Chapitre 25



Luna recula farouchement sans le quitter des yeux. Partir avec lui une seconde fois ? Après l'incident qui la rendait encore mal à l'aise ?

D'ailleurs elle peinait à comprendre pourquoi il avait subitement changé d'avis. Elle s'était faite à l'idée que plus jamais elle le reverrait...seulement dans les pages de magazines, les même qu'elle avait consultées à son retour pour y découvrir un portrait très précis de cet homme qui se dressait devant elle comme s'il pouvait d'un claquement de doigt mettre le monde à ses pieds. Il en était pourtant capable.

N'avait-elle pas frissonner en consultant quelques articles qui le décrivaient comme un homme implacable ?

Luna secoua imperceptiblement de la tête pour chasser le trouble qui l'envahissait.

- Vous avez été très clair en ce qui me concerne monsieur le Duc, vous vous êtes excusé et cela me suffit, je n'ai pas besoin d'un dîner pour accepter vos excuses.

- J'en conviens mais je tiens à vous emmener avec moi, rétorqua l'homme de plus en plus tendu.

Son ton autoritaire se glissa sur elle comme l'effet d'une caresse.

- Pour quelle raison ? À quoi cela servirait ? J'ai pris mon destin en main comme vous me l'avez suggéré et regardez !

D'un pas léger Luna alla jusqu'à son sapin pour accrocher la dernière boule.

- Il semble en piteuse état si vous voulez mon avis, commenta-t-il avec sarcasmes ; Et si vous appelez ça prendre son destin en main alors il est grand temps de me suivre.

Furieuse, Luna serra les lèvres mais toute cette colère retomba lorsque subtilement il se rapprocha d'elle.

- Laissez-moi me faire pardonner comme je l'entends miss Moor, lui dit-il avec une lueur impatiente dans les yeux.

- Vous êtes si froid, nota-t-elle d'une voix tremblante.

- Je ne peux guère changer sur ce point là, déclara-t-il sans essayer de la détromper ; C'est ma nature, je suis froid et lunatique et tout aussi implacable.

Luna le dévisagea longuement incapable de prononcer un mot.

- Vous n'aimez rien dans la vie ?

Elle vit ses mâchoires tressauter.

- Aussi inimaginable que ça puisse l'être j'aime votre compagnie, articula-t-il comme si cela lui coûté.

Le coeur de Luna se mit à battre à vive allure et se sentit rougir. Cet aveux ne manqua pas de la troubler davantage. Elle exhala un soupir tremblant tout en songeant à accepter.

La première fois avait été magnifique elle devait le reconnaître mais la suite avait été qu'une succession de désillusion et d'erreurs. Avait-elle assez d'audace pour se risquer à la suivre ?

- Où allons-nous ? Demanda-t-elle subitement.

Les yeux du Duc furent transpercés d'une lueur indescriptible.

- C'est une surprise...

- Je me lance dans l'inconnu avec vous si je comprends bien ?

- Vous n'allez pas le regretter, je vous le promets...

Luna baissa les yeux pour fuir son regard profond et ses jambes se mirent à avancer d'elles-mêmes jusqu'à sa chambre. Après quelques recommandations Luna prit des vêtements chauds et le suivit sans savoir où cette acceptation la mènerait.

- Votre chauffeur ne nous accompagne pas ? S'informa-t-elle en remarquant une voiture noire garée sur le trottoir mais totalement différent de celle qu'elle connaissait.

- Non, nous irons par mes propres moyens, je n'ai pas besoin de chauffeur.

Il lui ouvrit la portière également et rajouta ;

- Vous ne craignait rien Luna, je vous le promets.

Étrangement, elle lui fit confiance et monta à l'intérieur sans résistance. Mais une fois la portière refermée Luna eut l'impression qu'elle était comme prisonnière de sa propre décision et ne pouvait plus revenir en arrière.

S'efforçant de rester calme elle inspira profondément quand il s'installa au volant. Il était si imposant qu'elle crut suffoquer.

- Alors ? Maintenant que je ne peux plus quitter la voiture puis-je savoir où vous m'emmenez ?

- On dirais une enfant impatiente d'ouvrir son cadeau, remarqua-t-il en un sourire en coin.

- Nous nous connaissons que depuis une semaine et en règle générale je ne fais pas ce genre de chose.

Main crispée sur le volant il quitta la route principale, les traits tirés.

- Que voulez-vous savoir à mon sujet ?

- Je sais tout de vous monsieur Willar grâce à Internet.

Il tourna brièvement sa tête vers elle, l'air surpris.

- Vraiment ?

Luna haussa des épaules.

- Je ne suis pas très penchée presse ou magazine mais j'étais curieuse, répondit-elle d'une voix légère ; Vôtre ex-femme est très belle.

Il se rembrunit subitement.

- Elle peut remercier la chirurgie, dit-il d'une voix désincarnée de toutes émotions.

Luna se surprit à le dévisager pour tenter de comprendre cette colère éternellement inscrite sur son visage.

Hélas elle ne trouva rien d'autre qu'un homme froid et visiblement hanté par son passé.

- Pourquoi tant de froideur ? Avez-vous toujours été comme ça ?

- Cela fait partie de moi, depuis l'enfance, je me laisse très rarement guidé par des émotions car elles sont dangereuses.

- Vraiment ?

- Sauf avec vous, admit-il froidement.

- Le regret n'est pas une émotion, lui dit-elle en reportant son regard sur la route.

- Bien-sûr que c'en est une, affirma-t-il d'une voix plus amène ; Et le regret n'est pas l'émotion qui me vient à l'idée quand je vous vois Luna.

Son cœur se mit à battre à vive allure.

- Laquelle ?

Il arrêta la voiture au milieu de la route, complètement vide de circulation.

- D'accord...je crois que là...ça devient flippant.

Il se tourna vers elle, l'air sérieux.

- J'ignore qu'elle émotion, avoua-t-il d'une voix rauque ; Je suis désolé d'agir de la sorte, mais j'aimerais que vous me fassiez confiance.

Luna avait l'impression d'être devant un autre homme qui prenait plaisir à se confier.

- Je vous fait confiance Roderik...

Sans un mot ni même un sourire il reprit la route alors que le soleil commençait doucement à se coucher. Des myriades de sensations se bousculaient dans son esprit. Roderik était si mystérieux que c'est pour cette raison qu'elle avait accepté de le suivre. En fait, il l'arrachait à son quotidien pour la plonger dans un monde totalement inconnu mais il ne fallait pas se leurrer...elle était là pour soulager la conscience de cet homme rien de plus.

Du moins elle essayait de s'en convaincre.

Roderik serra le volant alors que des sensations intenses se répandaient en lui à une vitesse folle. Voilà plus de deux heures qu'il conduisait en direction du lac Ullswater là où il avait fait construire un cottage au plus proche de ce lac reposant et qui l'aidait de par son calme et son silence à le ressourcer.

Et pour une raison qu'il ignorait Roderik voulait lui faire découvrir ce paysage extraordinaire. Personne jusqu'ici avait eu la chance de pénétrer dans son havre de paix.

Se risquant un coup d'œil dans direction il la trouva endormie tête contre la vitre. D'un geste imprudent et prompte il prit son bras de façon à la remettre sur le dossier.

Elle ouvrit alors ses grands yeux verts pour le gratifier d'un sourire intimidé.

- Je ne voulais pas vous réveiller, dit-il sans quitter la route des yeux tandis qu'elle se redressait.

- Je me suis juste assoupie, murmura-t-elle d'un soupir.

- Nous sommes presque arrivés.

Roderik s'enfonça dans les bois et ne put s'empêcher de sourire en devinant aisément le regard paniqué de la jeune femme.

- Bienvenu au lac Ullswater miss Moor.

Roderik se gara devant son cottage et se tourna vers elle. Dans les couleurs rougeoyantes du soleil ses yeux prirent une teinte indéchiffrable et une bouffée de désirs le transperça.

- C'est magnifique, murmura-t-elle en ouvrant sa portière.

Dans ce paysage verdoyant la jeune femme s'approchait timidement vers son domaine les lèvres frémissante d'un sourire contenu.

- Nous sommes juste au-dessus du lac, venez, je vais vous montrer.

Luna le suivit au cœur de la foret en jetant des regards circulaires partout autour d'elle. Il n'y avait que le silence qui régnait dans cet endroit magnifique et presque hors du temps.

Elle grimpa les marches et le suivit à l'intérieur du cottage d'une rare beauté.

Il posa son sac dans l'entrée et plaqua une main autoritaire dans son dos pour l'entraîner sur le premier balcon.

- C'est splendide ! S'exclama Luna en dévorant le lac des yeux ; On a l'impression d'être sur l'eau.

- C'était l'idée de départ, expliqua Roderik en la regardant se pencher dangereusement.

Il prit son bras pour qu'elle se redresse.

- Faites attention vous n'imaginer pas le nombre de femmes qui se sont noyées en se penchant de la sorte....

Roderik s'efforçait de rester sérieux devant sa mine déconfite.

- Je plaisante Luna, chuchota-t-il en se penchant vers elle.

Furieuse elle le fusilla du regard avant de se tourner vers l'horizon.

- Très drôle monsieur Willar !

Roderik se rapprocha et l'obligea à le regarder en glissant son index sur son menton.

- Alors ? Vous ne regrettez pas ? S'enquit-il d'une voix profonde.

Ses yeux s'abaissèrent timidement et le trouble qui l'envahissait manqua de le faire défaillir. Il retira son doigt par crainte de lui faire peur. Bon sang ! Reprend-toi ! S'admonesta-t-il en serrant convulsivement les mâchoires.

- Non, je ne regrette pas, dit-elle d'une voix à peine plus haut qu'un murmure...comme si elle prenait conscience qu'elle était sur le point de basculer dans l'inconnu.

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