Une cause, une bataille, une défaite.

Camille et Arthur marchaient devant. Pierre et moi étions derrière.On revenait d'une séance de cinéma. On marchait dans les rues et il faisait sombre. Il devait être environ 19h. En effet, le soleil se couchait tôt en cette période.On avait décidé d'aller voir Frank car c'était sur notre chemin et de plus, on ne l'avait pas vu depuis longtemps.Frank était un vieux clochard, mais on s'était liés d'amitié avec lui.Nous étions dans une association caritative pour aider les SDF comme Frank. On l'avait rencontré lors d'une de nos actions au sein de cette association. Franck vivait seul dans un coin de rue sombre,avec pour seuls biens un carton en guise de matelas, un petit gobelet contenant quelques centimes et rien d'autre.
On arrivait à l'angle de la rue de Frank, mais la police était là. On se cacha pour observer la scène. On vit un des policiers passer les menottes à Franck, mais on n'entendait pas ce qui se passait. On s'avança plus pour mieux suivre l'action. Le policier qui menottait Franck l'accusait d'avoir volé de la nourriture dans une épicerie plus tôt dans la journée, mais Franck pestait. A l'évidence, il avait passé sa journée à dormir et à chanter des vieilles chansons dans son coin.

Évidemment,l'accuser n'avait aucun sens. Nous le connaissions bien.L'un des policiers emmena Franck dans la voiture avec une violence terrible.Quandle responsable de la patrouille appela son Chef au téléphone, on tendit l'oreille.
«Ouais Chef.... C'est bon. On a enfin pris le vieux clochard que vous nous aviez demandé d'escorter.Du coup la place est libre pour la commémoration du 11, chef. (...)On a sortie l'excuse de vol de nourriture chef. (...)Oui,voilà. Mais on en fait quoi maintenant chef ? (...)D'accord parfait. A toute à l'heure chef.»
Avait-on bien entendu ?Franck était innocent!Toute cette mise en scène n'avait été organisée que pour rendre la place présentable et accessible lors la cérémonie organisée parla mairie. Ils voulaient seulement dégager Franck alors qu'il nedemandait rien à personne. Franchement, c'était inadmissible.
La voiture n'était pas partie que Pierre bondit de derrière sa cachette. Mais qu'allait-il faire ? Il n'allait pas tenir tête aux policiers ?Et bien si! Il le faisait!
J'étais d'accord pour lutter pour les SDF, mais là, il allait trop loin.Lutter contre les forces de l'ordre, c'était une véritable folie.
Les policiers interpellèrent Pierre et l'interrogèrent d'abord calmement pour essayer de le ramener à la raison. Mais il n'arrêta pas et continua à s'énerver. On ne pouvait pas rester là sans rien faire. On se leva d'un coup et on alla aux côtés de Pierre qui hurlait.
«Mais NON, c'est inadmissible ! Vous n'avez pas le droit, bande de menteurs! Espèces d'escrocs ! Bande d'hypocrites !»Toutes les insultes sortirent de la bouche de Pierre. Je devais réagir.
«Pierre, Calme-toi !
-Quoi ! Tu prends la défense de ces menteurs ! Vas-y, laisse-moi ! Tu ne sers à rien de toute façon !
-Pierre,mais tais-toi où tu vas avoir des ennuis ! Je suis d'accord. Franck n'a rien fait de mal, pourtant c'est comme ça! Tu peux pas tenir tête aux forces de l'ordre, mec. Réfléchis !
-Écoutez votre ami, jeune homme, sinon on va devoir vous embarquer également. Allez, soyez raisonnable et rentrez chez vous.
-Tant que vous ne relâcherez pas Franck, je me battrais. Et vous,dit-il avec une rage inconnue en regardant Camille et Arthur, vous ne faites rien ? En fait, vous êtes exactement comme Fred, des dégonflés.
-Non, moi je te suis, protesta Camille,je trouve ça totalement horrible de faire ça à un SDF qui ne demande rien à personne. Je pense même qu'on devrait prévenir les médias.
-Non ! Moi je pense que vous devriez vous calmer les gars, cria Arthur. Au pire, ils le garderont 3 jours en cellule et le relâcheront. Allez, calmez-vous ! On est d'accord, cette pratique n'est pas juste mais on ne peut rien y changer !
-Mais vous ne comprenez pas?! Ils vont emmener un innocent, un démuni,tout ça pour récupérer cette maudite place pour la commémorationde jeudi. Des places, y'en a partout ! Tout ça pour cacher lavérité, ne pas déranger la belle image que veulent donner les politiques. C'est sûr, les SDF dans les rues, ça fait tâches sur les photos! Que ce soit Franck ou un autre c'est pareil! Accuser d'un crime qu'il a même pas commis, c'est ça le pire! Vous n'avez pas honte? Hurla-t-il aux policiers.Bah non, vous n'en avez rien à faire. Vous avez un toit, vous !Certainement une femme et des enfants. Et quand votre gamin vous demandera « Papa t'a fait quoi aujourd'hui?»Vous leurs répondrez «J'ai juste emprisonner des innocents, mais c'est pas bien méchant, hein ?» C'est ça que vous répondrez, n'est-ce pas ? Espèces de ...»
Non,là, sérieusement, ça allait trop loin. J'ai pris Pierre par le bras, mais il se débattait.Du monde dehors était sorti et observait la scène. Un des policiers sortit son taser. Camille, et Arthur ne luttaient quasiment plus. Ils observaient juste. A certains moments, l'un des deux revenait dans la partie, mais rien de très virulent. Partout les civils filmaient la scène. Pierre était devenu incontrôlable. On aurait dit un taureau dans l'arène pendant une corrida. Mais le policier au taser s'élança sur Pierre et le frappa en lui mettant une droite. Il finit par le taser. Plusieurs civils se rajoutaient à notre mouvement, des dizaines de sirènes se faisaient entendre. La situation dégénérait.
Des policiers arrivèrent en renfort de tous les côtés alors que la foule s'échauffait.Tout s'était effondré autour de nous, nous n'avions pas libéré Franck,Pierre était traîné, menotté sur le sol par les officiers et je fus moi-même arrêté alors que depuis le début j'avais seulement essayé de calmer les ardeurs. Seul Arthur s'enfuyait au loin en nous abandonnant à notre sort. Même Camille finit par se faire arrêter par les forces de l'ordre.
On avait voulu se battre plus ou moins contre une injustice, mais c'est nous qui en subissions les conséquences, et c'est ce qui était malheureusement le plus juste car notre réaction avait été disproportionnée.
Le lendemain, sur tous les médias, télés, radios et journaux, dans toutes les bouches, on ne parlait que de nous et de notre intervention musclée. Undébat avait été lancé et les politiques, les mêmes qui voulaient cacher la misère aux yeux des gens, utilisaient la cause des SDF et de la population pauvre pour leur propre promotion.

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