Chapitre 8



Jafar referma la porte de son bureau sèchement sans quitter Zuyad du regard.

- Je peux savoir ce qu'il se passe ? S'enquit son cousin en se laissant tomber sur le fauteuil.

- Figure-toi que durant ces dernières vingt-quatre heures j'ai appris beaucoup de choses, commença Jafar en posant ses mains sur le bureau ; Notamment le fait que ta fiancée ait menti sur son glorieux passé.

Zuyad se redressa en prenant un air sérieux.

- Et je peux savoir sur quel sujet ?

- Au sujet de son ancienne famille, en particulier sa demi-sœur. Belle Moor.

- Elle m'a tout dit à son sujet Jafar et je te l'ai rapporté. Cette femme est solitaire et n'a jamais eu de lien avec Eloïse.

- Ce que je peux comprendre aisément, s'enquit Jafar rictus aux lèvres.

Il s'installa lentement dans son fauteuil et s'y carra.

- Tu savais sans doute que je n'allais pas me contenter de ça, surtout avec la presse qui fouille dans les tréfonds secrets de ta future femme. Alors je suis parti à la recherche de cette fameuse jeune femme.

Zuyad se racla la gorge nerveusement, mais demeura sensible à l'écoute de la suite.

-Inutile de te décrire la surprise que j'ai eu lorsque j'ai découvert l'opposé de ta description.

Jafar marqua un temps de silence puis se pencha en avant.

- Elle m'a raconté son histoire, une histoire tout aussi touchante que troublante. Est-ce que tu savais que Eloïse et sa très chère mère l'ont piégées afin d'avoir la main sur son héritage ?

Zuyad écarquilla les yeux.

- Je l'ignorais, et je suis certain qu'il y a une explication à ça, se défendit Zuyad tant bien que mal.

Jafar observa son jeune cousin longuement et sut qu'il n'était pas au courant.

- Je ne veux pas d'explication, la vérité est aussi limpide que mes propres doutes. Quant à la description qui m'a été donné, elle est aussi fausse que tout le reste.

Cette fois-ci Zuyad fronça des sourcils.

- Maladroite je te l'accorde, mais son apparence est loin d'être celle que tu m'as décrite mon très cher cousin.

- Tu penses que Eloïse m'aurait menti à ce point Jafar ? S'enquit Zuyad l'air agacé.

- Jusqu'ici elle ne s'est pas montrée franche, contrat-il en se levant pour arpenter son bureau.

- Elle ne veut plus avoir de lien avec cette femme Jafar.

- Et je comprends enfin pourquoi, dit-il d'une voix rêche : La jalousie est l'une de ces motivations je suppose.

Jusqu'ici Jafar s'était montré patient et à l'écoute. Adopter cette stratégie était pour lui un moyen de consolider les failles de sa famille. De tempérament implacable et souvent surnommé le monarque sans coeur, Jafar avait décidé de se montrer le plus compatissant possible, surtout depuis le chao qui avait régné dans le cercle très fermé de sa famille. D'abord avec Souyana, qui du jour au lendemain avait demandé le divorce, afin de pouvoir jouir des dernières lueurs de la fortune de son oncle dont elle avait hérité. Puis après un combat aisément gagné contre l'ex-mari de sa sœur Jamina, mais qui avait créé un scandale dans le pays, Jafar s'était juré de dénouer les erreurs du passé. Et voilà qu'aujourd'hui son cousin lui ramenait une américaine dont le passé douteux lui donnait toutes les raisons de se méfier.

- Je te préviens Zuyad, si jamais ce mariage vire à l'échec, je risque de vraiment m'énerver, annonça-t-il d'une voix si menaçante que ce dernier se mit à pâlir.

- Il n'y a aucune raison pour que cela ce produise.

- Et comment le sais-tu au juste ? Demanda-t-il d'une voix dont l'impatience se faisait ressentir : Combien de fois j'ai entendu ça ? Combien de fois j'ai dû passer derrière toi pour faire le ménage ?

- Je ne t'ai rien demandé ! Je pouvais me débrouiller sans ton aide.

- Ah oui ? Alors puis-je savoir pourquoi tu m'as appelé toutes les fois où la situation devenait chaotique ?

Zuyad savait pertinemment qu'il était en tort mais sa fierté le rendait presque méprisable.

- Tu es trop jeune et trop fougueux pour envisager le mariage, reprit Jafar en adoptant une voix ferme et dénuée de toutes émotions, oubliant ainsi les liens qui les unissaient pour mieux dompter la situation.

- Tu n'as pas confiance n'est-ce pas ? Demanda Zuyad vexé.

- J'ai confiance en toi sur bon nombre de domaines mais en ce qui concerne les femmes, en effet, je doute. Tu n'as jamais fait tes preuves et ce mariage vire à l'échec avant même d'avoir commencé. Eloïse semble avoir des secrets et tu sais que j'ai horreur des secrets.

Zuyad se leva, l'air tourmenté.

- Je vais lui en parler, je suis certain qu'elle a une bonne explication.

- Ce qu'elle a fait à cette jeune femme ne mérite aucune explication, rétorqua Jafar d'une voix implacable ; La seule chose à faire à présent c'est d'attendre qu'elle veuille bien venir à vos fiançailles afin que la presse se calme.

Son cousin inclina sa tête respectueusement et s'apprêtait à partir quand Jafar lui barra le passage.

- Essaye de ne pas me décevoir Zuyad, murmura-t-il d'une voix grave ; Si je suis ici c'est parce que je crois en toi et je suis la dernière personne à décevoir.

Zuyad acquiesça en silence avant de quitter son bureau.

Une fois seul, Jafar se laissa tomber dans son fauteuil en lâchant un soupir. Il croisa ses mains près de sa bouche en songeant à la jeune femme qu'il avait quitté quelques heures plus tôt. Son périple à ses côtés avait été de loin le plus long et le plus agréable qu'il n'ait jamais connu jusqu'ici. D'ordinaire il était plutôt habitué à la solitude lorsqu'il souhaitait se rendre seul dans ce désert aride qu'il aimait foulé sur son étalon.

- Votre altesse ?

Jafar quitta ses pensées à la hâte pour accueillir Rachid avec un léger sourire.

- Puis-je avoir connaissance de vos tourments ?

- Ai-je l'air tourmenté ? S'enquit Jafar.

Bien sûr qu'il était tourmenté. N'importe quel homme le serait. Comment oublier cette jeune femme au regard de biche ? Comment fuir la sensation qui l'avait saisie devant cette silhouette séduisante ? Agacé par les images qui s'enchaînaient sans cesse dans son esprit Jafar se redressa sur le fauteuil avec humeur.

- Eloïse Ford nous a menti au sujet de mademoiselle Moor, expliqua Jafar quand il prit place dans le fauteuil en face de lui.

- Que voulez-vous dire ?

- Si les liens ont été rompus c'est parce que Mademoiselle Moor a perdu l'héritage de son père. Un plan soigneusement élaboré par la mère d'Eloïse.

Rachid écarquilla les yeux sous l'effet du choc.

- A-t-elle l'intention de le dire à la presse ?

Jafar esquissa une moue amère.

- Je ne pense que ce soit le genre de femme à sauter sur ce genre d'opportunité Rachid, au contraire elle était davantage pétrifiée à l'idée d'être confrontée à la presse.

- Alors qu'allons-nous faire ?

- Ce que nous avions prévu, répondit-il en se passant le pouce sur ses lèvres ; Belle Moor a le choix de venir ou non, mais j'espère qu'elle acceptera de venir.

Rachid esquissa un sourire confiant puis se leva.

- Vous connaissant votre altesse, je pense qu'elle viendra.

Jafar ne put s'empêcher de sourire dont l'esquisse diabolique le fit sourire à son tour. Mais une fois seul, Jafar perdit ce sourire car il n'était pas tout à fait sûr que ses talents de persuasion aient pu marcher sur Belle Moor...

~

Belle avait cessé de compter le nombres de minutes qu'elle venait de passer sur son ordinateur portable à regarder des articles qui parlaient des fiançailles d'Eloïse. Prise d'un fort dégoût, elle ferma brusquement ce dernier et récupéra sa tasse de chocolat chaud posée sur la table basse.

Dans ses plus sombres souvenirs passés avec Eloïse, Belle avait toujours su qu'elle parviendrait à ses fins. Et ce jour venait d'arriver. En épousant le cousin du Sultan, Eloïse s'assurait un avenir confortable. Une larmes solitaire glissa sur sa joue. Cette larme n'exprimait ni jalousie ni tristesse mais plutôt de la colère.

Son téléphone portable vibra sur la table-basse, la ramenant brusquement à la réalité. Belle essuya furtivement sa joue et décrocha avec une étrange sensation qui l'empêcha de se prononcer.

- Mademoiselle Moor, lança cette voix chaud et gutturale qu'elle tentait désespérément d'oublier.

Belle faillit lâcher sa tasse, et se redressa lentement sur le canapé.

- Vous avez perdue votre voix ?

- Comment avez-vous fait pour vous procurer mon numéro de téléphone ? Demanda-t-elle d'une voix sèche.

- Je crois qu'il m'est inutile de vous dire que je suis un homme de pouvoir, répondit-il d'une voix traînante.

- Vous ne manquez pas de toupet ! Je...

- Votre désagréable langage est-il dû au fait que je suis loin de vous ?

Belle réprima un frisson. Il est vrai qu'il lui était beaucoup plus facile de le confronter en le sachant à l'autre bout de la ville. Belle avait l'impression de retrouver l'assurance qu'elle avait perdue la veille, devant cet homme intimidant, et qui d'un seul regard lui avait donné l'impression d'être la proie d'un féroce animal.

- Oui, je dois l'avouer, il m'est plus facile de m'exprimer aujourd'hui que lorsque j'étais près de vous.

Le sultan émir un rire rauque qui la fit frissonner.

- Et si j'étais plus proche que vous ne le pensez, mademoiselle Moor ?

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