Chapitre 6- Elisa

J'essuie rapidement mes larmes quand je sens une présence dans mon dos.

Je n'ai pas besoin de me retourner pour savoir qu'il s'agit de Damien. Son parfum m'enivre, m'enveloppe. Il ne dit rien et je l'en remercie parce que je n'ai pas envie de parler. Je suis énervée, blessée, dégoûtée.

Depuis un moment déjà, Alex et son père veulent que je travaille pour eux et leur entreprise. Sauf que non. Je refuse d'être dépendante de la famille Burns. Je veux pouvoir m'assumer seule, en cas de pépin, ça a toujours été une priorité pour moi.

Quand les portes de l'ascenseur s'ouvrent, Damien et moi y grimpons dans le plus parfait des silences. Je regarde la pointe de mes chaussures, pour éviter ses yeux perçants, qui doivent être emplis de pitié. Je crois que si j'avais su, je n'aurais pas épousé Alex. Il se comporte en véritable con depuis que nous sommes ici, arrivant à me faire regretter ce « oui ».

—Ne pleure pas.

Je lève mon visage vers celui de Damien. Contrairement à ce que je croyais, je ne lis aucune once de pitié en lui. Son regard vert me semble brûlant, incandescent. L'espace parait soudainement plus petit, plus chaud qu'il ne l'était. Mon cœur s'emballe, je ne sais pas vraiment pourquoi et il le comprend. Il le voit. Il le ressent lui aussi. Damien avance d'un pas, d'un deuxième, réduisant considérablement l'espace entre nous.

Ma poitrine frôle sa chemise quand je respire, mes mains deviennent moites et ma vision se brouille doucement. Je ne me reconnais même pas quand d'une voix rauque, je lui dis :

—Fais-le Damien. Embrasse-moi.

Je n'ai pas besoin de me répéter, puisque Damien écrase ses lèvres sur les miennes. Nos dents s'entrechoquent, mes mains trouvent de suite leur place dans ses cheveux tandis qu'il me pousse un peu plus sur la paroi de l'ascenseur. Nos lèvres s'animent, se découvrent, s'embrassent. Sa langue vient doucement à la rencontre de la mienne pendant qu'un frisson me traverse l'échine. Je gémis en sentant son érection, il geint entre mes lèvres.

Le tintement de la cabine retentit et nous nous séparons aussi vite que possible quand deux hommes en costumes y entrent. Damien sort, me fait un clin d'œil juste avant que les portes ne se referment.  
*****

Chacun de mes membres tremblent. Je n'arrive pas à cesser mes pleurs. J'ai embrassé Damien...

Et j'ai adoré ça.

Je frémis, resserre la couverture autour de mes épaules. Mon dieu... Qu'est-ce que j'ai fait ? Je viens de tromper mon mari...

Je sanglote, attrape le verre de vin sur la petite table et le bois cul sec. Merde. Alex va me tuer s'il apprend ça. Mais il ne le saura jamais. Je ne peux pas lui dire que j'ai demandé à son frère de m'embrasser. PUTAIN !

Je suis la pire des épouses qu'il existe sur la terre. Je suis une vraie garce. Il ne faut plus jamais que je vois Damien. Ce mec est la tentation incarnée. Il est beau, gentil et a toujours les mots que j'ai envie qu'il dise. Je ne le verrai plus, quitte à rester enfermée dans cette chambre, tant pis. 

Cela fait une heure et demie que je suis là, sur la terrasse. Alexandro n'est toujours pas remonté. J'ai vraiment l'impression qu'il n'en a rien à foutre de moi, de ce que je peux ressentir. Seul son travail compte. Je le savais... Mais j'avais espéré qu'il allait un peu plus être présent lors de notre lune de miel. Je ne reconnais pas l'homme que j'ai épousé. En deux jours, il semble s'être transformé. Ou est-ce moi qui ai ouvert les yeux seulement maintenant ? Il n'empêche que je suis déçue, triste.

Je me lève, titube jusqu'à la chambre dans laquelle je me laisse tomber lourdement sur le lit.  Et Damien ? Il fait quoi ? Il pense à moi ? A ce baiser échangé ? Non, sûrement pas. Pourquoi penserait-il une seconde à cela ?  

*****
—Elisa ?

Je grogne quand Alexandro se colle à moi et me secoue. Il empeste l'alcool à des kilomètres à la ronde.

—Elisa ?

—Quoi ?

—Arrêtes d'être fâchée, souffle-t-il.

Son érection se loge entre mes fesses quand il se frotte à moi. Ses mains baladeuses sont déjà sur mes seins, les massant doucement.

—J'ai très envie de toi Elisa.

  Je me retourne vers lui, les larmes aux yeux. Je ne sais pas ce qu'il me chagrine le plus : Le fait qu'il doive boire pour se souvenir que j'existe ? Ses paroles prononcées un peu plus tôt ou bien le fait que je l'ai trompé ?

—Je n'aime pas quand tu dis de telles choses, sangloté-je, et encore moins devant les gens.

Alex se couche sur le dos, regardant le plafond.

—Tracasse, Damien m'a remonté les brettelles. T'arrives à y croire toi ? Qu'il veuille renouer, comme ça ? Après dix ans ?

—Oui, soufflé-je, et on était en train de parler de nous là, pas de Damien.

—Sauf qu'il n'y a pas de problème entre nous Elisa. T'es ma femme, quoique je ferais.
  Je ris froidement.

—Alex, tu te rends compte que je fais partie des meubles ? Tu es rivé sur ton pc depuis qu'on a décollé !

—J'ai un boulot à responsabilités Elisa ! Tu n'es qu'assistante, tu ne peux pas comprendre.

Je me redresse, horrifiée par ses paroles. Quel con !

—Mais je t'emmerde ! Je ne sais pas ce que t'as mais je ne te reconnais plus ! T'as un souci avec moi ?

—Oui ! Tu rapportes toujours tout à toi, merde ! C'est moi qui n'arrive pas à te suivre ! Tu m'as épousé Elisa, tu savais que ma vie, c'est mon job. Assume maintenant.

J'écarquille les yeux en enfilant une robe. Mes larmes coulent sur mes joues, je n'arrive pas à les retenir. Je n'en reviens pas qu'il ait aussi peu de considération pour moi.

—C'est vraiment ce que tu penses ? Que je vais accepter tout, même d'être transparente ? Et le tout sans rien dire ?

—Oui. 

—Et bien non. Je t'ai épousé toi et pas ton boulot. Je ne suis qu'assistante mais au moins je suis indépendante.

—Ouais mon cul.

Mes poings se serrent de colère, mes mâchoires se contractent. Je me penche pour prendre mes chaussures et je quitte la chambre.   Je ne sais pas ce que je fous.
*****

Je ne devrais même pas être ici, devant cette porte. Je ferme les yeux, soupire. Je ne peux pas demander à Damien d'être une oreille attentive, ce serait dépasser les limites, encore une fois. Je recule sans faire de bruit, file à travers le couloir et appelle l'ascenseur. Mon ventre se tord quand je me dis que j'ai pensé à lui. Pourquoi ce mec m'attire ? Pourquoi est-ce que mes pas m'ont guidée à sa porte ? Il est dangereux pour moi, parce que dans des moments comme celui-ci, où Alex me parait infâme, je pourrais très bien craquer, céder à ses baisers et à la tentation énorme qu'il représente et de suite le regretter.

Je finis par remonter dans notre suite, enlève mes chaussures et m'allonge dans le canapé. Alexandro ronfle tellement fort que je l'entends d'ici. Vive l'alcool qui fait ronfler...

Je me retourne au moins une cinquantaine de fois, triturant mon bracelet. Il faut que je sache ce qu'il se trame dans la tête dans la tête d'Alex. Pourquoi est-il si froid et méchant depuis que nous sommes ici ? Je vais finir par devenir folle. Je m'assois, prends le mac posé sur la table basse. Mot de passe. Merde. Qu'est-ce que j'en sais moi ? Je tape Elisa, mais non. Le nom de son chien Alexou, non plus. Je tente de réfléchir, tape le nom de leur entreprise « Burns compagny ». BINGO.
Il est vachement en manque d'inspiration niveau mot de passe. Le mien est beaucoup plus compliqué que ça.

J'ouvre ses mails, fronce les sourcils quand j'en vois un de son père qui s'intitule : Ton rendez-vous de demain-adresse.  C'est une blague j'espère ? Je lis en vitesse, passant au crible les pièces jointes.
Je referme d'un coup sec l'ordinateur, me lève telle une furie et fonce dans la chambre.

D'un coup sec, je presse l'interrupteur. Alexandro est allongé dans le lit, la bouche ouverte. Je prends la bouteille d'eau sur la table de nuit, lui renverse sur la tête.

—Oh putain !
Il bondit du lit d'un coup, trempé et hagard.

—Qu'est-ce que tu fous ? T'es devenue folle ma pauvre fille ?!

—Oh ma chérie, on devrait vraiment aller en Thaïlande, l'imité-je. Hua Hin est si merveilleux.

—Oh arrêtes, dit-il en enlevant son t'shirt.

—Tu n'en avais rien à foutre de moi en fait, tu voulais juste venir ici pour un putain de rachat !

Je croise mes bras, le toise de mes yeux enflammés. Je suis dégoûtée.

—Mais c'est important Elisa !

—Et moi ? Je ne le suis pas ? T'allais me dire quand que j'allais passer des jours à me faire chier ? T'allais me dire quand que j'allais être seule demain ? T'aurais trouvé une excuse bidon, c'est ça ?

—Elisa...

Je m'essuie furtivement les joues. J'en ai ma claque. Comment est-ce possible de compter si peu pour l'homme qui vient de se marier avec moi ?
Alex me prend dans ses bras, et même si je le repousse, il y arrive.

—Je suis désolé. Je ne savais pas que ça allait autant te toucher.
Je ne réponds pas, parce que si je le fais, je risquerai d'être méchante.

—Tu es ma femme Elisa, on doit se soutenir, quoiqu'on fasse. D'accord ?

De son index, il relève mon menton et fixe ses yeux aux miens.

—Je t'aime, même si tu n'as pas l'air d'y croire.

—Je n'ai jamais dit ça.

—Je ne te le dis pas souvent non plus.

Il effleure mes lèvres des siennes, m'embrasse en me poussant doucement dans le lit. J'aspire ses lèvres entre les miennes, avide d'une réconciliation sur l'oreiller. Alex sourit contre ma bouche avant de se relever pour enlever son caleçon. Son sexe est déjà dressé vers moi et je déglutis en me déshabillant.
****

—Donc tu es seule ?

Mélanie semble choquée. Je le devine à sa voix aigüe qui me perce les tympans.

—Oui. Je suis dégoutée mais bon... Je ne peux pas lui faire la tête éternellement je suppose.

J'observe les vagues que mes pieds forment dans l'eau de la piscine.

—Tu plaisantes Elisa ? Ce mec t'emmène à l'autre bout du monde en te faisant miroiter la lune de miel et quoi ?! Au final il s'agit seulement de boulot ! Je te jure que si j'étais toi, je le castrerai !

Je pouffe de rire et elle m'imite.

—Je sais Méla... Mais... Bref si tu veux tout savoir, j'ai l'impression qu'Alex est devenu un étranger ici. Il me parle à peine, me regarde à peine. Je me sens seule et...

—Quel pauvre type ! Je t'avais dit de ne pas l'épouser. Ça fait déjà plusieurs semaines qui ne te calcule plus. T'aurais dû annuler.

—Et j'aurais terni sa réputation, soufflé-je. Tu connais Alex. Tu sais à quel point il me l'aurait fait payer.

—Il te fait du chantage Elisa ! Merde mais ouvre les yeux ! Au fait, il t'a complimenté le jour j ?

—Oui.
Je mens. Non, il ne m'a pas dit que j'étais jolie ou autre, parce qu'Alex ne fait jamais ce genre de chose.
J'étouffe un sanglot quand un coup à la porte de la chambre retentit.

—Méla, je crois que c'est lui. Je rentre dimanche soir, on se voit lundi ?

—D'accord ma poulette. Je t'aime.

—Je t'aime aussi.
Je raccroche et soupire. Je hais quand ma meilleure amie a raison. Parce que tout ce qu'elle dit est vrai : Je me sens obligée de tout devoir à Alex. Cette nuit, alors qu'il s'était endormi, j'ai laissé un torrent de larmes couler sur mes joues. Je regrette. Je regrette de l'avoir épousé. Pas que je ne l'aime pas, bien au contraire, mais je me suis dit que lui n'en avait pas grand-chose à faire de moi. Sinon, il ne serait pas comme ça. Il ne serait pas si égoïste, solitaire...

Alex ne m'aime pas autant que je le croyais, c'est un fait.
Les coups sur la porte reprennent, me sortant de mes idées noires. Je me lève, essuie en vitesse mes pieds et mollets et cours à la porte.

Ses yeux émeraudes me transpercent directement. Je retiens mon souffle, sens mon cœur battre à tout rompre dans sa cage. Damien esquisse un sourire arrogant, carrément sexy.

—Salut.  Sa voix rauque me fait frémir, mes jambes tremblent de nervosité.

—Salut, soufflé-je. Qu'est-ce que tu fais là ?

Je m'écarte pour le laisser entrer, ce qu'il fait sans attendre.

—Je l'ai vu partir avec sa petite mallette de cuir. Sérieux ? Le travail ? Encore ?

Il s'appuie contre la commode du petit salon en croisant ses bras hâlés et musclés et me regarde de la tête aux pieds.

—Je crois que j'aime bien quand tu te ballades en nuisette.

Je m'empourpre avant de filer dans la chambre. Je reviens, un peignoir sur le dos.

—Je ne me ballade pas, dis-je en m'asseyant dans un des canapés, et je ne savais pas que tu allais débarquer.

Il rit en venant s'asseoir face à moi. Damien pue le sex-appeal, la testostérone, le désir. Mon ventre se contracte quand je repense à son baiser, à son érection sur le bas de mon ventre.

—Il revient quand ? demande-t-il en attrapant un magazine de finance.

—Ce soir, normalement.

Il relève son visage vers moi, un sourcil haussé. Ses yeux me scrutent intensément et j'en fais de même. La tension sexuelle entre nous est palpable. Je n'avais jamais ressenti cela auparavant. Ma conscience, dans un tout petit coin de ma tête me hurle que je suis mariée, qu'il ne faut pas que je cède à cet homme, que c'est mal !

Mais, quand il se lève, que je l'imite et que, sans que je ne comprenne comment, nos corps se retrouvent face à face, j'oublie ça. Je le veux. Il me plait, et je lui plais. Je ressens le besoin d'être vraiment désirée, d'être vraiment possédée par lui. Je ne le connais pas assez, mais il a plus d'attentions envers moi que son frère.

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