28| Nouveau départ
Newt en restait bouche bée.
7 petits mots.
Voilà à quoi était réduite la vie et la mort de Catherine Fleming.
A 7 minuscules et impersonnels mots dans le Daily Prophet.
La tête baissée sur le journal et les mains tremblantes, il caressa du bout des doigts le visage innocent de celle qu'il venait de perdre.
Le papier, rugueux au toucher, était bien loin de retranscrire la douceur de sa peau.
Une peau que Newt ne toucherait plus jamais, à son plus grand désespoir.
Des larmes coulant sur ses joues, le sorcier fixa la photographie en noir et blanc de Catherine pendant de longues secondes.
Ses yeux foncés étaient si vivants sur cette photographie. Si différent du regard vide dont il se souvenait alors qu'elle gisait morte dans ses bras, dans un appartement lugubre de Petite Italie.
Les sanglots qui le traversaient redoublèrent à ce souvenir. Il n'essaya même pas d'empêcher les larmes de recouvrir ses joues.
Quel était l'intérêt ? Depuis cet affreux événement, un jour auparavant, il ne tenait jamais très longtemps sans se remettre à pleurer.
Cependant, plutôt que de continuer à souffrir en silence face à ce bout de papier déprimant, Newt décida de replier le journal et porta son regard sur le lac qui brillait en face de lui.
Bleuté, calme, réchauffé par un soleil qui illuminait tout le parc. Il faisait aussi beau, si ce n'était même pas plus, que la veille, quand il s'était assis ici même avec Catherine pour lui avouer ses sentiments.
Désormais, ce parc lui paraissait bien terne. Et ce banc bien vide.
Il ferma les yeux et leva la tête vers le ciel, laissant le soleil sécher ses larmes et essayant de ne pas faire attention aux cris joyeux d'enfants jouant dans l'air de jeux à proximité de lui, aux oiseaux gazouillant dans les arbres et aux bavardages enjoués de jeunes couples se promenant main dans la main sur des sentiers de terre battue.
Il se devait bien de l'admettre, et même si cela lui était difficile, le monde continuait de tourner.
Sans elle.
Les moldus, comme les sorciers, continuaient de vaquer à leurs occupations habituelles et Newt se sentait bien incapable d'en faire autant.
Pourtant il le devait.
C'était ce qu'elle voulait. Elle l'avait écrit noir sur blanc.
Newt rouvrit les yeux et essuya ses joues du revers de la main.
Aussi dur qu'avait été la lecture de la lettre que lui avait laissé Catherine, Newt était heureux de l'avoir fait. Il en avait eu besoin. Un peu comme si ces mots couchés sur papier représentaient une partie de Catherine qui ne le quitterait jamais. Qui l'aideraient à surmonter cette épreuve.
Bien évidemment, à la première lecture de la lettre, cela n'avait pas facile. Le magizoologiste avait été étonné, choqué, attristé même d'apprendre que la moldue s'était douté de ce qui l'attendait. Non pas qu'il croyait entièrement à cette histoire de divination.
Mais elle si. Et cela lui suffisait.
Il lui fallut une deuxième lecture pour assimiler toutes ces nouvelles informations.
Et les accepter.
Car aussi blessant que cela était, il comprenait pourquoi elle avait gardé tout cela pour elle.
Parce qu'il ne l'aurait jamais cru. Et que même s'il l'avait fait, il aurait effectivement fait tout ce qui était en son pouvoir pour la protéger, quitte à se sacrifier pour elle.
Lors de sa troisième lecture, le lendemain matin, il se promit à lui-même, ainsi qu'à elle, de suivre sa demande. De continuer à vivre. De tourner la page.
Il lui faudrait du temps mais il y arriverait.
Et les mots de la jeune femme désormais imprimés dans son esprit, Newt se sentait plus léger. Non pas que cela atténuait la douleur qu'il ressentait dans tout son être à cause de sa disparition soudaine mais au moins il avait pu lui dire d'adieu. Avoir un dernier échange avec elle, aussi unilatéral soit-il.
Cette lettre, d'une certaine manière, comblait le vide qui régnait dans son cœur à l'idée de n'avoir pas pu lui dire au revoir, ni d'avoir pu l'embrasser une dernière fois.
Il sentit une larme solitaire couler le long de sa joue mais refusa de la laisser atteindre sa mâchoire.
Aussi coupable se sentait-il, il savait que Catherine avait toujours fait ses propres choix.
Alors évidemment, il avait été celui qui lui avait rendu la mémoire, celui qui l'avait fait connaître la communauté magique, ainsi que celui qui l'avait emmené à quelques mètres de cet immeuble maudit mais Catherine était entrée dans cette pièce de son plein gré. Et aussi dur que cela était pour lui de se l'admettre, il n'aurait jamais pu l'empêcher de venir l'aider. Tout comme il n'avait pas pu s'empêcher de secourir son frère.
De ce côté-là, ils étaient tous les deux aussi bougrement têtu l'un que l'autre.
Newt eut un sourire triste en repensant à la fois où ni l'un ni l'autre n'avait voulu capituler lors d'une excursion nocturne pour aller observer des sombrals.
Newt avait voulu garder une certaine distance entre eux et les créatures. Catherine avait voulu s'en approcher au plus près.
Ils s'étaient chamaillé pendant de longues minutes sans se rendre compte que les sombrals, agacés par ces visiteurs nocturnes bruyants, avaient décidés de s'éclipser en douce.
Quand ils s'étaient rendu compte de la situation, ils en avaient ri à gorge déployée.
Newt sentit ses entrailles se tordre à ce souvenir mais à la place d'un rire nostalgique, seul un sanglot s'échappa de sa gorge.
Sentant probablement sa détresse, Pickett sortit sa petite tête verte de sous le col du sorcier. Newt ne le remarqua même pas, trop concentré à se convaincre de se pardonner.
Ce fut seulement quand le Botruc émit des cliquetis rapides et bruyants que Newt remarqua sa présence sur ses cuisses.
Il soupira :
— Oui, je sais. 14 heures.
Comment pourrait-il l'oublier ? C'était comme si le poids des billets dans sa poche le faisait pencher plus d'un côté que de l'autre.
Et s'il y avait bien une chose à laquelle il ne voulait pas penser maintenant, c'était bien cela.
Avec un sourire las, il prit la créature dans sa main.
— Nous revoilà tous les deux, juste toi et moi. Comme au bon vieux temps, murmura-t-il dans un souffle à son attention.
Pickett pencha la tête avant de la secouer de gauche à droite.
— Ne t'en fais pas pour moi.
Le magizoologiste ramena Pickett sur son épaule avant de cacher son visage dans ses mains. Il prit de grandes inspirations, tentant vainement de penser à autre chose. Le visage de Catherine flottait dans son champ de vision. Il repensa à tous ces moments partagés ensemble dans sa valise, avec ses créatures.
Avec ses créatures.
Emprisonné dans sa propre tristesse, Newt en avait oublié toutes ses créatures qui connaissaient et aimaient Catherine tout autant que lui.
— J'ai peur que Dougal ne s'en remette pas, murmura-t-il en relevant la tête pour regarder deux cygnes nager côte à côte sur l'eau bleutée.
Le Demiguise était celui qui s'était le plus attaché à la jeune femme. D'une certaine manière et aux yeux de Newt, c'était comme si le singe avait trouvé son maître en la personne de Catherine. Cela le fit encore plus redouter le face à face qui l'attendait.
Le sorcier baissa les yeux sur sa valise, posée à ses pieds, alors que le son distinctif de bruit de pas approchant se fit entendre tout près de lui. Instinctivement, Newt cacha Pickett sous son col.
En se retournant pour vérifier que le moldu n'avait rien aperçu, il vit son frère s'arrêter à côté de lui.
— Newt, il faut y aller.
Thésée sourit faiblement puis lui fit un signe de tête en direction du chemin qui menait à un sentier étroit et ombragé.
Les yeux rougis et tirés, il semblait aussi fatigué que Newt. Ainsi que coupable.
Newt n'était pas au fait des événements précis ayant eu lieu lors de l'évasion de Grindelwald mais ce qui était sûr, c'était que les trois morts qui avaient suivies pesaient grandement sur la conscience de son frère.
Newt aurait aimé pouvoir dire quelque chose pour le réconforter mais il s'en trouvait incapable.
Alors, sans d'autres mots échangés, les deux frères partirent en silence vers le sentier et une fois hors de vue, ils transplanèrent. Le Grand Central Terminal apparut devant eux.
L'édifice imposant serra le cœur de Newt.
Il partait.
Cela lui mettait la boule au ventre car d'une certaine manière, quitter cette ville signifiait quitter Catherine et Newt était terrorisé par cette idée.
Après tout, et même s'il avait vécu avec elle majoritairement à Londres, la capitale britannique n'était pas la sienne. Pour lui, New York serait toujours associé aux yeux noirs et profonds de la jeune femme et il avait peur qu'en partant, en retournant à sa vie au Royaume-Uni, il finisse par l'oublier. Et il s'interdisait cela. Quoi que Catherine ait écrit dans sa lettre, il ne l'oublierait jamais.
En s'avançant vers l'entrée de la gare, il serra les deux billets de train contre sa poitrine, essayant de se convaincre qu'il faisait le bon choix.
Dire qu'il avait acheté ces billets sur un coup de tête, le jour avant l'accident.
Il avait voulu que Catherine puisse rentrer chez elle, en Californie, et revoir ses parents. Il voulait la rendre heureuse. Il savait que sa famille lui manquait mais il espérait aussi pouvoir faire d'une pierre deux coups et s'entretenir avec son père afin de concrétiser une idée qu'il avait eu quelques semaines auparavant.
S'il avait pensé, en achetant ces billets, que Thésée serait son compagnon de voyage et que la raison du voyage serait un enterrement, il n'y aurait pas cru.
Il renifla et Thésée lui tapota le dos, l'empêchant de la même manière de faire marche arrière. Serait-il seulement capable de faire face à la famille Fleming sans craquer ? Eux qui ne connaîtrait jamais les raisons de la mort de leur fille ?
Newt secoua la tête et repoussa cette pensée très loin dans son esprit. Il agrippa plus fermement la poignée de sa valise et emboîta le pas à son frère.
Il se devait d'y aller. Pour tourner la page.
Et si ce n'était pas pour lui, alors il devait au moins le faire pour ses créatures. Elles avaient besoin de lui. Que ce soit Pickett, Dougal, son Niffleur, ses Veaudelunes ou bien toutes les autres qui déambulaient librement dans sa valise. Et qui comptaient sur lui.
Il eut un sourire triste. Il irait mieux oui, pour elles.
La main sur son cœur, il sentit la lettre que Catherine lui avait laissé.
Soigneusement pliée, il la gardait dans la poche intérieure de son manteau pour ne pas la perdre. Il s'y raccrochait comme à sa propre vie.
Il grimpa l'escalier en pierre qui menait au quai derrière Thésée et grimaça de douleur à chaque marche. Sa blessure à la jambe avait pourtant été soigné grâce à la magie.
Cela n'était donc pas physique.
Probablement une douleur fantôme. Il aurait presque pu en rire.
Une douleur liée à un membre manquant. Une douleur presque imaginaire.
Il la chérirait car il savait qu'elle était liée à la personne la plus importante de sa vie. Et il était prêt à souffrir de temps à autres si cela signifiait qu'une part de Catherine était toujours avec lui.
Il boita derrière son frère pour atteindre le wagon 12 du train en direction de la Californie et alors que les deux sorciers l'atteignaient, Newt fut surpris de voir son frère s'arrêter près de la porte.
Il fut moins surpris quand il vit les sœurs Goldstein et Jacob Kowalski les attendre.
Newt retint ses larmes.
Il n'y avait pas pensé avant mais, en quittant New York, il quittait aussi d'autres êtres chers. Comme si ce départ n'était pas suffisamment dur, pensa-t-il tristement.
Mais pourtant, il était hors de question de rendre ces adieux plus longs qu'ils ne devaient l'être. Il n'était pas sûr de supporter d'autres séparations.
Il se planta devant le trio, à côté de Thésée, et attendit. Le premier à parler fut Jacob. Prenant Thésée puis Newt dans ses bras, il leur annonça avec un sourire se voulant léger :
— Revenez vite, d'accord. J'ai tout un tas de pâtisseries pour vous deux.
Newt sourit faiblement à Jacob pour la remercier avant que Queenie ne le prenne dans ses bras à son tour.
Newt pria pour que la Legilimen ne lise pas dans ses pensées, pour qu'elle ne mentionne pas le nom de la moldue devant lui. Et elle respecta son souhait.
Elle se contenta de lui sourire sincèrement. Ses yeux exprimant tout ce qu'elle ne pouvait dire à voix haute. Toute sa compassion, tristesse, amitié. Cela émut Newt bien plus que si elle avait parlé.
La sorcière, ne voulant pas pleurer devant lui, le reprit dans ses bras une dernière fois avant de s'échapper avec son mari, faisant un signe de la main à Thésée et à lui avant de disparaître dans la foule avec Jacob.
Newt baissa la tête, attristé, mais les adieux n'étaient pas finis.
— Prends-soi de toi, Newt.
Il plongea son regard dans celui de Tina. Il y vit la même tristesse et compassion que dans les yeux de Queenie et Jacob.
Elle s'approcha, comme pour poser une main sur son épaule, mais décida du contraire au dernier moment. Elle resta devant lui pendant quelques secondes, gênée, avant de sourire faiblement.
— Queenie, Jacob et moi pensions te rendre visite, d'ici quelques semaines, à Londres. Je- Est-ce que tu y vois un inconvénient ?
Son expression se remplit de doute et d'espoir et Newt ne put se résoudre à dire non.
Sa voix se fit rauque quand il répondit.
— Aucun.
Tina eut un sourire soulagé en répondant :
— Queenie sera ravie. Elle a toujours rêvé d'aller en Angleterre.
Newt lui sourit en retour. Du moins, il essaya.
Vivre, il devait vivre.
Et quoi de mieux que la présence de ses amis avec lui pour cela.
Pour l'aider à tenir sa promesse.
Il fit un signe de tête à Tina puis à Thésée et les deux frères pénétrèrent dans leur wagon.
Il s'en allait. Pour tourner une page de sa vie. En espérant que celle qui suivrait serait plus joyeuse.
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