avec quelques fractures sans gravité, j'en veux à ton professeur d'être cette horrible personne, j'en veux à ta faculté de l'avoir recruté, j'en veux à la Terre entière. Tu ne peux pas imaginer les jours que j'ai compté, priant tantôt qu'ils passent plus vite pour te voir ouvrir les yeux, tantôt que le temps ralentisse car on se rapprochait bien trop vite de la date fatidique. Le quatre mai. Quelle ironie. Six mois à attendre et bien sûr tu choisis six mois avant ton anniversaire.

Je t'ai fait un album photo. On en avait parlé de te faire l'album qui retraçait le début de ta vie pour tes vingt ans. Mais pourquoi je pense à ça? De toute façon j'aurais tout le temps de chercher d'autres photos si tu pars aujourd'hui. Un rire nerveux mêlé à un spasme me secoue alors que je tente de chasser les images qui défilent dans ma tête. Qu'est-ce qui ne va pas chez moi! Je devrais plutôt tenter de te transmettre toutes mes bonnes ondes, mais je crois que tu m'en voudrais, faire ces trucs débiles que maman nous conseillait avant nos examens alors que tu as toujours clamé que ça ne servait à rien. Tu pourrais même replonger dans le coma juste pour avoir raison.

Quarante secondes.

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