Chapitre 31
Belle se réveilla seule dans le grand lit de Jafar. Un sentiment d'abandon l'étreignit. Il y avait sans doute une raison à son départ, songea-t-elle en se frottant les yeux. La nuit derrière avait été riche en rebondissements et la conclusion qu'elle en avait tiré c'est que ni l'un ni l'autre étaient prêts à une éventuelle séparation.
Elle se prépara en vitesse et quitta discrètement la chambre de Jafar sans faire de bruit. Le couloir était vide, silencieux et une vive couleur orangé illuminaient les murs.
Belle regagna le hall et fut désagréablement surprise d'y trouver Eloïse qui s'empressa de la foudroyer du regard.
- J'ignorais que tu étais encore là, commenta-t-elle en gardant un semblant de politesse.
- Figure-toi que je me posais la même question à ton sujet, répliqua Eloïse sur une note méprisante ; Je peux savoir ce que tu fais encore ici ?
- Comme je te l'ai dit hier, j'ai été invité.
- Et à présent le pays pense que tu es la fiancée du sultan ! Dit-elle sans lui masquer sa fureur.
- C'est une erreur, et je ne vois pas en quoi ça te regarde.
Eloïse s'approcha avec assurance.
- Pauvre naïve que tu es, chantonna celle-ci en esquissant un sourire crispé ; Tu penses sincèrement qu'il en a quelque chose à faire de toi ? Sais-tu le nombre de femmes qu'il a sur sa liste ?
Blessée par sa remarque Belle tenta de ne rien laisser paraître.
- Pas toi il me semble, rétorqua Belle en lui rendant son sourire.
- Ce genre d'homme ne veut pas d'une jeune femme qui sort à peine de la faculté, comment as-tu pu croire qu'il ferait de toi son épouse. Il finira pas se lasser et tu finiras dans le même piteuse état que lorsque je t'ai volé ton héritage.
Le venin qu'elle venait de lui déverser lui comprima le cœur.
- Je pourrais jurer que tu es jalouse.
Eloïse éclata de rire en posant une main sur sa poitrine.
- Jalouse ! Répéta-t-elle d'une voix aiguë ; Alors que je vais épouser son cousin et lui assurer un héritier ?
Sur cette dernière note, Eloïse la toisa de la tête aux pieds puis se retourna pour quitter le palais, visiblement fière d'être parvenue à la faire douter.
Du moins c'est ce qu'elle pensait.
Jafar lui avait exprimé son mécontentement face à sa peur d'être sa fiancée ce qui la poussait à croire qu'il ressentait quelque chose pour elle...même infime.
Peu à peu, elle comprit le plan d'Eloïse et tout devint plus clair.
Son but était d'avoir un héritier pour le sultan ce qui la poussait à croire qu'elle était bien plus attiré par lui que par Zuyad.
Elle voulait assurer un héritier pour espérer devenir l'épouse de Jafar. Une montée de dégoût lui monta à la gorge. Il était hors de question qu'elle la laisse faire.
Pas cette fois !
Belle s'empressa d'emprunter le couloir principal et entra dans le bureau privé de Rachid avec l'espoir d'y trouver son amant.
- Belle ! Mon enfant êtes-vous perdue ? S'enquit Rachid en se levant précipitamment.
- Je cherche son altesse, l'avez-vous vu ? Demanda t-elle le souffle court.
- Son altesse est partie en visite à la grande mosquée du centre-ville, il revient dans une heure.
Déçue elle acquiesça les yeux dans le vague.
- Pourquoi ? S'enquit Rachid visiblement anxieux ; Vous n'avez pas pour projet de partir pendant son absence ?
Belle étudia Rachid en fronçant des sourcils.
- Non bien-sûr que non, qu'est-ce qui vous fait croire une chose pareille ?
L'homme redressa les épaules, le regard exprimant un vif soulagement.
- Parce que son altesse m'a donné des ordre avant de partir, il craint votre départ.
Surprise mais secrètement remplie de joie qu'il puisse craindre son départ Belle retint un sourire.
- Ah oui ? Et quels étaient ses ordres ?
- De vous attacher dans son bureau, répondit Rachid avec calme, comme si pour lui il s'agissait d'une simple routine.
Belle frémit, les yeux écarquillés.
- Ça sera inutile, dit-elle en s'approchant ; Je n'ai pas l'intention de partir.
Rachid inclina sa tête respectueusement, comme si cette réponse était pour lui un soulagement.
- Hier soir, le sultan m'a parlé d'un communiqué de presse qu'il a dans l'intention de publier, est-ce déjà fait ?
Rachid lui adressa un regard perplexe.
- Oui, il a dans l'intention de le publier à son retour.
Ce n'est pas exactement la réponse qu'elle espérait. Une tristesse l'envahissait alors que Rachid s'approchait avec un triste sourire aux lèvres.
- C'est pour vous protéger.
- Que dit ce communiqué ? Demanda-t-elle le cœur battant.
- Qu'il s'agit d'un simple malentendu, que vous êtes estimé par lui et le personnels du palais et que vous n'êtes pas sa fiancée mais une amie dont l'identité restera secrète.
Inévitablement Belle reçue une lame en plein cœur. Il voulait la protéger certes, mais ce communiqué de presse donnait l'impression qu'il effaçait leur histoire et qu'elle ne pourrait jamais naître.
- Croyez-moi sur parole Belle, le sultan est amer à la simple idée de le publier.
Gagnée par l'espoir, elle releva les yeux alors que son cerveau tournait à plein régime. De plus il y avait Eloïse et son plan aiguisé à la perfection pour devenir la souveraine de Rhayad.
- Rachid est-ce que vous me faites confiance ?
- À l'instant même où je vous ai vu j'ai tout de suite compris que vous n'étiez pas comme les autres femmes qui ont partagé la vie de mon ami.
- Alors si je vous demande de publier un autre communiqué allez-vous le faire ?
Stupéfait Rachid la considéra avec prudence.
- Quel communiqué voulez-vous faire Belle ?
Les mains moites, Belle resserra ses doigts contre son ventre en sachant qu'elle était sur le point de prendre une décision qui allait changer son destin.
- Confirmer la rumeur, lâcha Belle avant de ne plus pouvoir le faire.
Rachid la dévisagea longuement en silence ce qui eut bon d'accentuer son anxiété.
- Mon enfant, cette décision n'est pas à prendre à la légère, déclara ce dernier en ôtant son turban.
Il allongea son bras pour l'inviter à s'asseoir.
- Affirmer à la presse que vous êtes la fiancée du sultan entraînera des choses auxquelles vous n'êtes pas préparée.
- Lesquelles ? Demanda-t-elle en soutenant son regard apaisant.
- Jafar est le souverain du pays, ce qui signifie que le peuple attendra le mariage et voudra le célébrer. Vous serez considérée comme la sultane de Rhayad.
Belle se sentit nauséeuse et vacilla sur le fauteuil. C'était en effet une pure folie. Cependant, le regard de Jafar s'interposa entre la raison et la folie. Son expression de la veille lui avait brisé le cœur. Ils se connaissaient depuis peu mais elle ne pouvait ignorer les sentiments qui naissaient en elle.
- Etes-vous prête à cela Belle ? Êtes-vous prête à vous consentir à demeurer à ses côtés sans avoir la certitude qu'il vous aime comme vous semblez l'aimer ?
Rachid lui parlait sur un ton doux et rassurant. Il ne semblait pas vouloir l'en dissuader mais la prévenir.
- Vous l'avez entendu Rachid, il ne veut pas que je parte et si ce communiqué paraît dans la presse nous devront faire comme si nous étions des amis. Le peuple gardera un goût amer et...
Belle s'interrompit à temps car elle ne voulait surtout pas révéler le plan d'Eloïse sans en avoir la certitude.
- Êtes-vous prête à renoncer à l'idée d'être un jour une mère ? Insista-t-il.
- Nous revoilà au sujet le plus pénible de l'histoire de cette famille. Pourquoi êtes-vous à ce point persuadé qu'il ne peut pas avoir d'enfant ?
Rachid soupira lentement.
- Parce que les années précédentes n'ont pas été en faveur du sultan, je pense qu'il est temps pour nous d'écarter cette possibilité. Pendant des années nous avons tous espéré et mis cet espoir dans les mains de son ex-femme. Hélas, ce qu'il s'est passé n'a fait que détruire le sultan et le détail que vous ignorez c'est que la fureur du pays a été tel que Zafina a dut se réfugier hors du pays.
Un froid glacial la parcourut jusqu'à la base de sa nuque.
Visiblement Jafar n'était pas seulement un souverain comme tant d'autres, il était aimé par son peuple.
Ses sentiments étaient-ils assez forts pour envisager cette folie ?
Le cœur battant à la chamade elle releva les yeux vers Rachid.
- Publier ce communiqué Rachid, s'il vous plaît.
Elle se leva sous l'expression anxieuse de ce dernier.
- Il sera probablement fou de rage, la prévint-il en se levant à son tour.
- Alors qu'il en soit ainsi, murmura-t-elle en s'arrêtant devant la porte ; Chaque être humain mérite une chance d'être sauvé...
~
Jafar serra les dernières mains qui se présentaient à lui en forçant un sourire. En réalité il était tendu et frustré de ne pas avoir pu dire à Belle qu'il s'en allait et l'impatience de la retrouver commençait à le gagner.
Encore un sentiment auquel il n'était nullement préparé.
Et bientôt il allait devoir affronter une situation bien plus pénible.
Refusant d'être égoïste Jafar avait rédigé un communiqué qui mettrait fin à la rumeur de fiançailles qui les liait.
L'amertume ne quittait pas sa gorge depuis l'aube et ne cesserait pas de la quitter.
Pour la première fois de sa vie il se sentait prêt à faire passer une femme avant lui. Il n'avait aucune défiance à l'égard de Belle au contraire.
Elle donnait un sens à sa vie.
Et c'est exactement pour cette raison qu'il avait pris la décision de publier ce communiqué même si ce dernier condamnait ses chances de la garder ici. En faisant d'elle une amie proche et il allait devoir affronter une distance imminente.
Une distance qu'il n'était pas prêt à mettre.
Elle n'avait de cesse de le hanter, de l'obséder jour et nuit. Comment nier l'immense onde de chaleur qui l'avait traversé à l'idée qu'elle puisse être sa promise.
Tendu, Jafar serra les mâchoires et fit rouler ses épaules pour échapper aux multitudes idées qui traversaient son esprit pour la garder auprès de lui.
- Votre majesté, c'est un honneur de vous avoir accueilli aujourd'hui.
Jafar quitta sa torpeur pour afficher un sourire.
- C'est toujours un honneur d'être ici, Halim, Répondit Jafar.
L'imam s'inclina respectueusement.
- Vous n'imaginez pas à quel point nous sommes heureux d'apprendre que vous êtes fiancé.
Jafar se rembrunit légèrement.
- J'espère que nous aurons la chance de la voir bientôt maintenant que c'est officiel, s'enquit le ministre des affaires étrangères.
Jafar les dévisagea longuement, mâchoires serrées.
- Votre communiqué officiel nous a tous ravis, le peuple sera bientôt en émoi.
Le communiqué ?
Jafar afficha un masque impassible alors qu'il comprenait peu à peu qu'il venait d'être devancé par Rachid.
Il dégaina son téléphone une fois seul et s'aperçut qu'il était bombardé de notifications dont l'une rapportait ce fameux communiqué.
" Le sultan Al-Zyhar officialise ses fiançailles "
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