CHAPITRE VII
Sofia est surexcitée depuis que je lui ai annoncé notre départ pour New-York en partant de chez les Collins. Elle était tellement heureuse qu'en me sautant dessus au milieu de la route on a bien failli se faire renverser. Ce qui nous aurait fait manquer notre voyage.
Depuis elle n'arrête pas de faire des listes bizarres d'activités, de vêtements, de lieux à visiter...bref elle est devenue complètement folle, elle a fait ça toute la journée d'hier, du matin au soir. Elle a même passé la nuit à y penser. Le problème, c'est que quand elle pense en étant aussi hyperactive que Charlie, elle se met à se parler à elle-même. Et je n'ai pas pu fermer l'œil de la nuit. En plus de ça, comme si ce n’était pas suffisant, elle ne cesse de me supplier depuis, pour que j'accepte d’inviter Mathéo. Et Zachary. Mais c'est hors de question. Elle pourra me harceler autant qu'elle le voudra je ne céderai pas.
Je viens de prendre un bon bain chaud pour me détendre un peu après toutes ces émotions. J’avais besoin de me reposer pour effacer ces cernes terribles de mon visage. Et pour m'éloigner pendant quelques minutes de l'hystérique aux listes. C’est pourtant au moment où je sors de la baignoire, parfaitement relaxée, que quelqu'un décide de venir frapper à la porte, gâchant ainsi mon instant de calme et de solitude. Je suis certaine que Sofia est allongée dans son lit, son casque sur la tête, avec la musique à fond dedans. Elle ne va jamais entendre le bruit assourdissant que provoque cette personne de toute évidence très pressée. Quelle idée de tambouriner comme ça sur la porte des gens ! Les voisins pourraient se plaindre, les murs ici sont tellement fins. J’enfile donc mon peignoir à contrecœur, tout en pestant sans même essayer d’être discrète que je ne suis même pas chez moi et que je ne devrais pas être celle qui doit toujours ouvrir la porte.
Et ainsi, tout comme hier, j'ai l'impression que mon corps tout entier va me lâcher quand en ouvrant la porte, je découvre que notre visiteur mystère n’est autre que Zachary Collins. C'est pas possible. Il me suit ou quoi ? Évidemment que oui, puisqu'il vient de frapper à la porte de l'appartement dans lequel j’habite. Et je ne pensais pas pouvoir autant rougir, quand son regard se baisse, uniquement pour me rappeler que je suis en peignoir devant lui. Même si ça ne révèle rien, je croise mes bras pour être sûre qu'il ne va pas s'ouvrir par accident, ou que ce ne soit pas assez tordu pour faire plaisir à cet obsédé. Ce dernier a l'air de s’amuser de la situation. Comme toujours ! Et j’en ai marre. Je m'apprêtais donc à lui claquer la porte au nez quand il reprend étrangement vite son sérieux.
- Avant que tu ne fermes cette porte, je dois te dire que je suis venu pour te présenter des excuses.
Des excuses ? Il n'est pas du genre à présenter des excuses. Surtout pas aussi facilement, sur un coup de tête. C'est bizarre, et je sais que je ne devrais pas l'écouter. Que ça doit encore être un de ses plans ridicules pour me séduire. Mais…je suis trop curieuse, ou trop stupide, pour ne pas le laisser poursuivre. Alors je fais un pas sur le côté pour lui indiquer qu'il peut entrer. Ce qu'il s’empresse de faire, redoutant sûrement que je change d’avis à la dernière minute.
C’est une fois la porte refermée, que je réalise que je ne peux décemment pas rester comme ça. Ce n'est pas comme si j'étais toute nue non, mais je dois tout de même m'habiller. Son côté obsédé mis à part, je risquerais moi, d’être assez perturbée durant notre conversation pour ne rien suivre. Je me tourne donc vers lui, toujours en serrant le peignoir contre moi.
- Tu permets que je...que j'aille m'habiller ?
Pendant quelques secondes, j'étais certaine qu'il me sortirait une phrase complètement stupide et provocatrice dont il a le secret comme "je t'ai déjà vu moins habillée que ça Amyra Salem". Mais il n'en fait rien. Il hoche simplement la tête en glissant ses mains dans les poches de son pantalon avec nonchalance. J’en profite donc pour retourner dans la salle de bains aussi vite que possible. Là-bas je m'empresse d'enfiler la salopette et le débardeur que j'avais choisi avant de prendre mon bain.
Évidemment ce sont des vêtements supposés être confortables que je ne porte que quand je suis chez moi. Mais maintenant que je sais que Zachary Collins m’attend dans le salon, et que je vois les formes qu'ils me donnent dans le miroir comme une soudaine révélation...je me dis qu'au cas où, à partir de maintenant je ne porterai que des habits de nonne, même à la maison. Je n’ai pas le temps de me changer encore une fois ! Je grogne donc silencieusement en détachant mes cheveux pour les faire sauvagement tomber sur mes épaules avec agacement, puis je sors enfin de ma cachette, pour retourner dans le salon.
Zachary est en train de regarder des photos sur l'étagère. Il y a principalement des photos de Sofia, de sa famille et de…de moi… Comme celle que je lui avais envoyée l'année dernière sans me douter qu'elle l'afficherait dans son salon. J'étais allée à une soirée d'halloween, déguisée en infirmière sexy. Pour ma défense, c'est Caly qui m'avait trouvé ce déguisement. Il y avait même la perruque blond platine et...quelle horreur !
Je m’interpose très vite entre Zachary et la photo maudite, pour donner un coup dans le cadre qui tombe en avant dans un petit claquement sourd, dissimulant ainsi l'image que je retirerai de cette étagère une fois notre invité parti. Puis je souris timidement à celui qui se tient toujours devant moi, et qui visiblement n’a pas raté une seule miette du spectacle.
- Si tu vivais avec ma tante, tenté-je de me justifier tant bien que mal, elle se serait faite un malin plaisir de t'habiller en stripteaseur alors pas de commentaires.
- Bien sûr que non.
Il se met à sourire très légèrement, comme s'il luttait contre tout son être pour ne pas le faire, puis il s'éloigne de moi pour marcher un peu et regarder attentivement la pièce. Je suppose que c'est la première fois qu'il vient ici. A la différence de son colocataire…
- C'est sympa ici, déclare-t-il en admirant la vue que deux étages de plus peuvent apporter.
- Oui ça l'est. Et c'est sûrement mieux rangé que ton appart à toi.
Il paraît plus amusé qu'offensé par cette remarque de ma part.
- Figure-toi que je suis devenu une vraie fée du logis.
- Ah oui comment ça se fait ?
- J'ai compris que personne ne ferait le ménage à ma place.
Je dois me retenir de rire pour qu’il ne se croit pas plus irrésistiblement drôle qu’il ne l’est déjà. Quel fainéant celui-là. Mais d'un côté je ne vais pas le juger, c'est un des points qu'ont tous les jeunes quand ils s'installent dans un nouveau chez eux et qu'ils se rendent compte que leurs parents ne feront pas la vaisselle derrière eux. Moi en tout cas je dois le faire même en vivant avec une adulte. Parce qu'il n'y a pas plus paresseux que Caly quand il s’agit des tâches ménagères.
Je vais m'appuyer contre la table, impatiente, lorsqu’il se remet à admirer la vue sur l’océan. Ça m’étonnerait qu’il soit simplement venu ici pour visiter, alors à quoi il joue ?
- Alors ces excuses ?
Il fait volte-face en se grattant la nuque, gêné, comme si je venais de le ramener violemment à la réalité.
- Ouais…à propos de ça…
Il se met à sourire avec malice en haussant les épaules, presque navré de devoir m’apprendre quelque chose dont je me doutais déjà.
- J’ai menti.
Bah voyons. Est-ce que ça étonne vraiment quelqu’un ici ? Pas moi en tout cas.
- En fait je savais que tu serais trop curieuse pour ne pas m’écouter.
Et de toute évidence il me connaît toujours aussi bien. Ça m’énerve !
Si seulement je pouvais lui retirer ce petit sourire satisfait du visage.
A la place, je me contente de croiser les bras pour lui faire comprendre que je ne suis pas très ouverte à la discussion. Bien que maintenant qu’il est là j’aimerais bien savoir ce qu’il a à me dire…
Et voilà ! C’est avec ce genre de comportement que je me suis retrouvée fiancée au bout de cinq mois.
- J’ai compris quelque chose hier, reprend Zachary en commençant à faire les cent pas devant moi. Tu es furieuse contre moi. Et je te comprends, je n’ai rien fait jusqu’à maintenant qui aurait pu t’inspirer autre chose que de la colère.
Minute…Quoi ?
- Je me trompe ?
Je…ne comprends pas tout ce qu’il se passe ici. Il ne vient pas me présenter ses excuses, cela dit il reconnaît s’être comporté comme un con. Dans tous les cas je préfère aller dans son sens. Après tout il me laissera peut-être plus rapidement tranquille.
Je hoche donc simplement la tête pour confirmer sa théorie.
Pourtant moi aussi je le connais. Assez pour sentir venir la connerie qui suivra la phrase sensée qui le fera redescendre dans mon estime aussi vite qu’il était parvenu à y remonter.
- Donc tu m’en veux. Mais…
La voilà. La connerie.
- Mais tu es toujours amoureuse de moi.
J’aimerais ne pas avoir raison parfois. J’aimerais vraiment. Mais bon sang qu’est-ce qu’il est prévisible, c’en est presque flippant !
- Zachary…
- Dis-moi le contraire Amyra. Dis-moi le contraire et je m’en vais.
Il s’approche de moi pour doucement, poser ses mains sur mes épaules et me regarder droit dans les yeux. Ses yeux dans lesquels j’adorais me perdre autrefois. Je sais que c’est le moment où je devrais le repousser, lui hurler que je ne ressens absolument plus rien pour lui. Mais je…
Je ne sais même pas si c’est vrai !
- Dîne avec moi, me propose-t-il précipitamment comme si cette proposition était la réponse à tous nos problèmes.
Dîner avec lui ? Et puis quoi encore ?
Je me mets à rire face à l’absurdité de sa demande.
- Pourquoi je dînerais avec toi ?
- Pourquoi pas ?
Il me sourit toujours, alors je dois détourner le regard pour ne pas m’y mettre moi aussi. Mais c’est trop tard. Si mon sourire à moi n’a duré qu’une fraction de seconde, il a été assez long pour confirmer à Zachary Collins qu’au plus profond de moi, je voudrais vraiment dire oui.
Alors d’un geste de la main, je parviens à l’écarter et à me frayer un passage loin de lui pour désigner la porte.
- Tu devrais partir maintenant.
- Pourquoi ?
- Parce que c’est…compliqué Zachary !
On est compliqués.
- Ça ne l’est pas de simplement dire oui.
Je ne sais pas quoi faire. Je ne sais pas quoi dire. Je voudrais que ma réponse soit déjà tout écrite. Que quelqu’un décide pour moi pour une fois !
Et comme visiblement je prenais trop de temps à répondre, Zachary décide subitement d’aller se planter au milieu du salon, pour se pencher et…se mettre à genoux. C’est quoi cette histoire ? Je voulais simplement prendre un bain pour me détendre et voilà que…
Je rêve ou quoi ?!
- Qu’est-ce que tu fous ? Relève-toi immédiatement !
- Hors de question. Apparemment il n’y a que comme ça que tu m’écoute alors je n’ai pas d’autre choix.
Il fait bien évidemment allusion au jour de mon départ, il y a trois ans. Mais à l’époque tout était si différent…tout était si simple. Bien sûr que je pouvais lui pardonner, je m’apprêtais à monter dans un avion qui allait m’emmener à des kilomètres de lui.
- La dernière fois je t’ai écouté parce qu’on était entourés de dizaines d’inconnus qui nous observaient bizarrement.
Et comme si elle avait été appelée par le destin pour me jouer un sale tour, c'est ce moment que choisit ma meilleure amie pour sortir de sa chambre en baillant comme si de rien n’était.
D’abord trop distraite par le bout de papier qu’elle tient entre ses mains et par la musique dans son casque que je parviens à entendre de là où je suis, il doit lui falloir quelques secondes pour remarquer la scène qui se déroule dans son salon. Je crois bien voir du jus sortir de ses narines quand elle pose la brique de jus de pomme en toussant pour s’approcher et retirer son casque.
- Attendez une minute…c’est une demande en mariage ? Encore ? Je veux dire c’est la deuxième que tu reçois en deux mois seulement mais après tout pourquoi pas je…
- Il ne me demande pas en mariage Sofia ! la coupé-je en me retenant de lever les yeux au ciel. Il m'invite à dîner.
- Ce qui est encore mieux, déclare-t-elle alors en allant s'asseoir dans le canapé pour observer toute la scène avec des étoiles pleins les yeux.
Je ne sais pas si je dois rire de nouveau, ou bien pleurer cette fois.
Je décide d’ignorer Sofia, pour me reconcentrer sur Zachary. Et pour mieux la tuer plus tard.
- Qu’est-ce que je dois dire pour que tu sortes de cet appartement ?
- Tu le sais déjà.
- Zachary je ne dînerai pas avec toi ! Je…
Je me mets alors dos à lui en grognant, massant un peu mes tempes pour essayer d’avoir les idées un peu plus claires. Je ne peux plus réfléchir quand je le regarde. Ou quand il me regarde. Il ne lâchera pas l’affaire. Je le sais. Mais je ne peux pas simplement accepter comme ça ! Une partie de moi, qui trouve cet acte spontané ridiculement romantique, aimerait le faire. Mais une autre, qui le trouve assez gonflé de débarquer à l’improviste comme ça pour essayer de me faire retomber dans ses bras après tout ce qu’il m’a fait…me crie de refuser à tout prix et de rester le plus loin possible de ce type. J’ai l’impression de devenir bipolaire. Ou schizophrène. Peu importe, en tout cas c’est le bazar dans ma tête ! Je n’arrive pas à me mettre d’accord avec moi-même.
Bien sûr c'était sans compter l’aide de ma meilleure amie, qui ne tarde pas à remettre son grain de sel dans l’histoire.
- Oh allez chérie ! Il s'est mis à genoux qu’est-ce que tu veux de plus ?
- C'est vrai, renchérit Zachary en profitant de la situation. Qu’est-ce que tu veux de plus ?
- En plus tu auras un repas gratuit de quoi tu te plains ?
- Je te paierai tout ce que tu voudras.
- Et dans un restaurant hyper chic qui plus est.
- Un quoi ? s’indigne aussitôt celui dont le porte-monnaie est gravement menacé par la pure romantique qu’est Sofia.
Pas de réponse pendant un moment. Je reste dos à eux, un léger sourire aux lèvres. J’admets que je trouve la situation assez drôle. Comment refuser avec ces deux-là contre moi ? Comment gagner quand je sais d’avance qu’ils n’abandonneront pas tant que je n’aurai pas accepter ?
Zachary Collins…cet emmerdeur de première.
Pourquoi a-t-il fallu que je tombe amoureuse de lui ?
- Très bien, approuve-t-il finalement d’une petite voix. Le restaurant le plus chic de la ville.
Et c’est reparti. Ils ne sont pas croyables…
- Ça sera la plus belle soirée de ta vie, poursuit alors Sofia tel un parfait avocat en pleine plaidoirie.
- La plus romantique.
- Tu seras comme Cendrillon !
- Oui enfin…j'espère que tu ne t'enfuiras pas à la fin.
- Et je suis certaine que…
- Mercredi soir ! m’écrié-je subitement de toutes mes forces en essayant de cacher mon amusement.
Ils ont réussi à m’avoir !
Ils sont forts…
Je me tourne vers les deux complices, qui me dévisagent surpris, et quelque peu perdus.
- Ça sera mercredi soir, reprends-je avec fermeté, si tu ne peux pas tant pis. J'irai te rejoindre en bas de l'immeuble à 20h tapante, si tu es en retard c'est pareil. Ça sera un plat et un dessert. Pas d’entrée, pas d'alcool, pas de surprise, pas de promenade ou de dernier verre ensuite. C'est clair ?
Zachary se met alors à sourire, et se relève pour venir vers moi fou de joie, mais je l'arrête rapidement en posant ma main sur son torse pour qu’il ne fasse pas un pas de plus dans ma direction.
- Et ne m'embrasse sous aucun prétexte !
Il recule donc, à mon grand soulagement, en hochant la tête. Puis, enfin, il repart vers la porte d’entrée après avoir adressé un clin d’œil à Sofia qui se met à applaudir avec excitation. Notre invité se retourne une dernière fois vers moi avant de franchir le pas de la porte, m’adresse un dernier sourire, et s’en va enfin. Me libérant d’un poids que je ne pensais même pas avoir sur les épaules avant d’en être débarrassée. Je pousse un long soupir de soulagement en allant m’asseoir dans le canapé, à côté d’une Sofia plus que fière de son coup.
- Sofia. Tu es la pire des amies.
- Au contraire, je suis la meilleure des meilleures amies que n’importe qui rêverait d’avoir. Tu mourrais d’envie de dire oui.
- Je ne mourrais pas d'envie de dire oui !
Bon je le voulais peut-être un peu.
Maintenant qu’il est parti et que je peux remettre un peu d'ordre dans ma tête, je me rends compte que j’étais plus que tentée d’accepter. Mais je ne pouvais pas, et je regrette déjà de l'avoir fait.
- Et puis même si je le voulais vraiment, je te signale qu'il y a beaucoup trop de choses qui nous empêcheraient d’avoir…un « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ».
- Comme quoi ? Je suis désolée de te le rappeler Amyra mais dès demain…tout ce qu’il sera pour toi c’est un ex comme un autre.
C'est vrai. J’avais presque oublié. Presque.
Demain ça sera officiel. Le divorce, sera officiel. Ma mère ne sera plus mariée. Ce qui veut dire que je n'aurai plus aucun lien de parenté ni avec Dorian, ni avec Charlie, ni avec...Zachary.
- Et il a l'air de vraiment beaucoup tenir à toi. Il est venu se mettre à genoux devant toi pour ça. La dernière fois qu'il l'avait fait c'était…
- Je me souviens parfaitement de la dernière fois. Mais Zachary tient uniquement à sa famille, et à lui-même. Je ne suis qu’une histoire parmi tant d’autres qu’il ne parvient pas à oublier pour je ne sais quelle raison.
Je relève mes pieds sur le canapé, les bloquant contre moi pour enrouler mes bras autour, et poser ma tête sur mes genoux en fixant un point invisible sur le sol. Ce qui apparemment, énerve ma meilleure amie qui me frappe soudainement avec une force qu’elle n’avait pas l’air de vouloir contrôler.
- Arrête de te chercher des excuses merde ! Tu vas bientôt avoir 21 ans, et tu te comportes toujours comme une gosse qui ne sait pas ce qu’elle veut ! Alors que bon sang, ça crève les yeux que tu as toujours des sentiments pour lui ! Tu pourras me dire ce que tu veux, toi non plus tu n’as jamais réussi à oublier Zachary Collins !
- Oui peut-être je l'admets !
Je suis moi-même surprise de l'avoir dit à voix haute, mais je suppose que me faire gronder par ma meilleure amie comme une enfant, ça m’a permis de réaliser certaines choses. Je ne pouvais pas me cacher la vérité plus longtemps après tout. Il fallait bien…que ça sorte.
Sofia n'ose plus parler. Elle doit être heureuse d’avoir entendu ces mots, alors que moi je ne le suis pas du tout et ce n'est pas un simple petit caprice.
- Sofia la dernière fois que j'ai fait confiance à Zachary, il m'a brisé le cœur. J'étais détruite, j'ai même quitté la ville et ma famille à cause de lui.
- Parce que tu le voulais.
- Parce que je le devais ! Tu ne l'as jamais su parce que c’est si simple de cacher ce qu’on ressent derrière un écran, mais Caly a dû me ramasser à la petite cuillère après cette histoire. Je n'ai pas regardé, ni même pensé à un autre que lui pendant des mois et des mois. Tu as raison je n'ai jamais pu l'oublier.
Je sens les larmes me monter aux yeux rien qu’en me remémorant cette période. Je crie sur tous les toits que ma vie a été un bonheur parfait dès le moment où je suis partie vivre avec Caly, mais c’est faux. Et je suis épuisée de mentir au monde entier parce que non, je n’ai pas tout de suite été heureuse. J’ai simplement appris à vivre avec ma tristesse.
- Et puis il y a eu Sandro. Même si je pensais toujours à Zachary quand j’étais en sa présence, je me sentais bien avec lui. Je me sentais capable de tomber amoureuse à nouveau. De faire confiance à nouveau. J'étais enfin, heureuse.
J’étais guérie.
- Et puis il m'a trahie, il m'a manipulée, et j'ai encore souffert. Mais quand je pleurais là encore, je ne faisais que penser à ce crétin de Zachary Collins. Non je n'arrive pas à me le sortir de la tête. Et même si aujourd'hui il a changé, même si nos parents ne seront bientôt plus mariés et qu'on n’aura plus de raison d'avoir honte et de se cacher...il y aura toujours la distance pour nous séparer. Je ne peux pas ouvrir mon cœur à un garçon qui compte autant pour moi alors que je sais très bien, que mon cœur se brisera à nouveau à la fin des vacances quand je reprendrai ma petite vie loin de lui. Et j'en ai assez de ça Sofia. Je n'en peux plus. Je voudrais juste ne plus rien ressentir pour personne.
- Ne dis pas ça.
Elle me prend vite dans ses bras pour me calmer quand les larmes commencent à rouler le long de mes joues. Je n’avais encore jamais parlé de tout ça à quelqu’un. Même Caly n’en sait pas autant.
- Amyra ta vie amoureuse n’a pas à être une tragédie.
Elle se sépare de moi pour essuyer mes larmes.
- Tu n’es plus une ado perdue. Tu as le droit à une histoire torride de vacances sans pour autant que ça se finisse dans les larmes et la douleur.
Je suis obligée de sourire en entendant son discours si familier.
- On croirait entendre ma mère.
- Quelle partie ?
- Celle sur « l’histoire torride ».
Le regard scandalisé que me lance alors mon amie, parvient à m’amuser et à me remettre de bonne humeur.
Elle est toujours là pour moi. Elle l’a toujours été, depuis le premier jour. Depuis Foster. C’est vrai que c’est la meilleure des meilleures amies.
Je peux donc faire un geste pour elle. Histoire de la remercier d'être aussi géniale et présente pour moi. Un geste que je ne ferais pour personne d’autre.
- Tu sais quoi ? Si le dîner se passe bien, je pourrais songer au fait d’inviter les garçons à passer le nouvel an avec nous à New-York.
- Sans déconner ?!
Elle se jette sur moi pour m'étouffer dans ses bras. Je m'attendais à ce genre de réaction, j'aurais dû pourtant mieux m'y préparer. Mais elle est heureuse, c'est tout ce qui compte. Je ne sais pas si ce qui se passe entre elle et Mathéo c'est du sérieux, mais en tout cas, la dernière fois que je l'avais vu dans cet état, c'était à l'époque où elle était encore avec Mackensie. Ça me fait plaisir qu'elle redonne une chance à l'amour. Ou peut-être que Mathéo est une simple histoire torride de vacances. Peut-être qu'elle l'oubliera dès que ses cours reprendront. Même s'ils vivent dans le même immeuble.
En attendant, je ne peux que faire passer son bonheur avant le mien. Quitte à inviter Zachary à New-York.
Lorsqu'elle me lâche enfin, c’est pour attraper son carnet et son stylo, laissés hier soir sur la table basse, et l'ouvrir à la page, "listes pour New-York".
- Bon alors si les garçons viennent avec nous on va devoir tout réorganiser.
- Sofia rien n’est encore...
- Oui oui je sais.
Elle n'écoute même plus ce que je lui dis. Elle est bien trop concentrée par ce qu'elle écrit. J'attrape donc la télécommande sous ses fesses, et je m’apprêtais à allumer la télé, quand une soudaine illumination s’empare de mon amie qui se tourne vers moi dans un sursaut qui me surprend et me fait pousser un petit cri. Elle ne le remarque même pas. Elle me sourit de toutes ses dents.
- Mardi quand on ira faire nos achats de Noël, il faudra absolument qu'on achète des trucs pour New-York. Il me faut des vêtements d'hiver assez sexy pour faire rougir Mathéo.
- Si tu y tiens.
Je ne sais pas quoi dire d’autre. Pourtant rien que l'idée de devoir acheter des choses en plus m'épuise. Le centre commercial sera rempli, les gens vont se précipiter dans tous les sens...je déteste ça. Mais c’est un autre, et dernier, sacrifice que je suis prête à faire...
De toute façon quand je vivais ici elle me traînait déjà là-bas à la dernière minute, même si j'avais déjà acheté tous mes cadeaux. Ça va être comme au bon vieux temps.
- D'ailleurs je voulais te demander, reprend mon amie toujours à moitié concentrée par ce qu’elle écrit, pourquoi mercredi soir en particulier ?
- J’en sais rien. Je pensais lui imposer le plus de conditions possibles pour essayer de le dissuader.
Ça n'a même pas marché. Lamentable. Je dois admettre qu'il est fort quand il s'agit de ne pas lâcher l'affaire. D'ailleurs quand on vivait encore sous le même toit je m'en suis rendue compte très vite. Il était déterminé à faire de ma vie un enfer à l'époque et il y est bien parvenu sans même flancher une seule seconde. Pas même quand je lui ai cassé le nez. Mon ancien téléphone s'en souvient, il a été séquestré je ne sais combien de fois par cet imbécile.
Mais bon, de l'eau a coulé sous les ponts depuis, et j’ai pu changer de téléphone. Aujourd'hui je dois supporter Caly, et là maintenant Sofia. Qui est toujours en train de faire une liste de vêtements qu'elle doit trier par couleurs, tissus, prix, et leur capacité à la rendre ultra sexy. Je n'arrive toujours pas à croire que je vais aller à New-York avec elle. Je suis folle de joie en y pensant.
Même si je n'oublie pas que demain je vais devoir faire tout mon possible pour soutenir ma mère. Je dois être présente pour elle, je veux qu'elle sache que je suis là, que je le serai toujours et que je l'aime plus que tout. Plus qu'un beau-père pourtant génial. Je vais passer la journée avec elle. J'en ai parlé à Sébastian, il sera là lui aussi. Je suppose que dans ce genre de moment, une maman a besoin de ses enfants. Elle a besoin de savoir qu'elle est aimée par quelqu'un d'autre que par sa mère hystérique. Je plaisante, j'adore ma grand-mère. Demain on sera tous les trois là pour la soutenir et Caly viendra la voir pour le nouvel an comme elle me l'avait dit. Elle ne sera jamais seule. Et quand elle le sera, parce que je sais qu’elle le sera au bout d’un moment, j’espère qu’elle se souviendra des moments qu’on aura passé ensemble durant ces vacances. Parce que je compte aussi les garder dans un coin de ma mémoire pour les mauvais jours à venir. Il y en aura forcément.
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