25- Bain de minuit

Après s'être assuré que personne ne les avait vus dans le couloir, Coyle saisit délicatement la main de sa protégée et l'entraîna dans un dédale de longs couloirs. Même si elle tenta au début de mémoriser les lieux, la jeune femme abandonna bien vite...

Coyle la fit attendre devant les cuisines, où il prépara un panier de nourriture pour leur repas. Karmen le regarda empiler les aliments avec peine dans le panier en osier, sans venir l'aider – il aurait été trop fière pour admettre qu'il avait besoin d'aide.

Après être repartis ils débouchèrent ensuite sur un grand couloir, au bout duquel on apercevait les vitres d'une immense véranda. Celle-ci donnait sur les fameux jardins que Karmen admirait chaque jour depuis sa chambre.

Les voir en vrai était vraiment quelques choses d'autre...

-C'est tellement paisible, fit-elle dans un souffle.

-Oui c'est apaisant, ces jardins sont très bien entretenus.

-C'est si dommage que personne n'y vienne jamais...

Coyle tourna la tête vers elle un bref instant, mais ne la regarda pas dans les yeux.

-C'est compliqué en fait...Le roi a interdit qu'on y accède, seul lui en a le pouvoir.

-Mais si jamais quelqu'un nous voyait...s'exclama Karmen en stoppant nette sa marche.

-Aucun risque, à cette heure-ci il n'y a personne, la rassura Coyle.

-Je ne...

-Arrête de t'en faire.

Karmen capitula, mais ne put s'empêcher de rester sur ses gardes : elle n'avait pas très envie d'être découverte ici... Après quelques minutes de marche silencieuse, ils arrivèrent devant un grand bassin qui débordait sur un balcon, avec une vue imprenable sur la mer.

-On va se baigner ici, annonça Coyle en retirant sa chemise.

Déglutissant avec peine, Karmen fixa un peu plus longtemps que prévus les abdominaux fermement dessinés sous sa peau. Ce que l'homme face à elle ne manqua pas de remarquer.

-Je ne vous gêne pas trop ? Railla-t-il.

Automatiquement, Karmen se mit à rougir, et baissa la tête pour éviter le regard ardent de l'homme qui lui faisait face, et qu'elle était à deux doigts d'embrasser plus tôt dans la soirée.

-Je vais...enfin tournez vous, fit-elle.

Un sourire moqueur sur le visage, il s'exécuta tout de même, pendant que Karmen faisait tomber ses couches de vêtements une à une pour rester avec ses sous-vêtements. Elle rentra dans l'eau froide sans sourciller puis l'invita à la rejoindre.

-Oulala c'est froid, grimaça-t-il en entrant dans l'eau.

Karmen lâcha un petit rire et le regarda du coin de l'œil.

-On a pas tous la chance d'évoluer avec des bains chauds chaque soir ! Moi par exemple, je le lavais avec une bassine, tous les matins, et avec de l'eau encore plus froide que ça !

Coyle écarquilla les yeux en tournant la tête vers elle.

-Non c'est pas vrai tu me fais marcher !

-Mais non je te jure ! En ville c'est un autre monde.

Coyle ne répondit pas, perdu dans ses pensées. En effet, il n'avait jamais vécu dans de telles conditions...

Karmen, de son côté, remercia le ciel qu'il ait tourné la tête, elle était devenue cramoisie à la vue de ses lèvres... S'il avait vu cela aurait été très gênant.

Pour oublier tout ça, elle plongea la tête sous l'eau et frotta les restes de potage contre sa peau diaphane. Le contact mordant de l'eau froide contre sa peau lui remit rapidement les idées en place : elle était juste une fille du peuple, elle n'avait pas à avoir de telles pensées vis-à-vis d'un fonctionnaire royal.

Lorsqu'elle ressortit la tête de l'eau, elle remarqua que Coyle s'était approché du rebord et qu'il contemplait l'horizon sombre. Elle s'approcha derrière lui en nageant et s'accoudant à quelques mètres de lui.

-C'est si calme...souffla-t-elle.

-Ça ne l'est presque jamais.

Karmen sentit qu'il glissait un autre sens sous cette phrase mais ne parvint pas à saisir lequel. Elle continua à découvrir l'horizon en silence : devant elle s'étendait une baie magnifique, bordée par une plage immense. De là où elle était elle ne voyait pas les détails mais elle aurait parié que les masses sombres en contrebas étaient des bosquets fleuris, comme ceux des jardins.

-J'ai trouvé une solution pour Mona, déclara soudainement l'homme à ses côtés.

Le cœur de Karmen manqua un battement : déjà ! Il avait réussi !

-Oh non c'est pas vrai ! Cria-t-elle en souriant.

Coyle fronça les sourcils et lui fit signe de se taire, et continua.

-Elle est femme de chambre dans l'aile nord à présent. Celle qui donne sur l'entrée du palais, elle s'occupe des visiteurs de courte durée du palais.

Incapable de se retenir, Karmen sauta au cou de Coyle : bien que surpris, celui-ci lui rendit son étreinte de manière formelle mais sans trop s'appesantir dessus. Consciente du malaise qui s'était formé, Karmen s'écarta délicatement et replaça une mèche de cheveux derrière son oreille.

-Merci beaucoup, je ne sais pas quoi dire...

-Ce n'est rien, mais il y a cependant une condition à respecter pour le moment.

Karmen l'invita à continuer du regard.

-Tu...enfin ça va te paraître bizarre, mais il ne faut pas que tu la voies pour le moment.

-Pourquoi ? Gémit Karmen en le suppliant avec ses yeux de biche.

-Ta résidence au palais est confidentielle, et tu es dans l'aile sud, Mona ne pourra pas venir, et toi il ne vaut mieux pas que tu sortes, tu serais arrêtée tout de suite.

-Je comprends, murmura Karmen en baissant les yeux sur la surface de l'eau.

Coyle lui sourit un bref instant et continua en fixant l'horizon devant lui.

-On verra plus tard mais pour le moment c'est une mauvaise idée.

-Mmmh...

-Pour tes autres amis, je n'ai pas encore eu le temps mais je pense y arriver. Je te tiens au courant.

Karmen hocha la tête, déjà bien assez contente pour aujourd'hui. Mona n'avait pas dû comprendre pourquoi elle sortait de prison, mais la jeune femme espérait juste qu'elle était heureuse.

-Viens, on va manger.

Karmen sortit de l'eau frigorifiée, et enfila un châle le temps que ses autres vêtements sèchent. En attendant, Coyle avait déjà disposé leur pique-nique sur la nappe. Le repas se fit en silence, chacun fixant la mer. Karmen ne sentit pas les aliments passer, elle mangeai mécaniquement, sans arriver à apprécier les goûts qu'elle avait en bouche. Elle était préoccupée, sa vie prenait une tournure tellement inattendue ! D'abord son renvoi de l'école, puis sa fuite face à Bastien, la rencontre avec Mona, les garçons...Mais surtout cette fameuse nuit où Coyle l'avait tirée des griffes de ce monstre...

Depuis elle vivait dans un autre monde, où tout était « luxe, calme et volupté » comme le disait un poème qu'elle avait lu une fois... Mais ce conte de fée avait-il une fin ? Quand cela s'arrêterait-il et comment ?

-Il faudrait peut-être rentrer ? Suggéra-t-elle en sortant de ses pensées.

-Bonne idée, nos vêtements doivent être secs maintenant.

Karmen remit sa tunique, passa ses jupons mais garda le reste de ses vêtements sur le bras ; après tout dans quelques minutes, elle serait couchée.

C'était sans compter sur les patrouilles de gardes : très nombreuses à chaque couloir, ils durent faire de multiples détours pour parvenir à la chambre, ce qui provoqua des crises de fous rires incontrôlables chez la jeune femme, perdue dans ce labyrinthe.

-Mais fermez la à la fin ! Chuchota Coyle d'une voix bourrue mais néanmoins amusée.

-Vous devriez voir votre tête ! Pouffa-t-elle une main devant la bouche.

-Mais stop !

-Arrêtez d'angoisser il n'y a personne !

Comme pour lui donner tord, un soldat déboucha à l'autre bout du couloir, lance en main. Aussitôt Coyle réagit en tirant Karmen dans un recoin sombre. Mais malheureusement lorsque le garde passa à côté d'eux, la jeune femme ne put s'empêcher de lâcher un petit rire : instantanément, le soldat s'arrêter et pivota sur lui même pour déterminer l'origine du bruit.

Coyle avait plaqué sa main contre la bouche de la jeune femme, maintenant à deux doigts de partir en fou rire incontrôlable. Heureusement pour lui le garde continua son chemin sans trop chercher.

-Vous êtes totalement inconsciente, chuchota-t-il d'une voix énervée dès qu'il fut parti.

-Hihi je m'en moque, ahana la jeun femme en tentant de reprendre son souffle.

Coyle grogna mais ne répondit rien ; elle était déjà loin de le pays de la bêtise ce soir... Ils regagnèrent leur chambre en silence, enfin presque si on ne comptait pas les éclats de rire soudains de la jeune femme, impossible à stopper.

L'homme borda la jeune écervelée, ne répondit pas à ses suppliques de faire un cache-cache dans le palais de nuit – non non ça ira je suis fatigué – et partit se coucher à son tour, amusé par le comportement enfantin de son invitée.

Hello alors aujourd'hui c'est un chapitre calme avec peu d'action mais une bonne nouvelle pour Mona. 😌

Vous le sentez comment ce début de vie en tant que femme de chambre pour elle?😛

Coyle et Karmen?😏

Xoxo😘

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