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_ Kihyunnie ?

_ Leader ! m'écris-je, les manches retroussées, en pleine préparation du repas du soir. Tu viens me dire que tu as faim ou tu veux aider ? le taquiné-je.

_ Qu'est-ce que je peux faire ? pose-t-il alors, sérieux.

_ Tiens, occupe-toi de ça.

_ D'accord.

Je te vois venir de loin petit vieux, je te vois venir.

_ Alors ? Tu y as réfléchi ? insisté-je, impatient.

_ Oui et non, rien de bien concluant, baragouine-t-il, en lavant quelques légumes.

Légèrement remonté, je stoppe mon activité, m'appuie sur le rebord du plan de travail, et lui suggère de faire de même du regard.

Il faut qu'on fasse le point ensemble, parce que sinon, je ne vais plus pouvoir répondre de moi.

Cette histoire ne se déroule pas du tout comme je l'ai prévu, et ça m'énerve, autant que ça me frustre !

D'un regard derrière le plus vieux, j'aperçois celui du plus jeune, assis dans le canapé, recruté dans l'après-midi par Minhyuk, pour une partie de jeu vidéo.

Ne t'inquiète pas Kyunnie, je gère !

Obéissant, Hyunwoo s'appuie face à moi, contre le rebord, et attend ainsi silencieusement que je ne dise quelque chose.

Quelque chose qui pourrait peut-être l'aider à voir plus clair.

_ Tu continues à dormir avec lui ? demandé-je, d'un ton rassurant.

_ Oui, je, soupire-t-il, nerveux. Oui.

_ Tu quoi ? posé-je, agacé. Ose me dire les choses Hyun hyung. Tu es venu ici pour me parler de tes inquiétudes, pas vrai ? Alors n'hésite pas autant, c'est frustrant.

Il sait pertinemment combien je suis impatient, et combien j'ai rarement le temps pour la délicatesse.

Je n'aime pas tourner dix ans autour du pot.

_ Je n'arrive pas à m'éloigner de lui, confesse-t-il finalement, la tête baissée et la voix basse. Ce n'est pas ce que je veux, mais c'est ce qui serait le mieux pour lui.

_ Tu n'y arrives pas parce que ?

_ Parce que quand il n'est pas là, je n'arrive plus à dormir.

_ Et c'est tout ? insisté-je.

_ Je ne veux simplement pas qu'il s'éloigne, je ne peux pas l'expliquer.

Arrête de regarder ce sol, et par pitié, arrête de te voiler la face. C'est insupportable.

_ Tu ne peux pas, ou tu ne veux pas ?

_ Je n'en sais rien, tu joues sur les mots là, souffle-t-il, en se grattant la nuque, mal à l'aise.

_ Non pas vraiment, soufflé-je du nez, agacé. J'essaye juste de clarifier tes pensées, parce que apparemment c'est le foutoir la d'dans !

_ Je ne suis pas amoureux de lui, je veux dire... bafouille-t-il, en tentant un regard perdu vers le mien. Il est très important pour moi, comme vous tous, et je ne veux pas que l'un d'entre vous s'éloigne de moi. Je suis le leader de ce groupe, je dois vous épauler et vous soutenir, et non l'inverse. Je ne peux pas faire ce que je voudrais, je dois être rationnel et penser à vous avant de penser à moi.

Il a l'air vraiment perdu. Sûrement bien plus que le cadet.

Il se gratte, encore et encore, l'arrière de la tête, nerveusement, ne sachant réellement où placer ses mains.

Il est en train de s'enfoncer dans ses inquiétudes et interrogations.

Ce n'est pas bon du tout.

_ Ne pense pas tout le temps à nous comme un groupe, râlé-je, attendri, en touillant quelques secondes dans la casserole derrière moi. Tu mélanges trop facilement privé et professionnel.

_ Nous n'avons pas de vie privée Kihyun.

_ Mouais, ok tu marques un point, soupiré-je, en me tournant à nouveau vers lui. Mais tu en perds un pour la suite de ta phrase. Tu dois penser à nous avant de penser à toi ? Tu crois que nous on pense comme ça ? Tu crois que ça nous fait plaisir de te voir te forcer à tout garder pour toi, sous prétexte que tu n'as pas le droit ?

Durement, j'essaye de chuchoter et garder mon calme, pour que cette conversation reste discrète et privée.

Le problème, c'est que j'ai tout sauf envie de me retenir.

C'est plus fort que moi, sa façon de voir les choses est si frustrante, si horripilante.

Continue à chuchoter Kihyun, s'il te plaît, garde ton calme.

Respire calmement.

_ Tu reproches à ce gamin de tout cacher derrière un masque, mais en fait vous êtes pareils, deux vrais boulets ! m'écris-je, plus fort que moi. Vous ne voulez pas inquiéter les autres, l'un parce qu'il est le plus jeune, et l'autre parce qu'il est le plus vieux. Vous êtes lourds. Vous ne pensez pas à nous comme étant une famille, mais juste un groupe.

Je ne l'avais jamais vu aussi mal à l'aise. Il n'ose pas me regarder dans les yeux. Il se contente de boire mes paroles certainement blessantes, tout en observant ses pieds.

Merde, encore une fois, ça ne se passe pas du tout comme je l'avais prévu.

_ Hyunwoo, soufflé-je, en prenant mon temps pour que la pression redescende, les doigts massant mon arête nasale. Tu sais que je t'aime. Tu sais qu'ici nous t'aimons tous énormément. Tu es un père, un grand frère, un meilleur ami, sur lequel on pourra toujours compter. J'aimerais qu'à partir de maintenant, tu prennes le temps de penser à tes propres sentiments, proposé-je, ému, une main posée sur son épaule. Tu es un être humain toi aussi, tu as le droit d'avoir des faiblesses. Continue à épauler les autres comme tu le fais, mais laisse-nous également t'épauler, cela ne fera pas de toi un mauvais leader, bien au contraire.

Ah ! Bon sang !

_ Je sais que tu n'étais pas venu pour parler de ça à la base, soupiré-je.

Oh ?

Mais ?

_ Hyung ? Est-ce que ça va ?

Merde !

Je crois qu'il pleure !

Sans aucune once de réflexion, l'esprit mourant sous la culpabilité, j'enserre ses épaules de mes bras, et chuchote quelques excuses, peiné de le voir dans un état jamais vu jusque-là.

Après de longues minutes de cette étreinte apaisante, il finit par s'éloigner de moi et réussi à me regarder dans les yeux, m'offrant un sourire gêné et reconnaissant, ses petits yeux encore humides.

En bon leader, ce dernier achève en silence ce qu'il avait commencé, et ainsi nous avons terminé ensemble le repas du soir.

_ Tu devrais peut-être discuter avec Jooheon, tenté-je ensuite. Il partage sa chambre avec lui, il doit sûrement lui raconter beaucoup plus de choses qu'à moi, et puis, il est le second plus jeune, alors j'imagine qu'il doit savoir plus facilement ce qui se trouve dans sa tête. Il se fera sûrement un plaisir de t'aider, souris-je, pour conclure cette conversation teintée de mélancolie.

_ Merci, souffle-t-il, simple.

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