Tome 2-Ch 38-Damien
Alors que ma mère et Mélanie rendent visite à Elisa, Connor, Logan, Eden et moi préparons la maison. Je sais qu'on avait dit que les travaux de peinture seront faits plus tard dans l'année, mais il faut que je m'occupe pour éviter de penser. Parce que penser à tout ce merdier me rend malade, parce que si l'autre tête de con n'était pas en taule, je l'étriperais de mes propres mains.
Je suis certain qu'il va déployer sa horde d'avocats véreux, mais je ne flancherais pas et j'emprunterais même pour avoir le meilleur qu'il puisse exister dans ce pays. L'argent ne résout pas tout, fort heureusement, et je compte bien lui faire payer un maximum, à hauteur des emmerdes qu'il nous cause depuis le début.
La haine ne faiblit pas, ma colère ne redescend pas non plus. L'image de ma femme allongée sur ce brancard, couverte de sang me hante chaque nuit, à chaque fois que je suis loin d'elle.
Les journaux télévisés ne cessent de relater la vie de celui qui me sert de frère, celle du couple qu'il formait avec Elisa, pas si heureux qu'ils voulaient le faire croire, à la chute de l'empire de Burn & Cie. Parce que leur faillite met aussi les actionnaires dans un sacré merdier, et d'un côté, je ne peux que m'en réjouir : au lieu de nous faire chier et de chercher à comment m'atteindre le plus possible, il n'avait qu'à mieux gérer son entreprise et à voir là où la concurrence devenait féroce.
— Ça va, mec ?
Respire, Dam...
— Et toi ?
Connor me sourit franchement et fait un signe de tête vers le gamin de Mélanie. Agée de sept ans, il ressemble à sa mère comme deux gouttes d'eau. Il est en train de montrer à Eden ses petites voitures, les faisant doucement rouler sur le tapis de jeux, sur lequel ils sont tous les deux couchés.
— Il va adorer avoir un p'tit frère ou une petite sœur, déclaré-je en continuant à tracer le contour du mur avec mon pinceau.
— Oh oui, c'est clair. D'ailleurs, même moi j'aurais voulu avoir un frangin, ou bien une frangine à protéger.
— Tu m'as eu moi, me moqué-je, c'est tellement mieux.
Connor rigole en trempant son rouleau dans le bac de peinture chocolat.
— Ouais, c'est certain. Tu te rappelles quand on a piqué les clés de la caisse de ta mère ?
J'éclate de rire. Evidement. Comment oublier cette virée nocturne alors que ma mère appelait déjà tous les flics de la ville en pensant que sa bagnole pourrie ait été volée.
— On s'était bien marrés.
D'ailleurs, dès que nous sommes ensemble, on s'amuse. Même quand nous allions nous entraînés à la salle de sport, on s'éclatait entre deux poussées de fontes. Il est le frère que j'aurais adoré avoir, mon frangin de cœur. Notre lien n'a rien à voir avec celui que j'ai avec Alexandro, et ça, depuis notre rencontre sur le perron de sa baraque de ville.
Le destin fait des fois de bonnes choses, et cette rencontre entre nous a été une des meilleures qu'il a fait pour moi.
Connor est mon ami, mon frère de cœur, mon frère d'armes, aussi et c'est tous les deux, ou rien du tout. Dans presque tous les domaines de la vie.
∞
Samedi, quatorze heures trente exactement. Elisa sort aujourd'hui, après deux longues semaines d'hospitalisation qui m'ont paru interminables. Gérer un bébé, c'est beaucoup plus compliquer que de gérer une troupe de soldats. Eden a pleuré, beaucoup, hurlé, énormément, et j'avoue que bien souvent, perdu face à ses larmes inconsolables, j'ai failli chialer, moi aussi. Je crois d'ailleurs que je l'ai gavé de lait, parce que je ne savais plus quoi faire pour le calmer les nuits. Sa mère lui manque, ses nibards surtout, parce que dès que nous allons lui rendre visite, ce veinard se rue sur la poitrine d'Elisa. Ah mais qu'il a raison, moi aussi je profiterais à sa place ! Mais non, je me tiens tranquille parce qu'elle souffre encore, parce que le moindre mouvement brusque de l'épaule lui tire des grimaces et lui arrache des cris étouffés, malgré les séances que lui impose la kiné.
J'essaie de passer un maximum de temps avec elle, parce qu'elle me manque, parce que je n'aime pas la savoir seule et que le téléphone ne me suffit pas, mais avec un bébé de même pas six mois, il n'est pas conseillé de rester des heures, et comme Elisa flippe qu'il attrape quelque-chose, on ne reste qu'une heure ou deux, enfermés dans sa chambre. Alors aujourd'hui, je n'ai qu'une hâte : celle de la ramener chez nous, de lui montrer ce que Connor et moi lui avons préparé, et de la tenir contre moi pendant la nuit.
Après avoir tourné en rond durant dix minutes, je me gare enfin sur le parking de l'hôpital. Eden babille dans son siège, sur l'air des Guns N'Rose qui passe en boucle depuis que nous avons quitté la maison. Je sors de la voiture, pressé et de bonne humeur, et le prends.
— Si les Guns N'Rose te font kiffer la vie, attends d'écouter Muse.
— Aaahhhh !
— Et ouais, Playboy. Ils sont incroyables, tu vas en prendre pleins les oreilles avec eux.
Eden gesticule dans mes bras, et je le cale contre mon torse avant de remonter le chemin qui mène à la femme qui nous est chère.
∞
Le bras en écharpe pour soulager son épaule, elle est dos à moi quand nous entrons dans la chambre. Elle sifflote un air que je ne reconnais pas, et c'est Eden qui est le premier à prendre la parole :
— Aahhh !
Elisa se retourne vers nous, un sourire magnifique aux lèvres.
— Salut vous deux !
— Ah non, protesté-je, tu es censée dire : salut les hommes de ma vie.
— Salut les hommes de ma vie, glousse-t-elle.
Je m'approche et elle embrasse Eden avant que je ne presse ma bouche sur la sienne. Ses lèvres pleines et gourmandes m'ont manqué, et si nous n'avions pas notre fils avec nous, je l'allongerais sur le lit, et l'embrasserais encore et encore, juste pour rattraper le temps perdu.
— T'as déjà fait ta valise ? demandé-je en l'apercevant sur le matelas.
— Oui, enfin, une infirmière m'a aidée parce qu'avec un bras, ce n'est pas simple.
Elle s'assied dans le fauteuil, se penche lentement pour enfiler ses ballerines et je referme la valise, d'une seule main.
— T'as tout ?
— Oui.
— Tes ordonnances ? Tes chaussons ? Tes produits ? Tes cachets ?
— Oui, chef.
Elle rit, et son humeur taquine qui reflète tellement la mienne me fait grand bien au moral. Je la retrouve chaque jour un peu plus, l'adore chaque seconde un peu plus encore, même si je ne pensais pas cela possible. Mais avoir eu plusieurs fois l'impression de la perdre, m'a fait réaliser à quel point elle compte, à quel point je ne peux vivre sans elle.
— Parfait, murmuré-je en la fixant dans les yeux. On peut rentrer chez nous, dans ce cas.
∞
Sur le trajet, je suis comme un gamin de cinq surexcité à l'idée de la ramener chez nous. Enfin... Nous allons enfin être chez nous, dans cette maison faites pour nous, que nous avons choisie. Nous allons être rien que tous les trois, et ça, ça n'a pas de prix à mes yeux. Notre nouvelle vie a pris deux semaines de retard, mais ça y est, nous y sommes ! J'ai hâte qu'elle voie la maison, d'apercevoir sa moue quand elle remarquera les couleurs que nous avons choisies, avec Connor. J'ai hâte de déposer mon fils dans son parc et de la serrer dans mes bras, pour m'imprégner de son parfum enivrant.
Lorsque je coupe le moteur dans l'allée, elle est pâle, et je serre les dents. J'imagine que des tas de mauvais souvenirs lui reviennent en mémoire, tels une bonne piqûre de rappel des faits. Je me doute, puisque j'ai les mêmes quand mon regard se pose sur les graviers.
Je presse ma main sur sa cuisse, et frotte mon pouce sur le tissu de son jeans.
— Hey, regarde-moi, toi.
Elisa inspire brusquement, puis fixe ses yeux bleus aux miens en retenant son souffle.
— C'est fini. Il ne peut plus nous atteindre et tu n'as plus rien à craindre, ok ?
— J'ai eu la frousse de ma vie, je crois... Enfin, j'ai déjà eu de belles frayeurs, comme celles de te perdre mais... J'ai cru que j'allais mourir dans ces graviers, et je priais. Pour toi, pour Eden...
J'essuie une larme qui perle au coin de son œil, et l'attire doucement contre moi, sans lui faire mal.
— Je ne te laisserais plus, Elisa. Je te l'ai promis, et je l'ai promis à notre fils, aussi. Il ne pourra plus rien faire de là où il est.
— Merci, Dam, merci d'être là.
Je dépose un baiser sur sa tempe, et serre sa main dans la mienne pour essayer de la réconforter un maximum.
— Où voudrais-tu que je sois ? Ma place est avec vous deux, nulle part ailleurs.
Elisa relève son visage vers le mien, et m'embrasse doucement.
— On y va ? Une surprise t'attend...
— Une surprise ?
Son enthousiasme réapparaît comme par magie et je ris. On dirait une enfant qui va recevoir un super cadeau.
— Oui, une belle surprise, enfin, j'espère.
Elle sort de la voiture et je l'imite avant de détacher Eden de son siège et de le prendre dans les bras. Je dépose un baiser sur sa touffe de cheveux noirs, et suis Elisa dans l'allée, jusqu'à la porte d'entrée.
— Faut juste penser à désactiver l'alarme, dis-je en déverrouillant.
Mon cœur bat à tout rompre. Si elle n'aime pas, je suis bon pour tout repeindre, dans les tons qu'elle choisira. Je pousse la porte, tape le code sur l'alarme avant qu'elle ne s'enclenche et m'écarte, pour la laisser découvrir notre chez-nous. Elle est bouche bée, les sourcils arqués. Elle tourne sur elle-même dans le living, redécouvrant cette pièce aux tons plus chauds.
— C'est magnifique, Damien !
Je suis on ne peut plus fier. C'est vrai que ça a la classe ainsi. Trois murs sont blancs, et celui du fond, le plus imposant, est peint en chocolat. Mélanie a dégoté des tentures de la même couleurs, histoire de faire un rappel de couleur et de casser tout ce blanc apparent. L'ensemble est rehaussé d'un tapis épais, de la même teinte et tous nos meubles sont bels et bien montés.
— T'as fait tout ça tout seul ?! s'extasie-t-elle.
— Euh... Bah pas vraiment. Eden m'a aidé, Logan aussi. Et ses parents. Enfin, sa mère et Connor.
Elisa me saute dessus, prenant tout de même garde à notre fils et à son épaule.
— Damien Burn, si tu n'avais pas existé, il aurait fallu t'inventer, toi et ton romantisme.
— Je ne suis pas romantique.
— Un chouïa, me taquine-t-elle.
— Non, même pas un peu.
— Menteur, susurre-t-elle.
— Pas romantique, pas menteur, même plus dragueur. Je suis simplement amoureux, et l'amour nous faire de ces trucs gnangnans à souhait, j'te jure.
Je dépose notre fils dans son parc, le débarrasse de sa veste bien chaude et me redresse, vers Elisa, dont les yeux brillent d'une étincelle malicieuse, que j'adore.
— Gnangnan ? Vraiment ?
J'avance, d'un pas, puis deux, puis assez pour me presser contre elle et me laisser transporter par son parfum, par le son de sa voix.
— Oui, vraiment. Comme à l'instant.
Je m'agenouille devant elle, et prend sa main dans la mienne après avoir pris l'écrin planqué dans la poche de mon jeans. Elle a les yeux écarquillés, et je sors la bague avant de lui glisser au doigt.
— Elisa Writ, je sais que tu vas dire oui, parce que je sais que je suis l'homme de ta vie, et que t'as déjà accepté, mais je te le redemande, encore une fois, avec une bague cette fois-ci : veux-tu être la femme qui partagera ma vie jusqu'à ce que la mort nous sépare ?
— Je le veux, mon commandant, je le veux plus que tout.
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