Chapitre 33
Belle écoutait attentivement les conseilles de Rachid en fronçant des sourcils. Les conseillers lui avaient témoignés un franc respect après la nouvelle de leur fiançailles.
Les mains nouées devant elle, Belle sentit son cœur s'emballer quand un souffle chaud effleura son oreille.
- Dis-moi, tu n'as pas l'intention de t'évanouir ?
Belle sourit à sa remarque et fut touchée qu'il n'est pas oublié.
- Aucun risque, chuchota-t-elle en lui souriant.
Il la prit par le coude après avoir interrompu la réunion et l'entraîna avec lui dans son bureau. Depuis qu'elle avait pris la décision de lancer le communiqué Jafar se comportait différemment mais restait toujours le même homme implacable. Une situation qu'elle avait du mal à gérer. Il referma la porte de son bureau puis arrima son regard au sien.
- Viens là, murmura-t-il en s'approchant du fauteuil.
Incapable de résister elle accepta sa main et s'installa sur ses genoux.
- Si tu as trop de pression il faut que tu me le dises Belle, immédiatement.
Elle était certes nerveuse à cause des préparatifs mais se sentait suffisamment rassurée pour s'interdire la moindre pression.
- Je vais bien Jafar, seulement un peu fatiguée.
Pour accompagner son dire elle se frotta les yeux. Elle était épuisée mentalement mais suffisamment lucide pour comprendre qu'il semblait inquiet pour autre chose.
- Je sens qu'il se passe quelques chose en toi Jafar, dis-moi ce qui tourmente tant les traits de ton visage.
Il expira par le nez tout en tapotant son pouce sur sa cuisse.
- J'ai pour crainte que tu changes d'avis, je ne veux pas que ta décision soit précipitée et que tu le regrettes.
Belle se mordit la lèvre pour s'interdire de lui dire ce qui l'avait réellement poussé à prendre cette décision.
Et il ne s'agissait pas seulement d'Eloïse mais les sentiments qu'elle ressentait pour lui.
- Il y a un mois jour pour jour nous étions bloqué au milieu de nulle part, reprit-il en caressant son dos comme un geste apaisant ; Aujourd'hui tu es sur le point de devenir ma femme.
À cette idée qui allait devenir réalité Belle sentit son cœur s'emballer.
Néanmoins une question taraudait son esprit.
- Si ces touristes n'avaient pas divulgués des informations sur nous, qu'aurais-tu fait ? Demanda-t-elle en retenant presque son souffle.
- Je t'aurais laissé partir pour mieux revenir te chercher, admit-il en toute honnêteté.
Belle était à la fois émue et triste qu'il ait pu songer à la laisser partir.
- Je n'aurais pas supporter l'idée de te savoir à l'autre bout du globe terrestre, ajouta-t-il plus sombrement.
Il se redressa sur le fauteuil les traits marqués par une faible colère à peine voilée.
- Comme je ne l'ai pas supporté lorsque j'ai quitté New-York pour regagner Rhayad.
- Pourtant nous nous connaissions à peine...murmura Belle.
- C'est là tout le mystère des pensées qui nous possèdent Belle, le désir n'est pas contrôlable, les émotions non plus.
Chaque fois qu'il usait de son accent exotique et grave Belle avait l'impression que tout son être allait s'embraser.
- Je ne mérite pas ton adoration, conclut-il à voix-basse.
La douleur perceptible dans sa voix suffit à la convaincre de rester et de lui montrer qu'il méritait d'être aimé.
- Et moi je ne mérite pas une telle déclaration, répliqua Belle avec fermeté.
Elle se leva pour lui ôter l'immense pouvoir qu'il avait sur elle. Cependant, lorsqu'elle recouvrit un espace suffisant pour le confronter l'image qu'il renvoyait la fit violemment rougir.
Assis comme un dieu grec, avec son profil altière il croisa lentement les jambes sans la quitter des yeux.
- Seriez-vous en train de me tester votre altesse ? Demanda-t-elle d'une voix soupçonneuse.
- J'envisage toutes les possibilités, toutes les craintes qui me préoccupe.
- Lesquelles ?
- Belle, réalises-tu que devenir ma femme peut devenir un obstacle à tes désirs ?
Pour aiguiser le sens de ses paroles il baissa les yeux sur son ventre.
- Aussi invraisemblable que cela puisse paraître j'ai plutôt l'impression que c'est à toi que ça pose problème.
Il se rembrunit, crispant ses doigts sur les accoudoirs du fauteuil.
- Évidemment que ça me pose problème ! S'emporta le sultan en se levant avec une vitalité déconcertante ; Te priver d'être un jour...
- Arrêté avec cette folie de ne pas pouvoir avoir d'enfants Jafar tu te bases sur des mauvaises expériences et des prophéties absurdes.
- Nous avons longtemps mis fin à cette possibilité au palais, trancha-t-il sèchement.
- Je suis au courant, Rachid m'a dit de ne pas en parlé mais tu me pousses à le faire.
- Parce que je me suis assez montré égoïste en choisissant pour toi, répliqua-t-il alors qu'un rictus s'incurvait sur ses lèvres.
Belle sentit une violente colère la submerger et serra les poings pour la contenir.
- Je suis suffisamment grande pour prendre mes propres décisions Jafar.
Il réduisit l'espace qui les séparait les traits tendus.
- Je ne veux qu'un jour tu te réveilles à mes côtés avec des doutes et des regrets.
- Aucun risque que cela arrive sauf si tu me prouves le contraire.
Il tiqua, visiblement déstabilisé par sa fermeté. Belle croisa les bras dans l'attente d'une réponse de sa part. Il crispa ses mâchoires puis leva sa main pour glisser celle-ci sur sa joue.
- C'est ton dernier mot habibti ?
Elle acquiesça, définitivement prête à nouer sa vie à la sienne. Toute la colère et la crainte se dissipèrent sur le visage du sultan.
- Tu es vraiment un homme peu ordinaire Jafar, commenta-t-elle en esquissant un mince sourire.
- Je ne suis pas comme les autres, je suis destiné à assouvir les besoins d'un peuple, et toi, je ne veux pas t'entraîner dans un monde que tu ne connais pas.
Touché qu'il se montre si prévenant Belle n'eut pas le cœur de se battre. Elle voulait seulement se jeter à corps perdu dans son monde peu importe la chute.
- Mon père m'a toujours dit de suivre mon cœur peu importe que ça soit bon ou mauvais.
Jafar ne put s'empêcher de sentir son cœur se pincer en regardant la jeune femme qui bientôt deviendrait son épouse. La semaine qui avait suivie l'annonce de leur fiançailles avait été riche en émotions. En émoi, le peuple attendait le lendemain avec une impatience démesurée. Au début, Jafar avait redouté la réaction du pays car Belle était américaine au contraire de Zafina. Contre toute attente sa beauté incroyable avait suffi pour charmer l'ensemble du peuple et la fraîcheur de ses traits avaient donné un espoir pour les conseillers.
Cependant, Jafar craignait que sa décision hâtive pousse la jeune femme à le regretter. Secrètement, elle nourrissait l'espoir d'avoir une famille et il ne pouvait pas lui apporté. Il refusait même d'en entendre parler après s'être bercé d'illusions. Ils seront seuls, définitivement seuls sans possibilité d'agrandir leur famille. Alors la peur qu'elle se réveille un jour avec regret et chagrin lui était insupportable.
Quittant sa torpeur il plongea son regard dans le sien et lut une vive détermination. Avec Zafina, il l'avait volontairement négligée car elle-même lui avait donné l'impression d'être ici pour un but très précis et poussée par la soif de prestige elle avait oublié qui détenait les cartes de son avenir.
En revanche, lorsqu'il posait son regard dans les yeux bleus de la jeune femme, il voulait à tout prix la rendre heureuse.
- Alors demain, tu deviendras ma femme, conclut-il d'une voix rauque.
Pour sceller la fin définitive de cette conversation Jafar l'embrassa avec une douceur délibérée puis s'écarta avant d'être envahi d'une irrésistible envie de la faire sienne.
Il venait de vivre une longue et pénible semaine, torturé de ne pas pouvoir l'avoir à ses côtés. Demain cette insupportable distance prendrait fin.
Quelques coups portés à la porte le poussa à s'éloigner davantage.
- Oui !
Son cousin apparut au pas de la porte et les regarda tour à tour.
- Belle, tu veux bien nous laisser ?
Elle quitta le bureau en le privant d'un dernier regard et il en fut irrité au point de vouloir la rattraper.
- Que me vaut cette visite ? S'enquit Jafar à l'adresse de Zuyad.
- Je suis venu t'annoncer que je viens de me marier dans la discrétion la plus évidente.
- Vraiment ? S'étonna Jafar sans éprouver de l'indignation.
- Oui, soupira Zuyad en se laissant tomber dans le fauteuil ; Eloïse a fait une crise de colère mais à quoi bon exposer mon mariage quand le tien est attendu avec frénésie.
- La jalousie ne te va pas Zuyad.
- Je ne suis pas jaloux, juste lucide, je ne suis pas sur le trône mais je jouis d'une fortune grâce à toi. Exposer mon mariage ne sera d'aucune utilité pour moi.
Étonné par la sagesse de son cousin Jafar l'observa avec méfiance.
- Eloïse veut-elle quelque chose en particulier ?
- Te donner un héritier.
Un rictus amer se forma sur sa bouche.
- Ce n'est pas ma priorité Zuyad, et je trouve ça honteux de réduire ton enfant à une pièce de rechange.
- Nous sommes d'accord, approuva Zuyad en étouffant un bâillement ; Mais Eloïse a dans l'esprit de te le donner sauf que moi je ne suis pas prêt à mettre ma vie entre parenthèse.
- Alors pour quelle raison tu t'es marié ?
- Parce que je suis respecté et approuvé par le pays qui contrairement à toi me voue une méprise assez évidente.
- Parce que tu t'es montré méprisant avec eux en collectionnant des femmes avec un manque de respect assez évident. Dois-je te rappeler ton escapade en Italie ?
Il grimaça au souvenir du terrible scandale qui avait frappé le pays et les plus conservateurs. Une attitude qui avait réduit son cousin à une réputation désastreuse.
- Et c'est exactement pour cette raison que je me suis marié, déclara Zuyad en souriant ; Eloïse aspire à être riche et moi à réconcilier le pays avec moi.
Jafar demeura impassible.
- Alors je te souhaite bonne chance, conclut Jafar en inclinant sa tête.
- Autant que je t'en souhaite avec Belle, répliqua Zuyad en se levant pour quitter son bureau.
Jafar lui lança un regard noir et attendit qu'il soit proche de la porte pour déclarer :
- En parlant de Belle, commença Jafar en attendant qu'il le regarde : Si tu tiens à la fortune que je te verse chaque moi, je te conseille vivement de ne plus jamais la regarder comme tu l'as fait à maintes reprises.
Il marqua une pause dans laquelle Zuyad blêmit sous son teint bronzé.
- Sinon je risque de briser les rêves de fortune auxquelles Eloïse aspire tant...
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top