Case 24 - Dernier verre pour Saint-Nicolas

Maxine

Jeu. Set. Et match !

Mon sourire s'étire, tandis que je joue de mes coudes derrière ma warfare. J'ajuste ma lunette, m'allume une cigarette. Exception due à ma position. Sur un toit, face au Torb'j. Les poivrots font leurs entrées. Les vigiles, habillés sur leur trente-et-un pour l'occasion, gèrent le flux. La soirée parfaite, pour un meurtre bien ficelé.

Je regarde l'heure sur mon téléphone. Vingt-et-une heures. La perche et les demoiselles ont été libérées il y a deux heures. Son état mental est sûrement à son apogée. Et recevoir l'appel du boss qui le somme de gérer le bar ce soir ne va pas l'arranger. Je vais avoir un peu de retard. Un message s'affiche sur mon écran.

La cible approche.

Mes lèvres se pincent, quand un bus rempli se gare devant le bar. La commande de papa ours est enfin là. Bien qu'il fait plaisir aux hommes avec le show de Vava, il en va de même avec les femmes avec les gogos danseurs de Noël. Le sol va être glissant avec toutes les serveuses qui vont mouiller leurs petites culottes. Et dans le lot, ma cible.

Il furète par-dessus son épaule. Scrute les alentours avec méfiance. Sans savoir que je l'ai mené directement dans la gueule du loup. Damien a les mains liées, il ne pourra pas attaquer. Seulement observer. Ginette n'est pas en mission, elle doit gérer l'équipe. Et le boss, trop occupé à détourner l'attention pour me laisser le champ libre.

Melas et madame Rodou sont épuisés. Elles ne tiennent plus sur leurs jambes. Eh oui, mesdames, face à Uriel, vous n'aviez aucune chance. J'ai déjà parfois dû mal à maintenir son endurance quand il n'est pas dans ses pleines capacités. Là, l'humiliation d'avoir croisé nos chemins vous fera regretter d'avoir chassé sur notre terrain.

Je frotte mes mains entre elles pour les réchauffer. J'ai beau avoir une couverture chauffante sur tout le reste du corps, cela n'empêche que le froid est mordant ce soir. De plus, la soirée bats son plein. La musique pulse hors du bar. Je vérifie ma lunette. La perche court derrière le comptoir, un torchon sur l'épaule, avec deux autres serveuses pour honorer les commandes. Il garde son professionnalisme en toute circonstance. La scène est hors de ma vue, mais le gibier doit être enragé.

Un œil à l'écran. Vingt-trois heures.

Dernier contrat du mois. Après c'est les vacances. Je me libère toujours pour passer la saint sylvestre hors de la France. La seule condition que j'impose aux commanditaires. Mon téléphone vibre à nouveau. Message du marchand de glace.

Ton vol est réservé pour demain.

Parfait. Nos chemins vont se séparer pour de bon. Il reste mon protecteur, mais le fantôme a besoin de se volatiliser. Une nouvelle cigarette rejoint mes lèvres. Message de la perche :

Bordel t'es où ? C'est l'anarchie à l'intérieur.

Suivie du boss :

Cible en place.

Je me cale derrière ma lunette. Le père Noël qui dénote des autres de son espèce est assis près de la vitrine. Il pense se planquer derrière le sapin, mais c'est mal me connaître. Il palpe les fesses des serveuses à défaut de pouvoir palper ceux qu'il a l'habitude d'avoir sur ses cuisses. Il ne pourra plus les attendre à la sortie des écoles. Avoir la chance d'être libéré après seulement quelques mois à l'ombre. Non. Ce soir, c'est la dernière fois que tu lèveras ton verre.

Mon doigt caresse la gâchette.

Il se frotte les cuisses. Ça le démange.

J'appuie. La balle fuse à travers le flocon qui apparaît. Transperce la vitre. Parcours son bout de chemin dans le sapin en évitant les boules et les guirlandes. Avant de se loger dans sa tête. Il s'étale sur la table, renversant sa bière. Son bonnet rouge et blanc se teinte de pourpre.

Échec et math.

Je remballe. Descends rapidement les étages. Traverse la rue. Entre par la porte de service. Me dirige vers les vestiaires, range ma mallette. Enfile ma tenue. L'euphorie d'avoir mené à bien cette compétition me dévergonde.

Je déboule derrière le bar. Attrape la pinte que la perche remplit, puis monte sur le comptoir.

— Acté ! gueulé-je à travers la foule sous les yeux ahuris de mon collègue.

Je lève ma bière en direction de papa ours qui répond à mon geste.

Les poivrots ne pigent pas un mot de ce que je raconte, mais à ce stade je m'en fous comme de l'an quarante. Minuit sonne.

— Tournée générale ! ajouté-je avant d'avaler mon verre d'une traite.

Ils ne leur en faut pas plus pour tous se précipiter au comptoir. Sauf celui qui gît sur sa table. Cette nuit, le bon vieux monsieur fera sa tournée, quant aux autres, ils se feront exterminer. Je vide ma bière, le goût amer m'arrachant un sourire. Autour de moi, la fête bat son plein, la musique pulse, et les rires fusent. Rien de mieux pour clore ce mois pourri.... ou presque.

Diantre !

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