15. Une nouvelle amie
Cléo câlinait son ex-copine.
Cléo,
Câline,
Son ex.
Son ex magnifique, son ex qui est une femme. Peut-être qu'après tout, ce qu'Angel avait cru partager avec Cléo n'était qu'une illusion, peut-être que Cléo était juste simplement hétéro et qu'il le considérait comme un bon ami, peut-être qu'Angel était le seul à avoir ressenti une relation particulière entre eux.
Mais non, c'était ridicule, ce n'était pas parce que Cléo faisait un câlin à Maya qu'il n'était pas intéressé par lui. Mais d'un autre côté, il voyait comment le blond regardait son ex, il avait vu comment il avait fermé les yeux, l'air apaisé, quand elle l'avait pris dans ses bras.
Au fond de lui, Angel savait que Cléo n'était pas Mathias, que Cléo ne lui ferait jamais de mal comme Mathias l'avait fait. Que Mathias était un cas à part et accessoirement un psychopathe. Mais il était tellement profondément marqué par cette première histoire d'amour qu'il ne pouvait chasser le doute qui planait dans son esprit. C'est pour ça qu'à la base il ne voulait pas s'engager dans une relation avec un homme qui n'était pas sûr à 100% de sa sexualité. Mais Cléo était Cléo, et Angel ne pouvait pas s'en détacher.
Il savait, du coin de l'œil, que le blond le regardait à sa droite. Heureusement ils étaient en demi groupe pour ce cours donc Angel n'avait pas le supplice de voir Cléo et Maya assis l'un à côté de l'autre, comme ils l'avaient déjà fait lundi. Le jeune homme était assis à côté de son meilleur ami, qui d'ailleurs avait l'air un peu renfrogné. Maël, assis à côté de lui, lui tapa sur l'épaule :
"Mec, ça va ? Lui demanda-t-il en chuchotant.
Cette intervention tira Angel de ses pensées, qui réalisa qu'il n'écoutait pas du tout le cours.
- Euh, ouais, ouais, ça va. Pourquoi ?
- Bah, je sais pas, t'as l'air super tendu.
- J'avoue.
- C'est Cléo c'est ça ?
- Comment tu-
- Vous êtes arrivés ensemble ce matin alors que vous n'habitez pas à côté, que vos mères ne sont a priori pas amies. Je fais le calcul et j'en déduis que vous avez passé la nuit ensemble.
Bon, Angel n'osa même pas lui sortir le mensonge du covoiturage.
- Ouais, c'est vrai. Il... m'aide sur un problème perso.
- Cléo c'est vraiment une bonne personne, t'as de la chance de pouvoir compter sur lui.
Oui. Il avait de la chance.
- C'est vrai.
- Mais du coup, c'est quoi le problème ?
- Il euh... câline son ex ?
- Oh. Maya c'est ça ?
- Mh.
- Bon après... ils ont le droit d'être ami non ? Ils le sont ?
- Je sais pas trop, on en a jamais parlé.
- Bah alors, il suffit de lui poser la question. Déjà que Cléo est assez réservé, si en plus toi tu n'oses pas lui parler vous n'allez jamais avancer.
Angel grimaça : Maël n'avait pas tord. Il s'en voulu immédiatement de s'être énervé tout à l'heure. Il savait qu'il avait des problèmes de colère : "tu es instable" lui avait dit un jour Mathias. Et il l'avait cru, parce qu'après tout c'était un peu vrai.
- Et toi avec Azaël ? S'enquit-il pour changer de sujet.
Le jeune homme à sa gauche ouvrit grands les yeux, puis lança avec un sourire :
- Au fait, on est en cours, on a pas le droit de parler."
Bien joué Maël.
*
Le déjeuner fut frustrant. Angel était au bout de la table en face de Charline et Romain, et Cléo était... à l'autre bout. Ils se parlèrent de façon cordiale mais de toute façon ne purent beaucoup échanger pour la simple et bonne raison qu'ils étaient trop loin l'un de l'autre. Angel se détendit malgré tout et écouta Charline parler d'un chien qu'elle avait secouru dimanche : elle l'avait trouvé sur le bord de la route en allant à son cours de danse et n'avait pas eu le cœur de le mettre à la fourrière. Une fois les vérifications faites chez le vétérinaire qui avaient confirmé qu'il n'était pas pucé, elle l'avait gardé chez elle et l'avait baptisé "Arno".
- Pourquoi Arno ? Avait demandé Romain.
- Et pourquoi pas ? Ça sonne rigolo.
- On ira balader nos chiens ensemble", avait proposé Maël d'un air enthousiaste.
Pour l'après midi, ils étaient tous partis dans des cours différents, car ils avaient chacun leurs spécialités respectives. Cléo et Nolan en musique (ce dernier commençait tout juste cette année) ; Charline, Abraham et Romain en sport ; Azaël en art ; Elisa et Newton en littérature anglaise ; Angel et Maël en mathématiques.
*
C'était une blague ? Maya était avec lui en maths.
Il ne l'avait pas remarquée au premier cours, celui où il avait sympathisé avec Maël, mais maintenant qu'il voyait qui elle était, il ne pouvait pas l'ignorer. Il se dit que la pauvre jeune fille ne devait même pas savoir qui il était, et qu'elle était détestée par quelqu'un qu'elle ne connaissait même pas. Mais il n'arrivait pas à s'empêcher d'avoir du ressentiment à son égard. Est-ce que c'était par rapport à son histoire personnelle ? Certainement. Est-ce que c'était, rien qu'à peine, un peu jalousie aussi ? Possiblement.
Angel s'assit en chassant cette pensée. Il attendait que Maël revienne des toilettes, mais quelqu'un se permit de s'assoir à côté de lui avant que le blond ne revienne.
Cette personne évidemment, était Maya.
"C'est une habitude chez toi prendre la place des gens, lui lança Angel d'un ton acerbe qu'il regretta un peu.
- Je ne vois pas de quoi tu parles, répondit-elle sans même le regarder.
Angel soupira et fit l'effort de prendre un ton plus cordial :
- Bon, qu'est-ce que tu veux ?
Elle soupira à son tour :
- J'ai vu comment tu m'as regardée quand j'ai fait un câlin à Cléo.
- Et ?
- Et je veux que tu saches qu'il n'y plus rien entre nous.
- Pourquoi ça m'importerait ?
- Aller Angel, on va pas jouer à ça. Cléo m'a tout raconté.
Il paniqua :
- Comment ça tout ?
- Ben, que vous vous tournez autour quoi.
Angel se sentit soulagé ; il avait cru un court instant que le jeune homme avait trahi ses confidences.
- Et donc, continua-t-elle, je voulais te dire... que la voie est libre quoi. Cléo et moi, on est juste amis. Et... j'aimerais qu'on s'entende. Alors je veux l'aider.
- Est-ce que c'est vrai que tu l'as trompé ?
Maya ouvrit la bouche, surprise par la question.
- Euh je...
- Comment est-ce qu'on peut tromper quelqu'un comme Cléo ?
Angel ne voulait pas lui faire de reproches. Mais il avait besoin de savoir, de comprendre les tenants et les aboutissants de cette relation. Maya baissa les yeux, honteuse très certainement. Elle sembla réfléchir un court instant avant de relever la tête :
- J'ai fait l'erreur de ma vie et je le sais. Mais ce n'est pas auprès de toi que je dois me justifier. Cléo m'a pardonnée et c'est tout ce qui compte. Maintenant, la seule chose que je peux faire pour me racheter, c'est l'aider à aller de l'avant.
- Est-ce que ce n'est pas un peu hypocrite ? Lui faire du mal et poser le pansement après ? C'est un peu trop facile.
- Peut-être. Mais je sais que Cléo a besoin de ça, qu'on le pousse, qu'on le soutienne. Parce qu'il manque énormément de confiance en lui. Il a... il a un passé, comme tout le monde, mais qu'il n'a jamais voulu me raconter entièrement. Tout ce que je sais c'est qu'il en est encore marqué. Et si il m'accepte en tant qu'amie, je serais là pour lui rappeler tous les jours à quel point il est formidable, à quel point il mérite mieux que ce qu'il a eu avec moi.
- D'accord.
- D'accord ?
- Aide moi à comprendre Cléo, aide moi à me rapprocher de lui."
*
Il était 17h et la fin des cours sonnait pour la plupart des lycéens. Mais Angel ne se dirigeait pas vers la sortie : ses pas le menaient au bout du couloir B3, là où se trouvait la salle de musique. "Cléo reste souvent après les cours pour s'entraîner" lui avait dit Maya. S'approchant petit à petit, il était en mesure de discerner un air au piano, mais qu'il ne sut pas identifier. Il s'arrêta à l'entrebâillement de la porte, silencieusement, et y passa la tête.
Ce qu'il vit fut un mélange de beauté et de grâce, autant pour ses yeux que pour ses oreilles.
Cléo, la tête légèrement penchée en arrière, faisait courir ses mains sur le piano : c'était comme si ses doigts caressaient les touches, les survolaient avec légèreté. La mélodie qui s'en dégageait sonnait comme un hommage, mais pas le genre d'hommage qu'on fait à un enterrement -non, le genre qu'on fait quand on est fier de quelqu'un. Oui, voilà, c'était un air qui disait fierté et reconnaissance, avec une certaine gravité dans les notes.
Si ses doigts étaient rapides et précis, sa bouche elle marmonnait -non, chantonnait un quelque chose, pas assez fort pour être vraiment audible. La tête ainsi penchée Cléo dévoilait son cou d'une manière sexy, il fallait le dire, le genre de manière qui donne envie de mordre dedans. Sale pervers, se dit Angel à lui-même. Les cheveux de Cléo étaient ramenés vers l'arrière, coincés derrière ses oreilles ; une coiffure que le nouveau n'avait jamais vu sur lui (d'habitude ses cheveux tombaient plutôt devant ses yeux) mais qui lui allait diablement bien.
Bref, Cléo était un ange, et c'est la première chose qui vint à l'esprit d'Angel.
Respectant son art, il attendit que le blond finisse de jouer avant de lancer :
"Salut joli garçon".
*
NDA : oui j'ai clairement plagié SKAM pour la scène du piano lol
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