Chapitre 21
DECEMBER-DAN
Aujourd'hui, ça allait être un entrainement intensif avec les recrues. J'avais envie de les faire souffrir un peu pour qu'ils soient davantage sérieux.
Je me changeai en tenue sportive et on frappa à la porte. J'invitai la personne à rentrer et Wyatt me salua faiblement.
J'en fis de même en enfilant mes baskets sans vraiment faire attention à lui, mais lorsque je le regardai plus en détails, je constatai un bleu autour de son œil.
Je l'arrêtai dans son explication des dernières nouvelles des recrues et plissai les yeux.
— Qu'est-ce que tu as à l'œil ?
Il écarquilla les yeux avec peu de discrétion et se toucha l'œil avec un petit rire en expliquant qu'il avait glissé dans les douches communes.
— Tu me prends pour une conne, Wyatt ?
Il fut étonné de mon langage et il se mit à bafouiller.
— N..Non, mais je ... je vous dis la vérité, Madame.
Je laissai échapper un rire ironique et le dévisageai avec méchanceté.
— Tu me prends définitivement pour une conne. Qui t'as fait ça ? Toi et les autres élèves n'êtes pas supposés vous prendre des coups et des bleus en dehors de mes entraînements et des autres enseignants qui s'occupent de votre formation. Alors, dis-moi qui t'as fait ça ou ...
— Ou quoi ? ricana-t-il. Vous allez m'interdire de m'entrainer ou de me battre ? Encore pire, vous allez refuser de m'entrainer, c'est ça ? Quand on est agent, on a qu'une parole, Madame. Vous l'avez répété plusieurs fois, alors vous ne pouvez plus retirer. Je le ferai cet entraînement.
On se regarda avec dureté.
S'il le prenait comme ça...
— Bien. Si tu le prends comme ça. Tu n'auras pas intérêt à venir pleurer, parce qu'on t'a cassé des côtes. Tu n'as pas à te laisser faire auprès des autres, Wyatt ...
— Oui, je vous balance qui m'a frappé et vous le punissez. Je me retrouve dans la merde et on me surnomme « la balance ». Non merci ! Je préfère me prendre des coups par des cons que de passer pour votre favori. Peut-on s'en aller ?
— Donc, on t'a frappé ?
— Peut-être, peut-être pas. Puis qu'est-ce que ça change ? Je m'endurcis.
Je secouai la tête, incrédule face à sa façon d'être, puis je contournai mon bureau avant de me placer face à lui. Je plongeai mon regard dans le sien, bien qu'il fasse une tête de plus que moi malgré son âge et rétorquai :
— S'endurcir, c'est bien, mais ne plus pouvoir assurer la formation et se faire virer du QG pour faiblesse, est-ce mieux ? Dis-le moi, Wyatt.
Il tenta de dévier son regard du mien, mais j'attrapai sa mâchoire d'une main et je le forçai à me regarder.
— Dis-moi ce que tu veux Wyatt.
Il repoussa ma main et recula d'un pas.
— Vous n'êtes pas ma mère, se braqua-t-il.
— Je me préoccupe de mes recrues et ceux qui font du mal à d'autres, je les vire, me justifiai-je soudainement en colère. Tu crois que je n'ai pas vu dès le début que tu étais le petit bouc émissaire de ce groupe. Tu es à l'écart Wyatt. Tu ne te sociabilises pas. Ici, tu n'as aucun allié. Pour les groupes, on te choisit un dernier. Tu es le plus faible d'entre eux, assénai-je. Ils ont une force mentale que tu n'as pas.
Il serra les poings et contracta sa mâchoire tout en me dévisageant.
— Alors, virez-moi. Je ne suis pas digne d'être un agent.
Je soupirai en levant les yeux.
— Je n'ai jamais dit ça ! m'exclamai-je.
— Alors vous dites que je suis une merde !?
— Absolument pas ! Tu sais quoi ? On va s'arrêter là, Wyatt. Je ne suis pas d'humeur à me mettre en colère. Cependant, sache que pour arriver ici, je me suis battue. Mais intelligemment. J'ai accepté l'aide de ceux qui me rendraient plus forts.
Nous nous regardâmes une dernière fois avant de quitter mon bureau tous les deux en froid.
Je voulais l'aider et non le materner ou je ne sais quoi.
Même si, vis-à-vis de Wyatt j'avais ce besoin de le protéger. Je ne savais pas pourquoi.
Je n'aimais pas qu'on s'en prenne au plus faible tout simplement.
***
— Nicolas, tu recommences ta 93èmepompe !
Il était au sol.
Totalement épuisé, face à ses autres camarades qui le regardaient.
— Madame, vous êtes clairement un tyran, tenta de plaisanter Vince.
À mon regard, il se tut et s'excusa.
Oui, je l'étais mais c'était pour qu'ils parviennent à l'excellence.
— Allez Nicolas ! Nous avons pleins de choses de prévu et ma journée est chargée.
Il gémit au sol.
— Il t'en reste que 7 ! Tu peux le faire ! le motivai-je.
Je ne savais pas s'il pouvait le faire après l'entrainement que nous avions fait.
C'était une course d'obstacle à travers un labyrinthe plein de surprise et ils étaient tous épuisés. Pourtant, nous n'étions qu'onze heures du matin.
Mais, ça y'est. Les semaines avançaient et ils étaient déjà de mieux en mieux.
— 7, répéta-t-il d'une voix éteinte.
Il se redressa avec lenteur, souffla, le visage couvert de sueur et rougi par l'effort.
Il se positionna avec lenteur et je comptai.
— 93-94-95-96-97 ...
Il s'arrêta, serra les dents et ferma les yeux.
— 98-99...
Il eut du mal à remonter avec ses bras.
— 100. Génial.
Il se laissa tomber et rencontra le tapis avec joie.
— Vous pouvez l'applaudir ! Il l'a fait !
Et ils le firent.
Ils allèrent l'aider à se relever et je m'approchai de lui.
— Dorénavant Nicolas, avant de me défier, sois prêt à subir ma fureur douce, d'accord ?
Il acquiesça doucement avec un petit sourire.
— Dois-je continuer demain ? Pour le réfectoire ?
Ah oui, comme il avait été insolent, il était de corvée au réfectoire, bien sûr, pour son plus grand malheur.
— Il aime ça maintenant ! le railla Alex ce qui fit rire les autres.
Même Wyatt sourit rapidement.
— Non. J'avais dit jusqu'à lundi, Nicolas. Après, tu es libre. Et pour la peine, Alex, demain, c'est ton tour !
— Quoi ? Non !
Nicolas sourit heureux et les autres rigolèrent du malheur d'Alex qui me supplia et qui s'excusa plusieurs fois, mais c'était trop tard.
Sur le chemin vers la salle de tir, il continua à s'excuser, tandis que je remarquai Wyatt en retrait. Il était froid et même ses collègues qui avaient tentés quelques approches, certainement se sentant coupables de leur acte envers lui.
Bien sûr, je ne savais toujours pas qui lui avait porté ce coup.
Et je pense que ses camarades avaient dû remarquer mon regard insistant à son adresse.
J'avais envie de faire cracher le morceau à la personne qui avait fait ça, mais je me retins.
Wyatt baissa immédiatement la tête face à ses camarades. Devant moi, il pouvait être si fort mais devant eux, il passait pour le petit peureux du groupe ce que je n'aimais absolument pas.
J'hésitai devant la porte de la salle. J'aurais dû faire ma morale lors du précédent entrainement. Ils me regardèrent tous, fixement, s'attendant à ce que je dise un truc par rapport à Wyatt, mais celui-ci me supplia du regard de ne rien dire.
— Bien. Vous allez à présent apprendre à tirer. Certains l'ont déjà fait et d'autres non. Ne vous faites pas, ce n'est pas sorcier. De toute façon comme je vous l'ai dit, le QG ne vous apprend pas à tuer directement. Si vous pouvez laisser l'ennemi en vie, faites-le. Enlever la vie de quelqu'un n'est pas facile. C'est clairement traumatisant. D'ailleurs, qui a déjà tué ?
Ils se regardèrent tous entre eux, choqués.
Personne ne leva la main.
OK. J'avais été peut-être précoce à mon âge et je n'aurais jamais dû leur poser la question comme telle.
— Eh bien, lâchai-je en me grattant la tête, j'ai été précoce en ça aussi. J'avais 14 ans et c'était pour sauver mon frère. Jared Carter. Vous avez dû le croiser...
— 14 ans ! s'exclama Brook, estomaquée. Mais ... c'est vachement tôt.
— C'était soit il mourrait, soit le gars mourrait. Je ne me suis pas posée de questions. J'ai simplement tiré. Et, c'est encore traumatisant. Mais après le premier, ça va mieux ! ironisai-je ce qui les fit grimacer.
Ils me regardèrent encore plus choqués.
Bien sûr que ça n'allait jamais bien, mais ... on faisait avec.
C'est très maladroit, je vous l'accorde.
— En tout cas, je ne vais pas vous mentir, vous n'y échapperez pas. Vous pouvez retarder le moment, mais si vous êtes agent de terrain, ça arrivera.
Je les regardai tous avant de leur dire de faire cinq groupes de deux.
Évidemment, les recrues se précipitaient pour former leur duo et celui qui restait en dernier, soupira parce qu'il se retrouvait avec Wyatt et ce fut Alex Ruez, le petit plaisantin de cette équipe.
Je ne dis rien et j'allai récupérer un bac où il y avait des armes.
Kyle qui gérait la salle de tir avait dû tout préparer.
J'en distribuai une à chaque équipe.
— Elles ne sont pas chargés. Je vais vous distribuer les balles.
Je quittai la pièce avec le bac pour éviter tout incident et frappai à la porte d'à côté.
La voix profonde de Ky m'autorisa à entrer.
Je le saluai avec le sourire.
— Salut Ky !
— Hé DD jolie !
J'allai lui donner une rapide accolade amicale et il me remercia pour le bac.
— Merci à toi d'avoir tout préparé.
— C'est normal. Les balles sont là.
Il m'indiqua une boite que je pris et je le remerciai une nouvelle fois, tout en lui piquant un beignet.
— Arrête de manger ces cochonneries, ça ne t'aide pas à perdre le poids que tu veux perdre.
Il rit tout en se tapant son ventre bedonnant.
— Et j'adore ça ! Que de la graisse ! Ce sont comme des muscles.
Je secouai la tête en riant et quittai la petite pièce et retournai dans l'autre, après avoir fait disparaitre, le succulent beignet.
Dieu qu'il était bon.
— Alors, l'équipe qui réussira à tirer correctement dans la cible aura le droit à une sortie à l'extérieur, indiquai-je la consigne.
Ils hurlèrent de joie tandis que je distribuai une balle à chacun.
— Ceux qui y arrivent, vous aidez les autres, OK ?
— Madame ? Ça serait bien que ... vous nous montriez l'exemple, lâcha Nicolas qui était en binôme avec Vince.
Vince lui donna un coup de coude et je dévisageai ce Nicolas avec curiosité. Il se la pétait beaucoup trop à mon goût. Et, il ne retenait pas la leçon visiblement.
Je crois qu'il aimait bien être de corvée.
— Je sais déjà tirer Nicolas.
— Moi aussi, dit-il en haussant les épaules avec désinvolture. Mais, vous êtes notre chef, alors un exemple, c'est bien.
Les autres le regardèrent avec un peu de vénération.
Oui, il vivait pour me défier bêtement devant ses camarades, juste pour se sentir supérieur.
Tss.
Il me connaissait mal.
Je pris l'arme que la dénommée Charlotte tenait, la chargeai d'une balle rapidement, m'avançai à un stand et une feuille avec le corps d'un homme apparu.
— Je la mets direct au centre, tu me feras 200 pompes, Nicolas. Puisque 100 pompes ne t'ont pas suffi. Insolence est mon deuxième prénom. Tu demanderas à mon père, si tu le croises.
— Quoi ? s'insurgea-t-il. Non ! Je retire ce que j'ai dit.
— Trop tard.
Je tirai et la balle arriva pile poil au centre.
Je me retournai vers mes élèves stupéfaits et je leur souris, satisfaite.
— Je suis « l'Espoir », j'ai été élue meilleure tireuse de ma catégorie, alors avant de tenter de me défier Nicolas, parce que c'était clairement le cas, renseigne-toi ! 200 pompes au prochain entrainement et tu es de nouveau de corvée avec Alex.
— Ce n'est pas juste !
— Encore un mot et je ne serai pas clémente, j'alourdirai ta peine, mon petit chat, dis-je.
Il bredouilla je ne sais quoi, mais je ne fis pas attention et repris le cours.
J'achevai ma distribution, puis ils se munirent tous de lunettes de protection et de casque pour le bruit.
Je leur donnai l'autorisation de commencer.
Certaines filles avaient du mal à tenir l'arme telle que Lea Yang. Alors, je l'aidai parce que sa partenaire Loïs n'y arrivait pas non plus.
Une fois que je leur avais expliqué, Lea tira, mais rata carrément la cible.
Ce fut autour de Loïs qui tira à côté.
— C'est le début, dis-je pour les rassurer.
Mon Dieu, elles étaient nulles à chier.
Je leur donnai d'autres balles et j'allai voir les autres équipes.
Amber Jones s'en sortait bien et sa partenaire Brook, beaucoup moins, mais elle faisait genre d'être une professionnelle en tir.
— Tu devrais écouter les conseils d'Amber, Brook parce que c'est vraiment mauvais.
Amber ricana sous le regard réprobateur de Brook.
— Joli afro, Amber, dis-je.
— Merci Madame.
Brook était rouge de colère.
Je regardai l'équipe de Vince et de Nicolas. Bien que celui-ci soit en colère, il s'en sortait assez bien. Et Vince aussi.
De toute façon, ceux qui s'en sortaient bien étaient Vince, Amber et Wyatt. Les autres, ça dépendait vraiment des disciplines.
J'allai voir l'équipe de Lucas Bryant et de Charlotte et eux, ce n'était vraiment pas terrible mais je les encourageai cependant.
Je terminai par Alex et Wyatt. Et je fus agréablement surprise. Ils étaient les meilleurs sur ce cours. Ils s'approchaient rapidement du centre de la cible, à force de tirer.
La feuille avait des trous propres et lisibles.
— C'est vraiment bien les gars, les félicitai-je.
— Merci Madame, sourit Alex. La prochaine, je la mets au centre pour vous et vos beaux yeux.
— Tu me dragues Alex ? ricanai-je.
— Nannn ! J'ai trop de respect pour vous.
Je lui souris et nous regardâmes Wyatt qui s'apprêtait à tirer.
— Prépare-toi à sortir, Alex, annonça-t-il.
— Tss. Muchacho, tire et tais-toi !
Wyatt se positionna correctement et appuya sur la gâchette.
La balle perfora parfaitement le centre de la feuille.
Alex et moi, nous le regardâmes, hébétés.
Bien sûr que Wyatt savait tiré. Il avait menti. Ce gosse cachait des secrets.
Je n'avais plus de doute dessus.
Maintenant, qui était-il et quel était son but ?
— Caramba ! Tu faisais genre que tu avais des difficultés ! s'exclama Alex.
— C'est un coup de chance, répondit-il en haussant les épaules.
J'observai Wyatt qui n'exprima aucune émotion.
Juste peut-être la satisfaction de m'avoir bluffé.
Ses camarades furent surpris aussi et certains lui lancèrent des regards assassins qu'il ne calcula même pas.
— Bon. Wyatt et Alex sont de sortie la semaine prochaine, annonçai-je. Vous avez même le droit à votre première mission de terrain, continuai-je.
Je voulais découvrir qui il était et c'était la meilleure des solutions que de lui faire faire une première mission,
— Wouhou ! bondit Alex de joie en enlaçant Wyatt. T'es plutôt cool en fait.
Wyatt esquissa un sourire tandis que les autres exprimaient l'injustice qu'ils venaient de subir.
— Vous voulez sortir mais vous ne savez même pas tirés correctement. Allez, au boulot !
Je croisai le regard de Wyatt.
Je devais le surveiller car il mentait vraiment bien.
Peut-être que personne ne l'avait frappé et qu'il savait que j'avais envie de le protéger donc il se jouait de moi ...
Je n'en savais plus rien.
Bref ! La fin du cours arriva rapidement et il était de l'heure de déjeuner. Je ne les revoyais plus avant demain, car ils avaient d'autres cours dans l'après-midi.
— Allez ! Bossez bien et on se voit demain.
— Merci Agent Lee ! dirent-ils à l'unisson.
Je les laissai et me dirigeai vers mon bureau, mais Wyatt m'héla.
Il arriva à ma hauteur.
— Tu ne fais plus la tête ? le raillai-je.
Il préféra m'ignorer et me demanda quand est-ce que se déroulerait la mission extérieure.
— Je pense que ça sera pour mercredi.
— Et notre journée à l'extérieur ?
— Mercredi aussi, répondis-je, ça sera plus simple. Il y a un problème ?
— Non.
— Bien.
Je repris ma route, mais il m'arrêta de nouveau.
— Je ne vous l'ai pas dit ce matin, mais j'ai commencé un entrainement avec le Maître Chang.
— C'est bien, Wyatt. Qu'est-ce que tu veux que je te dise ?
Il voyait bien que mon attitude envers lui, avait changé. Mais je ne pouvais pas faire autrement. Tant que je n'étais pas certaine de ses intentions, j'allai être sur mes gardes, dès à présent.
— Mais c'est le vôtre que je veux.
— Tu l'auras. Mais pour l'instant, je n'ai pas vraiment le temps, Wyatt.
— Vous devez essayer d'avoir le temps, dit-il durement.
— Je ne suis pas à ta disposition Wyatt, le jaugeai-je du regard. Aujourd'hui, tu me gonfles clairement.
Je le dévisageai et décidai de m'en aller, mais il m'attrapa par le bras ce qui me décontenança.
Le seul de mes élèves qui avaient osés me toucher était Alex et il était du genre tactile et amical, donc je n'avais rien dit mais à mon regard, il avait compris que je ne jouais pas dans la même cour que lui.
Alors le fait que Wyatt m'arrête de la sorte me donna davantage le doute sur sa personne.
Il relâcha mon bras ayant conscience de ce qu'il venait faire.
— Qu'est-ce qu'il y a ?
— Rien.
— Tu es étrange Wyatt, lui avouai-je. Tu ne me rassures pas du tout.
Ses yeux marrons me fixèrent sans laisser rien transparaitre.
— Je m'excuse Agent Lee, ça ne se reproduira plus.
Il marcha à reculons avant de s'en aller.
Je restai quelques secondes sans rien faire avant de m'en aller à mon tour.
Je devais songer à enquêter sur lui.
***
SARA
Nous nous retrouvâmes au réfectoire à l'heure du déjeuner en sa compagnie.
Tout le monde le regardait avec curiosité, mais il avait l'air de s'en contre-foutre et DD aussi. Ils étaient tous les deux très sereins et rigolaient ensemble. Ils discutaient même de stratégie.
Lorsqu'enfin Isaac s'installa à notre table, je fus soulagée, car je me sentais un peu exclue pour tout vous avouer ...
Isaac l'embrassa sur le sommet du crâne ce qui la sortit de sa discussion avec Will qui sourit.
—Tiens, Monsieur Legrand ! Comment allez-vous ?
Isaac le mitrailla du regard.
— Qu'est-ce qu'il fait ici ?
— Je déjeune avec mes deux merveilleuses patronnes, répondit-il à la place de DD. C'est tellement extraordinaire de travailler avec ce genre de femmes ! Je t'assure que les femmes sont en marche pour dominer le monde !
Il lui fit un clin d'œil en posant son bras sur le dossier de December-Dan.
Isaac serra sa fourchette et December-Dan ne voyait que du feu à ce jeu du regard.
D'ailleurs, elle sourit même à Will.
— Tu deviens moins macho toi, dis-moi.
— Il faut croire. Travailler avec vous me rend ... plus doux ! C'est exactement ça. J'adore la façon dont vous vous occupez de moi.
Je lui donnai un coup de pied et il tourna sa tête vivement vers moi.
Pour autant, il ne lâcha pas son sourire.
— Surtout Sara ! J'aime les femmes de caractère, tu sais, Isaac. C'est stimulant et excitant !
Je sentis mes joues se chauffer. Heureusement que j'avais la peau métissée car cela se verrait.
Isaac ne dit rien, prit une bouchée de son plat et Will poursuivit.
— Tu ne trouves pas ? J'aime les femmes qui prennent les commandes dans touuuus les sens du terme ! sous-entendit-il.
Je faillis m'étouffer et December-Dan explosa de rire.
— Tu es sérieux là, Will ?! Nous sommes à table !
Puis Will rit.
— Oh. Mon. Dieu ! Vous avez l'esprit mal placé les filles ! Je ne pensais absolument pas à ça ! Je parlais du boulot moi ! dit-il avec une fausse innocence.
— Mais bien sûr ! dit-elle ne le croyant pas un seul instant.
— Ah ! C'est toi qui imagine ça December-Dan. Je savais que tu n'étais pas entièrement satisfaite !
Isaac serra les poings. Là, il poussait le bouchon trop loin.
— Arrête Will, intervins-je. Tu commences à être lourd là.
— Ne sois pas jalouse Sara, minauda-t-il. Je t'ai toujours dit que toi et moi, c'était possible. Je suis tout à toi ! Je sais que tu te faisais un trip en bas en me voyant attacher et à ta merci dans ton bureau. Et sérieux, je commençais à kiffer, mais je suis en liberté maintenant. Désolé.
Je levai les yeux et DD se retint de rire.
— Mais bien sûr toi ! Adhère à ce qu'il dit ! répliquai-je, irritée.
— Mais je n'ai rien fait ! se défendit-elle.
— Il me cherche et tu ne dis rien, lâcha Isaac aussi piqué que moi. J'ai envie de le frapper.
— Mais vas-y, Monsieur Legrand ! Est-ce que ta femme ou du moins ta future femme ou non, ta future ex-fiancée est courant des coups que tu m'as portés, alors que j'étais à l'infirmerie pour raison la jalousie ?!
— Quoi ? lâcha DD, surprise.
— Je vais le tuer ! grogna Isaac prêt à en découdre avec Will.
Mais December-Dan s'interposa rapidement.
Ce mec n'était qu'un connard.
Il jubilait des malheurs des autres pour ne pas penser aux siens.
Pour venger Isaac, je pris mon assiette de pâtes et la lui renversai.
Tout le monde nous regarda et Will eut envie de me tuer et je le voyais bien dans son regard.
— Écoute-moi bien salopard, tu l'ouvres encore, je t'assure que je vais me faire un trip de folie en t'attachant comme le chien que tu es.
Il se leva, me surplomba de sa taille empestant les pâtes à la bolognaise et il sourit.
— Je n'attends que ça, Chef !
Je secouai la tête, avec une envie de le gifler, mais je me retins, sinon il gagnerait.
— Vous avez fini vous deux ? nous questionna DD. Parce que, lança-t-elle en balayant la salle du regard, Nicolas ! hurla-t-elle en lui faisant signe de venir. Cette recrue est de corvée de nettoyage.
Je me retins de rire parce que December-Dan était décidemment fidèle qu'à elle-même.
Elle avait puni un de ses pauvres élèves, encore une fois.
Il roula des yeux en s'approchant de notre table.
— Will, comme tu casses les pieds aussi, tu vas l'aider.
— Quoi ? Non, DD !
— Tais-toi et fais-le sinon tu te retrouves de nouveau attaché puisque tu aimes ça.
Il râla et je souris très heureuse de cette justice. Isaac aussi avait l'air d'être ravi et lâcha un petit ricanement. Nous nous levâmes enfin et ils étaient de nous en aller pour nous, alors que le dénommé Nicolas commençait à nettoyer.
— Ne me touche pas, tu n'es pas mon genre ! s'agaça Will.
— Déstresse mec ! Tu crois que ça me fait plaisir de nettoyer ou quoi ? Puis, je préfère les femmes et toi, tu viens de te faire humilier par l'une d'entre elles, rétorqua l'élève. Encore une fois.
Avant que Will ne le frappe, les agents intervinrent et l'emmenèrent sous l'exaspération de DD.
***
DECEMBER-DAN
J'avais quitté le QG depuis une heure que j'étais déjà au téléphone avec Sara. Comme l'entrevue générale avec Serena avait été reportée à demain matin, en raison de certains agents du conseil en mission, j'avais pu rentrer chez moi un peu plus tôt. Bien sûr, cela ne déplu à Serena qui adorait parler avec William qui prenait son rôle à cœur.
Bref, Sara m'avait appelé pour les derniers détails du mariage. Et confirmer avec moi, que demain, en fin d'après-midi, il y avait l'essayage des robes pour la dernière fois.
— Je ne vous remercierai jamais les filles pour cette organisation, lui dis-je.
— C'est un plaisir de faire ce mariage pour toi. Et au fait, avec tous les évènements, tu ne m'as même pas raconté le mariage des Davis. Marysa a balancé des trucs. Du genre, que tu avais dansé avec les Davis et que vous vous étiez réconciliés.
— Pourquoi nous n'avons pas parlés de tout ça au QG ?
— Nous étions trop occupées et c'est vraiment important de dissocier vie personnelle et professionnelle. Puis, William aurait trop parlé.
Je souris en rangeant la vaisselle propre qui sortait du lave-vaisselle.
Isaac n'était pas là, je l'avais laissé au QG et Skyler devait être chez Papa et Hope.
— Pourtant, tu n'es pas restée calme au réfectoire ! Je pensais vraiment que tu allais le frapper.
Je pris les courriers sur le plan de travail de la cuisine et commençai à les ouvrir un par un.
— Je me suis retenue parce que je suis quelqu'un de bien, vois-tu. Mais arrête de rentrer dans son jeu en riant à ses conneries. Même Isaac s'est retenu. Quelques coups ne lui auraient pas fait de mal. Il avait déjà oublié ceux de l'infirmerie.
Je ris doucement. En effet, William aurait mérité ces coups. Le défendre n'était pas simple.
Et je n'en avais pas voulu à Isaac, parce que je savais tout bonnement que Will pouvait dépasser les bornes et Isaac n'était pas du genre à frapper pour rien contrairement à moi.
— Avec Will, il faut rentrer dans son jeu sinon il ne lâche pas l'affaire, lui dis-je.
— Bref, raconte-moi ta soirée.
Je décidai de le faire tout en continuant d'ouvrir ces enveloppes.
Je lui assurai que mis à part des danses et des excuses, que tout s'était bien passé jusqu'à la menace générale. Skyler s'était bien amusée pour un premier mariage et avait hâte de revoir ses cousins.
— Bon. Je suis contente. Ne te vous précipitez pas, quand même. Prenez votre temps, tous les trois et la famille aussi, me suggéra-t-elle.
— Ouais, ne t'en fais pas.
J'ouvris une grosse enveloppe kraft pensant que cela avait un rapport avec notre future maison dont j'avais prévu de faire quelques cartons, mais lorsque je lus les premiers mots, je vis rouge soudainement.
Mais quel salaud !
— Sara, je te laisse.
— Quoi ? Qu'est...
Je raccrochai, ouvris un tiroir de la cuisine à la recherche de la chose en question, la fourrai dans mon sac et quittai la maison, tremblante de rage.
***
J'arrivai à la putain de demeure de malheur des Davis et sonnai comme une folle furieuse.
Une personne se décida de répondre et c'était le jardinier si je crois bien.
— Ouvrez cette putain de porte. Je dois voir les Davis !
— Excusez-moi madame, mais aucun membre de la famille n'est là.
— Quoi ? Vous mentez ! m'écriai-je.
— Je vous assure. Vous les trouverez chez P&J Corpor...
Je ne le laissai pas finir et repris ma voiture en évitant de justesse un accident de voiture.
***
— Bonsoir, que puis-je faire pour vous ?
Une jeune femme à l'accueil me regarda avec dédain.
J'en fis de même et lui demandai le bureau de Zeyn Davis.
— Ils sont en réunion familial.
— Dans quelle salle ?
— Je ne peux vous le dire. Je suis navrée.
— Navrée ?! ricanai-je à bout de nerfs.
Je sortis mon Glock de mon sac et la visai.
Aussitôt, elle blêmit et leva les mains.
— Vous êtes sûre ?
— Dans ... Dans la sa..salle 4185, bafouilla-t-elle.
Je la dévisageai et rangeai l'arme dans mon sac avant de me diriger vers la salle.
Elle n'allait pas tarder à appeler les flics.
J'en étais certaine.
Enfin, je trouvai la salle et entrai sans frapper.
Tous les regards se portèrent vers moi.
Ils étaient réellement en train de faire une réunion familiale ?
Eh bien, ça tombait bien qu'ils soient tous présents, parce que j'allai cracher mon venin et ça allait faire mal.
— December-Dan ! Quel plaisir de te voir, lâcha Peter. Justement, on parlait de toi et ...
Je m'avançai vers l'immense table avec les feuilles que je jetai au visage de Zeyn qui parut, choqué de ma violence.
— SALE CONNARD ! Tu ne veux que ta fille et tu OSES m'envoyer des papiers pour une demande de garde alternée, comme si nous avions parlés ! hurlai-je hors de moi.
Il se leva abasourdi et les regarda à son tour.
— Je ne les ai pas envoyés ! Je te le jure que je ne l'ai pas fait ! Il faut que tu me crois DD. Je te le jure sur la tête de notre fille ...
— Ouais c'est ça ! le coupai-je, acerbe. Elles vont s'envoyer toutes seules ! Tu n'es qu'un hypocrite, Zeyn ! vociférai-je. Je ne sais même pas comment j'ai pu un seul instant te pardonner ! Vous pardonner ! Tu me dégoutes. Tu n'es qu'un sale menteur, tout comme ta famille. Vous êtes des sacrés hypocrites.
Son regard me toucha, mais je le repoussai en sortant une feuille de la poche de ma veste que j'avais préparé, sans trop savoir quoi en faire, mais je voulais rester sur mes gardes et j'avais bien fait de ne pas la jeter précipitamment.
Je la lui plaquai contre le torse et il l'a pris comme dans un état second.
— Je te coupe l'herbe sous le pied à toi et à ta maudite famille. Vous n'avez aucun droit sur Skyler, crachai-je, froidement. Tu as signé un document comme quoi, j'avais la garde exclusive de Skyler.
— Quoi ?
Il regarda la feuille et releva sa tête vers moi, le choc se lisant clairement sur celui-ci.
— Tu n'as pas fait ça ?
— Qu'est-ce que je n'ai pas fait ? Créer de toute pièce un document avec ta signature qui me donnait les pleins droits. Si, je le fais, il y a quelques années de cela, sans trop savoir pourquoi. Mais maintenant, je sais : je savais que tu me ferais un coup pareil, déclarai-je, déçue et dégoutée de sa personne que je pensais, changée.
Je reculai de plusieurs pas tandis que Riccie lui prenait la feuille des mains, ne croyant pas à ce que je venais de dire.
Elle la lut aussi, blêmit et Drew la prit.
— Tu n'avais pas le droit December-Dan ! dit Riccie. C'est sa fille ! C'est illégal ce que tu as fait là. Ce n'est même pas vrai. Tu n'as pas le droit de faire ça.
— Comme tu n'avais pas le droit de faire réapparaitre Callie pour prendre le parti de Zeyn, lorsque j'avais pris ma décision. À cause de toi, Drew m'en a voulu, alors que ça aurait pu très bien se passer ce jour-là et Zeyn ne serait jamais parti, si tu ne lui avais pas dit que Drew était à la patinoire, parce que tu savais TOUT ! m'écriai-je. Tu sais quoi Riccie ? Tu devrais te la fermer, parce que tu n'es pas la mieux placée pour me juger à cet instant.
Son visage se décomposa et Drew la regarda.
— Quoi ? s'exclama-t-il, ulcéré. Qu'est-ce qu'elle raconte, Riccie ?
Elle ne répondit rien. Elle avait l'air d'être déçue, mais moi aussi je l'étais encore plus. J'étais attristée qu'ils se soient joués de moi de la sorte.
— Échec et mat les Davis. J'ai toujours dix pas d'avance, conclus-je la gorge nouée. Vous avez voulu me mentir, alors que vous aviez tout prévu.
Je secouai la tête et décidai de m'en aller. Je n'étais plus très loin de la porte, lorsque l'envie de pleurer me prit. Je n'avais que la haine pour eux.
Ça avait été trop beau pour être vrai.
Cette invitation et cette soirée de samedi n'avait été qu'une mascarade.
Tout aurait pu être différent. J'étais prête à le laisser la voir sans limite et sans restriction, parce que c'était leur droit à Skyler et Zeyn. Puis, c'était la famille de ma fille.
Et peut-être qu'avec le temps, j'aurais même accepté cette idée de garde alternée, mais ils m'avaient tous pris en traitre comme si j'étais une idiote de première.
Ils voulaient m'enlever Skyler, sans que je ne sois préparée psychologiquement.
D'ailleurs, Peter intervint en m'hurlant que ce papier ne valait et n'était qu'un tissu de mensonge et que ça ne passerait jamais auprès de la justice.
— Vous êtes sûr ? Avez-vous oublié mon métier ? J'ai autant de réseau que vous, monsieur Davis. Ne me tentez pas.
— On vous poursuivra en justice, me menaça-t-il, insistant. Sois en sûre.
Je ris comme une psychopathe tandis que la fille à l'accueil apparut, essoufflée.
— La police va arriver !
Son regard ne me traversa même pas tellement je les maudissais tous.
— Je m'en tape de la police, je me tire. Et cher monsieur Davis, réfléchissez avant de me poursuivre en justice. Vous aurez beaucoup à y perdre. Êtes-vous prêt à perdre votre empire ? Je serai heureuse de le détruire. Une tentative et j'anéanti tout ! Je vous dépouille jusqu'au dernier centime, menaça-je à mon tour.
Je les regardai une dernière fois avec dégoût et quittai l'entreprise.
Une fois dans ma voiture, je craquai sous les nerfs.
Une tentative et je briserai leur vie bien tranquille.
Je n'en avais rien à foutre !
Leur famille me connaissait bien mal.
Putain ! J'avais reçu une putain de lettre de leur avocat familial !
Ils n'avaient même pas les couilles de me le dire en face.
Voilà.
En agissant comme ça, ils venaient de ressortir une mauvaise partie de moi.
La vengeance.
Je démarrai au moment où j'entendis les sirènes de police.
***
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