8.

- Je m'appelle Liam. Tout ce que vous avez besoin de savoir c'est que vous êtes dorénavant sous mes ordres. C'est ici que vous suivrez un entrainement intensif et que vous aurez toutes les informations concernant votre mission. Votre unité aidera officieusement les troupes de l'armée américaine qui sont déjà sur place. Votre mission consistera dans un premier temps à observer et trouver des failles chez notre ennemi. Lorsque je vous jugerai prêts, vous devrez trouver le chef des rebelles et le neutraliser discrètement. Une fois la mission accomplie et seulement dans ces conditions, vous retournerez chez vous. Des questions ?

Nous nous tenons devant le brun, immobiles, attentifs. Des millions de questions fourmillent dans ma tête mais je m'abstiens. Au lieu de répondre, je regarde ses mains lorsqu'il reprend la parole. Elles sont étendues le long de son corps, il parait calme, mais aux gonflements de ses veines, je devine qu'il est aussi anxieux que nous. Ça a commencé.

Je regarde discrètement autour de moi alors qu'il se replonge dans un monologue. La pièce est vaste et la hauteur sous plafond m'indique que la base est très grande. Des bandes symétriques jaune criant traversent l'un des mur gris anthracite et indiquent un escalier en métal. Un homme à la peau tannée par le soleil d'une quarantaine d'années, affublé d'une blouse blanche et des lunettes rondes, se tient non loin de nous, un carnet dans la main. Il y a quelques hommes en tenue sombre autour de nous qui nous observent, inertes telles des statues de pierre. Je ne peux qu'admirer leur posture et leur présence car ils en imposent.

Je me détourne de ma contemplation lorsque j'entends Liam parler de quelque chose d'obligatoire. Zut. Je n'ai pas écouté ce qu'il disait et cela avait l'air important. Il doit avoir terminé son discours car il nous tourne le dos et emprunte une porte, se dérobant à notre vue. L'homme à la blouse avance d'un pas incertain, et s'adresse à nous avec un rictus crispé.

- Je suis le Docteur El Ghaly , bienvenu parmi nous.

Je note un accent très prononcé, il doit être Egyptien. Il passe une main fébrile dans ses boucles noires en jetant un œil à son carnet.

- Je vais vous appeler un par un pour commencer la visite médicale, ajoute-t-il. Bien, Paul. Suivez-moi s'il vous plait.

Paul s'exécute et je le regarde partir, commençant de plus en plus à paniquer. Une visite médicale ? Sérieusement ? Je suis foutue, littéralement foutue. Je ne donne pas cher de ma peau une fois que le médecin découvrira que je suis une femme et que je les ai tous roulés dans la farine. Il faut que je parte d'ici, immédiatement. Mais comment ? Nous sommes à je ne sais combien de pieds sous terre, en plein milieu d'un désert, dans un pays en guerre que je ne connais pas. Génial. Je dois éviter à tout prix cette visite. Je repère l'une des statues humaines dans un coin.

- Excusez-moi, je commence en changeant ma voix, est-ce que vous pouvez me dire où sont les toilettes ?

Il me regarde furtivement et sans me répondre, m'indique de le suivre avec un mouvement de tête. Tandis que je le suis, je vois Loughlin m'observer, les sourcils froncés mais je passe outre. Nous montons les escaliers rapidement puis il m'ouvre une porte à l'entrée d'un couloir, encore gris. Je m'enferme illico à l'intérieur et je m'affale contre la porte. Pourquoi je suis venue ici ? Il n'y a même pas de fenêtres ni même d'échappatoire. Je colle mon oreille contre la porte mais je n'entends rien. Le garde est-il toujours là ? J'attends quelques minutes et ne voyant pas quoi faire de plus pour m'en sortir, j'ouvre la porte à nouveau. Personne.

L'espoir que j'ai pu avoir disparait dès que je vois son buste me barrer le passage. Il n'exprime aucune émotion et me fait à nouveau un signe de tête. Je le suis, avec pour seule vision sa nuque parsemée de poils.

De retour en bas, je n'ai pas le temps de m'inquiéter d'avantage car le médecin ressort avec Paul.

- Jonathan.

Mon cœur se serre à la vue de ses petits yeux sombres qui me scrutent. Comment sait-il que c'est moi ? Et pourquoi je sens que ma main est levée ? Je regarde à ma droite et je vois le sourire mauvais de Yakov ainsi que sa poigne d'ours sur mon poignet. Je libère ma main en lui arrachant un grognement au passage et je me dirige vers ma perte.

La petite salle est trop étroite pour nous trois. Le médecin, mon oncle et moi. J'étouffe même si la climatisation tourne à plein régime. Il me regarde et me propose de m'allonger sur un petit lit d'auscultation. Une horloge murale indique qu'il est vingt heures cinq et ses tic-tacs m'oppressent.

- Jonathan, c'est bien ça ? me demande-t-il en redressant ses lunettes. Vous me paressez bien jeune mon garçon. Quel âge avez-vous ?

Je ne sais plus si je dois mentir, dire la vérité, quel est mon âge déjà ?

- J'ai 25 ans.

- Hm très bien, dit-il distraitement en écrivant sur son carnet. J'entends à votre voix que vous n'avez pas encore terminé de muer, ou que votre timbre n'est pas très prononcé... Etrange. Votre corps non plus ne semble pas très développé...

Ses petits yeux me transpercent et me sondent alors que je suis de plus en plus mal à l'aise. Soudain ses yeux s'équarquillent alors qu'il prend ma main. Il la relâche aussitôt et me dévisage.

- Oh... C'est... Excusez-moi, je ne l'ai pas vu plus tôt, dit-il en regardant la chevalière à mon doigt.

J'avais oublié cette bague mais apparemment elle a plus d'importance que je ne le pensais. Je suis toujours confuse quand je vois l'Egyptien rayer tout ce qu'il a écrit et refermer son carnet.

- Nous en avons fini. Merci pour votre collaboration.

Il me pousse presque hors de la salle blanche et appelle Yakov. Je ne comprends toujours pas ce qu'il s'est passé mais on peut dire que la bague de Richard m'a sauvée. J'inspire autant d'air que je le peux et me dirige vers Paul et Loughlin.

Une fois que tout le monde est passé, nous sommes emmenés dans un dortoir avec plusieurs lits attitrés assortis d'une armoire en métal. Yakov se jette sur le lit à côté de moi et ferme les yeux, les bras croisés sous sa tête. Paul commence à sortir les affaires de son paquetage et Loughlin s'approche de moi.

- Dis-moi, elle était rapide ta visite à toi ! Ses sourcils roux se haussent. Il attend une réponse.

- Pas vraiment.

- T'es pas très loquace. Tu caches quelque chose ?

- Hein ? Non pourquoi tu dis ça ? je demande sur la défensive.

- Comme ça... Rien ne reste secret très longtemps avec moi, mon pote.

- Ah oui ? Donc tu sais ce qu'ils attendent vraiment de nous ? raille Paul, des rangers à la main.

- Ce n'est qu'une question de temps. Et dès que je saurai vous serez les premiers avertis, dit Loughlin avec un clin d'œil au blond.

- Génial, et si tu fermais ton clape merde maintenant ? J'aimerais me reposer, crache Yakov.

Avant que Loughlin ne réponde, un Liam propre et douché, si j'en crois ses cheveux mouillés et l'absence de poussière sur son visage, fait son entrée et nous interrompt.

- Vous dormirez plus tard, rendez-vous au réfectoire ensuite vous irez vous doucher et dormir.

Comme s'il sentait que notre grincheux allait répliquer il se retourne et avant de disparaitre ajoute :

- Ce n'était pas une proposition mais un ordre.

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