Chapitre 5




Inutile pour Jafar d'être en pleine lumière pour deviner qu'elle rougissait mais plus encore. Ses yeux s'étaient élargis sous la panique. Même s'il s'agissait de la taquiner Jafar fut surpris pas sa réaction. Elle s'était farouchement reculée sur le fauteuil, le regard perdu sur le plancher grinçant. Les femmes qu'il avait l'habitude de côtoyer se serait jeté sur cette proposition, esquissant leur plus beau sourire langoureux. Il pouvait aisément deviner l'affolement de ses battements de cœur et la peur qui traversait sans cesse ses yeux bleus.

- Je plaisantais mademoiselle Moor, dit-il enfin pour mettre fin au silence.

- Je sais, du moins j'espérais que ce soit le cas, murmura-t-elle d'une voix nerveuse.

- Il faut dire que vous m'avez tendu une belle perche.

La jeune femme lui accorda enfin un regard mais pas celui qu'il voulait.

- Vous ne m'avez pas laissée finir, lui fit-elle remarquer.

- Parce que j'étais à peu près sûr de ce que vous alliez dire, rétorqua Jafar en prenant l'assiette sur la petite table.

- Et bien vous vous êtes trompé, répliqua la belle jeune femme en fronçant son petit nez retroussé.

Jafar sentit ses lèvres danser d'un sourire en coin.

- Je ne me trompe jamais, mais je peux vous accorder le bénéfice du doute.

- Vous pensez ne pas vous tromper, mais je suis certaine qu'il vous arrive parfois d'être à côté de la plaque, mais votre entourage a sans doute trop peur de vous le faire remarquer parce que vous êtes...

- Puissant ?

Loin d'être touché par l'hypothèse de la jeune femme, Jafar décida d'en jouer pour creuser les profondeurs de ses pensées.

- Vous avez de l'audace pour parler à un homme tel que moi, vous avez beaucoup de chance que je sois de bonne humeur ce soir.

De nouveau elle fronça son nez, la bouche soigneusement fermée et il aurait voulu que ce ne soit pas le cas. Charnue cette dernière était si parfaitement bien dessinée qu'il lui était presque impossible de ne pas s'imaginer la posséder. Brusquement il se leva pour s'installer sur le canapé, loin de la tentation.

- Puis-je savoir votre âge ? Demanda-t-il d'une voix qui se voulait neutre.

- Je vais avoir vingt- cinq ans le 25 décembre.

- Le jour de Noël, je suppose que vous étiez gâtée lorsque vous étiez enfant, dit-il en la dévisageant.

Elle haussa des épaules, la tête baissée vers son assiette.

- Je l'étais en effet, dit-elle le visage marqué par une tristesse qu'il tenta de comprendre.

- Et où se trouve votre mère ? La questionna-t-il en reposant l'assiette sans y avoir touché.

Il n'avait pas faim ce soir mais assoiffé de comprendre la jeune inconnue.

- Je l'ignore elle est partie il y a vingt-quatre ans soit le 31 décembre au soir sans donner la moindre explication.

Jafar demeura silencieux devant cette confidence d'une absolue tristesse, au point même qu'il en ressentit un pincement au cœur.

- Je suis navré pour vous, dit-il avec sincérité.

- Moi aussi je le suis, dit-elle en esquissant un vague sourire qui s'estompa très vite.

Il n'était pas du genre à prendre pitié mais ce soir, contre toute attente il se sentait peiné pour cette jeune femme au regard fuyant. Devait-il la forcer à venir à cette fête ? Alors qu'il ignorait même s'il allait donner le feu vert pour ce mariage ? Allait-il jouer l'égoïste pour la propre réputation de sa famille ?

Jafar aurait voulu que ce soit ces raisons qui le poussent à la faire venir mais comprit très vite qu'il s'agissait plutôt de lui. Face à ses lourdes pensées dangereuses Jafar contracta ses mâchoires et s'ordonna de retrouver la raison.

- Il se fait tard, annonça-t-elle en posant à son tour son assiette, je crois que nous devrions aller dormir.

Jafar prit cette intervention comme une grâce du ciel, car une minute de plus à ses côtés aurait pu lui être fatal.

- Vous avez raison, il est temps de mettre fin à votre supplice.

La jeune femme secoua de la tête, gênée.

- Ce...non...ce n'est pas un supplice, je suis juste très fatiguée, bégaya celle-ci maladroitement.

Jafar se contenta d'un bref rire puis se leva pour la devancer.

- Il y a une chambre d'ami et...

- Je pense que je devrais rester sur le canapé pour surveiller le feu, la coupa-t-il sans lui donner la possibilité de répliquer.

- Vous êtes sûr ? Insista-t-elle en triturant les coutures de son pull.

- Certain, affirma-t-il en prenant une bougie ; Nous ignorons si la panne sera réglée demain et il risque de faire froid.

La jeune femme acquiesça en silence puis se leva.

- Cependant, laissez-moi vous accompagner à votre chambre.

Belle constata qu'il ne s'agissait pas d'une proposition mais d'un ordre. Dormir en sachant qu'il était là ne serait pas chose aisée et encore moins maintenant qu'il connaissait un morceau de sa vie. Elle avait l'impression d'en avoir trop dit mais il était trop tard pour envisager de le regretter. La seule question qu'elle se posait ce soir c'est « Qu'allait-il se passer demain ? »

Allait-il repartir en lui donnant la possibilité de choisir ? Est-ce que les routes seront suffisamment dégagées pour qu'il reprenne la route ou allait-elle devoir partager ce chalet avec lui une nuit supplémentaire ?

Le cœur battant, Belle réprima un sursaut lorsqu'elle sentit sa large main se poser dans son dos. Ce geste n'avait pourtant rien d'inquiétant, mais Belle en ressentit toute la chaleur qu'elle avait dû supporter ce soir.

- C'est ici, annonça-t-elle une fois devant la porte.

- Vous avez un portable pour vous éclairer ?

- Oui, j'en ai un, rassurez-vous je pense pouvoir me débrouiller.

Du haut de ses un mètre quatre-vingt-dix il la jaugea et elle eut l'impression d'être sur le point de franchir les ténèbres si bien qu'elle s'efforça de déglutir.

- Prenez ça avec vous on ne sait jamais, dit-il d'une voix chaude avant de lui tendre la bougie qu'elle prit tel un automate évitant soigneusement de frôler sa main bronzée.

- Je vous remercie, murmura-t-elle en ouvrant la porte.

- Bonne nuit mademoiselle Moor.

- Bonne nuit, s'entendit-elle murmurer avant de refermer la porte pour s'y adosser.

Le souffle coupé, elle attendit patiemment d'entendre ses pas redescendre mais de longues secondes passèrent avant d'entendre le plancher craquer. Ce fut seulement à cet instant précis qu'elle relâcha son air puis reprit sa respiration en inspirant profondément. Quand Belle réalisa qu'elle était seule dans la pénombre un sentiment inquiétant la gagna et la solitude devint alors très pénible. Elle s'avança jusqu'au lit pour se saisir de son téléphone afin d'actionné la torche. Dans un bref soupir de soulagement elle posa la bougie sur la commode et s'enfonça dans les couvertures l'esprit hanté pour de nombreuses questions.

Devait-elle partir demain ?

A quoi bon rester ici alors qu'il n'y avait plus d'électricité ni même de quoi la réchauffer, songea-t-elle en fermant brièvement les yeux.

Et par-dessus tout...elle voulait fuir le sultan...

Lorsqu'il fut de retour dans le modeste et étouffant salon Jafar prit son téléphone dans sa poche et s'empressa de joindre son conseiller.

- Vous n'imaginez pas à quel point je suis soulagé de vous entendre, lança Rachid d'un soupir de soulagement.

- Ne t'inquiète pas mon ami, je vais bien, je suis juste coincé au milieu de nulle part.

- Voulez-vous que je vous fasse parvenir un hélicoptère ?

- Au risque de faire gros titre demain matin ? Hors de question, c'est trop dangereux.

Sans vergogne et ni regret Jafar ouvrit la chemise posée sur la console et s'approcha du feu pour mieux lire ce qu'elle contenait.

- Et de ton côté ? S'informa Jafar tout en étudiant les papiers.

- Tout est en ordre votre altesse, nous sommes arrivés à votre demeure, Zuyad et sa fiancée sont installés.

- Je veux qu'elle soit surveillé de très près, ordonna-t-il d'une voix implacable.

- En êtes-vous sûr ? S'enquit Rachid visiblement surpris ; Avez-vous reçu de mauvaises nouvelles ?

- Suffisamment pour que tu l'es à l'œil jusqu'à mon retour, répondit Jafar sans donner plus de détail.

- Très bien.

- Dès demain matin je tenterais de rejoindre les routes en espérant que la tempête ce soit calmée, ajouta Jafar avant de raccrocher.

Dans ses mains il tenait les papiers qui indiquaient la sommes qu'avait déboursé la jeune femme pour ce chalet ainsi qu'un chèque de caution.

Jafar frotta sa barbe naissante, songeur.

Devait-il partir en la laissant seule ? Allait-il pouvoir repartir ou bien devoir rester coincé ici avec la délicieuse jeune femme qui sans le savoir, l'intriguait autant qu'elle allumait en lui un brasier incandescent...

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