05

ROYAUME DE LA DARMONIE, le Château d'Édimort 1989

ÉLIAHUM DUCHESSE.

☆☆☆

__vous me semblez de très bonne humeur mon enfant, remarque la reine Martini.

Il est encore si matinale mais le château est déjà dans un mouvement très animé suite aux festivités du fin d'année et du nouvel an.

Avec la reine à ma gauche, son bras au creux du mien, nous sortons fraîchement de la chapelle royale pour la salle du déjeuner qui sera prête dans moins de dix minutes.

__je n'ai su quoi vous répondre ma reine, certains matins choisissent d'être agréable sans effort.

__certainement mon jeune prince, votre humeur va de mieux en mieux depuis un bout de temps, si vous fréquentiez une jeune noblesse, mes soupçons se poseront sur la nature de vos ententes, mais vous sachant seul, je rend grâce au seigneur que je ne cesse de prier tout les jours de vous donner la paix.

Les mots de la reine malgré inoffensifs, m'ont pris au dépourvu, j'ai cru à un certain moment qu'elle savait ce qui se tramait dans ma vie depuis un mois.

Je lui souris pour toute réponse et resserre son bras contre le mien, elle me sourit et nous nous dirigeons vers la salle à déjeuner.

La journée d'aujourd'hui au château s'annonce assez rude, nos derniers invités de la cérémonie du nouvel an atteriront sur le sol de la capitale vers ces après midi, je dois être présent pour les accueillir et les conduire dans les appartements qu'ils vont occuper le temps de leur séjour, ensuite je dois programmer les activités qu'ils pourront exercer pour les quelques jours qu'ils resteront ici, l'histoire de leur prouver notre hospitalité ainsi de leur vendre l'image de la beauté touristique de notre royaume, et pour ça j'ai tellement d'idées.

Un instant mes pensées virent vers Céline Mercedes, ça ne fait qu'une heure depuis qu'on s'est quitté mais cela me paraît une éternité. Plus nous nous voyons vers l'aurore, plus le désir de la revoir à tout moment s'accroît en moi.

Charles ne m'a pas caché son désaccord face à cette situation, en me faisant comprendre peu importe le temps que cela prendra, un jour nous serons découvert. Mais il ne s'agissait que de son avis, la décision me revient de toute façon et je ne veux pas me lasser de ce bonheur à sentir l'insistant regard de Céline sur mes doigts, encore moins sa petite voix mélodieuse lorsqu'elle répond à mes questions.

La reine Martini quitte mon bras et rejoint le groupe de femmes qui discutent devant la salle à déjeuner. Charles vieent vers moi et nous allons trouver place à l'intérieur.

La grande salle à déjeuner est bordée des chaises qui entourent l'énorme table en bois, couvert d'un vaste tapis blanc en coton, au-dessus sont jalonné des couverts devant chaque siège, après un cercle des plateaux contenant des fruits frais, les meilleures qui sont cultivées au royaume en cette saison, des pains sortis tout droit au four dégagent une odeur appétissante qui se marie à celle des gaufres et des omelettes. Des jus d'orange, d'ananas ainsi que de fraises pressés spécialement pour l'occasion, un vase de lait frais, ainsi que plusieurs condiments qui complimentent notre appétit gourmand.

Les dames rejoignèrent la salle à manger dans un brouhaha qui leur sont acquis, je ne comprendrais jamais comment elles font pour ne manquer aucun sujet de discussion, ni pour se comprendre avec cette manière de discuter où tout le monde parle au même moment.

La reine marcha gracieusement pour venir se mettre à ma gauche mais ma mère se précipita pour occuper cette place.

Je lèvai mon regard vers elle, interloqué de son comportement, elle me sourit et je secouai la tête... la reine alla se mettre tout juste en face de moi, on se glisse un petit sourire avant que le roi Philippe et ses invités fassent leur entrée.

Leur simple présence imposa un énorme silence dans la pièce, le claquement de leurs chaussures sur le patio resonnèrent en compagnie d'un chœur d'étirement des chaises qui se tuèrent à la minute où le dernier invité prit place.

__chers confrères et consœurs, toutes nations confondues, je vous souhaite le bienvenu dans mon royaume et pour cette occasion, bon appétit ! Merci de rehausser de votre présence.

C'est l'un de rare moment que la puissante voix du Roi se lève dans un lieu aussi remplie de convives. Il ne parle pas tellement que le son de sa voix m'est presqu'étrange à chaque occasion que je dois l'entendre.

Malgré la croissance de la technologie dans le monde avec l'avènement des télévisions où plusieurs chefs d'états s'en servent pour communiquer avec leurs peuples, le Roi Philippe requiert encore et toujours à la presse écrite pour publier ses communiqués dont le premier ministre, Le prince Édouard, mon père prend soin de publier dans tout les canaux de communication possible.

Une petite séance des souhaits de bon appétit déambule autour de la table avant de laisser seul aux couverts le rôle de bruit.

Les servantes environnent la salle comme toujours, à ma droite je peux apercevoir Céline, je sens même son regard qui ne s'éloigne pas de moi, je lève mes yeux sur elle et la considère d'un regard plein d'admiration pour sa beauté, j'aimerai lui sourire mais je m'abstiens de tout soupçon.

D'une voix murmurante ma mère m'informe :

__Le premier ministre Monégasque viendra dans la soirée avec sa famille, sa femme était mon amie d'enfance, ils ont une très belle fille qui est très intelligente, elle vient de l'Amérique,

__je vois.

Dis-je d'un ton qui n'admet aucune autre phrase de plus de sa part, je comprends bien à quoi elle essaie de jouer et je n'ai pas de temps pour ça.

Je me penche vers Charles pour entretenir un semblant de discussion avant de reprendre une position correcte, je mange à peine que les discussions envahissent la table, et c'est en ce moment que mes pensées décident de prendre une direction vers les couloirs de ce chateau pour atterrir spécialement dans une pièce sombre au plafond miroitant jalonné des perles cristallisées, les flammes qui scintillent dans la pièce au rythme de la brise fraiche de l'aurore se peint miraculeusement dans ses beaux yeux verts.

Et les souvenirs de cette matinée repoussèrent tout bruit autour de moi et cette pièce ne représente plus rien d'autre qu'elle et moi dans ma pièce interdite.

Depuis quelques jours je compose une partition que j'ai nommé : désir interdit. Et j'ai pu écrire quelques paroles même si je ne suis pas un bon chanteur, du moins pas une belle voix. Pianoter pour cette partition me passionne tellement, surtout depuis maintenant que j'ai une spectatrice à impressionner, et il s'avère qu'elle soit la raison de mon inspiration actuelle.

Les claviers de l'instrument dansent entre mes doigts et la musique se répand dans toute la pièce, elle est mielleuse, elle est exquise... mon sourire est un mélange de passion et de désir que je n'ai jamais expérimenté auparavant pour l'expliquer, mais je souris. Lorsque mes lèvres s'écartent légèrement, les paroles s'épanchent librement au rythme du battement de mon cœur.

Sais-tu que nous sommes compatible ?
Est-ce tu vois ce désir indéniable ?
Aimerais-tu savoir jusqu'où ça va?
Ou tu as peur du bruit des éclats ?

Crois-tu qu'entre nous ce possible ?
Aimerais-tu briser l'impossible ?
Serais-tu toujours ce que tu n'es pas ?
Ou ne ressens-tu pas ce que je ressens ?

Elle est tout juste à ma droite, je sais que mes paroles quand bien même susurrées, arrivent à percer son cœur.

Les mots que j'ai pu composer ne sont que ceux-là pour le moment. je marque donc une pause et me retourne face à elle.

__comment te sens-tu ?

Elle hoche timidement la tête, je souris. Ses yeux ont une teinte de vert pur on dirait le reflet d'une plante sur l'océan et quand la couleur des flammes se marie à celle de ses yeux, cela produit un spectacle de nuances qui me laisse sans voix.

Malgré un mois déjà que nous nous fréquentions, je ne sais pas grand-chose sur elle, ni elle sur moi. Elle est si réservée et un peu intriguée que je ne voulais pas la brusquer, je me contentai de savoir si elle allait bien à chaque bout de partition, et lui demandai ce qu'elle pensait de ma performance, elle me répondait soit c'est magnifique, soit elle utilisait sa phrase fétiche : _je n'ai aucun point de comparaison pour vous évaluer, la seule personne que j'ai vu jouer dans toute ma vie, c'est vous Altesse ...euh toi Élia._ Vers la fin elle est toujours saisie d'une quinte de toux qui prend fin après avoir prononcé maladroitement mon surnom.

En guise de réponse, je lui souris et lui glisse un merci de m'avoir écouter.

Finalement je lui rappellerai qu'elle devrait ne surtout pas oublier de revenir au prochain l'aube, et elle acquiesçait. Mais aujourd'hui, je voudrais marquer la différence, introduire une discussion qui ne soit plus si monotone que d'habitude, mais qui soit quand-même légère pour l'aider à se sentir à l'aise.

_Alors parle-moi de toi Céline, ai-je dit

Ce nouveau sujet de discussion ne la laisse pas indifférente, elle danse légèrement sur le banc pour se mettre à l'aise et d'une voix trébuchante me demande :

__par où voulez vous, euh... veux-tu que je commence?

Sa difficulté à s'adapter au tutoiement avec moi m'excite à lui faire parler souvent pour qu'elle fasse ses fameux euh...

Je pianote quelques notes sans lui répondre pour mettre un peu de suspens à ce moment et je repose le regard sur elle puis répond:

__parle-moi de ton enfance, où as-tu grandi? Tes parents, comment es-tu arrivé ici ?

J'ai un léger pincement au coeur lorsque je me rappelle que Charles m'avait dit qu'elle était orpheline, mais cette question s'est échappée de mes lèvres avant que mes pensées arrivent à l'analyser, je me ravise et prête attention à sa réponse.

__et bien... ! Inspire-t-elle en posant ses mains sur ses cuisses couvertes de ce pantalon de survêtement, au-dessus elle porte un large t-shirt bleu qui ne la rend pas moins intéressante du tout.

__je n'ai jamais connu mes parents, j'ai été déposé à l'orphelinat des soeurs religieuses toute petite m'a raconté ma soeur Estelle, elles ont prit soin de moi, et j'ai été scolarisé jusqu'au bac avant que l'une des soeurs riches qui nous scolarisait soit partie vers l'au-delà, sa fortune a malheureusement pour nous été héritée par sa famille biologique, du coup on ne pouvait plus nous scolariser à l'Université, désormais on envoie uniquement à l'école les plus jeunes qui n'ont encore obtenu le bac, et nous qui en avons, on nous envoie aller trouver un emploi pour s'en sortir...

Je reconnais la sœur Estelle d'une manière formelle, ma reine Martini et elle sont très amies, il arrive même que la reine se rendre dans la ville de Safronne pour rendre visite à sa vieille amie et laisser aux orphelins quelques cadeaux.

Céline mit une pause, soupira profondément, avant de lever vers moi la tête. Je distingue à peine les traits de son visage, mais la lumière extérieure devient de plus en plus visible, je ne dis rien, je continue à pianoter avec un pincement au coeur, ne pas grandir avec ses parents, ou carrément ne pas les connaître, ça doit être quelque chose de pénible à vivre avec.... Puis je marque une pause à mon tour, et lève mon regard vers elle

__et en suite, Comment tu as fait pour arriver ici?

- c'est grâce à la soeur Estelle, elle est une amie de la reine Martini, elle l'a demandé une faveur de nous recruter parmi les servantes, nous sommes à trois, du moins nous étions, Emma est rentrée servir à l'orphelinat comme bonne sœur après que Sarah ait perdue sa vie inopinément il y a deux ans. m'annonce-t-elle

__oh! Je suis désolé pour Sarah.

J'eus un pincement au cœur d'apprendre cela, j'étais au courant du décès d'une servante, et j'en ai fait même un discours sans être si écœuré jusqu'à ce qu'elle m'apprenne ça.

Elle hoche la tête et acquiesce un sourire négligé. Je voulais juste avoir une discussion légère et moins habituelle et voilà dans quoi je nous ai mis, et ce n'est pas pour autant que je me taise, il faudrait que je lui dise mon sentiment face à la situation avec ses parents.

__c'est.... Commencé-je avant d'arrêter pour chercher les mots adéquats qui exprimentmon ressenti... C'est une réalité douloureuse de ne jamais connaître les personnes qui vous ont mit au monde, je pense.

Elle hoche timidement la tête avant de baisser son regard vers ses doigts qui jouent avec les lacets de son pantalon de survêtement.

Je décide de reposer ma question de toujours dans l'espoir d'alléger l'atmosphère quand bien même je connais la réponse.

__alors comment tu trouve ma musique? Est-ce qu'elle t'a convaincu ?

Elle lève à nouveau vers moi son regard, hoche sa tête avant de la baisser à nouveau

__hey!! Je veux que tu me parles, et s'il te plait! Regarde-moi!! Dis-je tout bas

Elle lève son regard vers moi, un sourire timide qu'on ne distingue à peine

__et bien, son altesse, je trouve que vous êtes doué et que vous aimez beaucoup jouer, vous semblez détendu lorsque vos doigts pianotent les touches de ce clavier pour former des mélodies, mais j'ai aucun point de comparaison me permettant de vous évaluer.....

Elle dit tout ça d'un trait sans même se rendre compte qu'elle m'a appelé : son altesse et m'a vouvoyé du début à la fin sans se corriger, je décide de m'y attarder qu'à sa dernière phrase.

__c'est toute les fois que tu me dis ça Céline! Je ne veux pas que tu me compares à quiconque pour m'évaluer, je veux que tu me dise ce que tu as ressentie pendant que je jouais...

__je... Commence-t-elle. de la nostalgie... et de la tristesse, beaucoup de tristesses, vos mélodies, elles, toutes font un pincement fort au coeur, ils sont comme des alertes, des appels " au secours" des SOS silencieux, votre attitude, vos gestes, tout de vous en ces instants se rassemblent autour d'un sentiment lugubre dont on ne saurait pas pourquoi ? Vous êtes successeur au royaume, vous n'avez pas connu la misère, la galére, ni rien de pareil, votre vie semble être bonnement tracée, vous vivez depuis votre enfance la vie que la plus part d'entre nous reverrons....

__tu rêves d'être à ma place? Ai-je pensé à vive voix.
Je suis consterné d'entendre cela.

__ pas exactement, je sais pas si mes épaules sont suffisamment solides pour porter une telle gloire, mais votre aisance d'obtenir sans difficulté tout ce que vous voulez, tous rêvons de cela! M'avoue-t-elle

__tu te trompes Céline ! Ai-je dit tout bas d'une voix enrouée de tristesse

__ pourquoi dois-je me tromper? Ce n'est pas ça? On vous refuse des choses que vous voulez ? A-t-elle inquisité ébahie

__l'argent ne peux pas tout acquérir chère Mlle ! Ai-je philosophaillé

Elle fait paraître un sourire qui n'atteint pas ses yeux, elle penche sa tête vers le ciel qui prend forme de la matinée à travers la baie-vitrée que les rideaux couvrent à moitié

__tout les riches disent que l'argent ne fait pas le bonheur, mais aucun d'entre eux, a abandonné son argent aux pauvres, je pense que vous qui possédez quelque chose dans ce monde n'acceptez jamais facilement la chance que vous avez sur nous autre, je crois que c'est juste pour attirer notre pitié sur vous.

Ses mots ont l'effet des gifles contre mes joues, je voulais lui dire qu'elle se trompe, que je n'ai jamais eu tout ce que je voulais, que je bossais dur pour gagner l'argent parce que mes parent n'admettaient pas ma passion de musicien et ils me privaient de tout pour que j'abandonne sans succès jusqu'à ce qu'ils me menacent de faire du mal à mes amis, je voulais tout lui dire mais, ses mots m'ont assaillis de cette manière que ma colère commença à répondre à la place de ma raison.

__Je t'ai dit de ne pas me vouvoyer, ni m'appeler par ces titres à la con... j'ai hausé ma voix sur le dernier mot qu'elle eut un sursaut qui me ramolli doucement. Désolé Céline, je ne voulais pas te faire peur, vas-y on se reverra demain, s'il te plait, reviens.

Elle hoche la tête et se lève pour quitter la pièce.

__Éliahum !

C'est la voix de ma mère qui me ramène à la réalité, mon regard tombe sur la foule qui ont tous les yeux sur moi, c'est gênant, je crois que j'ai raté un détail à mon sujet.

__Désolé ! J'étais un peu distrait dans mes pensées, que puis-je pour vous ?

_ L'avion du premier ministre Monégasque vient d'atterir en avance, tu devrais aller les accueillir.

☆☆☆

À suivre...

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