Chapitre 1
Sous le ciel gris et dans le froid du mois de Janvier, je resserre ma parka autour de mes épaules en soufflant, et un nuage de buée s'envole devant mes yeux.
- Mais qu'est-ce qu'ils font ... ?
Cela fait 20 minutes que j'attends au coin d'une rue mes deux meilleurs amis. Le vent froid fait s'envoler mes cheveux et je tire sur mon bonnet. J'ai les doigts rouge et je regrette de ne pas avoir pensé à prendre des gants. Je finis par mettre ma capuche sur ma tête dans l'espoir de renforcer la chaleur offerte par mon bonnet, et je rentre mes mains dans mes manches, puis dans mes poches. J'entends soudain des pas derrière moi.
- Bah alors Eli, me dit une voix masculine, tu t'es reconvertie en esquimau ?
Je me retourne vers mon meilleur ami avec un grand sourire.
- Tu as de l'humour Arthur, mais si je tombe malade je vous tiendrai pour responsable !
- Oh mais ce serai dommage que tu tombes malade le jour de ton anniversaire !
J'aperçois du coin de l'œil la jeune fille qui viens de me parler et je lui lance un grand sourire. Mes deux amis se jettent sur moi et me prennent dans leurs bras, m'étouffant avec la doudoune de leurs capuches.
- Bon anniversaire Élisabeth ! me lancent t'ils en chœur.
-Maintenant que tu es majeure tu pourras faire plein de trucs ! enchaine ma meilleure amie, Chloé.
- Et je vais commencer par finir mes études, je réponds en riant. Je verrai plus tard pour que la « vraie » vie commence.
Bien que je ne sois pas la plus âgée du groupe, je suis la plus sérieuse. Il y a quelques mois, nous avons fêter les 18 ans d'Arthur, et Chloé les aura d'ici quelques mois, mais ils ne voient pour eux que l'occasion de devenir adultes et de faire leurs propres choix. Sortir sans l'autorisation de leurs parents, aller en boite de nuit, ou pouvoir acheter de l'alcool. Et moi, je ne vois que les études à terminer.
-Oh excuse-moi madame sérieuse !
Je ris en secouant la tête.
-Prends-en de la graine, jeune fille ! Je lui réponds en lui tirant la langue.
Je lui dis ça, mais contrairement à moi Chloé n'a pas besoin de travailler dur pour avoir de bons résultats, et tout le monde sais qu'elle aura son baccalauréat sans problème à la fin de cette année. Et ensuite, elle deviendra une danseuse mondialement connue. Enfin, c'est ce que l'on espère pour elle. Arthur lui, à l'intention de devenir médecin et il travaille beaucoup pour y réussir. Quant à moi, je n'ai aucune idée de ce que je veux faire plus tard, alors je travaille assez dur pour avoir des résultats corrects et avoir des portes ouvertes vers mon avenir.
- Bon aller, fini par dire Chloé. On y va où on reste ici à se geler le derrière ?
Elle part devant en sautillant avec la grâce d'une danseuse et je fini par la suivre avec Arthur. Cependant il me retient un instant et rapproche sa bouche de mon oreille.
- Au fait, me chuchote-t-il, tu es magnifique comme ça.
Il s'éloigne et me sourit. Je ne peux empêcher le rouge de me monter aux joues, mais je ne m'en inquiète pas, puisque ma gêne est camouflée par la couleur naturelle de ma peau face au froid. Je n'ai pas le temps de lui répondre que je dois courir pour les rattraper, vu qu'ils ont pris un peu d'avance.
Chloé qui nous attend quelques mètres plus loin et je n'arrive pas à enlever le sourire qui s'est collé à mon visage. Arthur est non seulement mon meilleur ami mais également le garçon dont je suis amoureuse depuis quelques mois. Je n'ai pas encore osé lui dire même si Chloé me pousse à le faire, et j'avoue que même s'il me lance des signaux, je ne me sens pas capable de lui avouer mes sentiments. Et puis j'aurais peur de gâcher notre amitié. Eternelle rengaine de l'amitié, que de de se faire des amis, avoir des sentiments, les avouer et de gâcher une amitié. Et j'ai peur de perdre ces nombreuses années de confiance entre nous.
Nous arrivons dans notre petit café habituel, situé à quelques rues du centre-ville et qui est presque toujours vide. C'est moi qui ai découvert ce piano bar du nom de " Foudre de Zeus" il y a quelques années et il était presque en faillite. Je pense que nos arrêts fréquents dans cet endroit ont aidé même un minimum le patron du bar, qui nous connais très bien maintenant, à le remettre sur pied et même si aujourd'hui, l'économie en est fragile, cela permet de faire perdurer notre petit coin de rendez-vous. Le patron sourit en nous voyant arriver.
-Ah ! Mes enfants !
- Bonjour ! Lui répondons nous en chœur.
Alors que l'on s'installe sur les tabourets juste en face de lui, il pose son regard sur moi.
-Elisabeth, bon anniversaire !
- Merci !
- Pour fêter ça je t'offre ton chocolat !
Je refuse, mais il insiste. Je finis par accepter et il nous apporte à Chloé et moi un chocolat et pour Arthur un cappuccino.
- Maintenant que tu es adulte, me dit ce dernier en tournant son sucre dans sa tasse avec une petite touillette, il est peut-être temps de te mettre au café !
Je finis la gorgée de chocolat chaud, qui coule dans ma gorge et propage une bouffée de chaleur dans tout mon corps.
- Je n'aime toujours pas le café, désolée !
- Goûte au moins ça, dit-il en me tendant sa tasse, et après tu pourras me dire que tu n'aimes pas C'est bien moins fort que le café
Je veux refuser mais il me force limite à boire en la plaçant juste en face de mon visage. Je rigole et finit par attraper le manche, non sans frotter ma main contre la sienne, et je porte la tasse à ma bouche. Je ne quitte pas le regard d'Arthur lorsque je pose mes lèvres sur le verre froid, que j'en prend une gorgée que j'avale en faisant une grimace de dégout sans oublier de tirer la langue.
- Beurk !
Mes amis rigolent et la porte du café s'ouvre pour laisser rentrer d'autres habitués du café qui nous saluent. On décide alors de leur laisser le bar et de nous installer sur une table un peu plus loin. Chloé et Arthur partent devant mais le patron me retient et se penche vers moi.
- ça n'avance toujours pas avec Arthur ?
Je rougis, et cette fois je ne peux pas accuser le froid. Je devrais peut-être essayer avec la chaleur... ?
- Ça se voit tant que ça ?
Il me répond par une grimace qui signifie que oui.
- Pas vraiment, je lui réponds. Je ne sais pas vraiment où j'en suis.
Il me sourit.
- Ne t'inquiètes pas, ça va venir, tu es une jolie fille, alors il finira par se rendre compte de ce qu'il loupe et là tu en profiteras.
Je lui rends son sourire avant de rejoindre mes amis.
- Qu'est-ce qu'il te disait ? m'interroge Chloé en sirotant son chocolat.
- Il voulait savoir si on faisait une petite soirée tous les trois ce soir.
Je suis moi-même étonnée que ma voix ne tremble pas lorsque je leur mens. Pourtant, ce n'est pas dans mes habitudes. Chloé hoche la tête et on continue de discuter jusqu'à ce que la porte du café s'ouvre de nouveau sur trois jeunes hommes d'environ notre âge qui s'installent sur une table non loin de la nôtre. Au bout de quelques minutes, Chloé me donne un coup de coude.
- Regarde le mec blond sur la table des mecs qui viennent d'arriver. Il est trop mignon.
Effectivement, elle le dévore du regard. Je tourne la tête vers les garçons et je vois que le mec en question est en train de lui sourire. Mais ce qui m'interpelle, c'est le garçon juste à côté de lui. Non seulement il est d'une beauté fracassante, mais en plus il me fixe intensément, si intensément que ça devrait en être gênant. Pourtant, je ne ressens aucune gêne et ne parviens pas à retirer mon regard du sien, comme si une force inhumaine me poussais à ne pas bouger. Ses yeux verts sont tellement clairs qu'ils contrastent avec la noirceur de ses cheveux, et ses traits sérieux et pourtant si doux sont tirés dans une sorte de moue intéressée.
- Eli !
Je sursaute en me retournant vers Chloé.
- Arrête un peu de le regarder comme ça on dirait que tu vas lui sauter dessus pour le manger tout cru !
- N'importe quoi ! Je bégaie en rougissant.
Alors que Chloé rigole, je vois Arthur serrer le point sur le manche de sa tasse, tellement que ses jointures devinrent blanches. Je pose ma main sur la sienne et plongea mon regard dans le sien.
- Arthur ?
-Quoi ?
Il m'a répondu si brutalement que je ne peux pas empêcher un mouvement de recul, et je retire ma main de la sienne. Il le remarque et je vois qu'il s'en veut immédiatement d'avoir répondu en étant si désagréable.
- Excuse-moi, commence-t-il, je...
- Excusez-moi de vous couper, mes enfants, nous dit le patron en arrivant derrière moi, mais vu que c'est ton anniversaire Eli, tu ne voudrais pas nous chanter une petite chanson ? Patrick se propose de jouer au piano.
Je regarde Patrick, un homme d'une quarantaine d'années, qui est également un habitué, qui me fait un signe. Je lui réponds par un sourire et me retourne vers le patron pour refuser mais Chloé en décide autrement.
- Oh oui ! s'écrie-t-elle. Une chanson ! Une chanson ! Ça fait longtemps que l'on ne t'a pas entendue chanter !
- Bon bah je ne crois pas avoir le choix...
Je me lève et me dirige vers le piano, où Patrick me rejoint, je me penche vers lui et lui souffle à l'oreille le titre de la chanson que j'ai choisie. Pour mon plus grand bonheur il sait la jouer. Patrick était un très grand pianiste quand il était jeune, et je ne peux m'empêcher de sourire en me disant qu'il n'a pas perdu, lorsque j'entends les premières notes. Je me mets donc à chanter la reprise de "Your Song" D'Elton John par Ellie Goulding. J'ai toujours été timide, mais étonnamment lorsque je chante, ma confiance en moi reviens et toute ma timidité disparait.
It's a little bit funny, this feeling inside
I'm not one of those who can easily hide
I don't have much money, but boy if I did
I'd buy a big house where we both could live
C'est quelque peu amusant, cette sensation intérieure
Je ne suis pas de celles qui peuvent facilement cacher
Je n'ai pas beaucoup d'argent, mais mec si j'en avais
Je t'achèterais une grande maison où nous pourrions vivre tous deux
Je sais que c'est pour cela qu'Arthur aime quand je chante, parce qu'il aime me voir sous mon vrai jour devant d'autres personnes que lui et Chloé. C'est pour ça que je le regarde lorsque je chante, mais pas que. C'est pour lui que j'ai choisi cette chanson, et je me suis dit que peut être que si je le regardais en chantant, il comprendrait l'amour que je lui porte. Il me sourit, et il arbore une expression de fierté dans les yeux, et j'essaye de me convaincre qu'il ressent la même chose pour moi.
Seulement, mes yeux dérivent vers le reste de la salle et je vois que tout le monde s'est tourné vers moi, et que droit devant moi il y a le garçon de tout à l'heure qui me fixait et je vois, avec regret mais aussi avec un peu de joie, - sans pouvoir me l'expliquer, qu'il me fixe toujours. Cependant, son air s'est adouci et il me regarde en appuyant son menton contre ses poings fermés.
So excuse me forgetting, but these things I do
See I've forgotten if they're green or they're blue
Anyway the thing is what I really mean
Yours are the sweetest eyes I've ever seen
Alors excuse-moi d'oublier, mais ces choses que je fais
Tu vois, j'ai oublié s'ils sont verts ou s'ils sont bleus
Quoi qu'il en soit, ce que je veux vraiment dire c'est
Que tes yeux sont les plus doux que je n'ai jamais vu
Et comme tout a l'heure, je ne peux pas retirer mon regard du sien. Peu avant la fin de la chanson, je réussis pourtant à me reprendre en main et à regarder de nouveau vers Arthur, mais celui-ci ne me regarde plus et semble absent, comme perdu dans ses pensées et je ressens alors comme un vide dans mon cœur, et je baisse la tête sur les dernières notes.
And you can tell everybody this is your song
It may be quite simple, but now that it's done
I hope you don't mind, I hope you don't mind that I put down in words
How wonderful life is now you're in the world
Et tu peux dire à tout le monde que ceci est ta chanson
Elle est peut-être un peu simple, mais à présent qu'elle est faite
J'espère que ça t'importe peu, j'espère que ça ne te gêne pas que j'aie mis en paroles
Comme merveilleuse est la vie maintenant que tu es au monde
Je redresse la tête pour sourire à l'assemblée qui se tiens devant moi et qui m'applaudit. Je ne comprends pas ce qu'il se passe. Je ressens des choses pour Arthur, je l'aime sans aucun doute. Alors pourquoi cet inconnu aux yeux verts m'intrigue tellement ? Pourquoi lorsque je croise con regard, je ne peux m'en détacher ? Je secoue la tête et rejoins mes amis, où Chloé me prend les mains.
-Tu as été extraordinaire, on aurait dit que cette chanson avait été écrite juste pour que tu la chantes !
- N'exagère pas, je réponds en rougissant légèrement.
-Elle a raison, intervint Arthur en plongeant son regard dans le miens. Tu as été parfaite.
Son ton est froid et son regard s'est obscurcit, mais je ne peux qu'être fière qu'il me dise ça.
- Merci...
-C'est la vérité vraie, s'exclame alors Chloé ayant senti le froid qui s'installait entre Arthur et moi.
Je vois Arthur lancer un regard noir derrière lui, là où se trouve la bande de garçon et je devine que ce regard est destiné à l'inconnu de tout à l'heure. Peut- être est -il jaloux ? Je secoue à nouveau la tête et je me punis intérieurement d'avoir pensé une telle chose. Il ne faut jamais se réjouir du malheur des autres, même si cela peut signifier qu'Arthur partage mes sentiments et qu'il y a peut-être une chance qu'on soit ensemble autrement qu'en partageant une amitié. Et puis, il n'a aucune raison de l'être, pas vrai ?
Vers midi nous nous levons pour aller déjeuner dans mon restaurant japonais préféré. L'histoire des garçons au café est vite oubliée et Chloé réussit à me convaincre de faire du shopping. Elle voulait qu'on sorte tous les trois ce soir en boite de nuit pour fêter mon anniversaire, bien qu'elle ne soit pas encore majeure. Et donc vers 17h nous décidons d'aller nous préparer chez moi.
- Je vous rejoindrai plus tard par contre, nous dit Arthur alors qu'on marche en direction de chez moi. Je n'ai pas de vêtements corrects et je vais aller en chercher chez moi avant de venir me préparer avec vous.
- Tu viens hein ? lui demandai-je avec une moue boudeuse.
Il sourit, m'attrape par le menton et plonge son regard dans le miens.
- C'est promis, princesse.
Il me lâche, me fait un clin d'œil et emprunte le chemin pour rentrer chez lui. Je reste bouche bée, ne sachant pas comment je dois réagir. Chloé s'en charge pour moi et se met à sauter partout autour de moi.
- Oh mon Dieu, oh mon Dieu, il t'a appelé Princesse ! Il t'aime j'en suis sûre ! La chance !
Je la regarde en riant et porte ma main à mon menton, là où il a posé ses doigts. Je sais qu'elle n'a jamais parlé de mes sentiments à Arthur, et qu'elle ne lui a jamais demandé s'il en avait pour moi. Elle estime qu'on est assez grand pour nous débrouiller seuls et que notre histoire sera plus belle si nous n'avons besoin de personne jouant le rôle de Cupidon pour nous mettre ensemble.
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