Mon téléphone sonna encore une fois. Je me réveillai avec difficulté. Il était bientôt une heure du matin et je ne comprenais pas pourquoi la personne persistait. Je décrochai dégoûtée de m'être levée le moment le plus important de mon rêve.
- Allô!? fis-je à moitié énervée.
- Ashley! Aide-moi, j'ai fait une grosse bêtise...
Cette phrase me fit comme un électrochoc.
- Killian, c'est toi? Qu'est-ce qu'il y a?
- Viens s'il te plait! Je suis dans la petite ruelle à côté du lycée. J'ai besoin de toi!!!
- Mais...
- VIENS PURÉE!! hurla-t-il paniqué.
Il raccrocha soudainement.

Même si je n'avais pas aimé la façon dont il s'était adressé à moi, je m'étais précipitée devant ma garde robe avant d'enfiler mon jeans noir et un pull au dessus du tee-shirt qui me servait de pyjama. Je pris rapidement des bottes faciles à mettre pour le rejoindre à temps. J'hésitais à passer par la porte. Finalement, j'optai pour la fenêtre : mon père m'ayant interdit de sortie et voyant l'heure tardive , je n'avais pas forcément envie de l'alerter par rapport à mon absence.

Après avoir bloquer ma fenêtre pour l'ouvrir de l'extérieur, je courus retrouver mon petit ami qui semblait mal à l'aise. Je le retrouvai assis, de dos, en train de pleurer. Je m'attendais au pire. Moi qui voulais le surprendre, j'avais abandonné cette idée là. Je m'avançais lentement, de peur de découvrir ce qui le mettait dans cet état. Je m'arrêtai sous le choc avant de tomber à la renverse. Le corps d'une fille que je connaissais depuis la primaire se trouvait au sol recouvert de sang.
- Killian... Qu'est-ce que...
- Ce n'est pas moi..., balbutia-t-il tout tremblant. Ce n'est pas moi...

Je le dévisageai terrifiée par l'image qu'il me montrait. Il souriait! Il paraissait satisfait de son acte. Son visage était tachée de sang. Il se mit soudainement à rire.
- T'es... T'es malade!? maugréai-je.
- Je devais le faire. On m'a proposé une grande somme d'argents si je la descendais! Et tu sais que ma soeur est dans un état critique pas vrai?
Je me mis à trembler. Je voulais fuir le plus loin possible ou me réveiller de ce mauvais cauchemar. Je préférais plutôt la deuxième option.
Lorsque ses yeux se posèrent sur moi, je sentis mon sang se glacer. J'étais effrayée à l'idée de terminer comme mon ancienne camarade - une dénommée Amy mais je ne me souvenais pas de son nom. Je n'avais plus la force de reculer ni de hurler. Ma peur se manifesta par les larmes qui coulaient en abondance. Il ne riait plus. Ça ne l'amusait plus vraiment car je pouvais le rejeter à cause de cette histoire. Il tendit alors sa main vers mon visage. Je fermai les yeux en redoutant le pire. Il l'avait sans doute remarqué. C'était pour cela qu'il l'avait retirée.
- Je ne sais pas ce qui m'a prit, bredouilla-t-il. Je ne me reconnais plus. Je suis effrayé de voir ce je suis en train de devenir. J'ai peur Ashley, j'ai peur parce que j'ai pris plaisir en faisant du mal à cette fille que je ne connais pas du tout, qui ne m'a rien fait en plus!

Je l'écoutais à peine. La peur m'empêchait de me concentrer et d'assembler les mots pour donner un sens aux phrases. Le plus important dans cette histoire était qu'il avait tué une personne et que cela aurait des lourdes conséquences. J'avais peur de lui... Mais en même temps, je ne voulais pas le laisser dans cette situation. Je souhaitais l'aider.
- Killian... Que vas-tu faire maintenant? dis-je pour briser le silence qui durait depuis peu.
- Pourquoi tu ne réponds pas à ma question? demanda-t-il sous l'emprise de la colère.
Parce que je ne t'écoutais pas... avais-je envie de lui répondre, mais je me contentai de le fixer sans dire un seul mot.
- Donc tu me vois comme un monstre alors. Ce sera impossible pour nous de continuer, pas vrai?
Mon coeur fit un bon. J'étais perdue dans mes sentiments. C'était un monstre, mais je l'aimais. Je ne me voyais pas le quitter ainsi.
- Qu'est-ce que tu racontes? On doit cacher le corps, déclarai-je en perdant la raison. Tu n'as rien fait, d'accord?

Je me demande ce qui m'avait pris. Je ne prenais pas en compte l'ampleur de ce drame. Je l'encourageais à se mentir pour ne pas qu'il culpabilise toute sa vie. Je me forçais de croire qu'il n'y était pour rien. Et malheureusement, ça avait marché. Dans ma tête, mon petit ami était arrivé dans cette ruelle après avoir entendu un bruit étrange et trouvé le corps d'Amy.

Je le pris dans mes bras pour le consoler. On avait appelé les ambulances et j'avais raconté une histoire montée de toutes pièces aux policiers et ambulanciers. Je finis par rentrer chez moi apaisée. L'histoire s'était bien finie.

Une semaine s'était passée sans que Killian me donne des nouvelles. Par contre, la mort d'Amy était ébruitée dans tous les coins. Parfois, je me sentais mal à l'idée de vivre parfaitement dans le mensonge. Je sirotais mon jus gazeux dans une petite place à l'extérieur du resto. J'étais seule à ma table lorsqu'une personne me rejoins. J'eus du mal à la reconnaître dû à son corps amaigri. Ses cernes violacées faisaient bien apparaître son teint qui était étrangement pâle. Ses cheveux noirs étaient emmêlés et allaient dans tous les sens. Elle s'installa brusquement en face de moi en me saisissant un bras.
- Ashley, aide moi.
Je redoutais le pire. C'était la même phrase qui avait été dite par mon petit ami, et le résultat ne m'avait pas plu. Voyant mon manque de réaction, elle continua:
- Ne m'abandonne pas s'il te plait... Tu as toujours été ma meilleure amie.
Comme je m'étais arrêtée de boire, je repris ma boisson en tenant ma paille. Elle me lança alors un regard noir.
- Je te parle Ashley! s'énerva-t-elle.
- Je sais, répondis-je en haussant les épaules. Et moi je t'écoute.
- Pourquoi tu agis comme ça? demanda-t-elle en se relevant.
- Assieds-toi, soupirai-je. Tu attires les regards vers nous.
- Laisse tomber. Je demanderai à quelqu'un d'autre.
- Aaahh, parce que tu as d'autres amis! ricanai-je. Et ils savent pour ton père?

Elle m'arracha la boisson et le versa sur mon visage. Ma chemise blanche devenait transparente, et par la même occasion, la partie tachée était colorée en rouge. Je me pressai d'essuyer la tâche et de remettre mon blouson noir en cuir.
- Ne te moque pas de moi! Peut-être que tu as des parents géniaux, mais ce n'est pas pareil pour tout le monde, ok!?
- Excuse-moi, mais il est quand même passé d'ingénieur à dealer! affirmai-je ironiquement.
Tout le restaurant nous regardait. J'avais dit ces paroles à voix haute, et ça avait attristé mon ancienne amie.
- Kelly je..., commençai-je en réalisant ce que je venais de faire.
- Je sais que je t'ai menti à propos de mon père, mais ce n'était pas la peine de crier sur tous les toits.
- Je suis...
- Je m'en fous de tes excuses! Tu aurais dû me comprendre, articula-t-elle à voix basse.
J'avais plein de remords. Alors qu'elle quittait le lieu, je retombai sur ma chaise et m'avachis sur la table.

En fin de journée, je trainais dans les rues en repensant à Kelly. Je m'en voulais énormément. Mais je m'étais aussi sentie trahie: je connaissais Kelly depuis le collège, et nous nous étions directement liées d'amitié. Ce n'est qu'en quatrième que je m'étais rendue compte que je ne savais pas réellement qui elle était. Elle esquivait toutes les questions qui étaient en rapport avec sa famille. La seule chose qu'elle disait était qu'elle ferait tout pour leur faire plaisir en ayant un bon dossier scolaire. C'est vrai qu'elle travaillait dur, qu'elle se donnait à fond dans ce qu'elle entreprenait... Mais ce que je n'arrivais pas à comprendre, c'est qu'elle avait mis Amy dans la confidence. Elle avait choisi d'en parler à une fille qui n'était pas si proche d'elle. Ça m'avait énervé qu'elle en parle à quelqu'un d'autre avant de venir m'en parler. Le plus pire dans tout ça, Kelly venait se plaindre de temps en temps de son comportement. Elle me racontait ses journées de moral avec elles lorsque nous avions changé d'établissement. À vrai dire, j'avais fait une dérogation pour entrer dans un lycée prestigieux. C'est ainsi que nous nous étions retrouvée séparée. Tout ça pour dire que j'avais mal pris le fait qu'elle m'avait cachée une chose pareille.

Les yeux rivés sur mes pensées, je ne remarquai même pas que j'avais dépassé ma maison. Mon regard se posa alors sur une silhouette que j'avais parvenu à reconnaître. Killian était avec une autre fille. Je vous avoue que cela m'avait mise en rogne. Je me précipitai à sa rencontre en m'apprêtant à lui donner une bonne correction.
- Je sais que c'est toi qui l'a tuée! entendis-je.
Mon coeur fit un bon. J'aurais dû m'en douter qu'une personne pouvait être témoin du crime qu'il avait commis. Je me planquai derrière une poubelle afin d'écouter la conversation.
- Si tu le sais, pourquoi tu ne me dénonces pas! rétorqua Killian.
- Tu me prends pour une idiote ou quoi!? Qui va croire mon histoire? Qu'un esprit possède des gens pour tuer quelqu'un?

J'écarquillai les yeux, surprise par ce que j'avais entendu. Dès que je sortis de ma cachette, la fille était déjà partie et Killian avait disparu.