Ivana venait de prendre sa dixième photo du lac sous le magnifique soleil couchant lorsqu'elle entendit derrière elle un craquement de branches. Aussitôt elle se retourna en ravalant un hoquet et fit face au mafieux qui émergeait à travers le chemin boisé. Il ne portait plus sa veste de costume et avait retroussé les manches de sa chemise, dévoilant ses avant-bras aux veines apparentes. Ivana cligna des yeux plusieurs fois pour se reconnecter au présent et réalisa seulement maintenant qu'elle s'était laissée distraire par la prise de ses nombreux clichés.
— Une minute de plus et je te perdais jeune fille, lui dit-il en lui lançant un regard mécontent.
— Je ne suis pas partie si loin que ça, se justifia-t-elle en abaissant l'appareil photo.
Sa défense lui fit lever un sourcil.
— Vraiment ? Parce que je tiens à te préciser que nous sommes de l'autre côté du lac.
Ivana ouvrit la bouche pour contester mais la referma aussi vite car en se retournant vers le lac elle prit conscience qu'il disait vrai.
— Je suis néanmoins ravi de constater que tu as renoué avec la photographie, ajouta-t-il en comblant les derniers mètres qui les séparaient. Viens, il faut faire demi-tour avant que la nuit tombe.
Subtilement, il glissa sa main au creux sensible de ses reins et la guida vers le chemin.
— Je suis désolée, je n'ai vraiment pas réalisé que j'étais partie aussi loin.
Sergueï avait pris la décision de la laisser seule afin qu'elle puisse se reconnecter avec cette passion qui lui avait tant manqué. Ivana lui était reconnaissante car sans lui jamais elle n'aurait pu franchir ce pas qui lui rappelait encore trop de mauvais souvenirs.
— Ce n'est pas très grave, l'essentiel c'est que je t'ai retrouvé.
Ivana nota une forme sévère s'emparer dans ses traits ciselés. Devait-elle le prendre comme une inquiétude de sa part ?
— Jamais je ne pourrais assez te remercier pour ce moment. J'avais oublié à quel point la nature pouvait être bénéfique et si apaisante.
— Ne me remercie pas ma douce, profite de ta chance de bénéficier de l'aide d'un dangereux mafieux sanguinaire qui d'ordinaire aurait passé son chemin.
— Donc c'est par pitié ? S'enquit-elle en s'arrêtant au milieu de la forêt la gorge nouée.
Le mafieux se rembrunit.
— Non, ce n'est pas de la pitié, ce que j'essaye de te dire avec peu de tact je l'admet c'est que je me suis promis il y a bien longtemps de ne jamais mêler une femme dans ma vie sur une période de longue durée parce que je suis trop dangereux or avec toi, j'ai eu beau essayer je ne suis pas parvenu à passer mon chemin.
Il s'avança vers elle puis saisit ses bras avec une force qu'elle ne lui connaissait pas.
— Ce que je veux te dire c'est que j'ignore où tout cela nous mènera mais une chose est sûre, nous allions ensemble.
Son expression était coupé entre la dureté et la douceur. Ivana le dévisagea longuement incapable de prononcer un mot.
— Je n'éprouve aucune pitié lorsque je te regarde, insista-t-il en levant sa main vers sa joue pour l'effleurer avec son pouce. Quand je te regarde je vois une jeune femme qui des mois en arrière a cessé de respirer dont le cœur s'est arrêté mais qui a résisté pour survivre. Je vois une jeune femme qui de bat chaque jour avec le peu d'armes qu'elle dispose mais qui lutte et je ne veux que cette même jeune femme passe à côté de toutes les choses que le monde peut lui offrir.
Son regard s'adoucit et un sourire en coin apparut sur sa bouche dure.
— À commencé par moi, ajouta-t-il en feignant un zeste d'arrogance.
Ivana émit un petit rire en baissant la tête.
— Il faut néanmoins que tu prennes acte des gravités qu'il y a dans mon monde, reprit-il en glissant un doigt sous son menton pour qu'elle le regarde. Je suis dangereux Ivana, tâche de ne jamais l'oublier.
Nul besoin de lui rappeler, songea-t-elle alors qu'une goutte d'eau tomba sur son front.
Ils levèrent la tête vers le ciel dissimulé par les arbres et elle sentit à nouveau une autre goutte d'eau tomber sur sa joue. Très vite la pluie déferla au cœur de la forêt mais ni l'un ni l'autre semblait vouloir bouger. Bientôt ils seraient trempés de la tête aux pieds et pourtant seuls leurs regards restèrent connectés comme si le reste n'avait aucune importance.
Elle vit ses mâchoires s'entrechoquer et son regard désormais brûlant se déposa sur ses lèvres. Le cœur battant à la chamade Ivana baissa les yeux timidement.
— Viens, tu vas attraper froid.
Ivana se pinça les lèvres en acquiesçant et le suivit dans la forêt pour rejoindre au plus vite la voiture car il avait raison...le temps qui venait de brusquement changer était en train de tourner à l'orage. Néanmoins, Ivana esquissa un sourire joyeux, appréciant ce mélange de pluie et de chaleur mêlées...une chaleur émanant de la paume de main du mafieux.
— Bon sang ! Dit-il en ouvrant précipitamment la portière passagère pour qu'elle se mette à l'abris.
Ivana balaya ses cheveux trempés en arrière essuyant au passage son visage.
Lorsqu'il se mit au volant, elle dévisagea sans vergogne son visage sculptural humide et ses cheveux trempés, assurant de bien prononcer la teneur de sa virilité.
— Tu as faim ? J'ai vu une petite auberge à deux kilomètres.
Ivana cligna des yeux pour sortir de cette torpeur agréable et acquiesça sans trop réfléchir. L'orage grondait, la pluie frappait le pare-brise guidé par le vent qui venait de se lever. Était-ce un signe qu'elle ne devait pas négliger ?
— Bienvenu dans mon monde Ivana Koskov, déclara le mafieux avec sarcasme.
— Ce n'est pas si mal, répondit Ivana en tournant la tête dans sa direction.
Il s'arrêta sur le parking vide de l'auberge et vrilla son regard dans le sien.
— Alors c'est que vous êtes irresponsable miss Koskov, lui dit-il avec un sourire en coin.
Irresponsable ? Et si pour une fois elle avait envie de l'être ? Et si pour une fois elle avait envie de prendre des risques ? Elle était enfin libre de faire ce qu'elle désire, elle voulait penser pour elle et oublier cette voix nauséeuse qui s'était donnée le droit de la guider pendant plusieurs mois.
— Oui je le suis, lui dit-elle enfin, d'une voix sérieuse. J'ai envie de l'être pour une fois dans ma vie.
Impassible, étouffant ses pensées afin qu'elle ne les devine pas, le mafieux effleura tendrement sa joue du bout de son index.
Il quitta la voiture et elle lui emboîta le pas aussitôt, désarçonnée par son silence qu'elle devinait comme une arme redoutable de la part de l'homme. L'énigmatique Sergueï Volkov possédait des secrets qu'elle brûlait de découvrir.
À l'intérieur de l'auberge, Ivana constata qu'ils étaient les seuls clients.
Le restaurant était vide et l'ambiance qu'il inspirait lui rappelait ses dernières vacances avec sa mère dans ce chalet montagneux si tranquille et qui lui rappelait à quel point les souvenirs enfouis pouvaient resurgir à tout moment et l'envahir d'émotions.
— Eh bien, nous avons le choix, commenta-t-il en levant un sourcil.
— Bienvenue ! S'exclama la gérante de l'auberge grand sourire aux lèvres. Oh mon dieu jeune fille prenez ceci pour vous réchauffer.
Ivana s'empressa de saisir la couverture pour se réchauffer.
— Merci.
— Est-ce que c'est possible de dîner ? Nous ne voulons pas vous déranger pour si peu.
— Mais non voyons ! Allez vous installer je vais vous préparer un bon repas chaud, s'exclama la gérante sans se départir de sa bonne humeur. Souhaitez-vous une chambre ?
Ivana écarquilla les yeux, les joues empourprées alors que le mafieux lui, se mit à rire doucement.
— Merci pour cette invitation très charmante mais je crains que nous allons devoir refuser à moins que vous soyez prête à endosser la responsabilité de ma mort prochaine ou de voir le FBI débarquer ici en trombe.
Cette plaisanterie qui n'en était pas forcément une fit rire la gérante, du moins au début car son rire s'effaça peu à peu obligeant Ivana à intervenir avant qu'elle se fasse tout un tas d'idées laissant entendre qu'elle était en danger !
— Il adore plaisanter, n'est-ce pas ? Lança-t-elle en lui lançant un regard d'alerte.
Le mafieux tiqua, laissant un peu plus le doute s'installer. Ivana livide attendit une réaction de sa part tout comme la gérante.
— Et personne semble apprécier mon humour comme tu me le dis souvent, déclara-t-il enfin, un sourire ravageur aux lèvres.
Pour aiguiser l'histoire à leur avantage il glissa sa main autour de sa taille, la ramenant contre lui, comme un couple amoureux.
La gérante partie alors tout sourire.
— Tu réalises qu'elle était...
— Morte de peur à l'idée que je sois un dangereux criminel en faute ? C'était amusant de la voir se décomposer.
— Et si ça se trouve elle en train de contacter la police ! Tu lui as presque laissé croire que tu m'avais kidnappé !
— Je suis à ça de le faire, répliqua-t-il en rapprochant son pouce à son index.
Ivana déglutit en dévisageant le mafieux qui feignait un air sérieux alors que dans ses yeux une lueur malicieuse indiquait le contraire.
— Tu veux me connaître davantage ? Reprit-il en lui tirant la chaise pour qu'elle s'installe. Je ressens un certain plaisir à voir la peur dans les yeux des autres. C'est diabolique je sais mais je crois que c'est à mesure des années que j'ai développé cet étrange plaisir.
— Avec moi aussi ?
Il s'installa à son tour, braquant ses yeux dans les siens alors qu'ils étaient pourvu de voracité.
— La tienne m'a fait ressentir un désir malsain dont je ne suis pas fier, avoua-t-il d'une voix percée de remords. Tu ne peux pas comprendre pour quelle raison...du moins pas encore.
— Alors explique moi, je suis ouverte à n'importe quel sujet maintenant que je sais qui tu es.
Il grimaça légèrement.
— Non je ne pense pas ma belle, crois-moi sur parole.
Ivana lutta pour ne pas lui montrer à quel point elle était déçue qu'il ne lui livre pas plus de détail.
— Tu essayes d'entretenir le mystère ?
— Peut-être, laissa-t-il entendre.
Elle prit une grande inspiration brutale, le bas-ventre secoué par la vision de sa chemise qui collait encore à son torse et ses bras.
— Nous savons tous les deux qu'il y a quelque chose de fort qui nous attire l'un à l'autre cependant je refuse de jouer avec tes faiblesses au contraire je veux te rendre plus forte.
— Je ne suis pas faible, j'ai mal, ma vie est vide de sens, elle me rend triste, et je refuse d'être infantilisée mon père le fait assez comme ça.
— Je ne te prends pas pour une enfant Ivana, je te vois comme une jeune femme qui ignore tout du monde qui l'entoure bon comme mauvais. N'essayons pas de nous leurrer plus longtemps. Nous avons un écart d'âge assez conséquent et j'ai une expérience assez redoutable contrairement à la tienne.
Ivana fronça des sourcils et nota dans son regard qu'il essayait de lui faire passer un message.
— Redoutable ? Répéta-t-elle de plus en plus intriguée.
— Oui, redoutable, affirma-t-il d'une voix rauque.
— Je sais déjà que mon âge te pose un problème mais...
— Non ma douce, il ne me pose plus un problème, seulement je ne veux pas te faire du mal inconsciemment car je n'ai aucune expérience lorsqu'il s'agit d'être doux et tu ne m'aides pas à savoir si c'est le cas ou pas.
Ivana remarqua que cette conversation était en train de l'agacer, comme s'il luttait contre quelque chose en lui d'assez puissant. Elle vit sa main se crisper sur le rebord de la table et comprit tout de suite qu'il s'agissait d'une lutte assez rude.
— Tu es de loin l'homme le plus attentionné et protecteur que j'ai rencontré jusqu'à maintenant à l'exception de mon père.
Il releva ses yeux aux lueurs proche d'un puissant désir.
— C'est de loin le plus beau des compliments d'ordinaire je suis plutôt du genre à recevoir d'une femme des cris d'hystéries proche de la folie avec deux ou trois insulte qui fusent.
Ivana émit un petit rire en baissant la tête.
La gérante revint avec les plats en esquissant un petit sourire qui ne semblait plus avoir la même saveur qu'à leur arrivée.
Ivana pâlit craignant qu'elle ait vraiment contacté la police.
— Madame j'espère tout de même pas que vous avez contacté la police pour une plaisanterie ?
— Bien sûr que si elle l'a fait, confirma Sergueï d'une voix trop détendue compte tenu des circonstances.
— Eh bien c'est-à-dire que nous avons...je veux dire qu'il y a un homme recherché par la police depuis plus d'une semaine par ici et il paraît qu'il enlève des jeunes filles et...
— Et elle pense que c'est moi le vilain prédateur, conclut le mafieux en se pointant du doigt les lèvres sillonnées par un sourire diabolique.
— Mais c'est...c'est n'importe quoi ! S'écria Ivana en se levant d'un bond.
La gérante se décomposa en se raclant la gorge.
Sergueï s'appuya avec nonchalance contre le dossier de la chaise en contemplant la jeune femme livide et perturbée par le sourire qu'il arborait. Il mordilla dans une frite sans la quitter des yeux et déclara avec un soupçon d'ironie bien dosé :
— Prépare-toi jeune fille, il est temps de partir en cavale pour une durée indéterminée...
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