Encore un week-end passé sur l'eau.
A la fois, pour échapper à Charlotte, mais aussi pour me détendre. Mon surf sous le bras, le haut de ma combi baissé, je rejoins mon van. Je pose ma planche contre celui ci, puis me baisse pour attraper mes clés cachées dans l'amortisseur.
Mon frère stresse à chaque fois qu'il vient sur la côte, il a toujours peur que quelqu'un vol le "cam's" mais comme je lui dis qui voudrait de ce vieux "tas de ferrailles".

Vivement demain, c'est la rentrée. J'ai reçu mon emploi du temps et comme depuis quelques années, Michel, le directeur a fait en sorte qu'on se croise le moins possible avec Charlotte. Il est compréhensif, il me connaît bien et sait à quel point je souffre de cette relation. 

Quand je pense que nous fêtons nos dix ans dans une semaine. Dix ans que je suis avec elle, cinq magnifiques, cinq à tourner en rond et à chercher comment partir.
Mais sa maladie m'en empêche, elle est d'une jalousie maladive, à chaque fois que j'essaie de m'échapper, elle se met en danger et je reviens. Elle a tellement peur de l'abandon, qu'elle préfère vivre malheureuse avec moi qu'être seule.
Je ne sais pas comment faire, je suis effrayé à l'idée qu'elle se foute vraiment en l'air. Elle m'a tellement fait peur, lorsqu'il y a quelques mois, je l'ai retrouvée allongée inconsciente sur notre lit, des boîtes de comprimés partout autour d'elle.
J'ai bien cru que c'était fini cette fois là. 
Elle avait avalé des somnifères.. Je suis arrivé à temps.. Tout ça parce que je discutais souvent avec une voisine. 

Je range mon surf puis m'essuie avec ma serviette. Je n'ai aucune envie de rentrer à la maison. Assis derrière le volant, je regarde la mer continuer de s'agiter. C'est la seule chose que Charlotte ne contrôle pas dans ma vie, elle me laisse surfer ou faire de la voile à ma guise. Je crois que sans cet échappatoire, il y a bien longtemps que je serais devenu fou.

Après vingt minutes à contempler l'océan, je me décide enfin à démarrer et à rentrer.

Charlotte est assise sur notre canapé bleu ciel, un livre à la main. Il y a cinq ans, je serais allé la rejoindre et je l'aurai embrassée, aujourd'hui, elle ne m'attire plus. Elle est plus comme une amie et encore. Elle ferme son livre en m'entendant arriver et laisse son visage vers moi. 

- Ah te voilà ! C'était bien ? 
- Oui. Il y avait des bonnes vagues. Je vais prendre ma douche.

Je traverse notre salon, décoré dans un style terre et mer, c'est à dire avec du bleu et du beige, puis rejoins les escaliers en bois.
Je décide de prendre un bain, c'est plus long, c'est plus détendant et ça me permet d'éviter un peu plus de côtoyer Charlotte. 

La soirée se passe comme d'habitude, nous mangeons, puis je fais la vaisselle, Charlotte va au lit lire un livre, me faisant promettre de la rejoindre rapidement, je m'installe dans le canapé et mets la télévision, les heures tournent et vers une heure, je décide d'aller me coucher, sachant très bien qu'elle sera endormie et que je n'aurai pas à faire semblant de quoi que ce soit.