18. Je penserais à lui
Cousin ? Qu'est-ce que ce connard essayait de faire ? Cléo l'avait bien reconnu, il savait -il sentait que c'était Mathias. Il le sentait à la façon dont Angel s'était immédiatement tendu à côté de lui, à sa façon de regarder ce garçon, qui lui avait fait du mal, avec pourtant encore de l'affection.
"Qu'est-ce que tu rac- ,commença t-il.
Puis il s'arrêta.
"Cousin"
Il avait un cousin oui. Enfin, un cousin éloigné. Un cousin qui s'appelait...
- Mathy ? Demanda t-il incrédule.
Le garçon aux cheveux jais sourit lentement, comme satisfait de la situation :
- Eh oui cousin. Mais "Mathy" c'est quand j'avais 6 ans. Aujourd'hui, c'est Mathias.
- What the fuck mec, c'est ton cousin ? S'étonna Newton. Et qu'est-ce qu'il fout avec Aza ?
- Eh bah c'est un pote de- , commença ce dernier.
- Ta gueule toi, on t'a pas demandé", l'interrompit Nolan, toujours dans l'entrée à leur barrer la route.
Cléo sentit la main d'Angel se défaire de la sienne et il eut soudain l'impression d'être l'être le plus impuissant au monde. Et quand il croisa son regard, ce fut pire : il y lu la trahison, le dépit, la colère... et la peur.
Angel avait peur de lui.
Angel devait penser qu'il lui avait menti.
Angel devait le détester.
Il vit le regard du châtain osciller entre lui, la porte et les escaliers. Et alors que Cléo ne sut pas réagir, ne sut dire un mot, Romain s'avança, posa une main sur l'épaule d'Angel et l'entraîna à l'étage.
Mathias ne bougea pas.
Puis le silence régna, avant qu'Élisa ne l'interrompt :
"Euh, cette fois c'est moi qui comprend pas. Qu'est-ce qui se passe ? Pourquoi le... cousin de Cléo est là ? C'est vrai qu'ils se ressemblent un peu... Mais avec Aza ? Et pourquoi on aurait dit qu'Angel avait vu un fantôme ?
Azaël, qui semblait avoir un peu dessoulé, soupira :
- Je vois qu'on est pas les bienvenus ici... on va se barrer, vous serez tous heureux comme ça.
- C'est le truc le plus intelligent que t'aies dit de la soirée. Aller bouge, je te ramène.
Abraham prit alors son frère par le bras et le tira hors du hall d'entrée.
- Je vais rester un peu, pour parler avec Cléo, lança Mathias à son ami.
- Comme tu veux... répondit ce dernier déjà loin, à moitié traîné par son jumeau.
Newton se tourna vers Cléo :
- Hum, tu veux lui parler ? Enfin genre, c'est vraiment ton cousin et tout ?"
*
Cléo se retrouva sur le pas de la porte, bras croisés en signe de réticence. La nuit était claire et il voyait le visage de ce garçon censé être son cousin, le Mathy qu'il avait connu jusqu'à ses 6 ans; avant que son père ne se fâche avec sa cousine -et avec toute sa famille globalement, et que Cléo ne les voit plus jamais.
Il ne savait pas vraiment pourquoi il avait accepté de lui parler, malgré ce qu'Angel lui avait raconté. Il aurait voulu être auprès du châtain, le retrouver à l'étage, être là pour lui. Mais il avait été impuissant. Il se sentait aussi horriblement con de ne pas avoir compris que Mathias était "Mathy". Mais en même temps, qui aurait fait le rapprochement ? Il ne savait même pas que son cousin vivait dans la ville d'à côté avant ce jour.
Peut-être qu'il voulait lui parler... pour Angel. Pour l'aider, si il le pouvait. Peut-être que cette discussion allait le débarrasser de son sentiment d'impuissance. Peut être que ça ferait évoluer leur relation. Ou peut être que ça allait tout gâcher.
"Comment va ton père ? L'interpella Mathias en le faisant sortir de ses pensées.
Cléo lui lança un regard dubitatif : c'était vraiment la première chose qu'il avait à dire ?
- Il... il va bien. Il a quitté ma mère, il fait le tour du monde maintenant.
Le brun hocha lentement la tête, comme en signe d'approbation.
- Et tu ne vas pas me demander comment vont mes parents ?
- Honnêtement, j'en ai pas grand chose à foutre.
- Jesus Cléo, tu étais moins vulgaire quand on était gosses...
- Arrête Mathias, qu'est-ce que tu veux ?
L'intéressé leva les mains en signe de défense :
- Hé, je te jure que je suis venu sans arrières pensées. Pourquoi t'es énervé ? C'est à cause d'Angel ? Vous êtes ensemble ? Je vous ai vu vous tenir la main...
Non, on l'est pas. Et on le sera peut être jamais par ta faute.
- Ça te regarde pas. Mais je connais votre passé, je sais comment tu t'es comporté. T'es vraiment un connard.
Mathias baissa la tête, une moue indescriptible sur son visage. Cléo comprenait petit à petit ce que les gens lui trouvait, et pourquoi Angel avait été aussi manipulable. Mathias avait le visage d'un ange et des airs de saint, pour qui ne saurait pas voir dans son regard cynique. Déjà petit, il avait l'habitude d'accuser les autres pour ses bêtises sans jamais se faire prendre. Un jour Cléo s'était retrouvé à présenter ses excuses à un grand oncle alors que ce n'était pas lui qui avait troué sa chemise.
Il s'en rappelait maintenant. Mathias avait toujours été vicieux. Mais quand on est enfant, ça passe toujours pour une simple malice.
- Je n'ai pas été des plus correct avec Angel, c'est vrai. Je l'aimais vraiment, tu sais. Crois le ou non...
- Mais tu sortais avec cette fille.
Mathias éclata de rire, et Cléo eu soudainement envie de le pousser sur la route. Une voiture passe, bam, plus de Mathias, problème réglé.
- Tu sais qu'on peut aimer plusieurs personnes à la fois non ? Ça s'appelle être polyam-
- Oh, ferme là, tu sais très bien que c'était pas ça. Il m'a tout dit, la façon dont tu t'es servi de lui...
- Et ? Je ne l'ai forcé à rien. Tu sais, j'aurais vraiment aimé tomber amoureux d'Angel. C'est un super beau mec, intéressant et tout ce qui va avec. Mais le problème Cléo, c'est qu'il ne sait pas être aimé. Tout ce qu'il sait faire c'est se donner, se soumettre. Parce que chez lui l'amour c'est une obsession. Dès le début j'étais son obsession, et il était prêt à tout pour ça. Au final... il a eu ce qu'il voulait non ?
C'était trop, il ne pouvait pas parler d'Angel comme ça. Aucun humain ne pouvait considérer aussi un autre individu comme ça. Dans un excès de rage et de dépit, Cléo saisit le col de son cousin pour le plaquer sur mur. Qu'est-ce qui lui prenait ? Ça ne lui ressemblait pas.
- Wow, Cléo, calme toi ! S'exclama Mathias, surpris et le souffle coupé.
- Qu'est-ce que tu veux que je fasse ?! Que je te laisse parler comme ça de lui ?
Le brun esquissa un sourire -son sourire si énervant qui commençait à franchement exaspérer Cléo, et lança :
- Parce que tu ne me crois pas ? Voyons : au début de l'année, Angel est à fond sur Azaël -oui il m'a tout raconté. Puis ils s'embrassent, alors il a ce qu'il veut. Ensuite il passe à toi ; assez rapidement non ?
- Ça ne veut rien dire, on s'est embrassé et il a pas...
- Et qui te dit que cette fois-ci ce qu'il attend pour passer à autre chose ce n'est pas plus ?
- N'importe quoi, souffla Cléo.
- Qu'est-ce qu'il t'a dit au juste ? Tout ? Ou juste ce qui l'arrangeait ? Est-ce qu'il t'a raconté qu'il a sauté Lola ?!
Le cœur de Cléo rata un battement. Angel et Lola ? Ça n'avait pas de sens. Lola était avec Mathias et...
- Et ouais, il a baisé ma meuf. Sacré vengeance, je lui tire mon chapeau. Enfin chez lui, ce n'était pas de la vengeance. Je te l'ai dit, il est obsessionnel. Quand il a connu Lola, quand il m'a vu avec elle, elle est devenue sa nouvelle obsession. "Qu'est-ce qu'elle a que je n'ai pas ?" : il devait se poser cette question tous les jours. Et il a poussé ses recherches jusque dans son lit. Alors, avant de dire que je suis le connard de l'histoire, il faut penser à tout bien raconter.
La nuit n'avait jamais semblé aussi froide.
Mathias se dégagea avec force de la prise de Cléo. Alors même que ce dernier ne voulait pas le croire, le ressentiment qui se lisait dans les yeux de son cousin était si sincère que le blond douta. Angel était-il vraiment comme ça ? À obtenir égoïstement tout ce qu'il voulait ? Peut être que depuis le début, alors que Cléo croyait jouer à ce défi, c'était de lui qu'on se jouait. Mais en même temps, il ne pouvait croire que la semaine passée ensemble n'avait été que du faux, que de l'obsessionnel. Angel n'avait rien tenté, même pas un bisous, et leur relation n'avait été que douceur et bienveillance. Non décidément, il ne pouvait pas y croire.
Alors il regarda Mathias d'un air acerbe et déclara :
- Arrête de vouloir foutre la merde entre nous. Rentre chez toi."
Et il lui tourna le dos, non sans claquer la porte bien fort.
*
Il trouva les autres toujours au salon ; ils ne regardaient plus Harry Potter mais semblaient discuter plus ou moins sérieusement. Maël était à moitié allongé sur Nolan qui lui caressait les cheveux. Charline avait sa tête sur l'épaule de Newton ; Cléo fronça les sourcils à cette vision mais ne dit rien. L'ambiance était clame mais pesante. Quand il entra dans la pièce, tous les regards se tournèrent vers lui :
- Alors, qu'est-ce qui se passe ? C'est quoi l'histoire ?
Cléo se sentait fatigué, désorienté et perdu. Il n'avait pas la force.
- Je... je vous raconterais plus tard si c'est OK.
- Mais non on veut sav-
- C'est carrément OK mec. Tout va bien ? Interrompit Newton.
Cléo regarda son meilleur ami, qui comme toujours savait quand c'était le moment, et quand ça ne l'était pas. Il avait de la chance de l'avoir. Il lui décrocha un sourire reconnaissant qui voulait tout dire, et demanda :
- Je vais monter voir comment va Angel. Il est dans la chambre... ?
- De gauche, celui de la petite sœur de Newt', répondit immédiatement Romain. Par contre, il dort peut être.
- Merci, souffla le blond.
*
Angel, dos à la porte, ressemblait à un tableau, allongé ainsi dans les draps roses et les multiples peluches de Georgia. Cléo le contempla quelques secondes avant de s'assoir au bord du lit avec précaution.
"Je suis désolé pour ce soir, chuchota-t-il. Je... je ne savais vraiment pas que c'était mon cousin, je n'ai pas fait le rapprochement.
- C'est rien, lui répondit une voix éraillée, signe qu'il avait pleuré.
- Oh, tu dormais pas ?
Une part de Cléo l'aurait espéré. Pour ne pas l'affronter.
- De toute évidence...
- Mh, ouais, désolé. Donc... tu veux en parler ou... ?
- Qu'est-ce qu'il y a à dire Cléo ? Le mec qui m'a brisé est ton cousin, il est de ta famille. Ça... ça peut pas le faire.
C'était donc comme ça qu'Angel voyait les choses ?
- Comment ça "ça peut pas le faire" ? On s'en fout, je le considère même pas comme mon cousin. Je le vois jamais, j'avais oublié son existence jusqu'à aujourd'hui, je te jure.
Mais Cléo ne reçu en réponse à son serment que du silence.
- Angel s'il te plait...
Il entendit un sanglot étouffé. Une vague d'empathie s'empara de lui et il voulu se mettre à pleurer lui aussi, mais il se dit que ce n'était vraiment pas le moment. Alors il se rapprocha pour caresser les douces boucles du jeune homme allongé à côté. Cependant ce dernier, à peine au contact de sa main, se rétracta pour se mettre encore plus sous les draps.
- C'est pas... c'est pas de ta faute Cléo, ne t'excuse pas, finit par lui répondre Angel. C'est Mathias. Le revoir ça m'a... ça m'a...
Et il ne finit pas sa phrase, mais Cléo pouvait facilement deviner où il voulait en venir. Il s'enhardit face à la détresse du châtain :
- Mais je suis là maintenant OK ? Ce connard appartient au passé ; bientôt il ne te tourmentera plus je te le promets.
- Tu peux pas me promettre ça, souffla Angel.
- Bien sûr que si ! Je te jure que je m'en fous que ce soit mon cousin, je ferai tout ce que je peux pour qu'il n'apparaisse plus jamais dans ta vie.
- Non Cléo tu comprends pas, c'est ça le problème...
- Je comprends pas quoi ?
- Toi, tu t'en fous peut être. Mais moi maintenant, dès que je te regarderais, je penserais à lui".
Et sur ces mots, le cœur de Cléo se brisa.
*
NDA : bon... sur cette fin de chapitre peu joyeuse, je me permets de vous souhaiter une bonne année 2024 ! Je vous promet que Cléo et Angel seront plus heureux à l'avenir :)
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