Chapitre 33



Un long silence s'ensuivit dans lequel Roderik comprit sans le moindre sentiment de culpabilité que son frère était probablement au courant.

- Je comprends mieux pourquoi tu voulais tant percer mon mensonge, commença Luke avec amertume ; C'était pour mieux me la prendre.

Roderik leva le menton et pivota lentement sur lui-même pour apercevoir Luna en train de défaire sa valise.

- Te la prendre ? Répéta-t-il avec une lenteur délibérée ; N'est-ce pas présomptueux de ta part de dire une telle chose ?

- Ne me prend pas pour un imbécile ! Tu as couché avec elle ? Oui ou non ?

- Ma vie privée ne te regarde en rien ! Siffla-t-elle entre ses dents.

Luke poussa un juron.

- Tu as bien joué ton coup mon frère, lâcha Luke le souffle court ; J'espère au moins que tu en profites !

Roderik serra son téléphone entre doigts au risque de le briser.

- Tu as de la chance que je sois loin de Londres ! Rugit-il en allant dans une autre pièce : La façon dont tu parles d'elle est la preuve évidente que Luna Moor n'est pas ton amie mais juste une conquête de plus que tu désirais mettre dans ton lit !

Roderik ne lui laissa aucune chance de lui répondre.

- Je n'ai pas moindre envie de discuter de ma vie privée avec toi.

- Tu te rends compte qu'elle est jeune et...

- Assez ! Hurla-t-il si fort qu'il entendit un petit cri de l'autre côté de la cloison.

Luna sursauta violemment en étouffant un cri. Quoi qu'il puisse lui dire en passant le pas de cette porte Luna savait pour quelle raison il venait de se mettre en colère. À l'évidence quelqu'un savait pour eux et cette personne devait être Luke.

Faisant mine d'être occupée elle pliait et dépliait ses affaires nerveusement.

- Est-ce que tu as pris ta commande Luna ? Lança-t-il en surgissant de nulle part sans laisser la moindre expression transparaître.

Elle comprit qu'il ne voulait pas en discuter alors Luna décida de ne pas entamer le sujet.

- Oui, tu as déjà mangé des œufs Bénédicte ?

- Oui, c'est un excellent choix, répondit-il l'air songeur ; C'était mon frère au téléphone, il est au courant pour nous.

Eberluée qu'il lui en parle si vite, Luna cessa son remue ménage dans ses affaires et se redressa pour le confronter.

- Il l'a mal pris ?

Il demeura silencieux un long moment.

- Luna, commença-t-il la rejoignant ; As-tu déjà pense un instant qu'il puisse être ton ami ?

Luna étouffa un rire qui en disait long sur sa réponse.

- Je ne dirais pas que Luke soit un ami sur lequel on pourrait compter, il a passé plus de temps à me lancer des sous-entendus que d'essayer de me comprendre.

Il plaqua ses deux mains sur ses cheveux.

- Il n'avait qu'un seul but, te mettre dans son lit, lâcha-t-il d'une voix percée de dégoût ; Il est en colère mais cela m'importe peu.

Il glissa ses doigts dans ses cheveux.

- Je n'ai pas à me justifier et toi non plus.

Elle opina du chef.

De toute façon elle n'avait pas envie de se justifier. Elle avait toujours fait ses propres choix seule sans aucune aide ou conseil de qui que ce soit.

- Alors pourquoi sembles-tu aussi en colère ? Demanda-t-elle néanmoins.

Il tiqua en déviant son regard dans la chambre.

- Parce que j'ai horreur que l'on se mêle de ma vie de la sorte ! S'énerva-t-il en s'éloignant vers la salle de bains ; C'est trop pour une seule journée.

Luna le rejoignit pour s'appuyer contre l'encadrement de la porte.

- C'est la première fois ?

- Oui, avoua-t-il les traits aiguisés de froideur ; Parce que d'ordinaire, cela ne dure pas, c'est éphémère.

Un frisson glacial transperça Luna. Sa sincérité était douloureuse à entendre et à supporter mais elle préférait ça au mensonge.

Appuyé avec nonchalance sur le rebord de levier il sonda son regard au sien.

- D'ordinaire je suis des plus impitoyable et la presse ni même ma famille a le temps d'en être informés que c'est déjà fini.

- Hormis ton mariage...

- Diable ! Ne parle pas de ça Luna, ce n'était pas un mariage c'était une erreur sinon pourquoi l'avoir fêté dans l'ombre.

Luna se mordit la lèvre. Il est vrai qu'elle n'avait trouvé aucune photo de son mariage seulement des articles.

- Je me suis essentiellement marié par devoir, ajouta-t-il doucement en ôtant sa chemise.

- C'est affreux, murmura Luna en peinant à se concentrer devant cette masse musculaire impressionnante.

- Je n'ai pas souffert rassure-toi, je savais dans quoi je m'engageais.

Luna esquissa un vague sourire, les yeux dans le vague.

- Les femmes qui ont partagé ma vie en sont ressortis, ivre de colère et humiliée veux-tu savoir pourquoi ?

Luna n'eut pas de temps de cligner des yeux qu'il la retenait prisonnière contre la porte.

- Je l'ignore Roderik, murmura-t-elle en peinant à soutenir son regard.

- Elles avaient toutes la même passion pour moi.

- Ton corps d'apollon ? Hasarda-t-elle en rougissant.

- Une rivière de diamant, un désir narcissique d'apparaître dans les premières pages de la presse à scandale.

Il marqua une pause pour glisser son index sur sa pommette.

- Et mon corps d'apollon, ajouta-t-il avec un sourire qui se voulait arrogant.

Elle éclata de rire et se hissa sur la pointe de ses pieds pour atteindre ses lèvres mais il plaqua sa main sur sa bouche pour interrompre son geste.

- Après tout ce que je viens de te dire tu n'éprouves pas l'envie terrible de fuir ?

Ses yeux verts furent traversées par une lueur d'incertitude.

- Non pourquoi ? Je devrais ? S'enquit-elle en perdant son sourire.

Roderik plongea son regard dans le sien et y trouva la réponse. Il venait de se justifier pour la première fois de sa vie, il venait de la plonger dans son obscur passé dans lequel aucune femme était parvenue à y trouver une place.

- Oui tu devrais mais pas pour les raisons que je viens d'énoncer, chuchota-t-il en posant un baiser sur son front.

- Je veux être avec toi aussi longtemps que tu voudras de moi.

Ses mots annihilèrent tout son être...

D'un regard presque sauvage il la dévisagea pour être certain d'avoir bien entendu. Elle semblait totalement inconsciente de ce qu'elle venait de lui dire.

- Tu devrais faire attention à ce que tu dis Luna, ces mots résonnent différemment en moi, avoua-t-il d'une voix dangereuse.

La jeune femme soutint son regard sans un mot. Ses lèvres s'entrouvrirent pour mieux se refermer puis elle reposa la plante de ses pieds sur le carrelage et disparut en le laissant seul à ses réflexions.

Cette femme le rendait complètement fou ! Songea-t-il en serrant convulsivement ses mâchoires. Il perdait tout contrôle.

- Miss Moor revenez immédiatement ici !

Luna fit mine de rien entendre et sourit secrètement. Qu'est-ce donc cette soudaine gravité qu'elle avait lu dans son regard ? Et pourquoi semblait-il si préoccupé de lui exposer son passé ?

Avait-il peur qu'elle prenne la fuite ?

- Miss Moor, fit-il derrière elle.

Luna se retourna pour l'affronter alors qu'elle s'était abaissée pour enlever ses chaussures.

- J'espérais un réponse, dit-il en faisant mine d'être mécontent.

- Que désires-tu m'entendre dire Roderik ?

- N'importe quoi hormis ce silence assourdissant.

Luna inspira imperceptiblement et marqua un temps d'hésitation. Elle se voulait prudente et ne voulait pas lui exposer ce qui lui soulevait le cœur.

- Tu viens de t'ouvrir à moi et je doute que tu l'ais déjà fait avec tes maîtresses.

Il grimaça pour toute réponse.

- Alors cela fait de moi quelqu'un de spécial à tes yeux.

Impassible, il se rapprocha avec une aisance qui lui coupa le souffle.

- C'est exactement ça, chuchota-t-il en lui prenant le poignet pour y déposer un baiser.

- Tu es spéciale, répéta-t-il en la dévorant des yeux.

- La première fois que je t'ai vu tu m'es apparu comme un monstre sans cœur, les apparences sont parfois trompeuses tu es bien placé pour le savoir, dit-elle en faisant allusion à ce qu'il avait pensé d'elle au tout début de leur rencontre.

- Tu as raison, admit-il avec gravité.

- Alors maintenant que nous nous sommes confié l'un à l'autre et que notre liaison semble plus éclaircie, je propose que nous profitons de ce que la vie nous réserve, décréta Luna en se calant contre lui.

Liaison...

Ce mot noua la gorge de Roderik tandis qu'il fixait froidement le mur du salon.

Car c'était bien plus qu'une liaison.

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