Chapitre 34
Plus tard dans la soirée, Sienna avait été conduite sur le balcon qui donnait sur l'étendue splendide du désert. Le soleil achevait sa descente sur les dunes quand l'homme la rejoignit.
Une boule se forma dans son estomac alors que cet instant aurait dû être apaisant avec toutes ces bougies et ces grandes vasques remplis de flammes qui vacillaient tendrement.
Il s'installa à l'autre bout de la table sans la quitter des yeux. Des yeux mystérieux qui cachaient bien des secrets.
Est-ce que Ethan avait menti ?
Non.
Impossible.
Son frère n'aurait jamais fait ça encore moins après l'avoir laissé partir.
- Tu n'es jamais revenu me voir après ton départ, commença-t-elle les mains moites.
- J'avais des tas de choses à faire, expliqua-t-il la mine sombre. Je devais régler certains détails et finaliser notre mariage.
Son empressement à vouloir scellé ce mariage datait depuis Boston, mais maintenant, dans ses yeux brûlaient une lueur satisfaite.
Ce qui signifiait qu'il avait enfin achevé ce qu'il voulait depuis le commencement.
- Je peux voir dans tes yeux que tu es tourmentée Sienna, remarqua-t-il d'une voix basse mais assez ferme pour qu'elle arrime son regard au sien. Je t'en prie ne me dis pas que c'est encore à propos de notre mariage ou de ta méfiance à mon égard.
- Je suis méfiante, lui confirma-t-elle en soutenant son regard désormais orageux. Mohamed est-ce que je sais tout de toi ? Tu m'as vraiment tout raconté ?
Il plissa les yeux comme deux fentes impénétrables et demeura trop longtemps silencieux.
- Je t'ai absolument tout dit sur moi habibti.
- Donc tu estimes que ce n'est pas nécessaire de m'informer que tu es un membre de la mafia à tes heures perdues ?
Il s'assombrit et les flammes qui dansaient sur son visage balafré exacerbèrent ce côté diabolique qu'elle ne lui connaissait pas.
- En effet, commença-t-il de sa voix de gorge. J'ai estimé que ce n'était pas nécessaire de t'informer sur cette partie de l'histoire qui ne changera rien à notre mariage. Ton frère a raté sa vocation à devenir détective.
Alors c'était vrai ?
Sienna vacilla même assise tout en ayant l'impression que le sol se dérobait sous ses pieds.
- Je ne te l'ai pas dit pour éviter que tu abordes ce genre d'expression. C'est un chapitre de ma vie qui m'a aidé à me reconstruire et à chercher qui je suis.
- En tuant sans compter ?
- Bien avant de rentrer dans cette mafia, j'avais déjà tué.
- Pour sauver ton peuple, pas pour...pour...le plaisir, répondit-elle livide.
- Tu as beaucoup à apprendre de la mafia trésor, tu juges à partir de légendes racontées dans des livres d'experts en rien.
- Ce sont des trafiquants, des...
- La mafia Sicilienne n'est pas comme tu le penses, et je n'ai pas tué pour le plaisir de tuer. J'ai appris à tuer des personnes mauvaises tout comme l'était mon oncle.
Sienna cessa de respirer en soutenant son regard sombre et qui n'exprimait aucun remords.
- J'ai appris à chasser, ajouta-t-il froidement.
- Oh...merveilleux...et moi qui pensais que l'accoutrement de guerrier était juste pour m'intimider.
- Je n'ai pas besoin de porter des accoutrements de guerrier pour t'intimider habibti, même nu je t'intimide.
Elle rougit en se raclant la gorge.
- Là n'est pas...le sujet, dit-elle en se passant une main derrière la nuque afin de tromper cette sensation qui coulait déjà en elle.
Depuis des mois ses hormones prenaient le dessus et elle était toujours parvenue à les maîtriser jusqu'à ce qu'il revienne dans sa vie. Maintenant, elle devait faire face à une tempête d'hormones incontrôlable qu'elle arrivait difficilement à contenir. Le simple fait de se souvenir de lui nu sur le yacht fit grimper en elle une flèche de désir presque insurmontable. Elle avait même honte de ressentir une telle vague de désirs profonds.
C'était comme si son corps ne voulait plus lui obéir et attendait patiemment que quelqu'un le libère.
- Tu es sûre ? Insista-t-il d'une voix amusée.
Sienna plaqua ses mains sur la table pour juguler au mieux ses hormones et releva les yeux.
- Est-ce que nous pouvons revenir au sujet principal ? S'il te plaît ?
- Il n'y a pas besoin d'y revenir, dit-il sur un ton catégorique. Il n'y absolument rien d'autre à rajouter Sienna.
Elle lui jeta un regard mécontent et à ce regard, il soupira agacé.
- Quand j'ai été blessé au visage, après que mon oncle se soit emparé du trône, je suis parti et je me suis réfugié en Sicile. C'est là-bas que j'ai rencontré cet homme qui m'a aidé à sa façon. Je me suis trouvé là-bas, j'ai compris qui j'étais et ce que je voulais être. Alors oui Sienna, j'ai tué des gens malveillants, j'ai appris à traquer et à manier l'art de la dissimulation. J'ai appris à me battre autrement qu'avec une arme, j'ai aiguisé mes compétences et ensuite je suis revenu me battre pour mon peuple. J'ai guidé mon armée d'une main de fer et j'ai récupéré le trône.
Glacée, Sienna fit retomber ses mains moites sur ses cuisses alors qu'il avait narré son histoire de façon impitoyable.
- Tu es toujours considéré comme un...un...mafieux ? Parvint-elle à lui demander.
- S'il avait besoin de moi, je serais là, dit-il en confirmant ainsi qu'il demeurait toujours un membre de la mafia.
Il se redressa lentement et tendit le bras vers les plats à sa gauche.
- Est-ce que je vais découvrir autre chose ?
- Non, tu connais officiellement tout de moi, même si je voulais que cette partie reste secrète.
- Une partie pourtant hautement importante.
Soudain il reposa la cuillère en argent et retomba lentement dans le dossier de la chaise qui semblait souffrir de sa carrure impitoyable.
- En effet, tu as raison, c'est une partie hautement importante parce que c'est grâce à lui que tu es là.
Sienna plissa le front en essayant de comprendre ce qu'il voulait dire par-là.
- Le chef de cette mafia est celui qui a fait que tu es là aujourd'hui. Massimo est venu me voir sur le bateau quand nous avons approché les côtés sicilienne. Je lui ai parlé de toi, il connaissait mes sentiment à ton égard et ma détermination à te vouloir. Alors quand il a découvert via la presse que j'allais épouser Farah et que j'avais perdu la mémoire, il est venu me voir au palais.
Sienna baissa les yeux sur la nappe en se souvenant de ce qu'il lui avait dit.
- L'ange de la mort...
- Oui, c'est lui, confirma-t-il en la dévisageant. C'est grâce à lui que je me suis souvenu de tout. C'est grâce à lui que je t'ai retrouvé.
Sienna se pinça les lèvres en baissant brièvement les yeux. Que dire ? Sa gorge se serra et ses mots se perdirent dans une myriade d'émotions.
- Est-ce que tu as d'autres questions ? D'autres inquiétudes ?
Elle fouilla dans son regard impassible tandis que lui fouillait littéralement son âme.
- Tu ne peux pas m'en vouloir d'avoir peur et de me montrer prudente Mohamed.
- Non, tu as raison, je ne peux pas t'empêcher d'être sur tes gardes, mais dans le fond tu veux lâcher prise mais tu t'en empêches. Tu as peur et c'est à moi de te prouver que tu n'as plus rien à craindre.
Sienna fut traversée par une vague de sensations méconnues alors qu'il la regardait avec une puissance déroutante.
- Arrête de me regarder comme si j'étais...une proie...
Un lent sourire viril gagna son visage dur et elle se liquéfia sur la chaise.
- Tu devrais manger un peu habibti, lui conseilla-t-il d'une voix rauque.
Une voix rauque destinée à la rendre folle.
Plus les secondes passaient, plus il montrait à quel point il était satisfait d'être parvenu à la ramener. C'était comme s'il voulait qu'elle sache qu'il avait gagné et que plus rien ne pouvait l'arrêter désormais.
Ses yeux brûlaient d'une lueur encore méconnue et qu'elle essayait en vain de traduire.
Le corps en feu, brûlant de part en part, Sienna décida de se restaurer un peu et elle profita pour l'interroger sur l'île et sur ce qui l'attendait dans les prochains jours.
Sa réponse implacable la rassura, parce qu'elle ne se sentait pas prête à affronter la moindre foule et encore moins une caméra. Ce n'était pas son monde, c'était le sien.
Au fond d'elle, Sienna se sentait émue qu'il soit conscient qu'elle faisait bien plus de sacrifice que lui. C'était toute sa vie qui allait changer et bien plus que ça.
Elle était tombée amoureuse de cet homme qui malgré son implacable discours, n'exposait rien ou du moins il était difficile de savoir ce qu'il y avait dans son cœur.
Un cœur blessé par la guerre et les pertes.
Il agissait comme un guerrier tout-puissant, clamant haut et fort qu'il voulait à ses côtés une femme qui parviendrait à lui apporter un peu douceur dans son monde.
Il était sûr que c'était elle...
- Quoi ? Lança-t-il en reposant son verre sur la table, tu as l'impression que je te regarde encore comme un prédateur ?
Elle rougit, s'efforçant de ne pas lui montrer à quel point son corps réagissait de façon incontrôlable à ses paroles.
- Tu as toujours l'air d'un prédateur d'antan, répondit-elle en essuyant sa bouche dans la serviette blanche.
Il ne dit rien, se contentant de la dévisager avec sa paire d'yeux aiguisée.
- Viens, il est temps de rentrer, ordonna-t-il en se levant.
Il contourna la table pour la guider vers les appartements. Comme mû par une force qu'elle ne contrôlait pas, Sienna le suivit alors que son parfum de mâle commençait tout juste à faire vaciller ses sens.
Il fallait qu'il s'éloigne avant que le tsunami soit incontrôlable.
Il la conduisit dans la chambre et ouvrit une porte sur la gauche.
- Tu devrais prendre un bain, ça te fera du bien, proposa-t-il en la guidant vers la grande baignoire.
- Une douche sera parfaite.
Il n'insista pas et la laissa seule. Sienna expira un grand coup en se passant les mains dans les cheveux et se déshabilla à la hâte pour se précipiter sous la douche. Elle resta sous les jets assez longtemps pour que son corps se détende et que la fièvre redescende.
Seulement elle savait qu'à l'instant précis où elle allait ouvrir la porte, ses efforts pour éteindre ce désir allaient s'effondrer.
Elle enfila une robe de nuit en coton longue et quitta la salle de bain le cœur battant à la chamade.
Comme elle l'avait prédit, l'homme l'attendait presque devant la porte, comme un garde du corps à l'affût du moindre bruit.
Il coula sur elle un regard qui fit chavirer son cœur et quand il rompit les faibles centimètres qui les séparaient, elle perdit le contrôle.
- Ça suffit, dit-il en prenant son visage en coupe.
Ses lèvres exigeantes se plaquèrent sur les siennes et au lieu de le repousser, Sienna accueillit son baiser. C'était sauvage, comme une urgence, une folle punition destinée à prouver qu'elle voulait ce baiser depuis bien trop longtemps.
Il lâcha ses lèvres pour dévorer sa gorge de baisers affolants. Sa main ferme et chaude avait agrippée ses mâchoires et il avait incliné sa tête de façon à pouvoir parsemer sa gorge de baisers de plus en plus possessifs.
- Pourquoi vouloir résister à quelque chose que tu désires ? Chuchota-t-il contre ses lèvres.
Les yeux fermés, elle ouvrit la bouche pour lui répondre mais aucun son ne sortit.
- Tu brûles pour moi Sienna, exactement comme avant, continua-t-il contre sa bouche.
Elle ouvrit les yeux et lut dans les siens de la braise dangereuse, un feu ardent et une volonté suprême de la faire sienne à nouveau.
- Dis-le, ordonna-t-il, je veux te l'entendre dire.
Le cœur battant jusque dans les tempes, elle fixa son regard puissant et se perdit dedans.
Alors tout se mit à se mélanger dans son esprit. La mafia, la peur, l'envie, la passion, le danger, son pouvoir sur le trône de Rhafar, son implacable détermination, la crainte que tout s'effondre, son bébé, les souvenirs de leurs étreintes sur le bateau...
Au lieu de lui donner une réponse, elle posa ses mains sur son torse, la respiration de plus en plus irrégulière en se disant tout simplement que rien ne pouvait être pire que d'être éloignée de cet homme qu'elle aimait en secret...
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