Prologue

- M'entendez-vous? Faites du bruit ou n'importe quoi pour qu'on vous sorte de là.

Depuis une dizaine de minutes, cette voix répète la même chose. Je voudrais crier un appel à l'aide de mes lèvres fendues mais pourquoi le faire si je n'ai presque plus de raison de vivre? Sa tête est posée sur ma jambe droite, cloîtrée entre deux blocs. Je n'arrive pas à bouger et même si je le pouvais, je ne le ferais pas juste pour qu'il n'ait pas mal. De mes mains, j' essaie de protéger son corps meurtri contre l' empilement de pierres et des bouts de bois qui quelques minutes avant servaient d' encadrement pour les fenêtres.

- Ne t'en va pas stp, pleuré-je en voyant tout le mal qu'il a de garder les yeux ouverts.

Un rictus essaie de se former sur ses lèvres et ça a pour effet de m' arracher un sourire. Je ne sais pas d'où lui vient un tel courage mais depuis que je le connais, Gardy avait toujours été un homme fort. Dans les situations les plus difficiles, il s' était toujours dressé en un bouclier pour moi me répétant que rire d'un drame le rendait moins "dramatique" puisqu'à la fin tout s' arrangera. J'ai cru en cela pendant les trois merveilleuses années passées près de lui et même en ce moment, j' essaie de m'y accrocher me disant intérieurement qu'on finira par s'en sortir...ensemble.

Une nouvelle secousse me fait regretter ma dernière réflexion. Le mur contre lequel je m'étais appuyée vibre sous mon dos. Je ferme alors les yeux en couvrant sa tête de mon corps. C'est à ce moment que je voudrais hurler pour qu'on vienne nous sortir de là mais personne ne parviendrait à entendre ma voix enrouée à force d'avoir trop crié. D' ailleurs, ça doit être la pagaille dehors. Je panique face à notre impuissance. D'une main, je m'accroche au pied du lit qui ne se tient pas en place non plus. Le lustre de la chambre tombe près de moi et mon coeur faillit s' arrêter. Le sol craque, j'essaie alors de bouger ma jambe qui s'en sort blessée pour me réfugier de l'autre côté de la pièce, traînant le corps de Gardy avec le peu de force que j'ai en essayant de garder mon équilibre. Les vibrations cessent d'un coup et je me rassois avec lui dans la même position qu' avant.

Je soupire en regardant ma robe de mariée toute baignée de notre sang et déchirée sur les côtés, tout comme sa veste que je viens de lui enlever pour stopper une hémorragie qu'il a au bras. J'avais tenu à ce qu'on passe notre lune de miel à cet hôtel alors que lui m' avait demandé de rentrer avec lui dans sa province natale à Jacmel. En ce moment, nous aurions été dans la maison faite de paille de sa grand-mère à l'abri de ces décombres. Mon entêtement m' avait toujours fait voir de toutes les couleurs. D'un regard pensif, je m' attarde sur cette alliance qu'il m' avait passée deux heures de cela. Pourquoi diable fallait-il que cette journée se termine comme ça?

- Lydia...sauve-toi, articule-t-il difficilement. Je ne...vais pas tenir... longtemps.

- Pour le meilleur et pour le pire, lui rappelé-je en caressant mon alliance.

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