Chapitre VI : Chara
Je voulais hurler. Hurler, jusqu'à en perdre la voix. Pleurer jusqu'à en avoir les yeux secs, vider mes réserves infinies de larmes.
La terreur s'emparait de moi, dévorant chaque neurone de mon cerveau. Les murs se courbaient, vacillaient, dansaient autour de moi. M'encerclant graduellement, je me sentais plus oppressée que jamais. Prise de vertige, je tombai au sol. Je voulus me remettre debout mais mes jambes croulaient sous mon poids. L'atmosphère se faisait lourde, moite, chaque mouvement demandait des efforts surhumains.
Mes gémissements plaintifs restaient figés dans ma gorge, qui se tordait et se nouait autant que mon estomac. La douleur était insupportable.
La lumière s'éteignit brusquement. Le silence s'effritait à cause de mes halètements appeurés et du rire d'un enfant. Celui de cette fillette, de ce fantôme.
J'espère que nous nous amuserons beaucoup toutes les deux, Frisk.
Je sentis ses petites mains se promener sur ma peau nue, mon ventre, ma poitrine, mes épaules. J'aurais voulu me défendre, m'enfuir, lui arracher chacun de ses membres. Mais une force invisible me bloquait le coeur et l'esprit, je demeurais incapable de bouger.
Ses doigts glissaient le long de mon cou, et bientôt s'enfoncèrent dans ma chair, pareil aux crocs d'un vampire. Elle essayait de m'étrangler, et je ne pouvais rien y faire.
Tu as peur, hein? Avoue que tu as peur, sale folle.
Bien sûr que j'avais peur, comment ne pas l'être?
Dis-le. Je veux te voir pleurer.
Ses ongles ne cessaient de s'enfoncer dans ma nuque. Je sentis un liquide chaud commencer à se répandre dans mon dos, et je ne mis que quelques secondes à en comprendre la nature.
Du sang. Son odeur métallique et poisseuse caractéristique, comment pourrais-je l'oublier? Tout n'était plus que douleur, chaos, douleur, chaos, douleur, encore et encore. Un cauchemar aux contours flous, un fantôme invisible pressé contre mon corps nu et ses mains qui ne souhaitaient qu'une chose, me sentir mourir.
Dis-le!
Un cri terrifiant sifflait dans mes oreilles. Je tremblais de plus en plus, retenant avec difficulté mes larmes de souffrance. Je devais résister, coûte que coûte.
Pour mon père, pour espérer retourner un jour à la surface. Pour revoir Nathanaël et le paysage du mont Ebott dans son écrin de neige. Pour vivre encore quelques mois.
DIS-LE, PETITE PESTE!!
Ses ongles, toujours plus profonds.
Cette douleur surréaliste.
Cette incapacité à respirer, à me mouvoir.
La peur qui me ronge les os.
Cette volonté d'y mettre fin.
Et ma détermination.
Je m'éclaircis la gorge, encore prisonnière de ses doigts. Il fallait que les mots prennent leur envol, attaque cette fillette de leur bec affûté pour qu'elle me délivre. Plutôt que les couteaux, les épées et les fusils, je prendrais les mots comme armes.
La douleur physique finit toujours par disparaître, mais les plaies morales ne se referment jamais. Je serais plus puissante que cette enfant, si seulement je mettais en pratique cette "détermination" dont l'autre femme m'avait parlé plus tôt.
« Jamais je n'aurais peur d'un démon comme toi. Ce serait te faire bien trop d'honneur. »
Ma voix tremblait comme jamais, et tous ces sanglots refoulés me donnaient mal à la tête. Je n'avais jamais dit un aussi gros mensonge, mais prononcer à voix haute cet assemblage maladroit de lettres m'encourageait à y croire. De toutes façons, que pouvais-je faire d'autre?
« Je suis déterminée à t'effacer définitivement, pour protéger tous les humains qui viendront après moi. Je ne te laisserai pas m'avoir, qui que tu sois. »
Tu es bien trop faible pour t'opposer à moi. J'aurais pris le contrôle de ton corps bien plus tôt que tu ne le penses. Tu ne pourras pas dire que je ne t'aurai pas prévenue.
« Ne compte pas là-dessus. Je vais trouver un moyen de te réduire à néant, crois-moi. »
Et bien, nous verrons ça.
Je sentis la pression de ses ongles se relâcher, je reprenais difficilement mon souffle.
Si je ne te tue pas avant.
Sa voix glaciale se répercutait contre les contours distordus de cette illusion, rebondissant contre les ténèbres en un écho macabre.
Tuer... J'en avais des frissons.
Prépare-toi à de futures parties de cache-cache, rien que toutes les deux. Je rajouterai une règle : celle qui perd meurt. À bientôt, ma chère petite Frisk.
Ses rires d'enfant se mêlaient à ma respiration étouffée, ils me perforaient la gorge et les oreilles. Ce vacarme aigu rendait l'atmosphère des plus angoissantes, seuls les battements irréguliers de mon coeur me prouvait que j'étais encore en vie.
Jusqu'à ce que la lumière revienne, m'aveuglant comme si j'avais passé des semaines dans l'obscurité. Si forte, si éblouissante, comme ma volonté de vivre. Mais même en plein jour, les ombres ne cessent de nous suivre, elles sont toujours là, attendant le moment propice pour nous attaquer. Lorsqu'elles nous tiennent enfin, on se demande pourquoi on ne s'est pas retourné plus tôt, afin de les voir nous emboîter le pas, prédire l'irréparable. Mais bien souvent, il est trop tard. Une part de moi-même n'était-elle pas morte avec la disparition de ma mère, les mots durs de Nathanaël, les moqueries de mes camarades? N'avais pas, bien caché au fond de moi, un soupçon de désir de mourir? Mettre fin aux souffrances, une bonne fois pour toutes... Cependant ce serait aussi effacer toutes mes perspectives d'avenir, de futur, de bonheur. Et ça, je ne laisserais personne me les enlever, car j'étais déterminée !
Mes yeux s'habituèrent vite aux amas de photons dansant dans la pièce, jusqu'à ce que je remarque les lettres écarlates ternissant le miroir. Des lettres aux courbes enfantines, des lettres comme j'avais l'habitude de les tracer quand j'apprenais encore à écrire, des lettres à l'encre rouge, pareilles aux derniers mots de Nathanaël, des lettres de sang.
"Salutations. Je suis Chara, le premier humain tombé."
Mon coeur se tordit, comme serré dans un étau. Cette histoire commençait à devenir aussi effrayante qu'un bon film d'horreur. Et Dieu sait à quel point je déteste ça.
Essayant de supprimer de mon esprit ce liquide rouge dégoulinant de la surface réfléchissante, je fonçai sous la douche. L'eau jaillit, et j'espérais que toutes mes peurs et ces images disparaîtraient également dans les égouts. J'augmentai la température petit à petit, jusqu'à ressentir des brûlures sur l'ensemble de mon corps et ma peau rougir. Même la douleur n'était rien face à mes idées noires. Je me recroquevillai au sol, les yeux dans le vide. Mon sang dilué filait dans le trou d'évacuation. Le sang que ce fantôme avait laissé, ruisselant de mes plaies naissantes. Pourquoi tant de ce liquide immonde devait-il être versé?
La tache à ma poitrine s'était étendue, et de façon plutôt inquiétante. Elle demeurait de très petite taille, mais avait au moins doublé de volume. Signe que je commençais déjà à sombrer dans les ténèbres. J'étais là depuis un jour à peine, et je regrettai d'avoir fui le monde humain de la sorte. Bien sûr, il y avait Croâpaud, Toriel... Mais je n'avais pas ma place ici. J'étais humaine, par conséquent une criminelle, coupable de tant de morts... Peut-être que cette Chara essayait, d'une manière particulièrement douloureuse et violente, de me le faire savoir. Peut-être, qu'effectivement, au nom des monstres, je méritais de mourir. Peut-être qu'il faudrait que j'abandonne.
Mais non. Ce n'était pas mon genre de baisser les bras si facilement. Je voulais vivre, coûte que coûte.
Je m'emparai du gant que Toriel m'avait laissé et frottai la tâche de toute mes forces. Je pensais naïvement qu'il restait de minces chances pour qu'elle disparaisse. Je frottais, frottais, frottais encore. Jusqu'à sentir ma poitrine brûler bien plus encore que l'ensemble de mon corps, jusqu'à voir le sang couler. Je continuai, presque incontrôlable. Je ne pouvais plus m'arrêter, me raisonner. Certains fument des cigarettes, d'autres boivent, quelques uns se droguent. Moi, je me contente de me faire souffrir, pour me prouver que suis encore vivante. Une sorte de mutilation rassurante, mais qui n'en reste pas pour autant dangereuse.
« Frisk, tout va bien? »
Non, bien sûr que non. Une petite fille essayait de me posséder, l'ensemble des monstres voulait me tuer, j'avais perdu mon père, Nathanaël. Comment pourrais-je aller bien?
« Frisk? Ça fait une demi-heure que tu es là dedans, il y a un problème? »
Évidemment, il y a un problème. Je n'arrive plus à penser de manière logique et cohérente, mon esprit n'est plus que chaos. Tout se mélange, s'entremêle, l'odeur du sang paraît imprimée dans ma peau, sur mes yeux. Rouge, toujours rouge, comme ceux de cette enfant.
De cette Chara.
« Frisk, tu m'entends?
- Oui-oui, ça va, ça va. C'est juste que j'essaie de désinfecter mes plaies, c'est un peu long.», ris-je nerveusement.
Je posai le gant au sol en soupirant. Imbibé de sang, sa couleur était passé du jaune au rouge. Pas très appétissant.
« Tu pleures?
- Non... Je ne pleure pas... »
Les larmes roulaient pourtant par dizaines sur mes joues, et il était difficile de ne pas entendre mes sanglots. J'étais pitoyable.
« Écoute Frisk, je sais que nous ne nous connaissons pas beaucoup, mais si tu as le moindre problème, tu ne dois surtout pas hésiter à m'en parler, d'accord? Je me ferai un plaisir de t'aider.
- Merci Toriel, mais ça ne sera pas nécessaire. C'est juste mon amoureux qui me manque. », mentis-je. « Tu ne peux pas m'aider. »
Nathanaël me manquait, évidemment, mais il n'était pas la source de tous mes maux. Pour être toute à fait honnête, je l'avais même mis au second plan pour le moment. Cette Chara méritait un peu plus d'attention.
« Si tu ne veux pas en parler, je ne te forcerai pas. Mais s'il te plaît, ne me mens pas.
- Parfois il vaut mieux se baigner dans les mensonges, si on veut éviter d'être blesser. Je ne veux impliquer personne dans mes problèmes. Encore moins les personnes qui ne désirent que mon bonheur. Pardonne-moi, je réglerai tout par moi-même. Je suis désolée, Toriel...
- Ce n'est pas grave, mon enfant. Je comprends... Si tu changes d'avis, je serais toujours là. »
Mais cette dernière phrase était aussi un mensonge. Parce que malgré les promesses, ceux qu'on aime finissent toujours par disparaître. Peu importe à quel point on hurle, à quel point on pleure, certains finissent engloutis par le néant. Comme Maman.
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Enfin lavée, j'avais remis des bandages propres sur chacune de mes cicatrices, insistant sur la poitrine. Personne ne devait voir cette tache, jamais. Si un monstre découvrait la vérité, je ne donnais pas cher de ma peau. Comme me l'avait fait remarquer Croâpaud plus tôt, plus mon âme se ternirait, plus je deviendrais dangereuse. Il fallait que je remonte d'ici-là, pour que le peuple de l'Underground ne connaisse plus aucun massacre. C'était mon devoir.
J'enfilai rapidement les vêtements que Toriel m'avait donnés. Un pull écru à grosses mailles, dans lequel je flottais légèrement. Une jupe trapèze en daim, comme beaucoup de filles en portaient à la surface. Je n'aimais pas vraiment les jupes, ni tout ce qui pouvait se rapporter à des habits féminins. Lorsque j'étais encore parmi les humains, j'affirmais clairement ce trait de mon caractère sur mon style vestimentaire. Je passais mon temps en jean, t-shirt ou pull trop large. Je me fichais de ce que les autres pouvaient penser, je voulais juste être à l'aise. Et de toutes façons, mis à part Nathanaël, je n'avais pas d'amis. À quoi bon faire des efforts, essayer de plaire aux autres?
Je ne fis pas la difficile cependant, et sortis habillée ainsi. Toriel avait déjà eu la gentillesse de me donner de quoi me changer (et des sous-vêtements, en plus de ça. Sur le coup, j'avais presque envie de la bénir.), je n'avais pas le droit de me plaindre. Je lui étais éternellement redevable.
« Toriel?
- Oui, mon enfant? »
Je m'engouffrai dans le salon, un peu intimidée. Elle m'avait entendu pleurer, et je n'avais pas été très gentille. La femme-chèvre voulait simplement m'aider, et j'avais dû la faire souffrir... Quelle idiote je faisais.
« Merci beaucoup pour les vêtements. Et ne t'inquiète pas pour moi. J'ai toujours réglé mes problèmes toute seule. », souris-je.
« Je suis ravie qu'ils soient à ta taille. Cette petite jupe te va vraiment bien.
- Si tu le dis.
- Si, vraiment, je t'assure!
- Je n'ai pas vraiment l'habitude d'en porter.
- Je vais essayer de te retrouver des pantalons dans les affaires de mon fils, pour les jours à venir.
- Ne t'embête pas pour moi, vraiment. »
J'avais un peu de mal à la regarder dans les yeux, à cause de ce fichu sentiment de culpabilité. Elle était si gentille ! Ses enfants avaient dû avoir beaucoup de chance. Être élevés par une mère pareille, ce devait être le pied.
Mon ventre émit un gargouillement des plus indiscrets, signalant à mon hôte que j'avais faim. Ce son singulier ne fit qu'accroître mon malaise. Comme j'étais impolie, mon dieu...
« Tu dois être affamée, ma pauvre petite... Malheureusement, le repas n'est pas encore tout à fait prêt. II va falloir que tu patientes encore un peu.
- Ce n'est pas grave, Toriel.
- En attendant, tu peux aller te balader un peu dans les ruines. Croâpaud est passé me voir tout à l'heure pour savoir s'il pouvait jouer avec toi. Je suis sûre qu'il serait très content de te voir.
- Croâpaud est passé ? », m'exclamai-je, toute excitée.
Décidément, cette grenouille était adorable. Toriel s'avança vers moi, puis me tapota tendrement la tête. Son sourire se fit encore plus large qu'à l'accoutumée. Elle était rayonnante... Comme les éclats du soleil. Comme ma mère disparue.
« Je suis ravie que tu te sois fait des amis si vite.
- Ça me change de la vie sur Terre.
- Pourquoi donc?
- Les seules personnes qui s'intéressaient à moi étaient mon père et mon amoureux. Je n'ai jamais vraiment eu d'amis, depuis la mort de ma mère. Les autres enfants avaient un peu peur de moi, sans raison. J'étais peut-être trop gentille, ou un peu trop différente pour eux.
- Je peux t'assurer qu'ici, si tu es gentille, les monstres t'ouvriront tous leur coeur.
- Merci du conseil. Je vais rejoindre ce petit bout de chou alors.
- Essaie de pas te blesser, mon enfant.
Je la pris dans mes bras quelques instants, histoire de ressentir un peu de sa chaleur. Elle me caressa les cheveux tendrement, jusqu'à ce que je décide de mettre fin à cette étreinte. Mon coeur se réchauffait : les flammes de l'amour, de l'amitié éclairaient les ténèbres engloutissantes laissées par Chara. Avec le soutien des monstres, j'arriverais probablement à la faire taire. Seul le temps nous le dira.
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Ce fut après une dizaine de minutes de recherches que je retrouvai le petit Croâpaud, jouant avec d'autres monstres. Quand il me vit, ses immenses yeux verts se mirent à pétiller de malice.
« Friskkkkkk ! Tu es revenue ! », s'écria-t-il, courant à ma rencontre.
« Tu sais bien que je ne peux pas me passer de toi, mon petit monstre. »
Nous échangeâmes un sourire empli de malice, avant d'exploser de rire. Je le pris aussitôt dans mes bras, et il enroula ses bras autour de mon cou.
« Tu m'as manqué, Frisk !
- À moi aussi, mon chéri. », répliquai-je avant de lui caresser la tête.
« Tu ne m'avais jamais appelé comme ça...
- Il faut dire que nous ne connaissons que depuis ce matin...
- C'est rigolo. "Mon petit monstre", "mon chéri", "je t'aime"... On dirait ma maman. Ou une amoureuse. »
Ses joues s'empourprèrent, mais pas autant que les miennes. Cet enfant était trop mignon, bien plus que ce que mon pauvre coeur pouvait supporter. Avec des yeux et un rire pareil, il aurait pu me faire faire n'importe quoi. Si nous faisions partie de la même espèce et qu'il avait dix ans de plus, il aurait aisément remplacé Nathanaël.
« Tu es trop jeune pour avoir une amoureuse, Croâpaud. Tu ne sais pas encore ce que c'est, l'amour.
- Si, je sais ce que c'est! J'ai déjà eu plein d'amoureuses!
- Ah oui? Ça ne m'étonne pas. Qui ne pourrait pas tomber sous ton charme?
- Arrête de te moquer de moi, Frisk... T'es pas gentille.
- Je ne me moque pas de toi, mon petit monstre. Je le pense sincèrement. »
Je le reposai au sol en lui adressant un nouveau sourire. Il rougit encore plus et détourna la regard. Des étoiles s'étaient logées dans ses yeux, me rappelant les nuits passées dehors avec Nathanaël. Des souvenirs heureux qui me mettaient le baume au coeur.
« Les jupes te vont bien. Tu as des grandes jambes.
- Je n'aime pas vraiment les jupes. Je ne suis pas très à l'aise, et puis on voit tous ces bandages...
- Ne t'inquiète pas, tu es jolie quand même.
- Merci, mon petit monstre. Tu sais, ce n'est pas parce que je suis une fille que je veux forcément être jolie.
- Ah bon ? Pourquoi ?
- D'où je viens, beaucoup de filles essaient d'être jolies pour avoir des amoureux, pour attirer l'attention. Moi, je trouve ça un peu stupide. Je m'en fiche d'avoir un amoureux, tant que je me sens bien dans mon corps. C'est pour ça que je ne m'apprécie pas vraiment que l'on voit mes jambes.
- Tu es rigolote, Frisk. »
Son rire cristallin résonnait contre les parois des ruines, merveilleux écho à la fois purificateur et délicieux. S'il continuait d'être aussi mignon, j'allais finir par vouloir le kidnapper. Ou le frognapper, plutôt. Oups, mon humour légendaire a encore frappé...
« Tu me présentes à tes amis, Croâpaud?
- Oui, bien sûr! Alors, ici, il y a...«, s'empressa-t-il de commencer, désignant de la main une sorte de... Carotte?
« Croâpaud, attends. », le coupa un étrange fantôme-mouche.
« Qu'est-ce qu'il y a, Emoplasme?
- Croâpaud, tu es stupide ou quoi? Cette humaine te manipule pour mieux te tuer! Les humains sont toujours très malins pour voler nos âmes, et toi tu es bien trop naïf! Il faut la tuer, idiot!
- Non! Frisk est gentille! Elle n'a pas du tout essayer de me tuer! Son âme est pure!
- Et comment tu sais ça? Elle te l'a montré? T'es amoureux ou quoi? »
Le sourire de ma petite grenouille s'estompa aussitôt. Les étoiles dans ses pupilles se changèrent en larmes qui s'accumulèrent à la frontière de ses paupières. Ses lèvres tremblaient, l'enfant gai et rieur que je connaissais laissa place à un être fragile et tourmenté.
« Emoplasme, ne lui fais pas de mal...
- Croâpaud, ce sont les règles. Il faut tuer tous les humains qui arrivent ici. Avec son âme, on pourra retourner à la surface. Tu ne veux pas voir le vrai soleil, quitter ces ruines déprimantes?
- Si... Mais je ne veux pas que Frisk meure.
- Reste en retrait, si tu ne veux pas voir ça. Légumoïde, viens, on va se charger d'elle.
- Je t'accompagne. Désolée Croâpaud, on a pas le choix. »
Ils laissèrent la grenouille derrière eux et me menacèrent du regard. Ils voulaient me tuer, aucun doute là-dessus. Le dénommé Emoplasme me lança aussitôt de petites boules d'énergie blanches, que je parvins avec difficulté à éviter. Je roulai au sol, légèrement essoufflée. Le combat avait commencé.
Je portai la main à mon coeur, laissant la lueur rouge de mon âme emplir les environs. Les quatre icônes jaunes apparurent aussitôt. Je cliquai sur le bouton "Clémence", mais rien ne se passa.
« Il en faudra un peu plus pour nous battre, idiote. », pouffa Légumoïde.
Celui-ci s'empressa de me lancer des légumes à la figure. Sérieusement, des légumes? Je parvins également à les éviter, roulant sur le sol avec habilité et rapidité. Merci les cours de gym du collège. J'actionnai l'icône "action". J'avais le choix entre "Parler", "Prendre une pause mignonne" ou "Faire une blague". J'enclenchai le dernier.
« Légumoïde, tu devrais manger un peu plus carottes, ça te rendrait aimable...
- Tu te moques de moi? Tu es répugnante, humaine. », répliqua-t-il aussitôt, visiblement très en colère.
J'avais oublié que l'humour n'était pas vraiment mon fort. Voir pas du tout. Je me maudis intérieurement avant d'éviter une nouvelle salve d'attaques. Deux boules d'énergie me blessèrent au bas-ventre, faute à cette satanée jupe. La douleur demeurait cependant supportable, comparé au feu qui me rongeait la poitrine.
« Les gars, arrêtez... Frisk est pacifique. Elle ne veut pas nous faire de mal... », il réprima un sanglot. « Elle veut nous aider.
- Si elle veut nous aider, elle n'a qu'à donner son âme!
- Je t'interdis de la tuer, Emoplasme!
- Je sais que ça ne te fait pas plaisir, Croâpaud, mais les règles sont les règles. Si tu n'es pas d'accord, tu n'as plus rien à faire avec nous.
- Emoplasme, non... »
Mon petit monstre ne put plus retenir ses larmes. Le voir ainsi, blessé à cause de moi, me brisa le coeur. Tout était encore de ma faute...
J'enclenchai cette fois-ci l'option "Parler".
« Que vous vouliez me tuer, je peux comprendre. Mais pourquoi vous faites pleurer votre ami comme ça? Oui, il essaie de m'aider, et alors? Est-ce une faute de vouloir protéger une vie?
- Tu es humaine, il faut t'éliminer.
- Tu ne t'es jamais demandé si certains humains pouvaient être gentils? Si certains n'ont pas envie de devenir amis avec vous, les monstres? Oui, les hommes qui vous ont enfermé ici sont des êtres abominables. Mais tous les humains ne sont pas comme ça. Je suis ici pour vous le prouver.
- N'essaie pas de nous amadouer. », cracha Emoplasme.
« Tu n'es pas très malin, toi. Je n'aurais aucun intérêt à le faire. Si j'avais voulu vous tuer, j'aurais volé vos âmes depuis bien longtemps, et vous ne seriez plus ici à discuter. Sauf que je suis contre la violence, et il est hors de question que je tue qui que ce soit dans l'Underground. Ça peut paraître difficile à croire mais j'ai vraiment envie de vous aider. Si ça vous fait plaisir, frappez-moi, relâchez votre haine. Faites-moi payer pour tous les morts que ma race a causé, je m'en fiche. Mais par pitié, ne faites pas souffrir votre ami, pas à cause de moi... »
Les deux enfants se toisèrent un instant du regard. Mes mots les avaient-il touchés? J'aurais aimé y croire, mais cela aurait été beaucoup trop simple. À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire, non?
« T'es vraiment stupide, humaine.
- Ouais. Tu sais qu'on va te tuer mais t'essaie même pas de te défendre. Et en plus de ça, t'essaie de protéger notre ami. Qu'est-ce que t'as dans la tête?
- Croâpaud vous l'a dit : je suis pacifique. Quitte à blesser quelqu'un, autant que ce soit moi. Ainsi personne ne sera blessé.
- T'es folle.
- Flowey te l'a pas dit? Avec les humains, c'est tuer ou être tué!
- Si vous croyez cette fleur, c'est que vous ne valez pas mieux que les humains. Allez-y attaquez-moi, puisque vous y tenez tant!
- Avec plaisir. »
Ils lancèrent simultanément leur attaque, et je n'essayai pas de les éviter. Je restais là, au sol, encaissant les attaques. Chaque coup porté dessinait de nouvelles plaies sur mon corps. J'étais la toile et eux les peintres. Ils agitaient leurs pinceaux avec agilité, me recouvrant peu à peu de lignes écarlates. La douleur me coupait la respiration, mais je serrai les dents. La lueur de mon âme s'estompait chaque seconde un peu plus. Il fallait que je résiste, que je garde ma détermination.
Je voyais ma barre de points de vie se vider de manière alarmante. Je n'étais déjà plus qu'à la moitié.
« Tu tiens à ce point à mourir? »
Les mots ne voulaient plus sortir. Ils attendaient que le supplice prenne fin, prisonniers de ma cage thoracique comme des oiseaux en cage.
5 points de vie.
« Et c'est l'attaque finale... », hurlèrent-ils en coeur.
Je les vis fermer les yeux, se concentrant pour former une immense boule de lumière. Celle-ci grandissait, grandissait, puis s'éleva dans l'air.
Le temps se dilatait, tout fonctionnait au ralenti. Je sentais battre mon coeur dans ma poitrine, lentement, si lentement... La boule se rapprocha de moi, menaçante, et je serais incapable de l'éviter. Mes points de vue tomberait à zéro. Et ce serait la fin.
La mort.
Alors que j'essayais vainement de ramper en arrière, totalement dépouillée de mes forces, je vis le regard de Croâpaud s'assombrir. Il m'adressa un dernier sourire, avant de bondir entre la boule et moi.
Recevant à ma place le coup qui aurait dû m'être fatal, il s'effondra lourdement au sol.
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Bonjour à tous !
Je suis heureuse d'enfin vous sortir ce chapitre, après ces deux semaines d'absence :) ! J'espère qu'il vous plaira autant que je me suis amusée à l'écrire, et que l'ambiance un peu sombre de cette fiction vous convient (parce que, malheureusement, la situation de Frisk ne va faire qu'empirer...). N'hésitez pas à émettre des théories sur la suite, ou partagez vos avis dans l'espace commentaires :)
L'étau se resserre sur Frisk, et Chara se fait plus menaçante. L'adorable Croâpaud résistera-t-il à l'attaque de ses amis? Frisk sortira-t-elle victorieuse de ce combat? Retrouvera-t-elle sa mère dans l'Underground? Quand est-ce que Frisk va ENFIN rencontrer Sans et Papyrus ?
Personne ne le sait ... Sauf moi :D
Sur ce,
Restez
D-É-T-E-R-M-I-N-É-S
~
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