Chapitre 18



Contre toute attente Luna passa une belle soirée. Entre la dinde et le délicieux pudding qu'elle avait tant rêvé, Luna était aux anges à quelques exceptions près.

Luke en était à son septième verre de champagne et ses agissements devenaient de plus en plus incontrôlable. Il usait de tous ses charmes quels qu'ils soient pour attirer l'attention sur lui. À plusieurs reprises sa main s'était discrètement baladée sur sa cuisse. Forcée de le laisser faire à cause de l'oïl aiguisé du Duc qui n'avait pas manqué de le remarquer Luna s'efforçait de maintenir un sourire digne.

- Bien, annonça Luke d'un soupir ; Je pense qu'il est temps pour nous de partir n'est-ce pas ma chérie ?

Luna reposa le gâteau qu'elle avait en main.

- Merci pour cette merveilleuse soirée, transmettez mes compliments à Mary, tout était délicieux, déclara-t-elle à l'adresse du Duc qui fixait son frère froidement.

- Vous lui transmettrez vos compliments demain au petit-déjeuner car il est absolument hors de question que Luke prenne le volant, Lâcha le Duc en se levant impérieusement.

Luna déglutit péniblement.

- Ton frère à raison, intervint Abigail qui enfilait son manteau ; Tu as trop bu Luke.

- Je suis capable de conduire jusqu'à chez-moi merci, rétorqua Luke en l'obligeant à se lever.

Chez lui ? Oh non, non, songea-t-elle en se dégageant d'un mouvement fluide. Il était hors de question qu'elle aille dans son appartement et se surprit à jeter un regard alarmant au seul homme capable de le faire plier.

- Tu n'es pas en état de prendre la route et je ne veux pas que tu mettes la vie de ta fiancée en danger.

- Ah parce que tu t'inquiètes de son sort à présent ? Lança Luke avec bravade ; Il y a tout juste une semaine tu voulais la faire disparaître de ma vie.

- Luke ! Gronda Abigail.

- Mademoiselle Moor il y a des chambres au premier étage tout à fait confortables, allez donc en choisir une pendant que je parle à mon frère.

Luna obtempéra sans un mot. Jamais elle aurait crû dire ça un jour mais elle le remerciait intérieurement d'être intervenu. Luke avait tenu des propos assez étranges durant la soirée et ses allusions étaient pour le moins inquiétante.

- Miss Moor ? Venez donc par-là.

Le ton de Mary s'était changé en un brusque et agréable apaisement. Peut-être que Roderik avait raison et qu'elle se méfiait de Luke.

- C'était très bon ! S'exclama-t-elle en joignant les mains contre son ventre alors qu'elle la suivait dans les étages ; Vous m'avez rappelé ma mère, elle cuisinait si bien.

Typique des anglais, Mary s'inclina en guise de réponse avant de poursuivre sa marche.

- Qu'est-ce qui te prends Luke ? Lâcha Roderik en faisant le tour de la table ; As-tu perdu la raison ? Où sont passées toutes tes promesses de la veille ?

- J'ai envie de rentrer chez moi et emmener Luna se reposer !

- Pas dans cet état ! Gronda Roderik en revoyant les yeux verts de la jeune femme s'écarquiller d'inquiétudes ; Tu commences à tituber et la route est glissante.

Luke leva les yeux au ciel en sortant ses clés de voiture.

- Mary ? Voulez-vous dire à Luna que nous partons ?

Mary s'arrêta au seuil de l'arche mains jointes.

- Mademoiselle est déjà installée dans une chambre.

- Peu m'importe dites-lui de redescendre.

- Mary n'en fera rien, est-ce bien clair ou je dois te le faire comprendre d'une autre manière ? Intervint Roderik d'une voix tranchante.

Abigail s'avança pour se mettre entre ses deux fils.

- Luke écoute un peu ton frère s'il te plaît.

Quelque part au plus profond de lui Roderik sentait quelque chose d'anormal dans l'attitude de son frère. Il le connaissait bien et pouvait sentir dans ses yeux qu'il le détournait de ses plans.

- Je peux le raccompagner si vous le souhaitez Roderik, lança une voix féminine près de l'entrée.

Christina Harpman arborait un sourire charmeur et semblait prête à partir.

- Je n'ai pas bu, précisa-t-elle d'une voix suave ; Je suis sûre que Miss Moor n'y voit aucun inconvénient.

Luna s'entoura de ses bras tout en restant cachée derrière le mur. Elle avait cru pendant un instant pouvoir faire confiance à Luke mais elle s'était trompée sur toute la ligne. L'inflexibilité de Roderik en revanche l'avait fait frémir de peur. Il faisait asseoir son autorité avec une rudesse troublante. Avait-il senti sa peur ? Est-ce qu'elle devait lui dire la vérité ?

- Très bien ! S'exclama Luke avec flegme ; Je vais laisser Christina me raccompagner et je passerais chercher Luna demain matin.

La réponse de Luke ne manqua pas de choquer sa mère. Quel genre d'homme partait avec une autre femme en laissant sa fiancée ?

C'en fut trop pour Luna qui remonta discrètement dans la chambre.

Roderik serra le poing pour endiguer la rage qui le consumait. Après qu'il ait eu fermé la porte de son manoir Roderik desserra sa cravate et se mit à réfléchir à toute de vitesse.

- Il se passe quelque chose, lança-t-il en allant se servir un verre.

- Quoi ? S'enquit Abigail ; Tu penses qu'il la trompe ?

Roderik se mit à rire avec amertume.

- Je ne crois pas en cette relation, il y a quelque chose d'anormal.

Incrédule, sa mère se laissa tomber dans le fauteuil le plus proche.

- Pourtant ils avaient l'air complices pendant le dîner, dit-elle en plissant son front ; Luna est une jeune femme absolument adorable, mon premier jugement était trop sévère et je le regrette, je suis sûr que Luke a trouvé la femme idéale.

Roderik pivota pour faire face à sa mère.

- La femme idéale ? Répéta-t-elle d'une voix rêche ; Bon dieu suis-je le seul à voir que cette relation n'est pas normal ! Quelle genre de femmes laisse son fiancé partir avec une autre.

Abigail soupira en le dévisageant.

- Roderik je crois que tu devrais te trouver une maîtresse, suggéra sa mère

Roderik lâcha un rire dubitatif.

- Je te demande pardon ?

Abigail soupira puis se leva du fauteuil.

- Je pense que tu ne supportes pas l'idée que ton frère ait trouvé une fille et depuis ton divorce tu...

- Tu penses que je suis jaloux de Luke ? La coupa-t-il les yeux noirs ; Mon divorce n'a absolument rien à voir avec les agissements de ton fils ! Je mène une existence tout à fait satisfaisante ma très chère mère.

Abigail se racla la gorge en reculant.

- Je voulais simplement dire que...

- Je peux obtenir n'importe quelle femme mais vois-tu je n'ai pas le temps, je dois m'occuper de ton fils.

- Laisse-le faire sa vie comme il l'entend Roderik, laisse-le faire des erreurs et...

Il leva sa main pour la faire taire et décida que c'était le meilleur moment pour lui raconter les mésaventures de Luke.

Après sa tirade, Abigail chancela et dut se retenir au bras du fauteuil.

- Voilà, pourquoi je n'ai pas confiance en Luke, articula-t-il froidement pour ensuite finir son verre d'un trait.

- Mais pourquoi...tu ne m'as rien dit ?

- Pour t'éviter ce genre de réaction qui menace ta santé, répondit Roderik en appelant Garry le chauffeur titré de sa mère ; Veuillez ramener ma mère elle ne se sent pas bien.

Abigail se leva pour suivre son chauffeur.

- Ne t'en fait pas mère, je contrôle la situation, lui avait-il dit avant qu'elle franchisse la porte.

En réalité il ne savait plus s'il contrôlait la situation. Un muscle tressauta violemment à la mâchoire alors qu'il s'était laissé tomber sur le fauteuil. La seule chose qui le rassurait ce soir c'est de la savoir saine et sauve...probablement déjà endormie et peut-être attristée par cette situation. Affecté par un lourd épuisement, il posa ses doigts sur ses yeux fermés envahi par une colère sourde.

- J'ai terminé monsieur de Duc, annonça Mary en s'inclinant.

- Très bien Mary, murmura-t-il en fixant le vide ; Avez-vous donné tout ce qu'elle désirait ?

- Elle m'a rien demandé de particulier hormis une tasse de chocolat chaud, répondit-elle doucement ; Néanmoins ce n'est pas très raisonnable de le boire sur la terrasse par ce froid.

L'esprit de Roderik ne fit qu'un tour.

- Où se trouve-t-elle ?

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