Chapitre 7 : Un dossier atypique
— Monsieur Dragnir ? répéta d'une voix forte Zeleph, le maitre de cérémonie.
Natsu toujours allongé sur sa rangée de siège ouvrit un œil :
— Tu m'accompagnes ? lança-t-il avec nonchalance.
— Je ne saurais refuser pareille humiliation, répondit Rakheid en se levant un sourire charmeur aux lèvres.
Ni une ni deux, le rosé bondit et atterrit avec souplesse sur ses jambes.
— Je suis là ! clama-t-il en se déplaçant avec assurance vers le comité.
Les deux frères avancèrent de concert, l'un emboitant le pas à l'autre et arrivèrent en même temps à hauteur des juges. À première vue, ils semblaient détendus, mais ils cachaient bien leur jeu.
Natsu s'immobilisa, son frère un pas derrière lui. Ensemble, ils faisaient front. Le plus jeune prit le temps de considérer un à un les juges, chacun droit dans les yeux. Peut-être en connaissait-il certains ?
À l'extrême gauche de la tablée, se trouvait la seule juge féminine de l'assemblée : une femme d'âge mûr très apprêtée. Ses cheveux étaient bouclés avec soin, sa robe scintillait. Elle avait dû être incroyablement belle par le passé.
À ses côtés se trouvait un homme bodybuildé que Natsu ne pouvait guère oublier. Il s'agissait du directeur d'un Collège qu'il avait affronté : cet homme se nommait Jiemma Orland, Directeur de Sabor Tooth. L'adolescent grimaça contrarié. Pourquoi fallait-il que ce type soit juge ici ? Encore heureux qu'il n'ait pas prévu de cacher le fiasco qui s'était déroulé ! Il souda ses mâchoires énervé. Jamais il ne pardonnerait à son père ce qu'il avait fait ce jour-là. Jamais !
La main apaisante de son frère vint se poster sur son épaule. Natsu secoua la tête afin de chasser la tension qui commençait à monter en lui. Ce n'était vraiment pas le moment de se rappeler de ça !
À la gauche de Jiemma, se trouvait un homme aux cheveux blancs tirés en arrière, son visage présentait un tatouage de lignes brisées d'un côté noires, de l'autre blanches. Natsu ne l'avait jamais vu de sa vie, mais à première vue, ce type ne lui inspirait aucune confiance. Il n'arrêtait pas de le fixer avec presque de la bave sur les lèvres ! C'était...hum franchement dégoûtant !
Ensuite venait le Directeur Zeleph, assis à côté d'un minuscule vieillard à moitié chauve qui roupillait.
Enfin, juste avant Mest Gryder, le délégué de la Fédération, était installé un homme aux cheveux châtains mi-longs, des lunettes de soleil sur le nez et un chapeau de cow-boy vissé sur la tête. Lui, il avait l'air sympa.
— Madame, Messieurs, dit-il d'un sourire chaleureux. C'est un honneur de me présenter. Je suis Natsu Dragnir !
— Oh ! répondit charmée la seule juge féminine de l'assemblée. Tout le plaisir est pour nous, jeune homme ! Enfin un garçon poli avec de l'allure ! continua-t-elle en papillonnant des cils. Je suis Jenny Realight de l'équipe de Blue Pegasus. Dites-moi, Monsieur Dragnir, pourquoi n'avez-vous pas revêtu les couleurs de votre équipe ?
— C'est que... hésita Natsu gêné. Il fit une pause et contempla ses pieds en se balançant sur ses jambes. Puis, il releva la tête et souda son regard à celui de Jenny, tout embarras envolé. C'est que je n'appartiens à aucune équipe ! termina-t-il.
Un brouhaha de commentaires fit suite à cette déclaration.
— Comment ? s'écria la juge.
— C'est inacceptable ! renchérit son voisin, Jiemma Orland, le regard rivé sur l'adolescent.
— Natsu Dragnir... commenta Mest Gryder de la Fédération dans un murmure. Ciel ! Je ne vous avais pas reconnu. Notre vacataire ! Notre IA vous a sélectionné ? C'est... inattendu. Il se leva et déclara haut et fort à l'assemblée. Ce qu'il dit est exact, Monsieur Dragnir ne fait partie d'aucune équipe. Cependant, la Fédération l'a autorisé à participer en tant que remplaçant.
— Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? protesta Zeleph d'une voix ulcérée.
L'incompréhension était totale. Tous les regards s'étaient rivés sur le garçon aux cheveux roses. Une vaste rumeur gonflait dans le gymnase. Les gens étaient mécontents. Un remplaçant sélectionné ? Du grand n'importe quoi !
Natsu immobile ne broncha pas, il se laissa contempler, le front haut, le regard fier. Il n'avait rien à cacher, enfin... il fallait que tout le monde le pense.
— Je n'aimerais pas être à sa place, murmura Mirajane.
— Un joueur de basket sans équipe en même temps c'est ridicule ! se moqua Sting blasé.
— Il a pourtant été sélectionné, lui rappela Rogue.
— Il affronte sans broncher. C'est impressionnant ! ajouta Erza.
Tous les jeunes ne purent qu'acquiescer, même Sting. L'attitude du rosé était exemplaire.
Le cœur de Lucy se serra. Natsu ne laissait rien paraitre : son sourire était conquérant, sûr de lui... Cependant, elle n'était pas dupe. Il n'en menait pas large. Il n'y avait qu'à voir la main de son frère qui restait posée sur son épaule.
— Monsieur Dragnir s'est trouvé dans l'incapacité d'intégrer une équipe, expliqua Mest Gryder. Devant son... Il se tourna vers Natsu contrarié. ... son obstination à toute épreuve, une autorisation spéciale lui a été accordée.
— Bouffon ! cria une voix dans les gradins.
— Rentre chez toi ! ricana grassement un rouquin.
« SILENCE !!! » tonna Zeleph au milieu des rires fusant dans la salle.
Natsu impassible hocha lentement la tête, puis sans demander d'autorisation déclara :
— Mon père a refusé de signer les documents pour que j'intègre l'équipe de mon collège. Il pinça les lèvres, il ressentait toujours la même frustration qu'à l'époque. Alors, je me suis rendu à la Fédération pour les supplier de m'accorder une... Malicieux, il chercha ses mots ; ses pupilles se mirent à reluire ...une dérogation !
— C'est joliment résumé, éclata de rire Mest. Supplier, dites-vous ? Vous nous avez plutôt fait vivre l'enfer, jeune homme ! Cependant, c'est vrai, vous l'avez reçue votre autorisation.
— Ah ! Je comprends mieux pourquoi ta tête me disait quelque chose, déclara le juge au chapeau de cow-boy. Je suis Rocker des Cuattro Cerberus. C'est donc toi qui es venu nous prêter main forte contre Sabor Tooth. Enchanté ! Je n'étais pas présent, mais j'ai vu le replay, très beau match !
— Mmmm, j'aurais bien voulu voir ça ! susurra le juge aux tatouages de lignes brisées.
— TOI !!! tonna la voix de Jiemma, le Directeur de Saber Tooth. C'était toi le vermisseau accompagné par son taré de père ?
— Je... je suis désolé, souffla piteusement Natsu en s'accrochant l'air de rien à la main de son frère.
— Comment as-tu osé déposer ta candidature ? rugit Jiemma en frappant du poing sur la table.
Natsu sursauta, puis le regarda sans comprendre.
— Déposer ma candidature ? Non, non, j'ai rien fait !
Il avait l'air sincère. C'est ce que pensa Lucy et elle ne fut probablement pas la seule. Cependant, Zeleph, le Directeur de SaborFairy coupa court à la discussion.
— Madame, Messieurs, interpella-t-il. Ce n'est ni le lieu ni le moment de débattre de ce sujet. Nous sommes ici pour valider les candidatures. Nous aurons tout le loisir demain lors des entretiens individuels et familiaux d'éclaircir ce point.
— Uniquement s'il est encore là demain... susurra l'homme aux tatouages en se frottant les mains.
Natsu ne l'entendit pas. Catastrophé, il s'était retourné vers son frère en s'écriant :
— Des entretiens ? Des entretiens familiaux ?
Rakheid leva les yeux au ciel. Quel idiot ! A quoi s'attendait-il ? Évidemment, qu'il y aurait des entretiens !
Les deux frères restèrent face à face une à deux secondes. Nul besoin de se parler, leur lien était si fort qu'ils se comprenaient rien qu'en se regardant. Natsu souffla apaisé et reporta son attention sur les juges.
— Monsieur Gryder, poursuivit Zeleph, reprenez s'il vous plait.
— Je récapitule : la Fédération lui a alloué le droit de participer au championnat. Il a effectivement participé à... Il partit à la recherche de l'information manquante dans son livret ...à trois matchs, enfin presque trois ! Il rit. Il était donc en droit de déposer sa candidature.
— Des statistiques sur trois matchs ne sont que pacotilles ! ronchonna Jiemma.
— Jiemma, interrompit Zeleph. Je vous en prie, laissez Monsieur Gryder continuer !
— En ce qui concerne le dossier scolaire...
La voix du représentant de la Fédération partit dans les aigues. Il écarquilla les yeux, fixa son feuillet puis l'air ahuri reporta son attention sur le garçon devant lui. Immédiatement, le visage de Natsu s'éclaira du sourire le plus malicieux qu'il avait en magasin.
— Ouais, dit-il en se grattant le haut du crâne. Ça pique.
— Ça pique ? répéta éberlué l'homme à la cicatrice. Monsieur Dragnir, c'est CA-TA-STRO-PHIQUE ! Clairement, je ne peux pas valider votre candidature. Zéro de moyenne au premier semestre, c'est irrecevable.
Toute l'attention de la salle se reporta à nouveau sur le jeune Dragnir qui ne diminua en rien son espièglerie. Il assumait complètement.
— Zéro de moyenne ! souffla Erza.
— Un raté, ironisa Sting.
— Il en est fier ! s'étonna Rogue.
— Votre candidature est rejet... reprit Mest Gryder.
— ... Je vous arrête tout de suite, le coupa Zeleph. Ne prenez pas ceci à la légère Monsieur Gryder. Si vous rejetez sa candidature, cela signifie que notre IA a été piratée.
— Zéro de moyenne, voyons directeur Zeleph ! Cette vermine n'a pas sa place chez nous, s'égosilla Jiemma.
Ces injures ne firent réagir personne. Venant des adultes haut placés, elles étaient considérées comme normales. Natsu baissa la tête dépité.
— Si notre IA a commis une erreur, nous n'avons pas le choix : le tirage devra être rejoué. Soyez donc sûr de ce que vous avancez !
À toute vitesse, Mest Gryder parcourut à nouveau en large et en travers le maigre dossier de ce joueur atypique qui lui donnait décidément du fil à retordre.
— Jeune homme, profita Jenny Realight, en attendant que ce cher Mest ne décortique tout cela, expliquez-moi. Comment un si beau garçon tel que vous a réussi à se retrouver avec une telle moyenne ?
Plusieurs rires fusèrent des gradins. Natsu hésita à répondre, mais Rakheid le rassura d'un simple regard.
— Madame...
— Appelez-moi Jenny.
Natsu rougit jusqu'aux oreilles.
— Jenny... Cela n'a pas été la meilleure de mes idées, je suis... euh têtu.
— Buté, le reprit son frère en souriant. Et idiot sur les bords !
Le rosé lui jeta un regard noir. Mais, il était là pour profiter, son père serait là ce soir. Il bomba le torse, redressa le menton et reprit d'une voix guillerette :
— Mon père ne veut pas que je joue au basket. Alors bah... j'ai visé le zéro de moyenne pour le forcer à m'écouter...
Il partit immédiatement d'un grand rire communicatif.
— Complètement demeuré ! s'écria Jiemma en levant les yeux au ciel.
— Aussi ! s'amusa Natsu.
— Vous venez d'Hargéon ? Vous apparteniez à une autre équipe avant ? demanda précipitamment l'homme aux lignes tatouées.
Natsu ne répondit pas, il le regarda en clignant bêtement des yeux. Pourquoi cette question ? Pourquoi ce regard ?
C'est alors qu'un cri jaillit des lèvres de l'envoyé de la Fédération. Il se leva d'un coup, le feuillet collé devant les yeux et d'une voix tremblante, il s'écria :
— Il n'y a aucune erreur. Je vous prie de m'excuser, je n'avais pas vu. C'est que... je ne savais pas que c'était possible. Monsieur Dragnir... votre candidature est validée !
— Pardon ? s'écrièrent l'ensemble des jurys d'une même voix.
— Hein ? s'étrangla Natsu alors que son frère et une partie de la foule rugissaient de joie.
— Il... il, continua Mest Gryder complètement assommé, il a obtenu la totalité des Signatures... Les Dix Joueurs Sacrés l'ont tous recommandé !
Un silence de mort s'abattit dans la salle. L'information était dure à digérer.
— Je ne comprends pas, déclara Natsu d'une voix blanche.
— Bienvenue aux Sélections, votre guide sera ... Minerva Orlando, termina Mest.
Le pauvre homme se laissa retomber sur son siège. Il était épuisé.
Tous les regards se tournèrent sur le seul membre du jury qui n'était pas encore intervenu : le vieil homme endormi.
— Makarov, expliquez-nous ! exigea Zeleph.
Aussitôt, le petit homme bondit sur sa table. Nul ne l'avait vu bouger, tout le monde le croyait assoupi. Il était déjà debout, en pleine forme, sautillant même. C'était un minuscule vieillard au crâne dégarni avec une épaisse moustache.
"Un ancêtre", songea Natsu.
— Bonjour Natsu, dit-il. Je suis ravi de faire ta connaissance. Il marqua une pause, sourit puis se tourna vers l'assemblée. Je ne peux pas répondre à la place des autres Joueurs Sacrés, cependant, moi, j'ai vu ce petit évoluer sur un terrain. Il est venu en renfort pour Lamia Scale dans le match qui l'opposait à mon équipe. Ce que j'ai vu ce jour-là, c'était du grand art. Tu m'as époustouflé, petit !
— Vous... vous êtes un Joueur Sacré ? souffla Natsu n'en croyant pas ses yeux.
— C'est Makarov, Natsu, le Directeur de Fairy Tail, expliqua Rakheid.
— Celui qui a inventé cette technique où on prend appui sur un autre joueur pour tirer ? demanda le rosé complètement hypnotisé.
Rakheid hocha la tête. Natsu en oublia tout : où il était, pourquoi il y était et tous les enjeux qui s'y jouaient. Il avança d'un pas vers le vieillard, un Joueur sacré, un de ces êtres qui avaient révolutionné le basket... à un point tel qu'ils avaient leurs statues dans un musée, leurs empreintes gravées dans les murs du palais royal.
— C'est un honneur, le vieux dit-il émerveillé. La technique que vous avez mise au point offre un tas de possibilités !
— Tu la maitrises ? s'enquit le Joueur Sacré les yeux brillants.
— Ouh la ! J'en suis loin, répondit Natsu en riant, mais je m'entraine dur.
— Bon, conclut Zeleph. Toutes les candidatures sont donc validées. Le débat est clos.
Ses yeux reluisaient d'une couleur ambrée. Fixement, il observait avec envie le jeune Dragnir. Ce potentiel qui tournoyait autour de ce garçon... Pas une seconde à perdre, il devait prévenir le Roi !
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top