Chapitre 9 : 1971 : Un poker pour des cookies


Une demi-heure plus tard, tout le monde était à table, sauf Edgar qui manquait encore. Hugh et Mona venaient tout juste de finir de déballer les derniers achats. Terence les ignorait royalement, même si l'envie de se joindre à eux se lisait sur son visage. Oui, c'est une expression... l'envie brûlait son visage. Quoi ? Je vous emmerde.

— Par contre, la chouette risque de poser quelques problèmes, dit Ignatus. Elle m'a l'air un peu sauvage.

Il dit ça parce qu'elle l'a mordue. Oui, je sais, les chouettes n'ont pas de dents, et c'est justement ça le truc.

— Trouve-lui un nom, suggéra Meredith. Les chouettes deviennent plus dociles envers leur maître une fois qu'on leur donne un nom.

— Je n'ai pas d'idée, répondit Mona. J'aime bien le nom que Molly a donné à la sienne.

Terence pouffa.

— Quoi, c'est vrai, c'est très joli, insista Mona.

— Elle l'a appelée Miss Léopoldine, rappela Terence.

Un silence pesant s'installa autour de la table.
Ben quoi, Miss Léopoldine, c'est... très... très... Qui est l'autrice stupide qui a donné un tel nom à une chouette ? Je pensais qu'on avait déjà battu tous les records avec Duchesse de Constantinople.

— J'ai bien appelé ma chouette Marquise de Polichinelle, dit Meredith. Elle est morte l'année dernière.

Marquise de Polichinelle ?Pitain, je ne voudrais pas être une chouette dans cette famille.

— J'aimerais trouver un nom aussi beau, dit Mona, le visage radieux.

Hein ?

— Je suis sûre que tu lui trouveras un nom parfait, la rassura Meredith.

Le vieux Ed rentra à la maison, et les enfants ne purent plus participer à la conversation. À la fin du repas, Mona vit sa grand-mère se glisser discrètement dans les cuisines. Elle en ressortit quelques minutes plus tard avec un léger sourire, puis rejoignit Ed et Magda dans le salon. Ni une ni deux, Mona se faufila dans la cuisine. Tutic était perché sur l'évier, pleurant silencieusement.
Purée, qu'est-ce que la vieille peau lui a fait ?

— Tutic ? appela Mona d'une voix douce.

— Oh, Mademoiselle, dit l'elfe en sursautant. Je ne vous avais pas entendue entrer.

— Qu'est-ce qui t'arrive ?

— Rien, Mademoiselle.

— Ne me mens pas, ordonna Mona.

— D'accord, dit Tutic. C'est mon père, l'elfe de votre grand-mère. Elle vient de me donner des nouvelles de lui...

— Je ne savais pas que Pinguy était ton père, répondit Mona. C'est pour ça qu'il me demande toujours si mon elfe fait du bon travail à la maison quand je vais chez grand-mère ?

— Oui.

— Et ta maman ? demanda Mona.

— C'est l'elfe de votre arrière-grand-mère, Marine Moon.

Dur de trouver de quoi s'accoupler chez les elfes...

— Les enfants ! Venez saluer vos grands-parents, appela Magda.

— Je reviendrai, dit Mona.

Non, tu vas complètement zapper. Mona, tu es une fille profondément égoïste, et tout ce qui ne tourne pas autour de toi ne t'intéresse pas le moins du monde.
Mona quitta la cuisine, laissant Tutic tout ému pleurer dans son torchon. Les Prewett furent salués par toute la famille. Lorsque Meredith ouvrit la porte, Mona aperçut Kathy sur le perron voisin.

— Pourquoi leur as-tu dit de rester déjeuner ? s'exclama Edgar dès que la porte fut refermée.

— Edgar, ce sont tes parents, rappela Magda, surprise.

— Et alors ? J'ai autre chose à faire qu'un repas de famille supplémentaire.

— Il faut bien qu'ils nous voient de temps en temps, et j'aime beaucoup leur compagnie, tout comme les enfants.

— Tu ne leur en veux plus ?

— Ce n'est pas de leur faute si votre famille est ruinée, répliqua Magda, acerbe.

— Qu'est-ce que t'en sais ? s'écria Edgar. On n'a jamais su ce qui s'était passé pour que les gens cessent de nous faire confiance financièrement.

Les trois enfants montèrent silencieusement les escaliers, évitant ainsi la dispute de leurs parents.

— Et puis tu leur en voulais de ne pas t'avoir dit la vérité avant que je ne t'épouse.

— C'est à toi que j'en veux le plus ! s'indigna Magda. Tu étais censé être le meilleur parti de l'école, alors que tu étais ruiné, et ton ascendance est des plus douteuses.

Oula... ça va, Ed ?

— J'ai du travail, dit Edgar. Je rentrerai pour le dîner.

La porte claqua à nouveau.
Magda poussa un juron, et quelques secondes plus tard, on entendit la porte de la cuisine claquer à son tour.
Mona, Terence et Hugh attendaient en haut de l'escalier, se regardant un moment, silencieux.

— Je vais voir Kathy, dit soudain Mona. Vous le direz à Mère si elle vous pose la question.

— Il faut que tu lui demandes la permission d'abord, dit Terence.

— Pour une fois... dit Mona.

— Non, il faut que tu lui demandes.

Ton frère a raison (pour une fois, cela dit en passant) ; tu dois demander la permission à ta mère.
Mona adressa un regard moqueur à son frère, redescendit les escaliers, et sortit à son tour. Kathy était toujours sur le perron.

— Un petit poker ? proposa Kathy en guise de bonjour.

— On joue quoi ?

— Des cookies que ma mère a faits pour nous deux.

— Cool.

— Cool.

Cool.
Elles commencèrent à jouer. Cinq heures plus tard, Mona réalisa qu'il allait bientôt être l'heure du dîner et qu'elle devrait déjà être rentrée.

— À demain, dit Kathy.

— Oui, à... Non, attends... demain j'ai un repas de famille, dit Mona.

— Alors à après-demain.

— Oui, à...

Un froid glacial parcourut Mona.

— Non, dit-elle. Je pars pour mon école après-demain.

— Oh, répondit Kathy, triste. Et tu ne reviens qu'à Noël, c'est ça ?

— Oui.

— Oh.

Voilà voilà...

— Bon, ben j'y vais, dit Mona.

— De toute façon, on se verra à Noël. S'il fait trop froid, on ira jouer dans ma chambre.

— Cool.

— Cool.

Mona fit demi-tour et rentra chez elle. Lorsqu'elle referma la porte, une larme coulait sur sa joue. Elle vérifia l'heure ; il lui restait quelques minutes avant le dîner. Elle pouvait remonter dans sa chambre et faire disparaître cette larme. En passant devant le salon, elle entendit les voix du vieux Ed et de Magda. Ils parlaient d'une voix calme à présent.

— Où est Mona ? demanda Edgar.

— Avec la Moldue d'à côté.

— Encore ?

— Oui, mais c'est sûrement la dernière fois qu'elles se voient. Je suppose qu'elles se disent au revoir.

— Mona va peut-être enfin revenir dans le droit chemin, dit Edgar. Cette amitié suspecte a assez duré.

— Je le pense aussi. Figures-toi qu'à l'anniversaire de Marine, Mona et Molly ont joué à un jeu de cartes moldu.

— Je n'aime pas cet Arthur Weasley non plus. Il est vraiment temps de recentrer les fréquentations de notre fille.

Mona sentit la colère monter en elle. Comment pouvaient-ils parler ainsi alors qu'elle souffrait de ne plus voir son amie, sa seule amie pendant des mois ? Ils se moquaient de ce qu'elle ressentait ?
Tout ce qui comptait, c'était la qualité des fréquentations, des Sang-Pur avec de bonnes idées pro-Sang-Pur.
Bienvenue chez les Moon.

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