Chapitre XIV

Je donne la valise de ma mère à Dorian qui la prend aussitôt et la met dans le coffre de la voiture. Oui d'un côté je suis triste de les voir partir comme d'habitude, mais là j'ai une raison de plus d'être heureuse et de positiver. Et d'ailleurs en parlant de ma mère, la voilà qui sort accompagnée de Charlie qui porte la petite salopette rouge que je lui ai offerte. Elle tenait à la mettre pour que je ne lui manque pas trop une fois qu'elle sera partie. La petite court vers moi pour me sauter dessus et me sert fort quand je la soulève dans les airs en riant. Mon dos va enfin pouvoir se reposer pendant quelques temps après ça. Bon parce que soulever Charlie au début ça allait, mais maintenant qu'elle a six ans, ça devient de plus en plus difficile.

- Tu vas me manquer ma chérie. Surtout sois sage et ne rends pas ton père dingue.

- Oui zuré !

Elle rit à nouveau avant de déposer un baiser sur ma joue. Je fais de même en écrasant ma bouche sur sa petite joue ronde ce qui fait encore plus rire la petite quand je la repose ensuite sur le sol. Je prends après dans mes bras ma mère, puis Dorian et les salue avant de les voir monter dans la voiture et s'éloigner en direction de l'aéroport. Une fois la voiture disparue et j'entre dans la maison où je retrouve Sébastian et Zachary avachis dans le canapé en train de regarder la télé comme tout à l'heure. Aucun d'eux n'a bougé en une heure je n'arrive même pas à y croire. Je ne m'attarde pourtant pas sur ce détail, c'est le moment de me débarrasser de mon grand frère. Je vais les rejoindre en me laissant tomber sur le canapé entre les deux fainéants qui sont obligés de se décaler en grognant agacés.

- Ça y est ils sont partis ? me demande Zachary en gardant ses yeux rivés sur l'écran.

- Oui ça y est, et d'ailleurs merci de m'avoir laissé porter les valises toute seule.

- Mais de rien Amyra Salem.

Je le regarde en me retenant de sourire mais il suffit d'un sourire et d'un clin d'œil de sa part pour que je perde tout le reste de mauvaise humeur qui était en moi. Pourquoi faut-il qu'il soit si beau franchement ? Je m'éclaircis la voix en me tournant cette fois vers mon frère qui ne voit rien de nos regards, trop occupé à regarder la télé comme un véritable zombie. Je fais donc comme lui en faisant mine de n'avoir rien derrière la tête.

- En tout cas maman m'a donné quartier libre pour inviter Sofia à la maison et je compte bien inviter d'autres amies aussi pour des soirées pyjamas et des trucs de filles.

Mon frère oublie étrangement la présence de l'appareil magique devant lui et se tourne vers moi d'un air paniqué et inquiet.

- Tu te fiches de moi là ?

- Pas du tout, maman m'a donné son accord alors si je veux inviter des amies je le ferai. Surtout que toi tu n'as plus le droit de faire venir des gens depuis la fameuse soirée d'Halloween de l'année dernière.

- Si je le fais elle n'en saura rien.

- On est en train de parler de maman là. Bien sûr qu'elle le saura.

Il allait renchérir, mais finalement il se tourne vers Zachary qui fait semblant de ne pas s'intéresser à la conversation.

- Tu ne dis rien toi ?

- Si je me fais livrer les filles à domicile maintenant pourquoi je voudrais m'en plaindre ?

Cette réponse qui était supposée m'aider ne fait que m'agacer. Je sais qu'il plaisante mais ça me rappelle malheureusement que Zachary Collins est un coureur de jupons invétéré. J'essaie de me convaincre du contraire depuis le début mais...je sais qu'au fond de lui il reste ce qu'il est, et ce n'est pas une relation aussi étrange que la nôtre qui va le faire changer. Mon frère grogne d'agacement et se lève d'un bond.

- Si c'est ça alors moi je vais dormir autre part.

Je savais que ça fonctionnerait. La meilleure façon de le faire adhérer à une idée c'est de lui faire croire que celle-ci vient de lui. Une fois qu'il est monté à l'étage et donc hors de vue Zachary allait poser son bras autour de moi mais je l'évite de justesse en me relevant, un sourire faux aux lèvres.

- Vas coller les filles que tu considères comme de simples plats chinois que tu peux commander par téléphone.

Il se met étonnement à rire, ce qui a le don de m'énerver encore plus. C'est quoi son problème ? Il se lève pour me faire face et me sourire avec toute l'arrogance qu'il a en lui. Ça m'énerve tellement ! Il continue de me fixer avant de dire LA phrase qui me met hors de moi.

- Est-ce que tu serais jalouse Amyra Salem ?

Là maintenant je n'ai qu'une envie, le frapper. Pourtant je me retiens pour ne pas lui donner ce plaisir, et je commence à partir. Mais il me retient par le poignet, me retourne et me soulève très vite sur son épaule. J'ai à peine le temps de le voir venir. Je tente évidemment de me débattre, en vain. Il est beaucoup trop fort pour moi et je ne voudrais tout de même pas alerter mon frère qui est toujours à l'étage. D'ailleurs c'est là-bas qu'il m'emmène. Dans sa chambre. Il referme même la porte derrière nous comme on en a pris l'habitude. Il me repose sur le sol après quelques pas et je ne me gêne pas pour lui donner une bonne gifle qu'il avait bien mérité. Comme toujours bien sûr la douleur a l'air de l'amuser parce que le sourire arrogant ne quitte pas ses lèvres de gamin. Et la personne que je veux gifler tout de suite ça serait plutôt moi à cause de cette satanée attirance que j'éprouve encore plus face à lui. Il sait que quand on est seuls tous les deux je perds mes moyens et ça l'amuse de jouer avec ça. Alors j'essaie de ne pas lui donner cette satisfaction en prenant un air en colère et en murmurant sur un ton sévère.

- Tu es complètement taré ! Je ne suis pas jalouse je suis énervée !

- Énervée de m'avoir entendu parler d'autres filles. Je crois que si tu cherches la définition sur internet tu vas trouver le mot jalousie.

- Je t'ai frappé une fois je ne vois pas ce qui me retiens de le refaire alors fais gaffe.

- Vas-y alors.

Il s'approche de moi pour diminuer le peu d'espace qui nous séparait encore et prend ma main dans la sienne pour la lever vers sa joue.

- Vas-y frappe-moi.

Ce n'est pas l'envie qui me manque. Mais je n'y arrive pas. Je ne sais pas pourquoi. À une époque si Zachary Collins m'avait carrément proposé de le gifler je l'aurais fait sans hésiter. Mais là je ne peux pas. Je crois que je me suis trop laissée attendrir pendant ce temps passé avec lui. Je ne suis pas la même et je déteste ça franchement.

- Je le savais. Tu es déjà trop dingue de moi pour le faire Amyra Salem.

- Et si je te tuais à la place ?

- Essaies toujours.

Et en une fraction de seconde, je me retrouve coincée entre ses bras qui m'attirent contre lui et ses lèvres scellent les miennes me faisant taire. Je voulais avoir le dernier mot mais le repousser c'est comme une torture qui me prend le corps tout entier. J'essaie tout de même de le faire parce que je suis trop énervée pour le laisser me déstabiliser ainsi. Et j'y parviens.

- Non mais qu'est-ce qui ne va pas chez toi ? Je suis en train de te crier dessus et toi tu m'embrasses ?

- C'est sûrement parce que tu es encore plus sexy quand tu es en colère. Et jalouse.

Il m'attire à nouveau vers lui avant que je puisse objecter au sujet du dernier mot et cette fois il dépose de doux baisers dans mon cou. Je les sens revenir, ces frissons que je déteste et qu'à la fois je considère à présent comme une réelle drogue.

- Ne crois pas que tu vas...que tu vas...

Je me rends compte que lutter contre le désir ne sert plus à rien à cet instant. Je ne trouve plus les mots pour lui crier dessus et surtout je sais que les gémissements que je pousse l'empêchent de me prendre au sérieux. Alors je me contente de me laisser aller et je glisse mes doigts dans ses cheveux. Pourquoi ce garçon me fait-il autant d'effet ? Pourquoi le détester est devenu impossible pour moi ? Je ne le supporte toujours pas ça c'est sûr. Mais il y a certains moments où la fameuse tension sexuelle est beaucoup trop présente pour ne pas être ressentie. Je sens ses mains se glisser jusqu'à ma poitrine, et une fois arrivées près des boutons de mon t-shirt, il agrippe le tissu et tire dessus d'un geste brusque qui le déchire. Là encore, au lieu de lui en vouloir d'avoir détruit l'un de mes t-shirts préférés, je commence à être de plus en plus excitée par sa force et je pousse un petit cri de surprise qu'il étouffe aussitôt en plaquant sa main sur ma bouche. Et justement à ce moment-là on entend quelqu'un frapper à la porte. Mon frère appelle Zachary qui se sépare de moi en souriant, dépose un dernier baiser sur ma bouche et part vers la porte. Je me mets très vite dans un coin de la pièce où je ne pourrai pas être vue, et la porte s'ouvre presque aussi vite. J'entends Sébastian demander où je suis, Zachary répondre que j'ai reçu un appel du garage et que j'y suis allée avec Sofia en urgence, et puis plus rien qui me concerne. Juste de simples au revoir et la porte qui se referme. Zachary est malin, il sait que Sébastian ne pose jamais de questions quand il s'agit de ma voiture qu'il a bousillé. Il se sent beaucoup trop coupable pour ça, heureusement. Je souris donc en retournant vers Zachary et quand il se retourne je l'embrasse sans qu'il ne s'y attende. Il pose ses mains sur mes hanches pendant que je le tire vers le lit, pour le pousser dessus et m'asseoir sur lui. Je continue de l'embrasser tandis que la porte d'entrée au rez-de-chaussée nous indique que nous sommes officiellement seuls dans cette maison gigantesque. Je ne sais pas jusqu'où on pourrait aller à ce moment-là. On est vraiment seuls pour la première fois depuis qu'on est ensemble et même si je n'arrête pas de paniquer à l'idée que cet instant fatidique d'une relation approche, je me sens en confiance avec lui. Ce qui est assez surprenant et plaisant à la fois. C'est étrange mais même si notre couple n'est pas plus simple que les autres que j'ai eu, j'ai ce sentiment et cette envie que ça marche. Je sens nos deux corps se rapprocher de plus en plus, signe qu'ils en veulent plus. Qu'ils ont soif de plus que de simples caresses. Mais Zachary parvient vite à freiner le sien visiblement car il met fin à notre baiser et me regarde préoccupé.

- Attends tu...tu es sûre de vouloir...aller plus loin ?

- Comment ça ?

- Je veux dire qu'on couche ensemble.

- Oui ça j'avais compris crétin. Mais pourquoi je ne serais pas sûre ?

Il a l'air de chercher les bons mots qui ne m'énerveront pas. Je redoute donc déjà sa réponse.

- Parce que tu...tu ne l'as jamais fait.

Je me redresse aussitôt, ce qu'il fait à son tour bien évidemment en regrettant les mots qui viennent de sortir de sa bouche. Mais je ne comprends pas comment il l'a su. Je ne lui ai jamais dit ça.

- Comment tu le sais ?

Il se gratte nerveusement la nuque en regardant le mur à côté de nous. Signe qu'il redoute fortement ma réaction. Mon regard à moi ne le quitte pas. Je veux savoir.

- En fait comment dire...c'est assez évident Amyra.

Waouh. Je crois qu'apprendre que des rumeurs tournent autour de moi dans toute la ville aurait été moins agaçant que d'entendre cette phrase qui fait que je le quitte d'un bond en retournant sur la terre ferme.

- Comment ça évident ?!

- Pourquoi tu te mets à crier ?

- Parce que tu es un véritable imbécile Zachary Collins !

Je me dirige vers la porte en grognant de rage et je sors en la claquant violemment. Je finis par m'enfermer dans ma chambre pour essayer de me calmer. Non mais il est vraiment con celui-là ! Il croit savoir parler aux femmes mais il en est loin. Il croit que dire à une fille que ça se voit qu'elle est toujours vierge c'est une bonne chose ? Et puis c'est quoi le problème avec moi ? Je dis ou fais des choses qui font que les gens voient ça de moi ? Je ne m'en suis jamais rendue compte. Si quelqu'un d'autre me l'avait dit, à un autre moment, ça m'aurait été complètement égal. Mais que Zachary le fasse alors qu'on était sur le point de...je trouve ça humiliant et frustrant. Il a de l'expérience lui c'est sûr. Et les filles avec qui monsieur a couché en avaient sûrement aussi. Mais ça ne veut pas dire qu'il a le droit de me rabaisser comme ça. La couleur rouge de mon visage ne signifie pas la colère mais la honte. Je n'ai pas d'expérience et ça se voit. Je suis une petite vierge de bientôt dix-huit ans ridicule. Je n'arrive pas à croire que ce qui vient d'arriver est arrivé, j'ai presque envie de passer le reste des vacances enfermée dans ma chambre pour ne plus avoir à regarder Zachary Collins dans les yeux. Je l'entends d'ailleurs frapper à la porte de ma chambre quand je retire mon t-shirt déchiré pour enfiler un sweat-shirt couleur bordeaux.

- Amyra ouvre s'il-te-plaît ! Je suis désolé je ne savais pas comment le dire autrement !

C'est son excuse ? Il n'a pas su mieux formuler une chose qui aurait pu me mettre hors de moi qu'importe la façon dont il l'aurait dit ? Je ne sais même pas s'il existe une manière plus agréable de le dire. Il aurait mieux fait de se taire, si jamais je ne voulais pas le faire au final, je lui aurais dit. Je regrette d'avoir chassé mon frère et de me retrouver seule avec Zachary. Ce crétin de Zachary !

- Amyra je sais très bien que tu es dans ta chambre alors ce n'est pas la peine de m'ignorer ! Je resterai devant cette porte jusqu'à son ouverture ! Ou alors je l'enfoncerai !

Ouais bonne chance pour ça. Je reçois un message de ma meilleure amie. Timing parfait. Elle me demande comment ça se passe depuis le départ de mes parents. Je réponds aussitôt que c'est une catastrophe et cette discussion se termine évidemment par une proposition de sortie que j'accepte volontiers. Zachary tambourine toujours sur la porte mais je ne l'écoute même plus. Je suis trop occupée à me détester et à me traiter de tous les noms. Pourquoi fallait-il que je sois aussi stupide ? J'entends le klaxon de Sofia seulement quelques minutes après, durant lesquelles Zachary n'a pas perdu d'énergie. Je me demande comment il fait pour tenir aussi longtemps sans lâcher l'affaire. Tous mes ex auraient déjà abandonné, mais pas lui. D'un côté je trouve ça mignon. Et de l'autre la honte est trop forte pour me laisser attendrir. Alors je prends mes affaires, mon courage à deux mains, et je baisse la tête pour éviter tout contact visuel lorsque j'ouvre la porte. L'effet de surprise me permet de me faufiler sans qu'il puisse s'y attendre et je me dépêche de marcher dans le couloir.

- Amyra attends.

Il se met à me courir après et me rattrape vite dans les escaliers comme je devais m'y attendre. Ce qui ne m'oblige pas à m'arrêter.

- Amyra où est-ce que tu vas ?

- Je sors, j'ai le droit non ?

- Attends tu ne vas pas partir comme ça juste à cause d'une phrase mal choisie.

- Pourquoi pas ?

- Parce que c'est ridicule.

- Ah parce qu'en plus je suis ridicule. Vas-y rajoute-en une couche je t'en prie.

- Amyra-

Je me retourne aussitôt en plongeant mon regard dans le sien. Puisque je me suis arrêtée en route je l'ai stoppé dans son élan et cette fois c'est moi qui suis en position de force puisqu'il y a trop de sentiments négatifs en moi pour que je puisse être déstabilisée.

- Quoi ? Vas-y parle je n'ai pas que ça à faire.

Il hésite de toute évidence. Il doit avoir peur de dire encore une chose qui va m'énerver. Pourtant il finit par retrouver l'usage de sa parole.

- Je...je voulais juste être sûr que ça ne te dérange pas.

- Et tu ne crois pas que si ça m'avait dérangé je te l'aurais dit ? Tu me crois idiote à ce point ?

- Non mais si ça ne te dérange pas alors tant mieux non ?

Je lâche un petit rire amer. Il pose vraiment cette question. Je dois me calmer. Après tout perdre le contrôle c'est exactement ce qui pourrait lui faire plaisir en temps normal. Alors je me mets à sourire et je pose mes mains sur son torse en me rapprochant de lui comme pour le séduire.

- Mon cher Zachary, si tu crois être assez irrésistible pour que je te tombe dans tes bras après ça, alors tu seras très surpris d'apprendre à quel point...c'est assez évident que non.

Et sur cette dernière phrase, je fais demi-tour et sors de la maison. Je grimpe dans la voiture de Sofia très vite pour qu'on roule jusqu'à la plage. Ça faisait longtemps que je n'étais pas venue apprécier le sable chaud et le bruit des vagues. L'air marin me manquait. Ces derniers temps j'étais trop préoccupée par trop de choses pour venir ici. On va s'asseoir au bord de l'eau qui s'échoue délicatement sur nos pieds. Le sable est similaire à de la farine, il est doux et confortable. Et l'eau est transparente et parfaitement nette. C'est le genre d'endroit que beaucoup de personnes voudraient visiter au moins une fois dans leurs vies.

- Il t'a carrément sorti que c'était évident ?

- Ouais.

- Waouh.

- Ça l'est ?

- Absolument.

- Hey !

Je la bouscule légèrement en lui donnant un coup d'épaule ce qui fait rire cette dernière. Et moi aussi par la même occasion puisque je sais qu'elle n'est pas sérieuse. Je me rends compte à ce moment-là qu'avec toutes ces histoires je n'ai plus vraiment pensé à elle, alors qu'elle est là pour moi depuis le début cette situation de dingue dans laquelle je suis. Je ne sais pas comment ça se passe avec Mac, je ne sais pas si elle a des problèmes ou si au contraire tout va bien, je ne sais rien. Je dois vite me renseigner au lieu de continuer de me comporter comme une meilleure amie indigne.

- Tu te rends compte que ça fait des semaines que tu t'occupes de mes problèmes alors que je ne sais rien des tiens ?

- Qui te dis que j'ai des problèmes ?

- Soyons réalistes Sofia tu es une source de problèmes.

- Tu veux dire que assez c'est évident ?

Bon d'accord celle-là encore je la laisse passer mais à la prochaine remarque qu'elle me fera sur ce qui est arrivé il y a quelques instants je la tuerai. Ce qui ne m'empêche pas pour le moment d'envoyer une bonne dose d'eau sur elle en reprenant ensuite mon sérieux pour lui montrer que je suis prête à avoir une vraie discussion avec elle. Elle le comprend apparemment et après un instant elle se livre enfin à moi.

- Mac va repartir. Et c'est pour de bon cette fois.

Oh. C'est une des choses que je m'attendais le moins à entendre. Je savais qu'il avait aimé le Cambodge mais je ne pensais pas que c'était au point de vouloir y retourner. Et surtout d'y vivre. Pour autant que je sache il a toujours vécu ici et il a toujours dit qu'il aimait l'endroit. Je me demande bien ce qui lui passe par la tête. Et bien sûr ça ne sert à rien de demander à ma meilleure amie ce que ça lui fait de savoir ça. Je la connais beaucoup trop bien pour savoir qu'elle est effondrée mais qu'elle fait bonne figure devant tout le monde. Alors tout de suite, je commence à me demander si elle est mal à cause de ça depuis longtemps et donc si je suis vraiment une amie assez abominable pour n'avoir rien vu.

- Quand-est-ce qu'il te l'a dit ?

- Hier. Tu imagines bien que j'ai pété un câble.

- Pourquoi tu ne m'as rien dit ?

Je suis partagée entre le choc et la honte de savoir que je n'ai pas été là.

- Tu as l'air tellement bien avec Zachary chérie. Je ne voulais pas que tu aies à te préoccuper de moi et de mes histoires de cœur ridicules.

- Sofia ton cœur est plus important que le mien. Alors je te jure que la prochaine fois que tu me fais ce coup-là en me cachant quelque chose d'aussi important je te brise en deux c'est clair ?

Elle se met à rire en hochant la tête, puis son rire s'accompagne de petites gouttes qui se mettent à couler le long de sa joue et je la prends dans mes bras pour la serrer contre moi et la rassurer. Ça c'est ce que j'aurais dû lui dire hier mais je n'ai pas pu parce qu'elle ne voulait pas me déranger. Je dois me rattraper en étant présente. Je dépose un baiser sur le haut de sa tête et frotte ma main sur son épaule comme pour la bercer et la calmer.

- Amyra qu'est-ce que je vais faire sans lui ?

Sa voix est tremblante. Je ne vois pas son visage mais les petites gouttes d'eau qui tombent sur mon bras m'indiquent qu'elle est vraiment au bord du gouffre. Normalement je suis douée pour réconforter les gens, mais là je n'arrive pas à le faire. Ça me tue. Je ne supporte pas de voir ma meilleure amie dans cet état et de ne pas pouvoir la rassurer comme il faut. Je pense que je vais devoir avoir une grande discussion avec Mac. Je dois comprendre sa décision. Si ce départ a été décidé sur un coup de tête ou s'il y avait bien réfléchi. Après quelques minutes qui me parurent atroces à entendre ma meilleure amie pleurer, je la vois enfin se calmer. J'envoie à nouveau un coup d'eau sur elle pour essayer de la faire rire, je décroche au moins un léger sourire et je prends sa main. Je devrais être là pour elle. Au moins ce soir, je me sens déjà assez mal de ne pas avoir été là hier.

- Bon ce soir c'est décidé je viens dormir chez toi.

- Tu fais ça pour être près de moi ou pour être loin de Zachary ?

Je me tourne vers elle, avec un air désespéré qui veut dire à la fois je n'arrive pas à croire que tu puisses penser ça de moi et tu as tellement raison que ça me fait presque peur. Je n'ai même plus besoin de mots pour lui exprimer ça d'ailleurs, elle me connaît beaucoup trop bien et finit par accepter. Je suis certaine qu'au fond elle n'attendait que cette proposition. Il fut un temps où Sofia était celle de nous deux qui avait le plus d'histoires dramatiques. Je pense que c'est pour cette raison d'ailleurs qu'elle n'a pas voulu me parler de cette histoire-là. Elle ne voulait pas en rajouter. Bref tout ça pour dire qu'à l'époque je dormais chez elle presque tous les soirs, alors je sais exactement comment m'y prendre maintenant. Et si par la même occasion je parviens à rendre Zachary totalement dingue sans moi alors c'est un bonus que je ne peux pas me permettre de refuser. On décide donc de rentrer chez elle, j'ai des affaires là-bas alors pas besoin de passer par chez moi. Et on passe la soirée à regarder des films d'horreurs, à manger comme de vraies goinfres et à parler des rumeurs qui tournent en ville. Je ne suis pas du genre commère hein. J'aime juste entendre ce qui se dit pour savoir à quel point les gens sont curieux. Parce qu'évidemment je ne répète jamais rien de ce que j'apprends ensuite sauf à Sofia. Elle et moi on s'est promis une chose. Si on apprend quelque chose sur quelqu'un, on se le dit tout de suite, mais on ne le répète à personne d'autre pour ne pas alimenter la rumeur. Et jusqu'à maintenant ça a toujours fonctionné. Je suis heureuse de voir Sofia sourire et de l'entendre rire, ça me rassure et je suis heureuse d'un côté que ce moment gênant avec Zachary soit arrivé. Sinon je ne serais pas sortie avec mon amie et elle aurait tout gardé pour elle pendant encore je ne sais combien de temps. S'il y a bien une chose que je ne veux pas c'est qu'un garçon vienne se mettre entre nous.

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