Chapitre 42



  - Tu es sûre que tout va bien ?

Belle ne put s'empêcher d'esquisser un sourire alors qu'elle avait le regard fixé sur l'horizon sombre du désert. Ils n'avaient pas quitté le chalet dans l'immédiat car Jafar avait lui aussi ressenti le besoin d'être à l'écart du monde extérieur. Ils avaient donc passé une nuit allongés l'un contre l'autre près du feu et pour rien au monde Belle ne l'oublierait. Mais à présent la réalité vint la frapper. Ils devaient retourner au palais avant que les médias rapportent de mauvaises informations. En effet son départ avait rapidement fait la une des journaux et certains disaient même qu'elle avait quitté Jafar. Heureusement, Rachid avait très vite publié un communiqué indiquant qu'elle était seulement partie rejoindre Jafar.

Le cœur serré, elle avait dû se confronter à une autre réalité sanglante car Jafar n'avait pas pu empêcher l'inévitable. En rallumant son téléphone portable Belle avait découvert avec effroi les raisons qui avaient poussé son époux à s'envoler pour Milan. N'ayant plus le choix que de lui dire la vérité, il était depuis anxieux que cette effroyable révélation ait des conséquences sur elle et sur le bébé.

Alors Belle s'efforçait de réprimer l'horrible douleur qui la consumait. Elle n'arrivait toujours pas à croire que Carole ait pu vouloir la vendre comme une vulgaire marchandise.

- Je suis juste un peu secouée, mais ça va aller, répondit-elle alors qu'il l'attirait contre lui.

- J'aurais dû te protéger davantage.

- Tu ne peux pas me protéger de tout Jafar, murmura-t-elle en fermant les yeux.

Le voyage l'avait fatigué, ses forces semblaient se dissoudre comme des grains de sable.

- À l'avenir je te promets d'être à l'affût du moindre danger.

Belle ne put s'empêcher de sourire ce qui l'incita à baisser les yeux sur elle.

- Je suis sérieux Belle, ne me refais plus jamais ça, ne t'en va plus sans que j'en sois informé.

Elle se redressa pour affronter son regard assombri par la nuit.

- Je suis désolé de t'avoir fait peur et je te promets de ne plus jamais recommencer.

Satisfait Jafar plongea ses doigts dans ses cheveux pour l'attirer à lui. Il l'embrassa avec douceur alors que la voiture chevauchait le désert obscur.

- Une fois arrivé, je veux que tu ailles te reposer, c'est impératif, tu es restée trop longtemps éveillée.

Contre toute attente elle acquiesça en étouffant un bâillement.

- Mon médecin viendra demain pour t'examiner et je te trouverais la meilleure gynécologue du pays.

Elle grimaça, la bouche pincée.

- Je n'ai pas envie d'être encore jugée Jafar, je préfère que ce soit ton docteur qui se charge de ça. Il a été très magnanime avec moi.

- Je t'assure que Kulale sera punie pour avoir osé te traiter de la sorte, déclara Jafar d'une voix menaçante.

- Laisse tomber je t'en prie, murmura-t-elle en fermant brièvement les yeux.

- Alors qu'elle a essayé de te convaincre de mettre un terme à notre enfant ? S'enquit-il dont la voix ruisselait de colère.

Belle frissonna d'horreur et sut d'avance qu'il était inutile de le contrer.

- Tu penses tout de même pas que je vais la laisser s'en sortir comme ça ? Insista-t-il d'une voix de plus en plus sombre ; Tu t'es présenté à elle pour un examen, pas pour être jugée ou jetée sur le bûcher pour un crime que tu n'as pas commis.

Il ouvrit sèchement la portière et fit le tour pour ouvrir la sienne. Il la souleva dans ses bras musclés alors que Rachid les attendait à l'entrée.

- Vous n'imaginez pas à quel point je suis heureux de vous voir ! S'exclama ce dernier alors qu'elle se cachait honteusement le visage contre le torse de Jafar.

- J'ai retrouvé notre petite fugueuse, lança-t-il en passant les portes du palais : À présent je l'emmène se reposer et j'aimerai que le médecin passe demain matin.

Rachid s'inclina en guise de réponse.

- Tu n'as rien dit à personne ? S'enquit Belle une fois qu'il eut passé les portes de la chambre.

- Pas encore non, je vais leur dire quand j'aurais l'ultime confirmation.

Il se pencha, les poings enfoncés dans le matelas.

- Tu as des doutes ? Demanda-t-elle en fronçant des sourcils.

- Aucun, affirma-t-il en glissant le revers de sa main sur sa joue ; Seulement pour pouvoir le dire formellement il me faut la confirmation du docteur, une confirmation que tu aurais dû obtenir de Kulale.

À cette évocation son visage se durcit.

Belle accueillit son baiser en fermant les yeux alors qu'il remontait les draps sur elle.

- Repose-toi, je te rejoins plus tard.

Jafar la quitta et referma soigneusement la porte derrière lui. Déterminé à découvrir ce qu'il s'était passé avec le docteur Kulale, Jafar rejoignit son bureau là où l'attendait Rachid. Il demeura silencieux pendant une trentaine de minutes jusqu'à ce que la porte s'ouvre sur cette dernière qui la mine décomposée esquissa une révérence maladroite.

Très vite, Jafar reçut des flashs de sa femme malheureuse et presque isolée parce que ni lui ni elle avaient su la protéger. Si lui avait compris de ses erreurs il était impatient de connaître les raisons qui avaient poussé cette gynécologue à se montrer si méprisante avec sa femme.

- Allons au but, commença-t-il sèchement : Avez-vous oui ou non dit à ma femme d'envisager d'avorter ?

Rachid écarquilla les yeux en se tournant vers lui.

- Belle est enceinte ? Demanda-t-il dont la voix inspirait espoir et prudence.

- Oui elle l'est, répondit Jafar sans quitter la femme des yeux alors que ses épaules s'affaissaient.

- Je dois reconnaître avoir eu des doutes concernant cette grossesse votre altesse, admit-elle en relevant les yeux.

- Ah oui ? Et pour quelle raison ? Questionna-t-il impatient.

- Parce que j'ai supposé que les dates ne correspondaient pas.

Soudain, Jafar plissa des yeux car il décela en elle quelque chose de plus profond qu'une simple supposition.

- Et si vous me disiez réellement la vérité madame Kulale, ma patience à des limites et je vous déconseille de les franchir.

Derrière son teint bronzé il vit des pâleurs apparaître.

- Je suis la gynécologue d'Eloïse Ford et je...

- Comme c'est intéressant, chuchota-t-il en s'approchant dangereusement.

- Elle m'a offert une proposition que je n'ai pas pu refuser.

- Laissez-moi deviner, il est question d'argent ?

- Elle voulait que je mente au sujet de l'enfant si jamais il s'avérait être une fille, admit-elle en évitant de le regarder ; Elle voulait absolument que tout le monde sache qu'elle attend un garçon.

Jafar étouffa un rire sec.

- Elle espérait tout de même pas que j'allais m'empresser de le nommer héritier de la couronne si ?

Pour toute réponse elle baissa les yeux.

Jafar était fou de rage et maudissait presque son cousin d'avoir été si stupide pour avoir permis à cette femme d'être ici...chez lui, sur les terres qu'il chérissait tant.

- Lorsque j'ai vu votre femme arriver avec la certitude d'être enceinte et quand l'échographie l'a confirmé j'ai pris peur. J'avais peur de perdre la somme d'argent qu'elle m'avait promis pour les études de mon fils.

Jafar sentit sa colère fléchir lentement car le visage de Belle s'interposa entre la raison qui lui dictait de la punir et son cœur fraîchement naissant qui lui soufflait de faire ce que Belle aurait fait.

Alors c'est silencieusement qu'il fit le tour de son bureau puis revint vers elle pour lui tendre un chèque. Le docteur Kulale le prit d'une main tremblant alors que la stupéfaction peignait son visage.

- Votre altesse je...

- Je fais ce que ma femme aurait fait, lâcha-t-il avec fermeté ; car je sais avec certitude qu'elle m'aurait dit de le faire même si dans le fond vous ne le méritez pas.

Les joues en feu elle se détourna honteuse et emprunta la direction de la porte mais s'y arrêta.

- Votre altesse ? Puis-je me racheter en vous offrant une nouvelle qui apaisera votre colère ?

Jafar fronça des sourcils mais l'invita à parler.

- Votre femme est enceinte depuis un peu plus de neuf semaines, lorsqu'elle est venu me voir elle entamait son premier trimestre. Médicalement nous appelons cela des semaines d'aménorrhées.

Jafar peinait à comprendre et une panique irrationnelle s'empara de lui.

- Je ne comprends pas où vous voulez en venir.

- Ce que je veux dire c'est qu'à cette période nous pouvons détecter si c'est une grossesse gémellaire ou non.

Jafar retint son souffle alors qu'elle arborait un léger sourire en coin.

- Je suis presque sûre que c'est le cas pour votre femme votre altesse, termina-t-elle avant de disparaître...

En état de choc Jafar avait l'impression qu'on venait de l'immobiliser si bien qu'il n'était pas parvenu à l'arrêter. Rachid lui, le regardait avec stupéfaction et joie mêlées. Son cœur se mit à tambouriner contre ses tempes et sa respiration devint alors plus lourde.

- Il faut contacter le médecin dès ce soir votre altesse, s'alarma Rachid.

Jafar dut se ressaisir car Rachid avait raison. Si jamais le docteur Kulale disait vrai alors ce n'était pas seulement une bonne nouvelle mais le commencement d'une nouvelle vie, la fin de cette pénible douleur qui peu à peu le quittait depuis qu'il savait que bientôt, il goûterait au bonheur d'être père

Dans l'impatience la plus pénible il réveilla Belle qui venait juste de s'assoupir.

- Je ne comprends pas pour quelle raison tu veux...

Jafar posa sa paume de main sur le ventre de sa femme et se mit à le caresser machinalement.

- Le docteur Kulale m'a révélé quelque chose ce soir et j'ai besoin d'une confirmation immédiate.

Alertée par le timbre évasif de son mari, Belle se redressa sur les coudes. Il semblait ailleurs, si bien qu'elle se mit à agiter sa main devant ses yeux.

- Tu es avec moi ?

- Votre altesse ? Vous m'avez demandé ?

Déboussolée Belle tourna la tête en direction du docteur précédé par deux hommes.

Quand Belle découvrit un appareil comme celui de la clinique, elle ouvrit de grand yeux ronds.

- Est-ce que quelqu'un peut me dire ce qu'il se passe ?

Après un rapide échange entre les deux hommes il s'assit près d'elle et lui prit la main.

- Le docteur va vérifier si tu attends des jumeaux.

- D..des quoi ? Bafouilla Belle en cillant.

- Elle a parlé de grossesse gémellaire.

- C'est impossible, dit-elle avec un rire nerveux ; Il est trop tôt pour le savoir Jafar.

- Au contraire, intervint le médecin personnel de Jafar en passant la sonde sur son ventre avec un sourire joyeux.

Belle rallongea sa tête sur l'oreiller, la bouche entrouverte.

- S'il s'agit d'une grossesse gémellaire nous allons rapidement le savoir, ajouta-t-il en recouvrant son sérieux.

Retenant son souffle Belle plissa des yeux lorsque l'écran dévoila une image brouillé mais suffisamment lisible pour y voir une forme noire.

- C'est le bébé ? Tu as vu ça ? Murmura-t-elle émue ; Comment j'ai pu rater ça ? Comment est-ce possible que je ne l'ai pas su plus tôt, je n'ai aucun symptôme.

- Le dénie sans doute, inconsciemment vous étiez dans le dénie.

- Pas inconsciemment, intervint Jafar en crispant ses mâchoires ; C'est de me faute.

Belle refusait de le voir s'accabler de nouveau.

- Le principal c'est que tout aille bien pour le bébé, murmura-t-elle en plongeant son regard dans le sien.

- Je dirais les bébés, rectifia le médecin en laissant éclater un rire joyeux.

Grisée par un bonheur pur, Belle ne lâcha pas Jafar du regard qui lui, portait sur ses traits une joie indéfinissable. Les larmes aux yeux, elle tâcha de retenir chaque émotion qui le traversait. C'était comme si son passé quittait son visage en des milliers de particules de sable fin pour laissaient enfin la place à l'esquisse d'un futur radieux.

Pour la première fois ses yeux noirs furent traversé par une émotion lisible. Lorsqu'il riva son regard au sien, elle en fut bouleversée.

- Mon amour, murmura-t-il en déposant un baiser sur sa paume de main.

Pour seule réponse à son bonheur, Belle esquissa un sourire au seul amour de sa vie...

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