8- Agression
⚠Certains passages peuvent heurter la sensibilité des plus jeunes vous êtes avertis⚠
Alors qu'elle traversait la ruelle principale, Karmen entendit des bruits lourds derrière elle. Elle comprit d'un coup qu'elle ne s'était pas montrée assez prudente ; seule à cette heure de la nuit, à quoi pensait-elle ?!
Elle accéléra le pas mais celui derrière elle allongea sa foulée, confirmant qu'il en avait bien après la jeune fille. Karmen abandonna tout faux semblant et se mit à courir le plus vite qu'elle put. Le souffle court, elle slaloma entre les échoppes en renversant des objets derrière elle.
Mais cela ne parut pas ralentir son poursuivant pour autant, dont Karmen ignorait encore l'identité d'ailleurs... Mais ce n'était pas non plus comme si elle allait prendre le temps de se retourner et de taper la causette.
Au détour d'une énième échoppe, elle se crut sauvée en renversant des cages pleines de légumes sur son passage. Mais en arrachant ces dernières au chariot, elle s'accrocha à un morceau de bois qui dépassait ! Avec son élan, cela la projeta à terre, permettant à son poursuivant de la rejoindre en quelques secondes...
Quand elle leva la tête, Karmen aperçut avec horreur le visage grinçant de...Bastien. Elle baissa la tête et ferma les yeux. Elle était perdue.
-Alors beauté on s'est perdue ? Railla le colosse.
Pour toute réponse la jeune femme cracha à ses pieds. Bastien fonça les sourcils, la saisit brutalement par les cheveux et la força à se relever brutalement.
-Joue pas à la maligne avec moi poupée, tu ne m'auras pas deux fois.
-Éloigne ton visage du mien tu pues chien ! Cria-t-elle, hors d'elle.
Loin d'obtempérer, il sourit d'un air goguenard.
-Chien ? Tu veux la jouer comme ça poupée ? Très bien on va jouer mais selon mes règles.
Une goutte de sueur coula le long du front de la jeune femme, qui tentait de garder un air calme, mais les masques ne semblaient en faire qu'à leur tête ce soir...
Bastien recueillit la goutte sur son doigt avant qu'elle ne s'écrase au sol, avec un air fasciné qui lui donnait en fait une allure de fou étant donné les circonstances.
-Tu trembles ? Quel bon début, si tu savait ce que j'ai en tête pour toi depuis la dernière fois !
-Je ne tremble pas devant les fils de putes, lâcha Karmen, consciente qu'elle ne s'en tirerait pas avec une petite pirouette cette fois.
Bastien ricana en renversant la tête en arrière, apparemment pas plus touché que ça par les insultes de la jeune femme. Il tira un peu plus fort sur sa prise et l'entraîna à sa suite sans plus de cérémonie.
Karmen ne doutait pas un seul instant de comment tout cela allait finir...Mais n'était-ce pas mieux ainsi au final ? Elle n'aurait qu'à penser à autre chose, en attendant la fin, qui vu sa situation actuelle serait une délivrance.
Son agresseur continuait de la traîner à sa suite, comme on tire sur le mord d'un cheval. Arrivé sous un porche, il la jeta d'un geste brutal à terre, où elle se réceptionna maladroitement.
-Alors beauté, jouons maintenant.
Sans hésitation, il défit la boucle de sa ceinture, et s'agenouilla sur Karmen pour la clouer au sol. Mais dans un élan de désespoir, elle tenta de se débattre une dernière fois.
-Lâche moi pauvre tache, enlève tes sales pattes de là chien dégage je te dis ! Hurla-t-elle en fureur.
Elle tenta de frapper partout où la cuirasse du soldat le permettait mais cela sembla sans conséquences... Au contraire cela l'amuser qu'elle se débatte, pour lui violer devait être plus amusant quand il était en position de domination...
Karmen sentit que les larmes commençaient à monter, elle se sentit tellement impuissante ! Son agresseur était presque parvenu à l'immobiliser, si elle ne trouvait pas vite une solution, elle finirait morte dans le caniveau au petit matin, considérée comme malheureuse victime d'un viol qui aurait mal tourné....
Et dire qu'elle avait lancé son couteau, sa seule chance de se sauver, à une inconnue qui avait disparue dans la nature après s'être échappée de son rendez-vous avec la mort ! Karmen en aurait hurlé de rage, mais cela aurait excité encore plus Bastien, qui cherchait maintenant à remonter ses jupons.
Sentant que la panique la gagnait, Karmen perdit ses moyens ; elle cogna de toutes ses forces contre le colosse, s'écorchant même les mains contre le bois. Mais Bastien se contenta de ricaner sauvagement, le regard illuminé d'une lueur lubrique.
Karmen baissa ses poings en sang, et tenta dans une dernière tentative de se rouler en boule et de hurler. Peut être que quelqu'un l'entendrait et viendrait à son secours, même si elle savait que cela représentait un faible espoir...
Grognant d'un air agacé, Bastien lui tira la tête en arrière et tenta de la repositionner comme il le souhaitait. Karmen hurla de toutes ses forces, de tout son être, pour tenter une dernière fois de signaler sa position.
Soudain, un morceau de bois énorme dépassa de derrière l'ombre du colosse, et vint frapper sa tête dans un bruit sec. Karmen se redressa en vitesse, alors que son agresseur s'effondrait à ses pieds avec une expression de surprise sur le visage. Elle s'éloigna de quelques pas et essaya de regarder son sauveur...
Ce regard métallique...Et le couteau ! C'était la vieille femme qu'elle avait secourue ! Une bûche dans une main et le couteau de Karmen dans l'autre, elle se tenait là, calmement en dévisageant la jeune femme traumatisée.
-Vous...balbutia-t-elle. Vous m'avez sauvé la vie. Merci. Merci.
-Désolée du retard, certains soldats étaient tenaces, répondit simplement ma doyenne. Viens mon enfant partons de là avant qu'il ne se réveille.
Assenant un énième coup de bûche sur la tête du soldat, l'inconnue entraîna Karmen à sa suite en lui tenant fermement la main, avec douceur. Encore sous es chocs des événements, la jeune femme se laissa faire, le regard dans le vague.
Arrivées au coin d'une ruelle sombre, elles rentrèrent dans une auberge faiblement éclairée par des torches. Sa sauveuse s'assit à une table derrière la voûte et fit signe à Karmen de faire de même. Dans un état second, celle-ci mit quelques instants à obtempérer, avec ses mains tremblantes qui ne parvenaient pas à saisir le dossier de la chaise.
La vieille dame commanda deux bières, et tendit la sienne à Karmen. Le regard perdu au loin, celle-ci prit la chope et but goulûment à longues gorgées la liqueur, qui la réveilla un peu.
-Très joli lancer ce matin, lança la doyenne, le sourire aux lèvres.
-Je ne sais pas moi même pourquoi je l'ai fait, expliqua Karmen. Juste...votre voix, encore pleine d'espoir alors que vous étiez sur le point d'être pendue...Je ne sais pas...Ça ne m'a pas laissée indifférente.
La vieille femme rigola doucement en baissant la tête.
-Je n'avais pas l'intention de les laisser me pendre, j'attendais juste la bonne occasion pour partir, et tu me l'a fournie.
Karmen lui sourit franchement, vidant les dernières gouttes de bière.
-Dans ce cas je suis heureuse d'avoir pu vous aider madame.
-Oh appelle moi Iris. Je n'aime pas toutes ces formules de madame je ne sais quoi.
-Très bien Iris. J'aurai une question à vous poser cependant ; pourquoi vous ont -ils condamné, je veux dire vraiment ? Tout le monde sait que la sorcellerie n'existe pas.
-Oh...c'est une longue histoire...répondit-elle en détournant le regard.
Karmen fronça les sourcils. Pourquoi ne lui répondait-elle pas ?
-Et donc ? Insista-t-elle
-Avant de connaître l'histoire des autres Karmen, il faut d'abord connaître la sienne.
La jeune femme hoqueta : elle ne lui avait jamais dit son prénom ! Comment le connaissait-elle ?
-Oui je sais ce que tu vas dire, enchaîna Iris sans lui laisser le temps de répliquer, mais tu dois m'écouter, nous disposons de peu de temps. Je vais répondre aux principales questions que tu dois te poser : oui je te connais, je te connais même depuis enfant, mais quand tes parents sont morts – oui j'étais amie avec eux aussi – j'ai été chargée de veiller sur toi. Mais nous avons été séparées, et mon frère, que tu as déjà croisé à ce que j'ai compris, nous a rejointes à la capitale pour garder un œil sur toi.
-Mais...tenta Karmen.
-Non écoute moi. Tu a tilté ce matin quand on s'est regardées car nous nous étions déjà vues, alors que tu n'étais qu'une enfant. J'étais chargée de veiller sur toi et j'en ai été empêchée, et je m'en excuse vraiment, Karmen, je t'ai laissée seule et tu as du tout construire, sans même savoir que je devais veiller sur toi...Je n'ai jamais pu te le dire. Je suis désolée.
Karmen ne sut quoi répondre...C'était trop pour un seul soir ! Alors comme ça elle aurait pu avoir une vie meilleure ? Avec quelqu'un à ses côtés sur qui compter ? C'était inimaginable.
-Je...suis perdue, réussit-elle simplement à dire. Je n'ai jamais pensé que...enfin vous voyez.
-Je sais mon enfant, pardonne moi, j'étais coincée en prison, pendant toutes ces années je ne savais rien de ce qui t'arrivait...Émile était chargé de veiller sur toi à ma place, mais il ne devait pas s'approcher trop...
-Émile ?
-Mon frère. Il a rejoint la capitale plus tard, mais étant déjà chassé par les gardes il a du rester discret...Il te suivait partout. Mais sans possibilité de te parler.
-Hormis le soir où il m'a mise en garde contre Bastien, compléta Karmen. Je me disais bien que vous aviez les mêmes yeux. Ce bleu métallique... On en rencontre rarement.
Iris sourit tendrement à sa protégée, lui prit la main et la serra fort.
-Maintenant nous sommes ensemble, et nous allons rattraper le temps perdu. Je suis là Karmen. Nous sommes là. Ensembles.
-Je....merci, balbutia la jeune femme, encore sous les chocs des révélations. Et que faisiez vous en prison ? Je doute que sorcellerie soit la vraie raison !
-C'est assez compliqué, je t'expliquerai tout demain, pour le moment tu as juste besoin d'une bonne nuit de sommeil... Nous devrons aussi trouver une solution contre Bastien.
-Il...il était à deux doigts de me violer...je mettrais du temps à m'en remettre...Je ne ne dois jamais le recroiser je ne le supporterai pas.... sanglota soudainement Karmen.
Elle prit sa tête entre ses mains et laisser filer les larmes qui s'accumulaient depuis un long moment... Cela faisait du bien. Plus de masques encore une fois. Respectueuse, Iris ne chercha pas à intervenir, gardant le silence. Quand elle se sentit mieux, la jeune fille releva la tête en reniflant doucement, et essuya les traces creusées dans ses joues par les larmes. Elle rassura son amie d'un petit sourire et regarda autour d'elle : tout ce gens paraissaient si paisibles, sans souci...
Elle ne se sentait plus très bien à sa place. Alors qu'elle se levait pour partir, un grand fracas retentit à l'étage : des cliquetis d'armures parvinrent rapidement aux oreilles des deux jeunes femmes ; inquiètes,celles -ci se regardèrent. Si jamais c'était pour elles il ne leur restait aucune option, elles étaient dans le fond de la taverne, sans issue de ce côté.
Les soldats, assez nombreux apparemment apostrophaient les clients sans aucune douceur. Karmen remarqua la paire de bottes qui descendaient l'escalier ; d'un cuit rouge, elles semblaient appartenir à une haute tête de l'armée. L'homme finit de dévaler les marches, et fouilla la salle du regard : il faisait encore dos à Karmen, mais celle-ci se pétrifia.
L'homme gardait la main collée contre son crâne, mais on voyait clairement du sang s'écouler entre la jointure de ses doigts. Karmen revit en un flash le formidable coup porté par Iris à Bastien... Lorsqu'il se retourna pour regarder la partie de la salle où se trouvaient Karmen et Iris, elle n'eut plus aucun doute. Le regard meurtrier de Bastien la foudroya sur place.
Reculant jusqu'au mur, la jeune femme comprit qu'il l'avait repérée et qu'elle n'avait plus aucune chance. Mais il ne connaissait pas Iris ! Penchant la tête en avant comme par peur, elle souffla à la doyenne derrière elle ses instructions.
-N'intervenez pas.
Elle entendit son amie saisir sa choppe et remonter à l'étage, et vit que Bastien ne l'avait pas remarquée. Ce serait sa seule victoire aujourd'hui apparemment. Karmen se composa un masque de terreur et garda la tête baissée.
Elle sentit son souffle rauque contre sa nuque lorsqu'il s'approcha d'elle. Mais pour une fois il garda le silence, ce qui inquiéta encore plus la jeune femme. Elle fut d'un coup projetée à terre par une gifle monumentale, et sentit le sang couler contre sa joue. Quand elle plaqua sa paume contre, elle ne sentit aucune plaie et en déduisit que c'était le sang de la blessure de son agresseur.
Elle fit l'erreur de lever les yeux, et se reçut une deuxième gifle, du revers de la main. On aurait dit que c'était la violence même qui animait le soldat au moment présent...Karmen avait eu le temps de lire dans son regard tellement de haine et de colère qu'elle n'avait pu s'empêcher de blêmir.
Cette fois ci c'était sûr que cela allait très mal finir.... Pour elle. Quelques larmes lui échappèrent, mais Karmen ne put retenir un sanglot : elle avait cru, vraiment cru, que tout allait s'arranger pour elle. L'arrivée de Iris, sa seconde fuite face à Bastien...Elle avait fait l'erreur de croire que tout cela était le symbole d'un nouveau départ.
Mais comme souvent ces derniers temps, elle n'avait fait qu'espérer en vain. Une autre gifle l'interrompit dans ses réflexions et la projeta à terre, contre un poteau en bois.
La jeune femme sentit un objet froid et dur cogner contre son crâne...Très vite elle sentit le sang s'écouler contre son cuir chevelu, jusqu'à son menton. Lorsqu'elle voulut tourner la tête par réflexe pour identifier ce qui l'avait blessée, Bastien l'en empêcha en lui tirant sur les cheveux pour qu'il la regarde : il n'avait toujours pas soufflé un seul mot.
A ce moment, Karmen se rendit compte que les coups de son agresseur avaient effrayé les clients, qui avaient déserté leurs tables. Tout était vide maintenant, et elle était à la merci de Bastien. Mais ce dernier semblait plus dans une quête de vengeance que dans l'idée de la violer. Karmen n'aurait su dire si c'était bien ou mal.
Mais en ce moment, de telles pensées étaient déplacées étant donné que Bastien se contentait de la frapper encore et encore. Karmen avait l'impression que sa tête allait exploser... Le sang coulait abondamment contre sa joue droite, et commençait à former une flaque par terre. Et Bastien la frappait toujours. Elle allait y passer !
Soudain tout se mit à tourner autour de Karmen, elle sentit ses jambes se dérober, et elle s'affaissa à terre. La pièce tourbillonna un instant au dessus d'elle, jusqu'à ce que tout devienne noir...Elle sentit encore quelques coups mais sentit son esprit glisser.... Jusqu'à la perte de conscience.
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