Chapitre 6 - Souffre-Douleurs
J'ouvre les yeux, les muscles contractés pour m'empêcher de gueuler encore plus fort, une douleur de chien me paralysant, la lumière m'aveuglant, et Undyne adossée contre le mur de la salle.
"Alphys va bientôt arriver avec des trucs qui aideront avec la plaie et la douleur."
"Pourquoi est-ce que tu-" Je râle mais me contrôle, autant que je le peux avec une plaie qui aurait dû m'achever. Manquerait plus qu'elle le fasse là. "Pourquoi m'avoir sauvée?!"
"J'ai remarqué le petit guignol dans ta poche qui n'arrêtait pas de gueuler. Et tes HP n'étaient pas à plat, parce que je n'ai pas atteint tes organes vitaux."
"Qu- Quoi?"
"Ouais. J'ai juste pété une côte et frôlé tes poumons, ton foie et tes intestins."
"Comment j'ai fait pour avoir autant de chance-?!" Je m'interromps avec un autre cri de douleur.
"J'ai vu Frisk et j'ai décidé au dernier moment de pas t'achever mais de juste te mettre HS."
"T'AURAIS PAS PU LE FAIRE UN PEU MOINS BRUTALEM-" En criant cette phrase, j'ai poussé du sang hors de ma plaie, ce qui me fait hurler de plus belle.
"Ouais, désolé, j'ai pas de pitié envers les humains."
Je respire à une vitesse extrême, et Undyne m'observe avec attention, et... Pitié.
"Ouais. Il faudrait qu'Alphys se dépêche. T'as pas l'air trop en forme."
"SANS BLAGUE SHERLOCK-" Je tousse de douleur. Je ne sais pas comment je peux exprimer combien j'ai envie de lui arracher la peau du visage et la lui faire bouffer.
J'entends la porte s'ouvrir, et je vois plus ou moins un monstre jaune qui doit faire moins d'un mètre quarante se précipiter vers moi les mains pleines. Lorsqu'elle se rapproche, je remarque qu'elle a une apparence reptilienne et qu'elle a des jambes qui se plient comme celles de beaucoup d'animaux quadrupèdes.
"J-je vais t'injecter un anesthésiant local! Ç-ça risque d-de faire un peu mal! N-ne bouge surtout p-pas!"
La femme jaune sort ce que je devine est une seringue, y injecte un produit et sans réfléchir deux fois soulève mon tee-shirt puis mon bandage pour m'enfoncer l'aiguille juste à côté de la plaie. Je hurle et me casses la voix sur le coup, je tire les draps du lit sur lequel je suis allongée, je fais de mon mieux pour résister à l'envie prenante de pousser la main de la femme et de tirer l'aiguille hors de moi. L'aiguille sort et progressivement je sens de moins en moins la douleur affolante de la plaie.
Je prends le temps de respirer. "Qu'est-ce qui m'arrivera?" Ma voix est écorchée par mes cris d'avant.
"J-je vais utiliser m-ma magie verte pour te soigner! T-tu devrais te sentir mieux dans quelques heures. Aucun d-de tes organes n-n'ont étés t-touchés, m-miraculeusement. Ça risque de t'endormir donc je te laisses un peu de temps avant de commencer."
"Apparemment, Undyne n'a pas voulu me tuer, mais ne l'a décidé qu'au dernier moment. Ce qui n'est pas malin, parce que j'ai cru mourir sur le coup."
"Si ça excuse quoi que ce soit, je n'aime pas les humains."
"Ça n'excuse pas grand chose à vrai dire." dis-je entre deux rires sarcastiques.
"Au moins, on est quittes, toi non plus t'as pas d'excuses."
"D'excuses pour quoi?"
"Tch. Tu sais ce que t'as fait."
Merde. Elle a vu, ou entendu, ma conversation avec Frisk.
J'essuie mes yeux et arrives enfin à mieux voir mon environnement et les deux personnes qui sont à côté de moi.
Alphys - si je m'en souviens bien - est recroquevillée tellement que sa colonne vertébrale a sans doute imprégnée un forme de C, ce qui la fait ressembler à un espèce de tyrannosaure. Son corps est enveloppé de formes rondes, elles-mêmes ornées d'écailles grandes et épaisses jaunes. Sa tête allongée est montée d'une paire de toutes petites lunettes rondes dont un des verres est brisé, et surmontée de trois crêtes qui partent vers l'arrière et disparaissent sous une blouse de scientifique blanche qui a l'air humide. Une queue de longueur moyenne dépasse de l'autre bout. Elle a l'air plus anxieuse qu'un collégien qui a raté son brevet.
Undyne, elle, n'a l'air qu'à moitié inquiète, adossée contre le mur, les bras croisés. Sa peau est recouverte de petites écailles fines bleu vif. Sa tête est surmontée d'une chevelure fine et rousse, et son visage a l'air d'avoir fondu de manière à ce que son œil gauche soit couvert. Elle est plus fine qu'une baguette, ce qui m'étonne vu la taille de l'armure qu'elle portait avant de me trouer. Elle a pourtant clairement une structure musculaire développée, ce qui ne m'étonne pas vraiment vu le genre de personne qu'elle a l'air d'être. Son corps porte lâchement un débardeur décolleté noir simple. Elle porte un jean serré plus clair que sa peau et des bottes hautes rouges fermées grâce à des boucles et lanières écarlates. Les semelles sont de la même couleur que les lanières en cuir.
"Me regarde pas comme ça, je voulais pas te faire souffrir. Je croyais que ça te ferait moins mal."
"Je peux pas dire que j'accepte tes excuses sans te mentir mais j'ai pas vraiment le choix, alors je te dis, c'est pas grave que tu aies manqué d'avoir commis un meurtre, et de m'avoir en tant que victime."
Elle baisse le regard par honte.
"Écoute, ça va s'arranger, et si ça se trouve on finira par s'entendre malgré ça." dis-je pour minimiser sa honte. Je suis une conasse, mais je ne préfère pas le faire subir à ceux qui souffrent déjà. Undyne en fait partie, j'ai juste eu la malchance de subir sa réaction à une souffrance qu'elle a enduré sans pouvoir donner son avis.
J'ai l'impression qu'il me manque un truc. Je regarde un peu plus bas, et ma poche est vide. "Où est Flowey?"
Alphys regarde rapidement un peu autour d'elle, avant qu'Undyne se baisse pour tapper avec sa main fermée sur son carrelage. "Hé guignol, la punk te cherche."
"Tu donnes toujours des noms communs comme surnom à tout le monde?"
"Pas à Alphys."
La concernée lâche un petit rire et rougit légèrement, et juste après, Flowey sort d'entre des plis de draps, je sais pas trop comment. "Mélodie! T'es vivante!"
"T'as de la chance de ne pas avoir été là un peu avant, tes tympans n'auraient pas été épargnés. La punk a une voix bien forte mine de rien."
"Elle a un prénom; c'est Mélodie." rectifie-t-il.
"Que je le connaisse ou pas, son prénom, ça sera punk pour moi."
"T'appelais Frisk punk, il était une fois."
"Le frère de Paps m'a raconté quelques trucs brièvement, dont ça. Et je m'en branle parce que ici, Frisk n'est qu'un meurtrier." Elle tourne son regard vers moi, et en le voyant, je me sens toute rikiki. "En parlant de lui, tout à l'heure j'ai vu qu'il t'a fait une offre."
Je me sens un peu plus lourde.
"Et on aurait dit que t'étais à deux doigts d'accepter."
Alphys me jette un regard horrifié.
"C'était comme si j'étais hypnotisée. C'était pas moi, c'était..." Je perds mes mots. "Était-ce du désespoir..? Il m'a dit que si je voulais rentrer, je devais..."
Flowey parle en ma défense, mais mes pensées dérivent à la scène d'avant ma perte de connaissance. J'ai pas envie de me remettre ça dans la tête.
Que je vieillisse ici serait mieux que de devenir meurtrière. Mais j'ai envie de rentrer chez moi...
"Il ne t'a pas proposé de le tuer, si?"
Quoi?
Ce mot m'échappe à la vitesse de ma pensée.
"Bah, il nous manque une âme humaine pour briser la barrière. Même si la plupart d'entre nous sommes morts, ça veut pas dire qu'on n'a plus le stock d'âmes qu'Asgore à récupéré durant tout le temps qu'on a été coincés dans l'Underground."
"Donc... J'ai pas à tuer un monstre... pour sortir?"
"Non. Pour qu'on soit libres, il faut juste que un autre humain meure. Mais c'est Frisk, ou toi."
Ça me rassure. Apparemment, on veut aussi de mon âme. Ma mort ne serait pas que pour une histoire de vengeance, mais pour se libérer aussi.
"Pourquoi?"
Flowey se tourne vers moi. "Tu connais pas la légende?!" Ça m'étonne qu'il ne soit pas au courant de mon ignorance, vu qu'il était avec moi durant tout mon périple.
"Il f-faut sept âmes humaines pour briser la barrière q-qui nous retient ici." dit Alphys timidement.
Undyne se pousse du mur pour prendre la parole. "Il y a longtemps, les monstres ont perdu la guerre contre les humains. Comme prix, nous avons été emprisonnés ici et la barrière a été établie par sept mages humains. Si tu connais quoi que ce soit à la magie, tu sais que pour contrer une force magique, il en faut une de la même puissance. Une âme de monstre n'a aucune valeur, vu que toute la magie est utilisée pour que le monstre puisse exister. Alors, toute la magie des humains est contenue dans leurs âmes."
J'encaisse l'histoire. Frisk savait ce qu'il me proposait. Il voulait rester en vie.
"Les humains vous ont martyrisés... Depuis la nuit des temps..."
Les trois monstres présents dans la salle hochent la tête.
Les humains ont toujours attaqué ce qui leur était inconnu, et ont utilisé les minorités comme souffre-douleurs. On se disait que seulement les plus extrêmes le faisaient, mais les monstres prouvent qu'on est tous pareil. À vrai dire, qui sont les vrais monstres?
Le côté de mon ventre commence à me picoter un peu, et par réflexe ma main part gratter. Je me rends compte que l'anesthésiant perd de son effet.
"Je recommence à sentir ma plaie."
"A-Ah merde!" Alphys zieute ma plaie et son visage se déforme par dégoût.
"J-je vais c-commencer à te soigner. T-tu vas t'endormir pendant q-que je le fais."
De toute façon, il n'y a pas d'autre option. Je lui fais signe de commencer. Elle positionne ses deux paumes vers ma plaie, à quelques centimètres, et une lumière verte s'échappe d'elle pour aller s'enfouir dans ma blessure. Je sens mes paupières s'alourdir, et je m'endors pendant qu'Alphys me soigne.
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