11.Damien

Je ne sais pas ce qui est le plus énervant ici, à New-York ? Est-ce les touristes incessants qui photographient tout et n'importe quoi ? Est-ce la population beaucoup trop dense ? Le fait de savoir que cet enculé y dirige une des plus grosses entreprises d'une main de maître ou encore, est-ce parce que je sais qu'elle est quelque part ici, sans savoir exactement où ?  

Ça fait deux heures que je suis rentré chez moi, et mes mâchoires ne se sont pas desserrées d'un iota. J'ai les nerfs en pelote, la tête en vrac.
Depuis que je suis rentré, j'ai eu le temps de défaire ma valise, de ranger le tas de linges que je n'ai pas eu l'occasion de mettre et de préparer du café. Ma mère va arriver, je compte bien lui soutirer l'adresse d'Elisa.

Il faut que je la voie. Il faut que je lui dise que oui, à la base ce n'était qu'une vengeance mais que j'ai vite craqué pour elle. J'ai la nette impression qu'elle et moi, on ne peut pas finir comme ça. Ce n'est que le début de quelque chose même si j'ai la trouille de m'engager dans quelque chose de sérieux. Je ne pense plus qu'à la tristesse de son regard, quand elle a su que je l'avais utilisée pour l'atteindre lui. Je n'ai pas l'habitude de décevoir qui que ce soit, mis à part mon père.

Lui et moi, on ne s'est jamais piffé. Il ne m'aime pas, je le hais. C'est aussi simple que ça. Quand j'avais quinze ans, que je voyais les coups qu'il portait à ma mère, je lui ai foncé dessus. Je ne pouvais plus supporter de le voir se défouler sur elle. Ma mère est menue, faible. Lui n'est qu'un gros plein de soupe, incapable de gérer sa colère.
Et maintenant, je sais qu'Alexandro lui ressemble sur ce point aussi. Je dois la voir, lui dire que je suis désolée. D'habitude, les femmes savent que je ne recherche que du cul. Du sexe seulement, c'est en quelque sorte une de mes règles. Mais avec elle... Putain avec elle, j'en veux plus. Je veux pouvoir la posséder à chaque fois que je serais à terre, qu'elle m'attende impatiemment pour que je la fasse jouir encore et encore en murmurant mon nom.

Je suis en train d'écraser ma clope quand ma mère entre.

—Coucou mon chéri !

Ma mère, vêtue de blanc entre dans la cuisine et se rue vers moi.

—Salut.
Je lui rends son étreinte et souris quand je vois qu'elle est passée à la boulangerie.

—Alors ces vacances ?

Je prends deux tasses dans le placard, verse du café dedans et les pose sur l'ilot central. Je sais qu'elle sait que je suis parti pour Elisa.

—Que veux-tu que je te dise... Vacances pourries.
Je m'installe près d'elle et l'observe couper la tarte.

—Pourquoi a-t-il il fallut que tu suives ton frère là-bas ?

Je ne sais pas trop quoi lui répondre. Je ne peux pas lui dire que mon unique but était de casser ce mariage de merde et que j'ai réussi cette mission avec brio.

—La Thaïlande est un pays magnifique, dis-je plein d'ironie. Voilà pourquoi j'y suis parti.

—Dam.
Elle comprend que je lui baratine, alors j'attaque directement.

—File-moi son adresse. Faut que j'aille lui parler.

Elle dépose une part énorme dans mon assiette. Je me délecte en voyant les pommes caramélisées sur le dessus. Ça a l'air délicieux.

—Elle ne veut pas te voir.

Je me crispe. Forcément qu'elle ne veut pas, mais là, je m'en tape.

—'Man, il faut que je la voie. C'est important.
Je mords une grosse bouchée dans la tarte et pousse un gémissement de plaisir, ce qui a le don pour faire sourire ma mère.

—Tu as couché avec elle ?

Je m'étrangle presque avec mon morceau, finis par l'avaler difficilement. Putain elle a fait comment pour savoir ça ?

—Non.

—Menteur. Tu ne voulais même pas aller à leur mariage, tu les suis en Thaïlande et là, tu rentres en voulant absolument la voir alors qu'elle veut divorcer de ton frère. 

Elle veut divorcer. Si je n'étais pas en compagnie de ma mère, je ferais une danse de la joie. A la place, je soupire, parce que décidemment, je ne peux jamais rien cacher à ma mère. 

—Ouais, on a couché ensemble.
Elle parait horrifiée, tandis que la honte s'insinue en moi.

—Je sais ce que tu penses maman. Mais Elisa me plait. Bien plus que tu ne le crois. Je dois la voir, lui expliquer un truc important.

Ma mère repousse son assiette, croise ses bras alors que j'avale une gorgée de café. Okay, elle est fâchée et donc, ne m'aidera pas sur ce coup-là. 

—Ne me dis pas que c'est encore cette histoire avec Léona.
Je ne réponds pas, énervé. Bien sûr que si, c'est encore cette putain d'histoire de merde ! Elle n'a jamais compris pourquoi je voulais faire payer à Alexandro ce truc alors que pour elle, dans l'histoire c'est Léona la salope.

—Damien, soupire-t-elle. Tu me déçois. Sérieusement. Tu te permets de draguer cette fille et de l'attirer dans ton lit alors qu'elle est mariée avec ton frère !

—Il se comporte comme un connard avec elle !
Je me lève, excédé et m'allume une clope.

—Elle l'a épousé !

Et? Ce n'est pas une excuse! 

—Il ne l'aime pas ! dis-je pour me défendre.

—Bien sûr que si ! On n'épouse pas quelqu'un qu'on aime pas !

Elle s'énerve autant que moi et je sais que je n'arriverais pas à lui soutirer l'adresse d'Elisa.

Elle se lève, prend son sac à main et le pend sur son épaule.

—Reste éloigné d'elle Damien. Laisse ton frère la reconquérir.

Je ricane froidement en imaginant la scène.

—Il l'a tabassée maman. Je refuse qu'un connard pareil s'approche d'elle !

Elle soupire l'air abasourdi, semble réfléchir avant de me fixer dans les yeux.

—Laisse-la Damien. Elle est mariée avec lui, pas avec toi et tu ne peux rien y faire. Elisa est assez forte pour savoir ce qu'elle veut.
Je la regarde bouche bée tandis qu'elle quitte mon appartement. Je suis sur le cul, vraiment. Ma mère, ancienne femme battue ne réagit pas quand je lui dis que son fils frappe sur sa femme ? Je suis sidéré, dégoûté. Il ne me reste qu'une solution pour savoir où elle crèche.

******

Je regarde le vieux bâtiment qui se tient devant moi. Les briques rouges sont salies, les vitres couvertes de poussières. On dirait une vieille baraque abandonnée. Je relis trois fois l'adresse sur la carte de visite que Mélanie, la blonde amie d'Elisa m'a remise au mariage, étonné qu'une maison d'édition ressemble à ça. J'avais toujours cru qu'elle se tenait dans de grands et prestigieux bâtiments.

 Il ne me reste qu'elle pour me dire où est-ce que je peux trouver sa copine. Je pousse la porte, fronce les sourcils en regardant l'intérieur. Avec sa décoration moderne et ses murs fraichement repeins, je me doute qu'il s'agit d'un petit truc lancé il n'y a pas si longtemps que ça. J'avance dans l'étroit couloir, salue deux femmes qui sont assises derrière leur bureau et demande à voir la patronne.

—Vous avez rendez-vous ?

Merde.

J'esquisse alors mon plus beau sourire aguicheur, les déshabille du regard en prononçant un « non mais Mélanie sait qui je suis ».

Elles s'empourprent avant qu'une d'entre elles ne me montre de la main la porte du fond.

—Merci, mademoiselle.
Les deux morues gloussent entre elles tandis que je m'éloigne.
Je frappe doucement à la porte et entre sans attendre.

Mélanie écarquille les yeux en me voyant. Je devine à son regard meurtrier qu'elle sait pour moi.

—Je te rappelle Laurent, un impoli vient de s'incruster dans mon bureau.
D'un coup sec, elle raccroche et croise les bras sur son bureau.

—Qu'est-ce que tu fous ici ?

—Donne-moi son adresse.

Elle rit en secouant la tête comme si je venais de faire la blague la plus drôle.

—Non.

—Putain mais vous faites chier !
Je jure en me passant une main dans les cheveux. Comment faire comprendre à cette bonne femme que je dois voir sa copine?

—Toi aussi tu fais chier ! Tu baises mon amie pour te venger de ton frère. T'es dégueulasse si tu veux mon avis.

­Je me laisse tomber sur le fauteuil en face du sien, la regarde silencieusement, froidement.

—Je dois la voir, finis-je par dire après quelques secondes.

—Laisse-la tranquille.
Elle attrape son stylo et une pile de dossiers.

—Ecoute-moi bien, dis-je en lui arrachant les dossiers des mains, je dois voir Elisa, c'est important. Je voudrais m'excuser.

—Tu craques pour elle ?
—Mais c'est quoi ces questions ? m'énervé-je. Je veux juste la voir, lui demander pardon et voir là où elle veut bien aller avec moi !
Les traits de Mélanie se détendent et je soupire quand elle se lève.

—Donc, tu en pinces pour elle. Je viens avec toi, sinon elle ne t'ouvrira pas.

Je souffle, exaspéré par cette nana et la suis, d'un côté reconnaissant qu'elle me mène enfin près d'Elisa. 

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