CHAPITRE V
Vendredi :
A peine rentrée de chez ma mère, Sofia me saute dessus dans l’entrée de l’appart pour m’annoncer que sa soirée (et nuit) avec le beau tatoué a été plus que torride.
- Amyra il est tellement…tout ! Il est beau, cultivé, on le même sens de l’humour…
Il est parfait donc. Et le sourire qui ne quitte plus ses lèvres me le confirme bien assez. Elle va s’allonger dans le canapé en soupirant de bonheur.
- Il est parfait.
Ça je l’avais deviné oui. Je vais m’asseoir sur l’accoudoir du canapé en riant sans pour autant trop me moquer, bien que dans son état mon amie serait totalement incapable de s’en rendre compte. Elle rayonne.
- Vous êtes allés voir quel film ?
Je sais que c’est stupide, mais en posant cette question…j’en pose également une autre. Est-ce que Zachary était avec eux en fin de compte ? Parce que s’ils sont allés voir un film romantique, c’est certain qu’il n’était pas là. Si c’était un film d’action il y aurait des chances. Mais pour une comédie…j’aurais ma réponse, ce serait sûr à 100% qu’il était avec eux.
Je ne sais pas pourquoi ça m’intéresse autant. De la simple curiosité sûrement, rien de plus. Sofia, enfin sortie de ses rêveries, se contente de se lever pour aller prendre son sac sans répondre à ma question.
- Je dois m’acheter une nouvelle veste. Les boutons de ma préférée se sont…accidentellement arrachés hier soir. Tu viens ?
Accidentellement…
Bon sang, j’aimerais ne pas être aussi envieuse mais j’aimerais tellement avoir ce genre d’accident moi aussi !
- Et ça ne peut pas attendre ? lui demandé-je frustrée de ne pas avoir ma réponse.
- Elle était en édition limitée chérie ! Si je veux avoir une chance d’en retrouver une je dois y aller aujourd’hui.
Et la voilà déjà partie. Je dois me dépêcher d’attraper mes affaires pour pouvoir la suivre. Ça m’étonne qu’elle ne me parle pas plus de sa soirée. Elle a toujours adoré me raconter ses histoires de cœur. Mais qu’elle ne le fasse pas, c’est plutôt mignon d’un côté. Elle veut garder le plus de mystère possible autour de sa nouvelle relation. Et…je peux la comprendre.
Ce soir-là, c’est après une longue journée au centre commercial, qu’on a pu se détendre un peu dans une nouvelle boîte de nuit à la mode. Je suis heureuse de retrouver de vieilles habitudes avec Sofia. Et seulement avec Sofia. C’était une journée entre filles dont j’avais crucialement besoin pour ma santé mentale. J’espère qu’elle sera suivie de beaucoup d’autres.
Samedi :
Raté. Puisque Sofia voulait absolument passer sa journée avec son Mathéo adoré, j’ai décidé d’emmener Charlie à son tour au centre commercial. Malgré les tonnes de cadeaux envoyés à la petite après mes voyages, j'avais trois ans d'achats accompagnés de scandales en public à rattraper avec elle. Même si maintenant elle s'est un peu calmée.
- Bon alors, comment ça se passe à l’école ?
- Bien. Mais je m’ennuie depuis que Livia est partie.
Livia…
C’était sa meilleure amie. Et je m’en souviens surtout parce que…c’était aussi la petite sœur d’Eliott. J’ignorais qu’ils avaient déménagé, et en même temps je suis assez soulagée. Pas parce que je n’aurais pas voulu le revoir, au contraire. C’est plutôt pour Sébastian que je me faisais du souci. Après mon départ, ils se sont finalement mis ensemble, et je n’attendais que ça. Mais à l’époque, mon frère n’avait pas encore fait son coming out et il craignait beaucoup le regard des autres. Ce qui n’était pas le cas d’Eliott qui avait déjà tout le soutien de sa famille et de ses plus proches amis. J’ai d’ailleurs découvert qu’il m’avait invitée à sortir à l’époque, uniquement pour que ses amis ne se doutent de rien. Mais après le fiasco qu’avait été la soirée, il s’était décidé à tout leur avouer. Comme il était devenu inutile de faire semblant, il m’avait mis un vent monumental par la suite. Mais je ne lui en veux pas. Moi aussi je pense m’être un peu servie de lui…
Pour en revenir à Sébastian et lui, même s’ils étaient heureux il restait quelques tensions et beaucoup de doutes, qu’ils n’ont pas pu surmonter quand mon frère est allé vivre chez notre père. Ils ne se sont pas quittés en de très bons termes, et rien que d’y penser, ça me rend folle. J’ai l’impression que tout autour de moi n’a toujours été que départ, séparation et cœurs brisés. Sébastian et Eliott, Sofia et Mackensie, ma mère et Dorian, Sandro et moi.
Zachary et moi…
Il faut croire que Caly a raison de rester célibataire.
- Cass me manque, m’avoue soudain la petite en baissant tristement la tête au-dessus de sa gaufre au caramel.
Cassandra, ma mère. C’est vrai qu’elle aussi est touchée par toute cette histoire de divorce. A force de culpabiliser, j’ai presque failli l’oublier.
- Papa n’en parle jamais avec moi.
Je sens ma gorge se serrer. Je me sens mal. Je me sens si mal pour elle. Personne n’a pris le temps de se soucier de ce qu’elle pouvait ressentir.
- Et comment tu vas ?
- Comme quand tu es partie.
Si seulement je pouvais passer une journée ici sans que quelqu’un ne me reproche mon départ.
Je comprends tout de même qu’elle m’en veuille. Et je comprends son chagrin aujourd’hui encore. Parce que si Dorian était comme un père pour moi, Charlie, elle, n’avait connu aucune autre mère que la mienne. Pour le moment je veux juste être là pour elle. Tant que je peux l’être.
- Je suis désolée. J’ai connu ça moi aussi. Et Dorian…ce n’est pas qu’il ne veut pas t’en parler, c’est juste que ça lui fait de la peine à lui aussi. Il ne sait pas comment gérer les choses.
- Si ça lui fait de la peine pourquoi ils se séparent ?
C’est vrai que moi je ne me posais pas ce genre de questions pendant le divorce de mes parents. Je les avais vu durant des années être malheureux ensemble, alors quand le moment de la séparation est arrivé…c’était comme logique pour moi. Je ne les voyais pas finir leur vie ensemble. Je ne sais donc pas comment expliquer ces choses-là à Charlie sans que ça lui fasse de la peine. Je ne peux qu’essayer.
- Parfois…deux personnes peuvent s’être aimées très fort, mais ne plus être heureuses toutes les deux. L’amour ça va et ça vient tu sais ?
- Dans ce cas j’en veux pas.
Si c’était aussi simple…
Dimanche :
Me voilà à un des fameux repas de famille chez Sofia. J'y allais parfois avant mon départ, et je suis plutôt heureuse de voir que mis à part quelques petits cousins qui ont bien trop grandi depuis la dernière fois que je les ai vus, rien n’a vraiment changé. Surtout pas l’oncle Gus qui s’approche de moi en empestant déjà l’alcool. Il n’est là que depuis un quart d’heure.
- Samyra !
- Amyra, le reprends-je amusée.
- Afyra !
- Presque.
- Azmyna !
- C’est…oui. On va dire que c’est ça.
Je me mets à rire gentiment, avant de reprendre très rapidement mon sérieux quand l’oncle de ma meilleure amie commence à s’écrouler sur moi. Je le rattrape de justesse, et le soulève du mieux que je peux, malgré ses 110 kilos. Heureusement je suis très vite aidée par le père de Sofia qui vient me libérer de son beau-frère à moitié assoupi sur mon épaule.
- Désolé Amyra.
- Non ça ne fait rien.
Il arrive à soulever l’endormi en se retenant de le laisser tomber par terre pour le laisser comater sur le sol, puis se retourne vers moi avant de l’emmener s’asseoir quelque part.
- Ça nous fait plaisir de te revoir, passe quand tu veux à la maison.
- Merci ça fait du bien d’être de retour.
Il me sourit une dernière fois, et le voilà parti. Sofia se faufile alors hors du groupe de petites cousines qui l’encerclait pour me rejoindre en grognant d’agacement.
- Je te préviens tout de suite, ce soir on ne reste pas à l’appart.
- Tu n’es pas fatiguée jeune fille ?
- Toi tu l’es ?
Mon regard se pose sur les parents de Sofia qui commencent à crier tous les deux sur le pauvre oncle Gus, assis dans le canapé. Personne à part moi ne les regarde, comme si tout le monde ici avait l’habitude de ce genre de scène. Ça ne m’étonne même pas. Pauvre Sofia. Je me plains souvent de ne pas avoir une famille très simple, mais je ne suis pas la seule à plaindre et je l’oublie de toute évidence beaucoup trop souvent. Un sourire étire alors mes lèvres, à l’intention de ma meilleure amie qui me regarde toujours avec impatience, dans l’attente d’une réponse de ma part.
- Tu sais bien que je ne suis jamais fatiguée pour tes beaux yeux.
Elle me sourit à son tour et enroule ses bras autour de moi avant de poser sa tête sur mon épaule.
- Toi je t’aime Salem.
- Je le sais.
Lundi :
J'ai recroisé Andrew en sortant de l'immeuble ce matin. Toujours aussi galant, il m'a invité à une soirée qu'il organisait chez lui ce soir. J'ai accepté volontiers, après tout je n’avais rien d’autre de prévu et j’aimerais bien apprendre à le connaître. Il a l’air très gentil. Malheureusement je n’ai pas pu rester bavarder avec lui puisque j’étais attendue autre part avec ma mère, ma grand-mère et mon frère pour une promenade en famille au bord de mer. Je sais que je passe beaucoup de temps avec Sofia ces temps-ci, ça ne veut pas dire que je dois ignorer ma famille. Encore une fois ma grand-mère avait préparé je ne sais combien de plats pour faire un pique-nique dans l’herbe. Et encore une fois je me suis régalée. J’aime ce genre de moment.
Tout comme les petits moments de solitudes comme celui que je me suis réservé dans l’après-midi en rentrant pour regarder une série, allongée dans le canapé. Sofia était sortie avec Mathéo, ils passent définitivement beaucoup de temps ensemble ces deux-là ! Mais aujourd’hui ça ne me dérangeait pas. Et quand elle est enfin rentrée, une fois changées, nous sommes redescendues quelques étages plus bas pour aller chez Andrew.
En entrant dans son appartement je ne m’attendais pas à voir autant de gens réunis dans un si petit endroit. Il doit y avoir une trentaine de personnes si ce n’est plus. Je ne peux même pas bien voir la déco. Mais les quelques pochettes de vinyles accrochées au mur me plaisent déjà assez. Je perds Sofia dans la « foule » après seulement quelques minutes, et me retrouve seule au milieu du salon, entourée d’inconnus qui ne remarquent même pas ma présence. Qu’est-ce que je fiche ici ?
- Salut.
Ouf. Sauvée par l’hôte. Je me tourne vers lui en souriant de soulagement.
- Salut.
Il me tend un gobelet que je prends sans hésiter. J’avais crucialement besoin d’un verre, et il m’était impossible de trouver la table des boissons avec toutes ces personnes entassées.
- Tu t’amuses ?
Je sais que je devrais dire oui. Être polie et le remercier de m’avoir invitée. Mais je sens que c’est le genre de garçon qui aime l’honnêteté. Alors…
- Pas vraiment en fait. Désolée c’est juste que…
- Que tu ne t’entends plus penser ?
Il n’a pas l’air de le prendre mal. Bien au contraire il m’a répondu sur le ton de la rigolade et ça me permet de me détendre un peu. Je ne voudrais pas me mettre à dos la seule personne dans cet immeuble qui prend à chaque fois la peine de bloquer les portes de l’ascenseur pour moi.
- Désolé pour ça. Mes potes se sont un peu emballés. Entre ce matin quand on s’est vus et ce soir, plus de quinze personnes ont été ajoutés à la liste des invités.
On croirait presque qu’il parle de Sofia quand il mentionne ses amis. Elle serait aussi du genre à me faire un coup pareil. Je prie d’ailleurs pour ne pas y avoir droit pendant ces vacances. Bien que tous les amis qu’elle ait pu se faire à la fac, sont tous en vacances, ou rentrés chez eux loin d’ici. C’est dommage, j’aurais aimé en rencontrer quelques-uns.
- Mais il faut les comprendre, ce soir je donnais mon premier concert ils voulaient fêter ça.
Un concert ? C’est vrai que la première fois qu’on s’est rencontrés il avait une guitare. Mais je ne pensais pas qu’il allait jouer devant un public.
- C’est super ça ! Pourquoi tu ne m’en as pas parlé ce matin ? Je serais venue.
- Non il ne valait mieux pas. J’étais tellement nerveux que j’ai préféré ne prévenir personne à part mes amis proches, au cas où je me ramassais au milieu du show ou que j’oubliais soudain les bons accords à cause du stress.
Ce que je peux comprendre. Rien que pour passer devant ma classe au lycée pour un simple exposé, j’avais les mains qui tremblaient à une vitesse surnaturelle.
- Et comment ça s’est passé ?
Il me sourit, sûrement heureux de constater que je porte de l’intérêt à la chose, et puis…il part. Il s’en va simplement en disparaissant dans la foule. Sans ajouter le moindre mot. Bizarre…
J’ai peut-être dit une bêtise. Je ne sais pas. Je n’ai absolument rien compris à sa réaction. Du moins c’était le cas, jusqu’à ce qu’au bout de la pièce, je vois une tête rousse apparaître parmi toutes les autres têtes pour se hisser sur ce que je soupçonne être une table, une guitare en main. Il parvient à siffler assez fort pour que toutes les discussions cessent et que toute l’attention se tourne vers lui.
- Salut tout le monde. Alors tout d’abord je tiens à vous remercier d’être aussi nombreux. Ce soir je réalisais un rêve de gosse, et je suis heureux que vous soyez venus fêter ça avec moi, même si je ne connais pas la moitié d’entre vous.
Quelques cris, rires et verres s’élèvent pour approuver son discours.
- Malheureusement, certains n’ont pas pu assister au spectacle. Alors j’ai décidé de vous faire un petit replay de la soirée. Gratuitement.
De nouveaux cris d’acclamation. Sofia réapparaît à ce moment-là, sortant de nulle part, pour venir se poster à côté de moi et fixer Andrew avec curiosité.
- Il est pas mal.
- Tu es au courant que vous vivez dans le même immeuble et que tu ne le remarques que maintenant ?
- Et je suis supposée connaître tous mes voisins ?
Moi je connais les miens. Mais je me retiens de lui faire la remarque très vite puisque les premières notes de musique commencent à résonner dans la pièce. Plus personne ne parle, tout le monde est comme hypnotisé par Andrew et son interprétation fabuleuse de « I Write Sins Not Tragedies ». Parce qu’en plus de jouer de la guitare comme personne, monsieur fait également honneur à Panic! At The Disco en chantant d’une voix digne des plus grands chanteurs de pop rock. Grave quand il le faut, et follement aigue quand on ne s’y attend pas. Je dois admettre que je suis impressionnée. Tout comme la totalité des invités qui se mettent à taper des mains au rythme de la musique. C’est certain, je serai à son prochain concert !
Bon. D’accord. J’ai été assez dure. Je m’amuse bien à cette fête finalement…
Mardi :
Une journée à la plage. C’est tout ce qu’il me manquait pour atteindre le bonheur extrême. Enfin…quand je parle de bonheur…
- Allez Amyra viens jouer avec nous !
Charlie n’arrête pas de me crier dans les oreilles pour que je les rejoigne elle et Sébastian. Ils sont en pleine partie de Volley Ball, et je vois bien que depuis une dizaine de minutes, mon frère fait tout son possible pour ne pas lui donner une bonne raclée. Il aimerait avoir un adversaire à sa taille, mais il veut aussi lui faire plaisir en la laissant gagner.
- Ouais sœurette viens t’amuser à quoi ça te sert de rester allonger là, à part à cramer ?
- Ne critique pas le bronzage Sébastian ! le gronde immédiatement Sofia en retirant ses lunettes de soleil. Le bronzage c’est sacré !
Mais évidemment il n’en a pas besoin, il a déjà un teint caramel parfait au naturel. Alors non il ne comprend pas qu’une personne aussi pâle que Sofia ait besoin de s’allonger pendant de longues minutes au soleil pour prendre un peu de couleurs. Moi…ça ne me dérange pas de bronzer même si ce n’est pas mon objectif premier. J’aime simplement rester assise sur le sable, avec mes musiques préférées dans mes écouteurs et la vue époustouflante de l’océan en face de moi. Il n’y a qu’à Shelter Meek que les plages sont aussi belles.
Et je crois que tout serait parfait si ces trois-là arrêtaient d’hurler comme ils le font…
- Au fait Amyra je vais faire un tour ce soir avec de vieux amis, tu veux venir ? me propose mon frère entre deux cris.
- Tu veux qu’on sorte ensemble ?
- Pourquoi pas ?
Ce serait une première. On n’a jamais vraiment été le genre de frère et sœur à faire des sorties tous les deux, même depuis qu’on a recommencé à bien s’entendre. Et à vrai dire c’est plutôt une bonne idée. Je suis heureuse qu’il me le propose.
- D’accord ça sera sympa.
Mais si ses amis viennent, il est hors de question que je me retrouve seule dans une bande de mecs. J’ai besoin de ma partenaire de sortie, qui continue de se prélasser les yeux fermés sous ses verres teintés.
- Tu veux venir ?
- Je comptais me reposer ce soir.
Se reposer. Non mais je rêve c’est elle qui me sort ça après m’avoir traînée de clubs en clubs ces derniers jours ? Elle ne va pas m’échapper aussi facilement. Je me penche donc vers elle pour murmurer avec ruse à son oreille :
- Tu te reposes assez souvent dans la chambre de Mathéo ces temps-ci non ?
Elle n’aime pas que j’utilise Mathéo contre elle. Ça ne fait que lui rappeler que je ne suis là que pour très peu de temps, et qu’après mon départ, son mec sera toujours dans le même immeuble qu’elle.
- Je viendrai c’est bon. Mais dégage de là tu gâches mon bronzage.
Je dépose un rapide baiser sur sa joue, la faisant légèrement sursauter, puis je me décide enfin à me lever pour attraper le ballon en plein vol, avant même que mon frère ait pu donner un coup dedans.
- Tu penses pouvoir nous battre toutes les deux ?
- C’est injuste ! proteste-t-il avec talent. Tu sais que si tu prends Charlie dans ton équipe je n’ai aucune chance de gagner !
La petite se met à rire et à sauter avec impatience. J’aime aussi ce genre de moment. Quand je nous vois tous les trois comme ça, j’oublie presque que bientôt on ne sera plus de la même famille. Que Charlie ne sera plus notre demi-sœur. Et que…Zachary ne sera plus mon demi-frère.
Zachary.
Ça va faire une semaine que je ne l’ai pas vu. Mais si je veux pouvoir profiter de mes vacances pleinement, je ne dois pas me laisser distraire par sa belle gueule. Pas encore une fois.
Mercredi :
La sortie d’hier soir a été un franc succès. J’ai pu rencontrer pas mal d’amis de Sébastian à qui je n’avais jamais adressé la parole, puisqu’avant il gardait toujours sa vie privée, très privée. Je me suis tellement amusée que je lui ai proposé de sortir aujourd’hui encore, mais cette fois rien que nous deux. J’aurais dû me douter quand il a suggéré un film que je détesterais l’idée au bout de deux minutes d’horreur. Je sors de cette salle sombre, traumatisée à vie.
- Ce n’était pas si terrible finalement, déclare mon frère adoré en dévorant les derniers popcorns que les scènes de boyaux déchiquetés m’ont empêchées de finir.
- Pas si…Sébastian je te déteste.
Il commence à se moquer de moi, avant de comprendre que je ne suis pas du tout d’humeur à plaisanter. Il passe alors son bras autour de moi et tente de me réconforter du mieux qu’il le peut.
- D’accord ce n’était peut-être pas mon meilleur choix. Je t’invite au resto pour me faire pardonner.
- Au resto ? C’est quoi le menu ? Nos cerveaux ?
Je crois que je n’avais jamais vu autant d’organes de toute ma vie. J’adore les films d’horreur en général, mais seulement quand ce sont des classiques. Comme Psychose ou…Shining. Pas ces désastres du 21e siècle qu’ils osent appeler « films ».
- Non je pensais plutôt au petit restaurant chinois au coin de la rue que tu aimes tant.
Oublié ! Tout est oublié ! Je ne me souviens même plus du nom de ce film !
Nous trouvons très rapidement une table une fois arrivés sur place. Toute la nostalgie qui accompagne ce lieu s’empare alors aussitôt de moi. J’adorais venir ici avant. En fait Dorian et ma mère m’emmenaient à chacun de mes anniversaires, chacune de mes bonnes notes, ils venaient toujours prendre de la soupe ici pour me l’apporter à la maison quand j’étais malade…
Je crois que la plupart de mes meilleurs souvenirs sont dans ce restaurant. Ainsi que les meilleurs « Chow Mein ». J’attends avec impatience ma commande quand un air sérieux et plein d’inquiétude apparaît sur le visage de Sébastian.
- Tu crois que ça ira pour maman ? Je veux dire…je sais que je n’ai pas toujours été très sympa avec Dorian.
- C’est le cas de le dire.
Il l’a toujours traité comme son pire ennemi. C’est sûr qu’il n’a pas et n’aura jamais le même lien que j’ai pu créer avec lui au fil des années. Pourtant il s’entend très bien avec la nouvelle femme de notre père. Sinon il ne serait pas aussi simple à vivre avec elle au quotidien. Et il ne l’aiderait pas autant avec les jumeaux.
- Oui bon je ne l’aimais pas. On s’en fiche.
C’est…un euphémisme, mais on va se contenter de ça.
- Je vois que maman ne va pas bien. Elle fait bonne figure…
- Mais elle ira mieux. Je le sais.
Je lui adresse mon sourire le plus rassurant en posant ma main sur la sienne. Et ça paraît lui suffire puisque toute son inquiétude disparaît. Du moins pour l’instant. Je n’ai pas arrêté de m’en vouloir et de me reprocher tout ce qui arrive, mais lui aussi doit se sentir coupable. J’imagine qu’il doit penser que s’il s’était mieux comporté avec Dorian, notre mère serait toujours avec lui. On ne saura jamais si c’est vraiment notre faute tout ça, mais une chose est sûre, la vie ne les a pas vraiment aidés.
Nos plats arrivent plus rapidement que je ne l’avais espéré et, enfin, je peux prendre une bouchée dont j’avais tant rêvé ces dernières années. Je m’étais jurée de faire un tour ici dès que je reviendrais. Mais…
- Tu sais quoi ? Ils sont meilleurs à New-York.
Mon frère se retient de rire face à cette remarque, jusqu’à ce que nos regards croisent ceux du couple de quadragénaires de la table à côté de la nôtre qui me fixent avec dégoût. Sûrement parce que je viens de parler la bouche pleine. Alors Sébastian, mon preux chevalier, prend à son tour une grosse bouchée de son plat, et se tourne vers eux pour articuler le plus distinctement possible :
- Oui bonchour un problème ?
Ils détournent aussitôt le regard à une vitesse qui me fait exploser de rire. Sébastian également. J’apprécie chaque instant passé avec lui maintenant. Encore plus en repensant à la relation qu’on avait il y a encore trois ans. Je ne veux plus jamais de ça. Je veux que chaque sortie, chaque discussion, chaque fou rire, soient exactement comme cette journée.
Jeudi :
Impossible de sortir du lit aujourd’hui. Je suis tout simplement épuisée. Sofia a bien tenté de me réveiller à plusieurs reprises mais rien à faire. Je veux juste dormir. J’ai passé les six dernières nuits dehors et je n’ai fait que bouger en journée. J’ai des heures de sommeil à rattraper de toute urgence si je veux être en forme demain.
Demain…l’une des journées que je redoutais le plus au monde. J’ai très peur de ce qui va se passer. Je ne sais pas si je survivrai à ça, déjà à l’époque j’avais l’impression qu’endurer ces 24 heures, était mission impossible. Oui. Les gâteaux, les jeux, les enfants courant absolument partout en hurlant de toutes leurs forces comme si leurs vies en dépendaient. Je parle bien de la seule journée durant laquelle je serai contrainte de croiser Zachary Collins.
L’anniversaire de sa petite sœur.
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