~ ° Chapitre 16 : A sad corporal ° ~


Shizu resta encore un moment, assise sur le bord du toit, ses pieds pendant dans le vide. L'air du soir était frais et calme, chargé d'une sérénité trompeuse. Le ciel, constellé d'étoiles, semblait s'étendre à l'infini, offrant un tableau d'une beauté presque insoutenable dans ce monde ravagé. Elle inspira profondément, laissant ses pensées dériver, bien qu'elle n'en ait pas conscience. Quelque chose semblait peser en elle, une tension qu'elle ne savait pas nommer. Et puis, soudain, elle sentit une humidité sur sa joue droite. Sur le moment, elle pensa qu'une goutte de pluie s'était échappée des cieux. Mais il n'y avait aucun nuage dans l'air clair. Intriguée, elle porta la main à son visage et découvrit qu'il s'agissait d'une larme.

Elle resta figée un instant, surprise par sa propre émotion. D'un geste brusque, elle essuya la trace salée, tentant de la chasser autant que ce qu'elle représentait. Mais avant qu'elle ne puisse se recentrer, le grincement métallique de la porte du toit l'interrompit.

« _Que fait une gamine toute seule sur le toit à une heure pareille ? »

La voix était froide, familière, autoritaire. Shizu se crispa immédiatement, reconnaissant celui qui venait de parler. Elle se retourna rapidement, se levant par réflexe, et s'inclina légèrement.

« _Bonsoir, caporal, répondit-elle simplement, tâchant de cacher son trouble. »

Le caporal Livaï ne répondit pas immédiatement. Il avança tranquillement, ses pas résonnant sur le toit, avant de venir s'asseoir à côté d'elle. Contrairement à elle, il s'installa dos au ciel étoilé, son regard perçant fixé sur elle. Shizu détourna les yeux, feignant de se concentrer à nouveau sur les étoiles. Elle sentait son regard peser sur elle, une présence intimidante qu'elle ne pouvait ignorer.

« _Dis-moi, Satori, commença-t-il d'un ton égal, tu es proche de Reiner et Bertolt, n'est-ce pas ? »

La question la surprit, mais elle se força à répondre avec honnêteté, bien que sa voix trahît une certaine nervosité.

« _Je... je ne sais pas si "proche" est le mot juste. Ce ne sont que des camarades. Je ne sais pas grand-chose d'eux, en réalité. Dit-elle avant de demander d'un ton prudent, Pourquoi me posez-vous cette question ? »

Livaï haussa légèrement les épaules, son ton restant neutre, presque indifférent.

« _Parce qu'ils semblent souvent coller à toi et ton amie. »

Shizu sentit un frisson d'angoisse lui parcourir l'échine. Elle s'efforça de ne rien laisser paraître.

« _Vous les suspectez de quelque chose ? osa-t-elle demander, bien que sa voix trahisse un léger tremblement.

_Non. répondit le caporal d'un ton glacial. »

Un silence pesant s'installa. Shizu baissa la tête, murmurant un :

« _Excusez-moi... »

Le caporal reprit, tranchant le malaise avec son pragmatisme habituel.

« _Si je les suspectais, je ne poserais pas la question de cette façon. Je m'y prendrais autrement. »

Elle le regarda à la dérobée, tentant d'évaluer ses intentions. Sa méfiance naturelle la maintenait sur ses gardes, mais elle sentait également que Livaï n'était pas un homme à poser des questions sans raison. Malgré elle, une vague de tristesse la submergea. Elle détourna à nouveau le regard, se concentrant sur les étoiles pour tenter de dissimuler son trouble. 

Une pensée dangereuse effleura son esprit. Elle pourrait tout lui dire. Là, maintenant. Elle pourrait lui révéler la vérité sur Reiner et Bertolt, sur leurs identités de titans et leurs plans. Elle pourrait lever ce poids immense de ses épaules. 

Mais elle savait que c'était impossible.

Ils la retrouveraient. Ils s'en prendraient à ceux qu'elle aimait, et tout serait fini. La peur la paralysait, un piège dans lequel elle s'était elle-même enfermée en acceptant de rester à leurs côtés. Annie avait affirmé qu'ils l'avaient abandonnée. Était-ce vrai ? Ou était-ce une autre forme de manipulation ? Elle ne savait plus quoi penser. La confusion brouillait ses pensées, et l'incertitude lui pesait comme une pierre.

Elle baissa la tête, fermant les yeux un instant pour tenter de chasser ces idées sombres. Mais elles restaient, comme des ombres dans son esprit. Livaï, silencieux, continuait de l'observer. Il ne disait rien, mais son regard semblait percer à travers elle, comme s'il voyait au-delà de ses mots.

« _Le monde est rempli de choses que l'on ne peut pas comprendre, dit-il soudain, sa voix aussi froide que la nuit. Ce que tu choisis d'en faire, ça, c'est ta responsabilité. »

Shizu sentit une boule se former dans sa gorge. Elle avait envie de pleurer, mais elle luttait de toutes ses forces pour se retenir. Elle esquissa un léger sourire au coin de ses lèvres, comme pour masquer son malaise, et demanda doucement, presque avec provocation :

« _Depuis quand vous vous souciez de vos soldats ? »

Livaï la regarda, imperturbable.

« _Je me soucie toujours d'eux, répondit-il, d'un ton calme mais ferme. »

Shizu haussa un sourcil, cherchant à alléger l'atmosphère.

« _Pourtant, on dit de vous que vous êtes un homme froid, dépourvu de sentiments, désagréable avec les autres, impoli... et la liste est encore longue. C'est vrai tout ça ? Vous avez l'air distant, votre visage est souvent fermé, et votre attitude envers les soldats... peut-être que c'est pour les durcir ? Ou juste pour qu'ils évitent de vous agacer ? »

Elle lança ces mots avec un sourire en coin, cherchant à détourner son propre esprit de ses tourments. À sa surprise, Livaï répondit avec un calme inattendu, presque introspectif.

« _Tu es la deuxième personne à me poser cette question, dit-il en se tournant face au étoile, adoptant une posture similaire à celle de Shizu, les pieds pendant dans le vide. Et tu n'as pas peur que je te réprimande ? »

Shizu lâcha un petit rire nerveux.

« _Si... un peu quand même, admit-elle, presque en chuchotant. »

Le caporal resta silencieux un moment, son regard perdu dans le ciel étoilé. Puis, contre toute attente, il lâcha une phrase qui surprit Shizu :

« _Avant... je n'étais pas comme ça. »

Elle se tourna vers lui, intriguée. Le ton qu'il avait utilisé était différent. Plus humain, presque vulnérable.

« _ Avant ? répéta-t-elle, incertaine.

_J'ai perdu quelqu'un... quelqu'un qui comptait beaucoup pour moi, dit-il simplement. »

Shizu sentit son cœur se serrer. Elle remarqua une lueur de tristesse dans ses yeux, bien qu'il tentât de maintenir son expression froide et impassible.

« _Je... je suis sûre que cette personne pense encore à vous, peu importe où elle est, tenta-t-elle doucement, espérant que ses mots soient réconfortants. »

Livaï détourna légèrement le regard, son visage à peine adouci.

« _Moi aussi, je pense à elle, murmura-t-il. »

Puis, il se releva avec sa grâce habituelle, lissant un pli inexistant sur sa veste. Il la regarda une dernière fois avant de se retourner et de quitter le toit. Lorsque la porte se referma derrière lui, Shizu resta figée, ses pensées tourbillonnant dans son esprit. Elle porta ses mains à sa bouche pour étouffer un sanglot qui montait en elle, mais c'était trop tard. Les larmes coulèrent sans retenue, et elle éclata en pleurs. Elle se détestait.

Pour qui se prenait-elle ? Comme si ses mots avaient réellement réconforté Livaï. Au contraire, elle avait probablement ravivé une douleur enfouie. Elle s'accusa silencieusement de sa maladresse, se sentant coupable et impuissante.

« _Pourquoi... pourquoi je ne peux pas simplement vivre normalement ? murmura-t-elle en levant les yeux vers le ciel. »

Ses larmes redoublèrent, et elle se recroquevilla légèrement sur elle-même, envahie par la douleur et l'amertume.

Soudain, elle sentit une paire de bras l'entourer doucement. L'odeur familière d'un parfum discret lui permit d'identifier la personne. Les pleurs de Shizu s'intensifièrent en réponse à ce geste inattendu.

« _Shizu... calme-toi, murmura une voix féminine, douce et rassurante. »

C'était Petra.

Shizu tenta de maîtriser sa respiration, mais les larmes continuèrent de couler un moment avant de finalement s'estomper. Une fois calmée, Petra relâcha son étreinte, mais resta près d'elle, un sourire apaisant sur les lèvres.

« _Je ne sais pas pourquoi tu pleures, et je ne vais pas te demander. Parfois, il vaut mieux garder certaines choses pour soi. Mais ça va mieux maintenant ? »

Shizu hocha la tête timidement.

« _Oui... merci, souffla-t-elle. Mais... qu'est-ce que tu fais ici, Petra ? »

Petra éclata d'un petit rire chaleureux.

« _Un certain caporal m'a demandé de m'assurer qu'une certaine "gamine triste" ne reste pas seule trop longtemps, dit-elle avec une lueur amusée dans les yeux. »

Shizu ne put s'empêcher de sourire faiblement en entendant cela.

« _C'est bien lui, ça... murmura-t-elle.

_Allez, viens, reprit Petra, en lui tendant la main. Il faut te reposer. Je te raccompagne. »

Shizu accepta l'aide, et ensemble, elles descendirent du toit. Arrivées devant la porte de la chambre de Shizu, Petra la serra doucement dans ses bras avant de se reculer avec un sourire bienveillant.

« _Essaie de venir dormir un peu, d'accord ? Et si tu as besoin de parler, je suis là. »

Shizu acquiesça, émue par la gentillesse de Petra. Alors que cette dernière s'éloignait, Shizu entra dans sa chambre, se sentant légèrement moins seule, même si son cœur restait alourdi par le poids de ses pensées.







A suivre...

[CHAPITRE RÉÉCRIS]






Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top