Chapitre 29: La visite du Chapelier
Quand je croise son regard, je saute sur place. C'est le Chapelier Fou, entouré par les deux abeilles. Il a une théière avec lui, sans doute son fameux thé à la cannelle. Sans réfléchir, je lui saute au cou.
- Oh Chapelier ! Je suis tellement contente de te voir. Je ne savais pas que tu venais
- Je voulais te faire une surprise. Et venir te prévenir dans quoi tu t'embarques.
Je lance un regard à Abigail
- Oui, je crois que j'en ai une petite idée.
La reine s'empresse de nous pousser vers le salon.
- Allons prendre ce fameux thé, nous aurons tout le temps de discuter. Que nous as-tu rapporté Chapelier ?
- Un thé à la cannelle dont j'ai la spécialité
- Parfait, c'est une bonne idée.
Je lance un regard complice au chapelier. Du thé à la cannelle, j'en étais sûr, j'espère juste qu'il ne nous donnera pas des hallucinations cette fois. Une fois que nous sommes installés, la reine nous donne une tasse à chacun et le chapelier nous sert. C'est Abigail qui commence la première.
- Bien, maintenant que nous sommes installés, j'aimerais savoir ce que me vaut ta visite Chapelier.
- Eh bien, à vrai dire, je m'ennuyais un peu dans ma chapellerie, la reine de cœur a commencé à réquisitionner tous les dodos du pays pour son armée
- Elle veut monter une armée ? Mais pour quoi faire ? C'est elle qui gouverne le pays à présent.
- Une armée pour être sûr d'avoir les meilleurs chevaliers dans son équipe, je veux dire.
- Mais elle n'a pas le pouvoir de l'épée vorpaline, et elle ne sait pas non plus que Léna a ouvert le livre des saisons.
- Ça, non, c'est un avantage.
Cette discussion commence vraiment à m'angoisser. Je bois une gorgée de thé à la cannelle. Le liquide est encore chaud dans ma bouche, et je sens un léger gout de rhum. Je regarde la reine, elle n'a pas l'air de s'en rendre compte. Où alors, elle n'est pas sensible à la saveur du rhum. Le Chapelier se tourne alors vers moi.
- As-tu fait des rêves, récemment ?
- Des rêves prémonitoires ? Seulement un seul, et c'était Mélissa qui essayait de me protéger, elle discutait avec le diable et lui prononçait des mots composés, qui se sont retrouvés dans ma poche quand je me suis réveillée
- Quel genre de mots ?
- Des mots comme « Suffletes pensées »
Je sors le papier de ma poche et le chapelier y jette un coup d'œil.
- Tu sais au moins ce que ça signifie ?
- Il me semble que ça veut dire « Pensées sombres », non ?
- Oui, c'est exact.
Abigail boit son thé, qu'elle semble plutôt apprécier. Elle ne doit pas sentir le gout du rhum au fond de la tasse, ou peut-être est-ce juste dans la mienne.
- Connais-tu le maître du Temps ? Celui qui a épousé la reine rouge ?
- Je l'ai déjà croisé, oui
- C'est une personne qui se vexe assez facilement, d'ailleurs, il est capable de bloquer l'heure du temps à six heures, soit l'heure du thé.
- C'est ce que nous sommes en train de faire, non ?
- Exactement, mais notre temps n'est pas bloqué.
Une sensation me donne alors le vertige. Je me lève et me dirige vers le mur, sur lequel je pose une main. Le rhum commence alors à remonter dans ma gorge et à me donner des hallucinations. Des images se succèdent dans ma tête et mon oreille se colle au mur. J'entends alors des voix qui me parviennent de l'autre côté du mur. C'est la voix de la reine de cœur qui, semble-t-il, parle à un de ces sujets.
- Je ne comprends pas comment nous ne pouvons pas attaqués, sachant que nous avons avec nous une guerrière qui détient l'épée vorpaline.
- Mais, ma reine... Nous avons tout le pays des merveilles à notre disposition, tous les dodos du pays sont sous vos ordres.
- Oui, et c'est très bien comme ça. Le dodo est l'animal symbolique de ce pays, c'est une espèce rare, mais beaucoup moins puissante que l'épée vorpaline et celle qui en est, maintenant, la maîtresse.
- Nous faisons ce que nous pouvons, mais cette jeune femme est maligne, et ne se laisse pas faire.
- Eh bien, trouvez son point faible.
Je retire alors mon oreille dur mur et un voile blanc passe d'un coup devant mes yeux. Des images se succèdent, et je reste spectatrice d'une scène, celle du maître du temps et de la reine rouge en train d'élaborer un plan pour me capturer, sans jamais intervenir. Quand mes yeux reprennent leur couleur naturelle, je reviens peu à peu à moi. Je regarde le Chapelier et lui demande à ce qu'on parle en privé. Nous nous retrouvons hors du salon, dans la cuisine, et je le fixe en croisant les bras.
- est-ce que c'est toi qui as mis du rhum dans ma tasse de thé ?
- Tu l'as senti ? Pourtant, je n'en ai mis que quelques gouttes.
- Tu en as mis dans celle de la reine aussi ?
- Oui, comme tu le sais, mettre du rhum dans mon thé à la cannelle, c'est ma spécialité. Mais je suis impressionné de voir que tu as senti le gout du rhum, tu dois avoir des sens très fins.
- Justement, cette petite expérience m'a donné des hallucinations et m'a fait entendre la voix de la reine de cœur. Comme la dernière fois que tu m'en a fait boire au pays des merveilles.
- Et qu'as-tu entendu cette fois ?
- J'ai entendu la reine et un de ses sujets discuter, elle a réquisitionné tous les dodos du pays et elle veut s'emparer de l'épée vorpaline. Elle essaye d'avoir des informations auprès de Mélissa par le biais de Linda, alors que sa mission à elle est de me protéger.
- Personne ne l'a laissera faire, et tu le sais très bien.
- Oui, mais elle me cherche quand même dans chaque monde que je visite, elle sème la terreur dans chaque village.
- Tu as le pouvoir de la nature, elle, elle ne le sait pas, c'est un avantage sur elle.
Je le regarde, les yeux un peu tristes. Certes, c'est un avantage, mais ça m'oblige à courir toujours plus vite. Nous revenons dans le salon auprès de la reine et reprenons nos places. Elle ne semble pas avoir gouter le rhum, ce qui signifie qu'elle n'est pas droguée. La saveur du rhum disparaît peu à peu de mon corps et je retrouve mes esprits. Le Chapelier s'adresse à la reine.
- En revanche, sachez majesté, que l'ordinateur de contrôle faiblit
- Ah oui ?
- Oui, comme toutes les machines, elles ne durent pas indéfiniment, les caméras de surveillances installés dans chaque royaume sont veilles.
- C'est l'avantage que nous avons, en tant qu'humains par rapport aux machines, c'est ce que nous savons comment nous remettre en forme et n'avons besoin de personne pour ça, alors qu'une machine a forcément besoin d'un mécanicien. C'est pour cela que je n'installe que des vieilles pièces de machine dans mon royaume. Elles ne sont plus en état de marche, mais elles apportent un petit côté rétro.
Je regarde la reine, curieuse d'en apprendre d'avantage.
- Sais-tu quel est le rôle des corbeaux ? J'ai été retiré de l'asile pour être enfermé dans un cabaret pour danseuses avec une de mes coéquipières, mais le directeur possède des corbeaux dans son bureau.
- Ce directeur, c'est aussi lui qui dirige l'asile et qui est un grand ami de la reine de cœur, non ?
- C'est ça. Mais comment le sais-tu ?
- Nous parlons entre souverains des royaumes, tu sais. La reine de cœur ne le sait mais nous avons des espions au pays des merveilles, comme ce très cher Chapelier Fou.
- L'autre jour, des corbeaux venant du bureau du directeur ont volés jusqu'à ma fenêtre. Ils semblaient vouloir me dire quelque chose.
La reine et le chapelier fou se regardent.
- Ils savent
- Ils savent quoi ? Que j'ai l'épée vorpaline ? Ou bien que j'ai ouvert le livre des 4 saisons ?
- Que tu détiens l 'épée vorpaline. Pour l'instant, personne ne sait que tu as ouvert ce fameux livre et que c'est toi qui bénéficie du pouvoir de chaque saison, il faut que ça reste ainsi.
La reine se lève alors et me prend par la main.
- Viens, Léna, il est temps pour toi de mettre ton pouvoir en connexion avec les miens
La reine m'entraîne avec elle et je n'ai pas d'autre choix que de la suivre. Elle m'emmène dans sa chambre et me laisse attraper ses mains. Sa magie se dissimule dans tout mon corps et nos esprits se connectent instantanément. Une lumière enveloppe nos deux corps et des frissons me font trembler. Abigail me regarde dans les yeux et me tiens les mains.
- Est-ce que tu sens les éléments de la terre venir à toi ? Et le pouvoir des quatre saisons ?
- Oui, je le sens dans tout mon corps.
- Alors, laisse-toi faire. La magie t'accepte et sent que tu as le cœur pur.
Nous restons un long moment comme ça, l'une en face de l'autre, et je me sens d'affection pour cette reine. Abigail me ramène ensuite dans le salon et le Chapelier se lève pour me prendre dans ses bras.
- Tu as l'air beaucoup mieux
- Merci
Abigail sourit
- Elle a été très sage au moment de la transmission des pouvoirs. Mais maintenant, elle va devoir apprendre des formules
- Comment ça ?
- Léna, tu ne penses quand même pas que la magie allait s'apprendre d'un seul coup ? Tes réponses sont dans les livres, les grimoires
- Où puis-je en trouver ?
- Dans une bibliothèque
- Laquelle ?
- Celle de ton asile, mais attention, tu devras être discrète. Personne ne doit savoir que tu es là.
- Le chapelier vient avec moi ?
- Non, il doit retourner au pays des merveilles pour surveiller la reine rouge.
Je lève les yeux au ciel en soupirant et, presque instantanément, le miroir apparaît devant mes yeux et sa surface qui me renvoi le reflet de la bibliothèque. Le Chapelier me sert une dernière fois dans ses bras.
- Sois prudente, et ne te laisse pas faire !
- Comme toujours.
Je lui souris une dernière fois avant de lui tourner le dos et de passer à travers le miroir. Pas de retour en arrière possible, cette fois.
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