Chapitre 28




- De quoi tu parles ?

Massimo s'approcha jusqu'à ce qu'il soit suffisamment proche de lui.

- Pour commencer...

L'Italien lui envoya un crochet du droit qui le fit reculer en arrière. Sous le choc, Arif s'apprêtait à appeler les gardes quand Mohamed leva sa main pour le stopper. Il se massa les mâchoires et fit craquer sa nuque.

Massimo mit ses mains devant lui en prenant un air faussement apeuré.

- Non ! Pitié votre altesse ne me frappez pas !

Avec un rire diabolique il fit retomber ses mains le long de ses jambes et d'un coup de menton l'invita à le frapper.

Les yeux noirs, Mohamed lui rendit son coup de poing et regarda son ami vaciller légèrement en se passant la langue sur sa lèvre blessée.

- Je peux savoir ce qui te prend ! Grogna Mohamed.

- Votre Altesse ? Vous êtes blessé ? Demanda Rania l'air affolé.

- Non, il n'est blessé, mais croyez-moi il va l'être dans quelques minutes, lança Massimo en reprenant son sérieux. Je t'ai frappé parce que un tu le mérite et deuxièmement, j'espérais que tu recouvre la mémoire. Malheureusement ça n'a pas l'air d'être le cas.

Mohamed fixait le mafieux comme un animal sauvage prêt à lui sauter à la gorge tandis que Massimo lui lançait des regards froids et mécontents.

- Tu aurais dû me prévenir pour ton accident au lieu de rester encore silencieux, cela t'aurait probablement évité de faire des tas d'erreurs depuis ton amnésie, déclara le mafieux passant le revers de sa main sur sa lèvre inférieure. J'ai fait tout ce chemin pour t'éviter de faire une connerie monumentale Mohamed.

Avec prudence, il scruta attentivement l'expression dure sur le visage de son ami.

- Tu es venu pour empêcher mon mariage ? Parce que si c'est le cas, tu arrives trop tard pour m'en dissuader, répondit-il sèchement. Je sais que je t'avais parlé de Farah par le passé, mais tu ne peux pas comprendre.

- En effet tu m'as parlé de cette femme qui à l'époque s'est montrée sous son véritable jour et j'ai été surpris en apprenant ton mariage avec cette...femme...mais ce n'est pas à cause de ce que tu m'as dit sur elle que je suis ici.

De plus en plus troublé par le comportement énigmatique du mafieux, Mohamed ne le quitta pas des yeux alors qu'il arpentait la pièce en étudiant le mobilier.

- Sienna Kendrick ça te dit quelque chose ?

- Oui, dit-il entre ses dents, pourquoi tu me parles de cette jeune femme ?

- Que sais-tu sur elle ? S'enquit-il en se tournant vers lui après avoir passé son index sur le bois massif du bureau.

- Nous l'avons embauché pour s'occuper des livres de la grande bibliothèque, répondit Arif, un peu désorienté.

- Et c'est tout ?

- Elle est partie il y a plus de deux mois maintenant, s'impatienta Mohamed. Pourquoi me parles-tu de cette fille Massimo ?

- Pourquoi est-elle partie ? Le questionna-t-il en s'asseyant sur le rebord du bureau, les bras croisés.

- Je l'ai soupçonnée de me connaître, elle a nié avant de me dire enfin la vérité. J'avais acheté le terrain où se trouve sa maison et je devais la détruire. Elle m'a dit que nous avions eu beaucoup de conflits sur le sujet. Elle est partie le lendemain et c'est moi qui ait souhaité son départ qu'elle a accepté immédiatement. Je devais tout faire pour qu'elle parte avant que les conséquences de mon geste me poussent à prendre de désagréables décisions.

Il marqua une pause en fermant le poing. Il se souvenait de cette jeune fille blonde qui l'avait plongé dans une profonde déception. Il se souvenait de l'avoir embrassé avant qu'elle lui révèle la vérité.

- Je l'ai enlevée pour la pousser à me dire la vérité. Je n'aurais pas dû procéder ainsi et cette décision aurait pu faire grand bruit si j'avais retardé son départ. En lui donnant le choix de partir, je devais lui prouver qu'elle n'était en rien prisonnière à Rhafar.

Le sultan s'approcha lentement vers son ami.

- Pourquoi ? Elle menace de parler à la presse la veille de mon mariage ? Elle veut de l'argent ?

Massimo fit mine de réfléchir.

- Eh bien si elle avait dû t'en demander je crois qu'elle l'aurait fait depuis longtemps étant donné que ce n'était pas la première fois que tu l'enlèves.

Une brume épaisse et sombre se forma devant ses yeux. Quelque chose se rompit à l'intérieur de lui et la seule chose qu'il parvint à distinguer c'est les bruits d'exclamations derrière lui.

- Je te demande pardon ?

- Tu as parfaitement bien entendu, tu l'as déjà enlevé par le passé. Tu ne t'en souviens pas ? Parce que moi je m'en souviens très bien. Tu devais effectivement briser sa vie un peu plus en supprimant la maison de ses parents qui ont péri dans un accident de voiture dans laquelle elle se trouvait, mais tu as subitement décidé qu'il en serait autrement. Tu lui as fait croire ou plutôt tu l'as mise au défi de convaincre un vieux bougre de te vendre son terrain pour sauver son quartier, mais en réalité c'était un leurre pour l'emmener avec toi sur ton yacht.

Son torse se soulevait dangereusement à mesure qu'il lui narrait ce qu'il avait oublié et peu à peu il avait l'impression que des flashs...des bribes de souvenirs réapparaissaient.

- Je le sais parce que je suis venu un soir sur ton yacht te surprendre parce que je n'avais pas apprécié que tu passes sur les côtes Sicilienne sans dire bonjour, poursuivit le mafieux en se redressant. Ce soir-là je ne t'avais jamais vu aussi déterminé. Tu l'as enlevé Mohamed et le seul qui était en mesure d'en informer quelqu'un c'est Amar qui malheureusement n'est plus parmi nous. Il m'avait appelé parce qu'il était inquiet pour la fille. Estime-toi heureux que je sois venu ce soir-là. Tu m'as dit qu'elle te troublait et deux jours plus tard j'ai reçu un message de ta part qui disait que c'était elle, que tu l'avais enfin trouvée.

Mohamed se retourna violemment et évita de justesse Rania qui était en état de choc.

- Tu te souviens maintenant ?

Il se passa une main rageuse sur le visage et leur tourna le dos, la respiration de plus en plus sauvage.

- La fille que tu cherches c'est Sienna Kendrick, articula le mafieux derrière son dos.

Tout s'arrêta autour de lui alors qu'il commençait lentement à se souvenir comme si ce coup de poing en plein visage l'avait sorti de cette léthargie interminable.

- En êtes-vous certain monsieur ? Demanda Arif avec prudence.

L'instant suivant un fracas assourdissant se mit à retentir et il provenait de la chaise qu'il venait jeter à travers la pièce.

- En tout cas lui en est sûr, lança Massimo en suivant des yeux son ami qui désormais arpentait son bureau comme un lion en cage.

- Mais pourquoi elle n'a rien dit ? Dit Rania en portant une main à son cœur.

Les oreilles bourdonnantes, il pressa ses doigts sur ses paupières alors que les images commençaient à surgir de son esprit en désordre.

Écrasé par le poids des souvenirs, il s'arrêta de marcher, les muscles douloureux tant ils étaient crispés. Ses poings tremblaient et il n'entendait plus rien que le poids des bourdonnements dans ses oreilles alors qu'il fouillait au plus profond de ses souvenirs.

- Pourquoi elle n'a rien dit ! Lâcha-t-il soudain et d'une voix crispée tant cette myriade d'émotions contradictoires lui serraient la gorge.

- Eh bien il y a plusieurs raisons à cela, répondit le mafieux en restant à distance. Tu n'as aucun droit d'être en colère contre elle j'espère que tu le sais ?

Il serra les mâchoires, conscient qu'il avait raison et que la seule rage qu'il était autorisé à exprimer c'est contre lui-même.

- Imagine un peu c'est jeune femme qui du jour au lendemain se retrouve propulsée dans un monde totalement méconnu. Tu la charmes, tu lui glisses des promesses, tu lui promets que tout ira pas bien. Tu la laisses après lui avoir promis de revenir et elle se retrouve sans nouvelle de toi pendant plusieurs semaines. Alors elle se dit que tu t'es moqué d'elle et soudain le destin décide de la remettre sur ton chemin, mais tu l'as complètement oublié.

Mohamed serra le poing, le corps crispé, alors que les souvenirs se mélangeaient à mesure que le mafieux lui exposait ce résumé qui le rendait l'unique coupable.

- Courageuse et peut-être désireuse de comprendre ce qui se passe, elle accepte de venir ici et apprend que tu as perdu la mémoire. Bien sûr comme si ce n'était pas suffisant elle découvre que des centaines de femmes se sont présentées à toi pour clamer haut et fort qu'elles étaient toutes la femme que tu cherches et que tu les as toutes traitées de menteuses. Piégée, elle retrouve espoir quand tu donnes l'impression que tu la connais, que tu as l'intime conviction que son visage ne t'est pas méconnu.

Plus il parlait, plus Mohamed sentait le poids de la culpabilité le broyer de l'intérieur.

Arif se laissa tomber sur le canapé comme s'il venait de recevoir un choc.

- Et dire que j'ai tout fait pour la convaincre de rester, murmura le vieil homme.

- Elle n'avait pas le choix de partir et c'est à cause de tes lois qu'elle s'est enfuie quand elle a compris que tout...absolument tout était contre elle.

- Les lois ? Répéta Rania l'air désorienté.

- Elle n'avait aucune raison d'avoir peur de mes lois, lança Mohamed en faisant quelques pas dans sa direction, le regard noir. Mes lois sont inscrites dans le marbre pour me protéger et protéger mon peuple. Elle n'avait aucune raison d'avoir peur !

Il avait l'impression de devenir fou et les ténèbres étaient partout autour de lui.

Le mafieux changea de visage et prit un air extrêmement sérieux.

- Elle est enceinte Mohamed.

Le temps s'arrêta brutalement. Tout son corps se figea dans une lente agonie alors que le silence dominait à présent. Arif se releva lentement et Rania posa sa main sur sa bouche.

- Tes lois que j'ai étudiées tout comme elle l'a fait sont la raison pour laquelle elle s'est enfuie et à sa place j'aurai fait exactement la même chose, poursuivit Massimo d'une voix grave. Être enceinte d'un homme qui ne se souvient même pas de toi et dont les lois stipulent qu'une grossesse hors mariage est interdite ne lui donne vraiment pas d'autre possibilité que de partir loin...très loin...

- Votre Majesté ? Dit Arif posément en s'approchant doucement. Dites-moi ce que je dois faire.

Enceinte...

Son cerveau brûlait de l'intérieur alors que des flashs d'elle envahissait son esprit comme s'il se jouait de lui pour le torturer. Il l'imaginait toute seule, enceinte, apeurée par sa faute.

- Annule immédiatement le mariage, ne donne pas les raisons pour l'instant, ordonna-t-il d'une voix autoritaire.

Il leva son regard sur Massimo.

- Elle n'est pas concernée par cette loi parce que j'ai signé les papiers et mon instinct m'a poussé à ne pas les invalider. Ce qui signifie qu'elle n'avait rien à craindre.

- Oh et d'après toi elle aurait dû le deviner toute seule ?

- Non, dit-il froidement, la respiration de plus en plus lourde. Je te le dis pour éviter que tu me regardes comme tu le fais maintenant. C'est-à-dire comme un monstre.

Il lui tourna le dos pour se diriger vers son bureau avec hâte car le temps pressait. Il fallait qu'il la retrouve en vitesse. Tout de suite !

- Depuis combien de temps elle est enceinte ? Demanda Rania depuis le canapé.

Mohamed redressa la tête, les yeux dans le vague en train de calculer avec rage le nombre de mois qui s'était écoulé depuis son amnésie.

- Elle est enceinte de cinq mois et demi, répondit le mafieux.

Comme un coup de poignard, il coupa son souffle en laissant la lame lui lacérer la chair.

- Il faut que je la retrouve immédiatement ! Dit-il entre ses dents. Prépare le jet privé, je dois partir maintenant pour New York. Je n'ai plus une seule seconde à perdre.

- Bien votre altesse.

- Euh...désolé de casser l'ambiance mais tu sembles avoir oublié quelque chose de très important, lança Massimo.

Mohamed lâcha sèchement tous les dossiers qu'il tenait sur le bureau et se redressa brusquement.

- Qu'ai-je pu oublié d'autre d'aussi grave que d'oublier la femme avec laquelle je voulais me marier et que j'ai abandonné ?

- Aurais-tu oublié son grand méchant frère ? Parce que lui il ne t'a pas oublié.

Le sultan fronça des sourcils en faisant le tour du bureau.

- J'ai enquêté avant de venir, c'est pour ça que je possède autant d'informations et la plus essentielle c'est celle-ci. Son frère.

- Dis-moi Massimo !

- Il a cinq mois d'avance sur toi et on ne peut pas dire qu'il te porte dans son cœur. Autrement dit j'espère que tu es préparé à te battre si tu veux la voir parce qu'il a déjà engagé un avocat et a obtenu une ordonnance du juge pour que tu ne l'approche pas si jamais ce moment devait arriver.

Les yeux injectés de sang, rictus aux lèvres, il demeura silencieux.

- Il a également pris le temps de lire tes lois mon ami, et on ne peut pas dire qu'il les a appréciées...oh non...il ne les a vraiment vraiment pas appréciées...

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