~ ° Chapitre 24 : Identity ° ~
Armin passa près d'elle et, sans lui laisser le choix, lui attrapa fermement le poignet. Son geste n'était ni brusque ni violent, mais il était suffisamment déterminé pour que Shizu comprenne qu'il n'avait pas l'intention de la laisser s'échapper. Depuis quelque temps, elle avait l'impression que tout le monde avait une emprise sur elle. Kenny, Maëlys, et maintenant Armin...
C'était pourtant Armin.
Le garçon gentil et calme, celui qui portait un regard admiratif sur le monde extérieur et qui parlait toujours avec une douceur qui réchauffait les cœurs. Elle l'avait déjà vu sérieux, concentré lorsqu'il évoquait l'océan et les terres au-delà des murs. Mais c'était la première fois qu'elle le voyait ainsi, l'expression crispée par la colère et l'inquiétude mêlées.
Elle se laissa entraîner sans un mot.
Il la guida jusqu'à sa chambre, où régnaient un ordre et une propreté presque irréprochables. Quatre lits parfaitement alignés occupaient la pièce, leurs draps tirés avec soin. Une légère odeur de bois ciré flottait dans l'air, trahissant une habitude presque maniaque de l'organisation. Malgré cette atmosphère apaisante, Shizu ne parvenait pas à se détendre. Elle se sentait terriblement mal à l'aise, et ce n'était pas simplement dû au fait qu'elle se trouvait seule avec Armin.
Avant même qu'elle n'ait le temps de formuler une pensée cohérente, la voix du blond s'éleva dans la pièce.
«_Maintenant, je veux que tu m'expliques. »
Son ton était ferme, mais il n'y avait aucune agressivité dans ses paroles. Il voulait comprendre, il voulait des réponses.
«_Pourquoi as-tu planté une fourchette dans le bras de Maëlys ? Pourquoi vous êtes-vous disputées après ça ? Et pourquoi on a appris que vous vous étiez battues ? »
Il croisa les bras sur sa poitrine et la fixa, cherchant à capter la moindre réaction sur son visage.
«_J'imagine que vous avez eu droit à une correction du major après ça ? »
Shizu resta silencieuse, détournant légèrement le regard. Que pouvait-elle bien répondre ? Devait-elle seulement répondre ?
Un soupir échappa à Armin.
«_Shizu... Je suis juste inquiet. »
Sa voix s'était adoucie, et lorsqu'elle osa enfin lever les yeux vers lui, elle fut frappée par l'intensité de son regard.
«_Hier, tu n'étais pas bien du tout. Tu étais... brisée. Et je ne sais toujours pas pourquoi tu pleurais autant. Et maintenant ça ? Qu'est-ce qui t'arrives ? »
Il marqua une pause, comme s'il espérait qu'elle briserait enfin son mutisme. Mais elle restait figée, luttant contre cette sensation oppressante qui l'étouffait.
«_Je veux que tu me parles. Je veux t'aider. »
Il fit un pas vers elle, son regard trahissant une sincérité désarmante. Elle serra les poings. Une boule se forma dans sa gorge, l'empêchant de parler. Elle voulait répondre, elle voulait tout lui dire... mais les mots refusaient de sortir.
Pourquoi est-ce que c'était si difficile ? Pourquoi se sentait-elle toujours aussi seule, aussi piégée ?
Elle baissa les yeux, le souffle court.
«_Shizu, dis-moi ce qui ne va pas. »
Armin attendait. Il ne la pressait pas, ne la forçait pas. Il était juste là, face à elle, lui tendant la main sans aucune attente en retour.
«_Ne cache pas ta peine. »
Elle releva la tête, et cette fois, elle ne put contenir les larmes qui embuaient ses prunelles.
«_Armin... j'ai mal... »
Sa voix tremblait, à peine audible. Elle posa ses mains sur sa poitrine, là où elle sentait cette douleur oppressante, ce poids qui l'écrasait depuis tant d'années.
«_ Je ne supporte plus. »
Son regard se perdit dans celui d'Armin, suppliant, cherchant désespérément une réponse à cette douleur qui ne la quittait jamais. Il fronça légèrement les sourcils, comme s'il tentait de comprendre l'ampleur de ce qu'elle essayait de lui dire. Il voyait bien que ce n'était pas une simple peine passagère. Ce qu'elle portait en elle était profond, enraciné dans son être. Une souffrance silencieuse, mais bien réelle.
Shizu détourna les yeux. Chaque jour, elle se demandait quand ce cauchemar prendrait fin. Quand est-ce qu'elle pourrait enfin respirer, sourire sincèrement, vivre sans craindre le lendemain ?
Armin l'observait en silence, les lèvres légèrement pincées. Il ne savait pas quoi dire, et pourtant, il sentait au plus profond de lui qu'il ne devait pas la laisser seule. Quelque chose lui disait qu'il devait s'accrocher à elle. Qu'il devait comprendre.
Doucement, il avança sa main et la posa sur celle de Shizu. Elle serrait toujours le tissu de sa chemise avec force, comme si cela pouvait empêcher son cœur de se briser davantage.
«_Parle-moi... »
Leurs regards se croisèrent de nouveau, et en un instant, un lien invisible sembla se tisser entre eux. L'un avait besoin d'aide. L'autre avait besoin de comprendre.
C'était étrange, mais à cet instant précis, ils se ressemblaient plus qu'ils ne l'avaient jamais imaginé.
Shizu prit une profonde inspiration, tentant de calmer les battements affolés de son cœur. Elle savait qu'elle pouvait lui faire confiance.
«_Armin... s'il te plaît... Ce que je vais te dire, promets-moi... promets-moi de ne le dire à personne. »
Un silence s'installa. Puis, après quelques secondes, un sourire doux étira les lèvres du blond.
«_Je te le promets. »
Elle hocha légèrement la tête, essayant de rassembler son courage.
Il était temps. Le secret qu'elle portait depuis si longtemps menaçait de la dévorer de l'intérieur.
Elle inspira profondément, son regard fixé sur Armin comme pour s'assurer qu'il était prêt à entendre la vérité.
«_Je... »
Sa gorge se serra. Mais elle ne pouvait plus reculer.
«_Je ne m'appelle pas vraiment Satori Shizu. »
Un frisson parcourut Armin.
Un simple aveu, mais qui changeait tout.
Lentement, il relâcha ses bras et recula d'un pas, prenant conscience de l'importance de cette révélation. Son regard se fit plus intense et plus attentif.
Il comprenait que ce qu'il allait entendre pourrait tout bouleverser.
Plus tard :
Le soleil s'éteignait lentement à l'horizon, étendant sa lueur orangée sur le QG. Shizu était là, contre la vitre, un chiffon dans les mains, nettoyant par automatisme, sans vraiment y penser. Son regard était perdu dans le paysage qui se déployait à l'extérieur. Elle ne voyait rien de tout ça, pourtant. Tout ce qui occupait son esprit, c'était l'imminence du plan qu'elle allait devoir exécuter ce soir.
Un frisson d'angoisse lui parcourut l'échine, mais elle le chassa aussi vite qu'il était venu. Il n'était pas question de faillir. Pas cette fois. Mais le doute, pourtant, s'infiltrait lentement, tapie dans l'ombre des pensées qu'elle n'osait affronter.
Son esprit revenait encore et encore à la conversation dans le bureau d'Erwin, à la manière dont il avait évoqué Emi, à la vision du passé qui s'était imprégnée dans ses paroles. Le regard d'Erwin, ce qu'il avait ressenti en la voyant, lui collait à la peau. C'était comme une présence invisible qu'elle ne parvenait pas à ignorer.
En passant son chiffon, à travers un reflet, elle découvrit une silhouette qui s'approchait. Elle se redressa, prête à faire face à ce qui l'attendait, mais la silhouette qui s'arrêta près d'elle ne la surprit pas. Livaï. Il n'avait fait aucun bruit en s'approchant, comme d'habitude. Sa présence était aussi discrète que pesante. Il s'était posté à côté d'elle, légèrement appuyé contre le mur, les bras croisés.
Son regard, froid et perçant, se fixa sur elle. Il ne disait rien, mais l'intensité de son observation était palpable. Un poids invisible semblait s'installer dans l'espace entre eux.
Shizu tenta de ravaler l'angoisse qui commençait à l'envahir. Elle se força à paraître calme, mais une sensation étrange, presque désagréable, lui chatouillait la nuque. Pourquoi sa simple présence la perturbait-elle tant ?
« _Vous... vous avez besoin de quelque chose, caporal ? Sa voix était plus hésitante qu'elle ne l'aurait voulu, trahissant un léger malaise. »
Livaï ne répondit pas tout de suite. Ses yeux, sombres et distants, ne la quittaient pas. Il scrutait chaque geste qu'elle faisait, chaque mouvement, comme s'il cherchait quelque chose. Puis, après une longue pause, il s'éloigna lentement d'un pas, tout en émettant un bruit inaudible, un claquement de langue.
« _Tu m'énerves. »
Cette phrase, lancée sans aucune explication, résonna comme un coup de tonnerre dans le silence du couloir. Shizu se figea, déstabilisée par le ton qu'il employait. Il était calme, mais la dureté de ses mots la fit sursauter.
Un frisson glissa le long de sa colonne vertébrale, mais elle ne répondit pas immédiatement.
Elle se tourna vers lui, les yeux légèrement écarquillés.
« _Quoi ? »
Le ton de sa voix trahit une inquiétude qu'elle n'avait pas cherchée à dissimuler. Pourquoi lui disait-il cela ? Pourquoi semblait-il si distant, si... perturbé par sa simple présence ?
Livaï s'arrêta un instant, comme s'il avait l'intention de lui dire quelque chose de plus, mais il se contenta de la regarder sans un mot. Puis, après un moment d'hésitation, il se tourna enfin vers elle, ses yeux sombres fixant son visage avec une intensité inhabituelle.
« _Tu... tu me fais me poser des questions. Il dit cela comme une réflexion plus qu'une accusation, sa voix toujours aussi calme. Je te vois là... mais quelque chose me gêne. »
Shizu frissonna à ses mots, un nœud se formant dans son estomac. Elle n'était pas préparée à ce genre de conversation. Pas ici, pas maintenant. Elle avait l'impression que, peu à peu, Livaï commençait à percer quelque chose en elle qu'elle n'était pas prête à lui révéler.
Il ne savait rien, il n'avait pas le droit de savoir.
Elle baissa les yeux, essayant de calmer le tumulte dans son esprit.
« _Je suis juste fatiguée, caporal. »
Sa voix était plus douce cette fois, mais elle savait que ce n'était pas suffisant. Elle sentait qu'il ne la croyait pas. Il la scrutait, comme s'il cherchait à voir à travers elle, mais il se contenta finalement de hausser les épaules.
« _Ouais... peut-être. Il laissa échapper un léger soupir avant de détourner le regard. Fais gaffe à toi, Shizu. »
Il s'éloigna sans ajouter un mot de plus. Shizu resta là, figée, les yeux fixés sur le vide devant elle. L'air semblait encore plus lourd maintenant qu'il était parti. Elle avait cette étrange sensation qu'il venait de semer un doute dans son esprit, un doute qu'elle n'avait pas voulu affronter.
Le regard de Livaï... c'était comme s'il voyait plus qu'elle ne le voulait. Comme s'il savait, au fond, que quelque chose clochait, même s'il n'en avait aucune idée.
Et elle, elle était là, prise entre deux mondes, à ne pas savoir comment se défaire de cette impression persistante.
« _Bouh ! »
Shizu sursauta une nouvelle fois, un cri étouffé échappant de ses lèvres avant qu'elle ne se retourne précipitamment, surprise par cette apparition inattendue.
Elle s'apprêtait à dire quelque chose de plus mordant quand elle aperçut Conny, un grand sourire aux lèvres, hilare comme à son habitude. À ses côtés, Sasha se tenait difficilement sur son épaule, en proie à une crise de rire incontrôlable.
Ce couple de joyeux lurons ne cessait de lui jouer des tours ces derniers temps, et elle n'y échappait jamais.
« _Conny, espèce de petit vaurien, tu m'as fait peur ! Lança-t-elle en reprenant peu à peu son calme. »
Elle tapota son propre cœur, comme si elle voulait se donner une contenance.
Conny éclata de rire encore plus fort, et Sasha, pas en reste, se tordait de rire à ses côtés. Mais Shizu n'était pas du genre à se laisser faire aussi facilement. Elle saisit les deux jeunes gens par la nuque, les tirant doucement vers elle. Leur rire s'étouffa aussitôt.
« _Ça vous fait rire ? Demanda-t-elle d'un ton sévère, son regard planté dans les leurs. »
Sasha, un peu penaude, tenta de se dégager de l'emprise de Shizu, tout en pouffant encore un peu.
« _Bah oui, Shizu. D'ailleurs, c'est ça ta punition ? T'es sûre que c'est pas le caporal qui t'a donné cette tâche ? Elle lâcha un petit rire étouffé. »
Elle savait que la jeune fille se foutait gentiment d'elle, mais elle n'avait pas le cœur à s'énerver. Elle répondit avec un sourire en coin.
« _Tu crois ça ? Tu veux que je te rappelle comment tu t'es prise une taloche la dernière fois, Sasha ? »
Sasha pouffa à nouveau, et Conny, voyant qu'ils étaient en train de dériver vers un autre sujet, coupa la discussion.
« _D'ailleurs, elle est où Maëlys ? Demanda-t-il en scrutant autour de lui, comme si la jeune femme allait apparaître d'un instant à l'autre. Elle ne devait pas être avec toi ?
_Si, mais pour éviter qu'on se tape encore une fois dessus, elle est partie nettoyer ailleurs. Répondit Shizu en haussant les épaules, une légère pointe de sarcasme dans la voix.
_Ooooh d'accord. Conny sembla pensif un instant avant de secouer la tête. Vous devriez vous excuser toutes les deux. Vous aviez l'air proches, ça serait dommage de briser une amitié comme la vôtre. »
Sur le ton de la plaisanterie, il ajouta :
« _Allez, on te laisse, Shizu. On se voit au réfectoire. »
Conny et Sasha se retournèrent pour partir, mais pas avant d'attraper un dernier sourire de Shizu.
Conny avait beau être un peu naïf avec ses conseils, Shizu appréciait son côté optimiste. Il ne savait sans doute pas que la relation entre Maëlys et elle n'avait rien à voir avec ce qu'il imaginait, mais l'intention était là, et ça la touchait un peu.
Dès qu'ils furent partis, Shizu expira un long souffle, tentant de calmer les pensées qui tourbillonnaient dans sa tête. Elle attrapa un seau pour continuer son travail, mais son esprit était ailleurs, cette fois-ci bien loin des blagues des autres.
Elle s'apprêtait à nettoyer la fenêtre suivante, mais son regard se perdit à travers la vitre, fixant l'horizon dans un moment de réflexion. Elle se demanda ce qu'Eren penserait d'elle quand il découvrirait qui elle était réellement. Comment réagirait-il, sachant qu'elle était une ennemie ?
Une boule se forma dans son ventre. La peur, ou était-ce la culpabilité ? Elle inspira profondément, essayant de repousser ce sentiment qui l'étouffait. Il fallait qu'elle reste calme. Elle n'avait pas le droit à l'erreur. Ce soir, tout allait se jouer, et elle ne pouvait pas se permettre de faiblir.
Elle repensa à la mission à venir, à ce qu'elle allait devoir accomplir. Une part d'elle se battait encore contre l'angoisse qui montait en elle. Mais une autre part, plus sombre, savait au fond d'elle que tout cela faisait partie du plan. Le plan pour lequel elle avait été préparée. Elle avait accepté son rôle, sa place dans ce combat. Même si cela signifiait que, après ce soir, tout serait terminé pour elle.
Elle savait que, peu importe ce qui se passerait, elle méritait la colère et le rejet d'Eren. C'était ce qu'elle avait choisi. C'était ce qu'elle avait accepté.
Et pourtant, une petite voix persistait dans sa tête. Une voix qui lui murmurait que tout allait bien se passer. Qu'il fallait juste tenir bon encore un peu.
Mais au fond, Shizu ne pouvait s'empêcher de se demander : quand cette nuit serait terminée, quand la vérité éclaterait, est-ce que quelqu'un serait là pour l'aider ? Ou est-ce qu'elle se retrouverait seule, une fois encore, face à la haine et à la trahison qu'elle avait causées ?
A suivre....
J'espère que ce chapitre vous a plus et n'hésitez pas à mettre un petit commentaire ou une petite étoile pour votre soutien, ce serait très sympathique de votre part <3
Laemi :)
[CHAPITRE REECRIS]
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top