53 (2)-Retour
**Attention ceci est le deuxième segment du chapitre 53, si tu n'as pas lu le premier ne vient pas te spoiler et lis le précédent!**
Elle ouvrit les yeux à moitié et les referma aussitôt face à l'éclat du soleil qui l'avait tirée de son sommeil. Elle s'étira langoureusement, mais surprise de ne sentir aucune résistance derrière elle, la jeune femme s'assit dans le lit et regarda autour d'elle. La pièce était déserte, elle était seule dans les draps. Anxieuse, elle imagina aussitôt tous les scénarios possibles : Coyle avait-il regretté leur étreinte et s'était-il enfui ? Ou alors s'était-elle tout simplement levée trop tard ?
Elle repoussa le drap et la fourrure qui lui avait tenu chaud toute la nuit et se leva d'un bond. Mais vêtue toujours de la même chemise, le froid qui rentrait par une fenêtre ouverte au fond de la pièce vint mordre sa peau d'un coup. Frissonnant, elle s'enveloppa dans la veste en velours de Coyle qui était pendue à une chaise.
Elle referma la col et se dirigea vers la fenêtre récalcitrante avant de mourir de froid. Alors qu'elle venait d'abaisser le loquet bloqué, une voix retentit dans son dos, la faisant sursauter.
-Tu ne devrais pas prendre l'habitude de lui prendre ses vêtements ou sinon tu vas nous arriver vêtue comme à un homme au prochain banquet !
-Logan !
Adossé contre le mur près de la porte, il abordait son éternel air nonchalant provocateur. Elle se dirigea vers lui et tenta de le frapper pour se venger de son intrusion gênante, mais il évita habilement le coup.
-Tu développes un amour pour le port du haut uniquement ? Railla-t-il en louchant son la chemise qui dépassait de la veste.
-Tu ne cesseras donc jamais de m'embêter toi...
-Trop tentant. Allez habille toi un peu avant que quelqu'un ne nous trouve dans cette situation embarrassante et dieu sait combien compromettante.
-Mmh, attend moi là. D'ailleurs qu'est-ce que tu viens faire ici ? Déclara-t-elle en marchant vers la salle d'eau.
-Je joue au messager ce matin.
Karmen se retourna sur le pas de la porte en s'appuyant contre le battant.
-Comment ça ?
-Coyle te prie de l'excuser, il a des..euh problèmes à régler et n'a pas pu rester ce matin. Il a dit qu'il allait repasser, mais pas avant un moment.
Karmen allait rebondir sur la dernière partie de sa phrase, lorsque l'accent mis par Logan sur le mot « problèmes » résonna en elle. Il n'avait tout de même pas...
-Dit moi qu'il n'est pas allé régler son compte au roi Étienne par pitié... chuchota-t-elle.
-Et bien...Disons que je le lui ai fortement déconseillé cette solution, si ça peut te rassurer il a eu l'air de se ranger à mon avis, mais après je pars du principe qu'on ne sait jamais vraiment ce qui se passe dans sa tête !
Malgré elle, la jeune femme lâcha un petit rire face aux paroles du meilleur ami de l'homme qu'elle aimait. Il n'avait pas tord, qui aurait pu prédire une seule action de cette tête de mule ? Personne, absolument personne et pas même elle. C'était comme demander à un aveugle de lire, on savait avant même d'essayer que ce serait un échec.
-D'accord je vois...J'espère vraiment que tout ira bien, qui sait ce que Étienne peut demander contre moi...
-Quoi qu'il fasse on ne le laissera pas faire tu as ma parole, affirma l'homme en la regardant droit dans les yeux, l'air sérieux pour une fois.
-Merci.
Elle ferma la porte derrière elle, et eut le plaisir de découvrir qu'un bain avait été rempli pour elle, et qu'il était encore fumant. Elle s'y plongea sans plus de cérémonie et entreprit de laver sa peau le mieux possible. Aujourd'hui était un nouveau jour, tout pouvait recommencer ou se finir, mais qu'importe au moins elle serait propre.
Riant seule face à la stupidité de ses pensées, elle sortit du bain et se prépara rapidement, mais délaissa volontairement le corset qui l'insupportait plus qu'autre chose, aussi que tous les artifices qui visaient à modifier sa silhouette. Naturel serait son maître mot.
Dans l'autre pièce, Logan l'attendait toujours, les bras croisés. Lorsqu'elle se montra, il ne put retenir une énième pique :
-Alors comme ça on veut aller contre les codes vestimentaires ?
-Tu veux que je te fasse essayer un corset ? Fallait le dire plus tôt ! Répliqua Karmen en faisant mine de repartir en arrière.
-Non, non ça ira !
Les mains levées, il signa sa capitulation devant le sourire moqueur de Karmen. Elle retourna dans la pièce et détacha ses cheveux tout emmêlés.
-Vous les hommes, n'avez vraiment pas idée de ce qu'on doit subir nous autres les dames. Les corsages, les robes étouffantes et les coiffes à n'en plus finir...
-Et je ne me plains pas d'y échapper bien au contraire.
-En parlant de t'échapper...(elle se retourna pour lui faire face) Va-t-en retrouver Mona, tu n'as rien à faire avec moi, je vais juste emmener Lina à la roseraie je pense.
Il la fixa d'un air surpris, l'air de ne pas trop savoir comment réagir pour une fois. Karmen savait que Mona avait besoin de lui, et le retenir à ses côtés pour traverser des jardins était tout à fait inutile.
-Tu..Tu es sûre ?
-Puisque je te le propose. Allez file !
Sans plus en demander, Logan la salua d'un air reconnaissant et partit en coup de vent. La porte claqua derrière lui et le silence revint régner dans la pièce. La jeune femme venait d'avoir l'idée d'emmener sa petite protégée aux jardins, depuis quelques temps elle ne la voyait pas assez et elle ne voulait pas la délaisser. Elle passa ses doigts dans ses boucles dans le but de les séparer un peu, mais elle abandonna devant la difficulté de la tâche.
Elle vérifia l'attache de son collier qu'elle ne quittait plus et sortit de la chambre aussi précipitamment que Logan quelques minutes avant elle. Elle n'eut aucun mal à trouver la petite, occupée à la laverie avec d'autres servantes plus âgées. Toutes s'inclinèrent devant elle comme devant une dame, et la jeune femme rougit devant leurs courbettes, après tout elle venait du même milieu qu'elles...
Elle les salua respectueusement et entraîna Lina à sa suite, ignorant ses questions à répétition.
-Où est-ce qu'on va ?
-Je n'avais pas fini comment je vais faire ?
-Karmen ?
-J'ai fais quelque chose de mal ?
La jeune femme tourna la tête vers elle à la dernière question, interloquée.
-Non bien sûr que non ! Je veux juste te faire une surprise mais ce n'en sera pas une si tu continues avec toutes tes questions chipie alors tais-toi et suis moi ! La rassura-t-elle.
-Oh..
L'enfant arrêta enfin de blablater et la suivit sans rechigner. Elles atteignirent l'allée qui menait à la roseraie plusieurs dizaines de minutes plus tard, à cause de la petite qui s'extasiait devant tout ce qu'elle voyait. La manière dont étaient taillés les buissons, en passant sur les fleurs pour finir sur les oiseaux sauvages, tout était source d'un petit rire ravi ou d'un cri émerveillé.
Attendrie devant l'innocence de l'enfant, Karmen se laissa aller à son tour et lui fit partager tout ce qu'elle savait sur l'herbologie. Elles passèrent un agréable moment ainsi, perdues entre les allées, jouant à cache cache entre les pommiers.
Elle l'emmena ensuite à la roseraie, que la petite ne voulut plus quitter ensuite. Lorsqu'elle arriva enfin à l'arracher à sa contemplation des plants, la petite la supplia sur tout le chemin du retour.
-On y retourna hein ? Karmen tu m'emmèneras à nouveau là-bas promis ?
Incapable de résister à sa petite bouille d'ange, la jeune femme acquiesça et fut récompensée par un magnifique petit sourire tout plein de dents. Arrivée devant le dortoir de sa protégée, elle réalisa qu'il s'était écoulé beaucoup plus de temps qu'elle ne pensait. Le soleil déclinait déjà, et il était déjà trop tard pour songer faire une apparition à la cour.
-Lina, tu pourras demander à ce que l'on me porte un repas s'il-te-plaît ? Si tu es trop fatiguée demande à quelqu'un d'autre ce soir, ce n'est pas grave.
-Non je viendrais moi !
-D'accord, si tu veux, on se revoit tout à l'heure ma belle.
Sautillant de partout, l'enfant rentra à l'intérieur de la pièce et Karmen repartit en direction de sa chambre. Seulement lorsqu'elle ouvrit la porte, une silhouette sur sa gauche attira immédiatement son attention. Attablé à son bureau, Coyle était penché sur des documents et ne semblait pas avoir remarqué sa présence.
Son cœur se gonfla à l'idée qu'il revienne dans la chambre pour travailler, comme au début de leur relation, avant que tout ne se complique. Les choses n'étaient-elles pas en train de rentrer dans l'ordre ?
Elle s'avança dans la pièce et l'homme face à elle leva enfin la tête vers elle. Le regard indéchiffrable, il hocha vaguement la tête avant de retourner à ses papiers. Interloquée, Karmen pensa d'abord que c'était en rapport avec elle, mais le pli entre les sourcils froncés de Coyle lui indiqua qu'il était préoccupé.
Elle préféra donc s'occuper de son côté, et partit dans la pièce adjacente ranger quelques fioles qui traînaient. Mais seulement voilà, le savoir si proche d'elle sans qu'ils se parlent était étrange. Elle avait ce sentiment qu'il manquait quelque chose, que ce n'était pas complet.
Lorsqu'elle eut rangé la moindre petite babiole qui traînait, elle n'eut pas d'autre choix que de retourner dans la même pièce que lui. Toujours attablé avec cet air concentré, il ne leva pas la tête, mais elle n'aurait su affirmer si c'était parce qu'il l'ignorait ou si c'était parce qu'il ne l'avait pas vue.
-Qu'est-ce que tu fais ?
-Ça ne se voit pas ?
Il avait l'air tendu. Elle résista à la tentation de le rembarrer avec une pique cinglante, et s'approcha plutôt de lui. Karmen se plaça derrière sa chaise et passa ses bras autour de son cou en se penchant contre lui. Il ne prononça pas un seul mot et continua de lire. Elle jeta un coup d'œil par dessus son épaule.
« Depuis quelques temps les rumeurs sur diverses trahisons circulaient dans le palais, mais jusqu'à cet événement de fuite on n'avait jamais eu aucun retour concret. Le roi ne s'est pas étendu sur la question et s'est empressé de nommer de nouveaux conseillers ainsi que le prévoit le... »
-Rien de bien passionnant, déclara soudain Coyle en avisant de son lecteur fantôme.
-Qu'est-ce que c'est ?
-Des témoignages liés à une fuite de conseillers assassinés quelques mois plus tard. Je suis tombé dessus aux archives et ça ne me sort plus de la tête.
-Tu m'y gardes une place hein...
-Tu es toujours là, ne t'en fais pas. Gronda Coyle en caressant brièvement son avant bras posé sur son torse.
Souriant d'un air niais, Karmen dépose un rapide baiser sur sa tempe et se redressa. Du moins elle amorça le mouvement pour le faire, puisque Coyle la retint fermement en l'empêchant d'aller plus loin.
-Viens par là toi.
Il l'attira face à lui et l'assit sur ses genoux. Heureuse qu'il tienne enfin compte de sa présence, la jeune femme ne se fit pas prier et effectua une rotation de manière à s'asseoir à califourchon sur lui.
Il passa une main dans ses cheveux d'un air absent, le regard perdu au loin. Karmen le sentit soucieux, sans parvenir à se décider de lui demander pourquoi. Dans ce genre de cas il n'y avait jamais rien à tirer avec lui, il se renfermait et ne parlait pas. Malgré le peu de distance qui séparait leurs corps respectifs, elle sentit que ce n'était pas le moment d'être tendre, ça se sentait.
Il inclina soudain sa tête, et la posa contre la poitrine de la jeune femme. Comme un enfant avec sa mère lorsqu'il tombe de sommeil. Il expira longuement, ce faisant l'air qu'il souffla vint chatouiller le décolleté de la jeune femme, qui lâcha un petit rire cristallin. Il embrassa sa peau crémeuse avant de redresser la tête, un petit sourire flottant sur ses lèvres.
-Ma dose de bonheur quotidienne...souffla-t-il.
-Tu ferais bien d'y prendre goût !
-Qu'est-ce qui te dit que ce n'est pas déjà fait ?
Elle lui lança un regard malicieux, mais ne répondit pas. Le regard qu'ils échangèrent suffisait amplement à tout dire. Karmen resta encore un moment son regard plongé dans le sien, mais finit par rompre le contact avant de perdre le contrôle. Comment des iris bleues d'acier pouvaient-elles faire autant d'effet sur tout son organisme ?
Quand elle le regardait, une boule d'appréhension et d'envie se formait en elle, son cœur s'affolait et sa gorge devenait aussi sèche qu'une fleur au milieu d'une saison de sécheresse. Était-ce cela avoir besoin de quelqu'un ?
-Allez, finis vite ton travail que je puisse t'avoir entièrement à moi !
-J'en peux plus pour aujourd'hui.
-Oh mais si, ça a l'air de te tracasser. Voyons, qu'est-ce qu'on a là...
Elle se saisit d'une feuille au hasard, et la brandit pour lire à haute voix :
-Les dénommés Anna et Rodric Nagilo ont été...Quoi ?
Sa voix grimpa dans les aigus d'un coup. Elle plaqua sa main contre sa bouche, et se remit debout en tremblant de tout son corps, la feuille toujours à la main. Non, c'était impossible !
-Tu as dit que c'était deux conseillers qui s'étaient fait assassiner c'est ça ? Décréta-t-elle d'une voix tremblante.
-Oui c'est bien ça, pourquoi est-ce que ça te met dans un tel état ?
-Où sont-ils allés. Coyle dis moi si tu sais où ils se sont enfuis ! Hurla-t-elle en brandissant la feuille.
Interloqué, l'homme face à elle se leva à son tour.
-A Tosale je crois. Mais Karmen bon sang qu'est-ce qu'il se passe ?!
Mais l'air horrifié, la jeune femme hoqueta et se détourna sans répondre. Chancelante, elle se précipita dans la salle de bain, dont elle ferma le verrou. Elle ne put retenir un vomissement, et se pencha au dessus d'un bac d'eau proche. Elle eut l'impression qu'on venait de la vider de tout ses organes.
Ça ne pouvait pas être ce qu'elle croyait ! Les yeux embués de larmes et l'estomac en vrac, elle s'effondra au sol, la feuille toujours serrée dans son poing crispé. De l'autre côté de la porte, Coyle tambourinait de toutes ses forces, depuis le moment où elle s'était mise à vomir.
-Karmen ! Ouvre ! Qu'est-ce qu'il se passe ?!
Coucou!
J'attends vos spéculations.
Je préviens à l'avance, il n'y aura pas d'autre chapitre avant le bac blanc, et après ça devrait reprendre :)
Xoxo
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top