Cinglé

"Je t'ai dit de me laisser tranquille ! Fiche le camp et lâche-moi les baskets !"

"Pourquoi ? Nous avons une conversation tellement agréable. Je ne fais que parler, n'est-ce pas ? Et nous avons besoin de quelqu'un à qui parler, non ?"

"Dégage ! Arrête de me suivre !"

Il tient toujours la cadence mais il s'est tu maintenant. Je refuse de le regarder. Si je l'ignore, peut-être qu'il s'en ira. Il l'a fait la semaine dernière.

Pourquoi suis-je passé par Seven Dials ? J'aurais dû le savoir. J'aurais dû retenir la leçon depuis le temps. Évite Seven Dials, Matthew !

Mais je ne fais pas attention, évidemment ! Je ne fais absolument pas gaffe quand je marche. Tout à coup je suis hors de Covent Garden et bim ! Seven Dials où ce maniaque se planque dans l'ombre près du Cambridge Theatre. Et maintenant il ne me lâchera pas.

"Oh, oh, nous sommes sur une petite foulée, ce soir, on dirait." J'vais devoir prendre le rythme, OK. Parti pour passer une soirée en ville ? Tu vas te faire railler dans ces fringues pourries. C'est tout ce que tu mérites. Sale con."

Il tient toujours le rythme alors même que je suis déjà à mi-chemin de Earlham Street. Les gens sont encore dehors, profitant de l'atmosphère, bien que la nuit soit sur le point de tomber. Les magasins sont fermés mais les vendeurs de nourriture ambulants dans leur petites tentes sont toujours là. L'odeur de la nourriture Tandoori provenant de l'un d'eux me fait presque m'arrêter.

Presque.

"Il y a un pauvre connard répugnant ! À peu près aussi répugnant que tu l'es la plupart du temps. Bon sang, qu'est-ce qu'il y a comme saletés qui errent dans les rues de cette ville, hein ? Un tas de putain de ratés, hein ? Beaucoup comme toi, quoi... Exhibant ta putain de tronche répugnante et immonde à travers la ville comme tu le fais."

Les ignorer est la meilleure ligne de conduite. Continue simplement de marcher. Fais le sourd.

Je remonte mon sac à dos et garde les yeux fixés au loin. Je ne le regarde pas. Il finira par se fatiguer. Il laissera tomber. Il s'en prendra à quelqu'un d'autre.

"Tu m'ignores maintenant ? Oh, ne crois pas que je ne t'ai pas vu jeter un œil en direction de cette merde étrangère qu'ils appellent nourriture de nos jours. T'as faim, n'est-ce pas ? Tu veux t'arrêter pour manger un morceau, hein ? Je parie que je sais de quoi d'autre tu voudrais un morceau."

"Tu vas me foutre la paix ! Casse-toi ! Pourquoi tu me suis ? Tire-toi ! Juste tire-toi ! Fous-moi la paix !"

Je continue de marcher, secouant la tête et agitant les mains pour me débarrasser de lui. Ces sales types ! Pourquoi la police ne ramasse-t-elle pas ces gens et ne les met-elle pas là où ils devraient être : dans un établissement spécialisé ? Des dangers pour la société ! Chacun d'entre eux. Londres est tout simplement infestée de ces cinglés.

Mais il est toujours là, accroché à moi comme une tique. Comment vais-je le semer si les cris et les grands gestes ne marchent pas ? Les gens sont arrêtés et nous fixent, moi et cet aliéné. Certains ont même sorti leurs téléphones. Bien !

"Appelez la police ! Ce cinglé n'arrêtera pas de me suivre ! Que quelqu'un appelle la police, s'il vous plaît !"

Ça ne l'effraiera pas, je pense. L'attention va le chasser.

Sauf que ça ne le chasse pas. Il se jette devant moi, essayant de me barrer la route. Je fais un pas de côté pour l'esquiver mais il anticipe et se retrouve là avant moi. Il continue de me bloquer jusqu'à ce que je ne puisse plus me contrôler et que je commence à crier.

"Hé, espèce de taré ! Dégage de mon chemin ! Va te faire foutre, putain ! Va faire chier quelqu'un d'autre !"

Mais il ne le fait pas. Il continue de sauter et danser devant moi.

Je fais volte-face et essaie de revenir sur mes pas, mais soudain il se trouve encore devant moi. Je me retourne, et il est toujours là.

"Où vas-tu, hein ? Tu vas pas en ville ? Tu veux pas rouler une pelle à une putain d'ivrogne ce soir, hein ? Ça m'étonne pas ! T'as pas d'couilles, connard. Les putains sont trop bien pour toi."

Je vois deux policiers anglais apparaître sur l'un des côtés de la rue, leurs gilets jaune fluo réfléchissant les lumières provenant des vendeurs de nourriture ambulants et des devantures illuminées des magasins. Les gens regardent toujours, bouches bées, se cramponnant à leurs téléphones à moitié levés.

"Tout va bien, monsieur ?"

"Oh, Dieu merci ! Ce cinglé m'importune ! Il..." Je me retourne, le bras tendu pour le pointer du doigt...

...et il est parti. Disparu ! Il s'est volatilisé dans la nature !

"Il était juste là ! Il m'a suivi tout le long depuis Seven Dials. Un mec complètement fou ! Où est-il allé ?"

Un des policiers anglais ouvre sa bouche pour dire quelque chose, mais l'autre lève la main pour l'en empêcher.

"Avons-nous pris notre traitement aujourd'hui, monsieur ?"

"Traitement ? Quoi ? De quoi parlez-vous ? Je ne prends aucun traitement !"

"La petite bouteille, monsieur ? Sur la table de nuit ? Une dose tous les matins, une tous les soirs ?"

"Je vous l'ai dit, Je ne prends aucun médi-"

Oh.


Petit connard étourdi, n'est-ce pas, Matthew ?

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