17| La dernière soirée
Le reste du voyage défila à une vitesse folle et Newt Scamander se retrouva bien embêté quand le paquebot commença à naviguer sur la Manche. Il avait voulu demander à Catherine de rester avec lui, de ne pas partir de son côté quand ils arriveraient à Portsmouth mais il n'avait pas encore trouvé le moment idéal pour cela. Newt voulait que ce soit spécial, que la jeune femme ne puisse pas dire non. Ce qu'il voulait, c'était qu'elle assiste à quelque chose de suffisamment impressionnant pour qu'elle souhaite rester en sa compagnie encore un peu plus longtemps. Il ne savait pas vraiment s'il souhaitait qu'elle reste encore quelques semaines avec lui ou bien de manière plus définitive, tout ce qu'il savait c'était qu'il n'était pas prêt à lui dire adieu. Et pour cela Newt était prêt à mettre les petits plats dans les grands sans même qu'il ne lui vienne à l'esprit qu'il n'avait pas besoin de faire tout cela ; que Catherine aurait dit oui à sa demande dans n'importe quelle condition car, elle aussi, souhaitait plus que tout au monde continuer à partager ses journées avec lui.
Et c'est ce qu'elle fit lorsque le sorcier lui proposa de le rejoindre sur le pont après le dîner. Il souhaitait lui montrer une toute nouvelle créature pour leur dernière soirée ensemble et Catherine avait accepté avec enthousiasme, souhaitant plus que tout profiter de ses derniers moments avec le jeune homme, en espérant que, peut-être, elle aurait le courage de lui demander si elle pourrait le revoir une fois sur Londres.
S'emmitouflant dans son manteau bleu et cachant discrètement Pickett dans sa poche droite, Newt attendait Catherine joyeusement. Il était persuadé que la vue d'un serpent de mer d'une trentaine de mètres serait suffisant pour influencer Catherine et lui faire dire oui. Quand elle arriva, un grand sourire sur les lèvres et maquillée de manière plus sophistiquée que d'ordinaire, Newt se surprit à sourire de bonheur en réponse. Il se mit aussi à se demander si son invitation était ce que l'on pouvait considérer comme un rendez-vous galant. Ce n'avait pas été son intention mais l'idée que, peut-être, Catherine l'avait compris comme cela, ne le dérangeait pas le moins du monde.
Newt emmena Catherine à l'arrière du bateau. Ils marchèrent lentement sur les planches de bois légèrement mouillées qui grinçaient sous leurs pieds. La soirée touchait à sa fin et le pont était pratiquement désert. Ils se dirigèrent cependant vers le coin le plus éloigné du pont avant de s'accouder au garde-corps rouillé et légèrement humide, profitant de cette manière d'une certaine tranquillité et intimité.
La nuit était déjà tombée quand ils commencèrent à chercher du regard le long serpent de mer et les étoiles brillaient au-dessus de leur tête comme un millier de lucioles. À quelques mètres d'eux, les derniers passagers qui se baladaient sur le pont pour prendre un dernier bol d'air frais marin et admirer l'étendue infinie d'eau autour d'eux finirent par rentrer à l'intérieur du bateau pour se réchauffer. Catherine et Newt se retrouvèrent seuls ; le bruit des vagues étant la seule chose qui brisait le silence.
Newt, séparé de Catherine par quelques centimètres, observait la jeune femme contempler les étoiles, le menton posé dans sa main. Il se mit alors à nommer les constellations pour elle, tendant le bras de temps à autres pour lui en montrer certaines en particulier. Catherine l'écoutait avec attention, un grand sourire sur les lèvres, et assez rapidement, Newt en oublia même la raison de leur présence sur le pont à une heure aussi tardive.
Le temps s'écoula rapidement et les minutes devinrent des heures. L'air frais de fin de soirée fut remplacé par un vent froid et cinglant et la petite veste que Catherine portait devint inutile face à l'acharnement des courants d'air glacés. La jeune femme se mit à frissonner à côté du sorcier, portant ses mains à ses bras pour les réchauffer. Son sourire se fit plus faible et Newt observa la mer avec inquiétude. Ce serpent de mer avait bien choisi sa nuit pour se cacher.
Quelques secondes après, Pickett sortit sa petite tête de la poche du manteau de Newt et tendit un bras vert dans la direction de Catherine, ne supportant pas, lui aussi, de la voir dans cet état.
Newt serra les mâchoires et jeta un rapide coup d'œil dans la direction de la jeune femme avant de retirer son manteau épais nerveusement et de le déposer délicatement sur ses épaules.
Catherine écarquilla les yeux à son geste avant de protester vigoureusement. Elle voulut lui rendre son manteau mais Newt refusa catégoriquement.
— Je- Newt...
La voix de Catherine était faible et son regard surpris et ému. Ses simples mots éprouvaient tout ce qu'elle ne pouvait pas dire. Elle était touchée qu'il fasse un tel geste, probablement un peu gêné et coupable qu'il soit obligé de faire face au vent glacial par sa faute.
Elle baissa les yeux sur le tissu épais bleu qui recouvrait ses épaules et franchit les quelques centimètres qui la séparait de Newt pour se coller à lui dans ce qu'il comprenait comme étant sa manière à elle de le réchauffer.
Leurs épaules se touchant, Catherine déposa doucement sa tête sur l'épaule du sorcier avant de glisser sa main sous son biceps et de faire courir ses doigts le long de son bras. Elle s'arrêta au milieu de son avant-bras et y déposa sa main, faisant parcourir des frissons dans le corps de Newt et ce malgré les diverses couches de vêtements qui séparaient leur peau.
La jeune femme porta ensuite son attention sur la mer en face d'eux et Newt se rendit compte de sa raideur. Son cœur tambourinait dans sa poitrine et il dut inspirer lentement plusieurs fois avant de pouvoir se débarrasser de la tension qui s'était installée dans ses épaules. Tous ses muscles se relâchèrent progressivement et le sorcier fit un geste qu'il ne pensait pas être capable de faire. Il déposa sa main sur celle que Catherine reposait sur son bras. Ses doigts courant sur la peau douce et chaude de la jeune femme, il finit par recouvrir totalement sa main par la sienne dans ce qu'il espérait être un geste affectueux.
Catherine ne bougea pas pendant quelques secondes avant de venir caresser le pouce de Newt avec le sien. Un geste tout simple qui soulagea le sorcier de toutes ses peurs.
Aucun des deux ne fit un geste pendant de longues minutes, profitant au maximum de la proximité de l'autre et de l'intimité qu'ils éprouvaient si loin de toute civilisation. Il ne restait plus qu'eux dans un monde gouverné par la mer et les étoiles.
Newt ne sentait pas le vent s'engouffrer sous sa veste en tissu épais noir. La seule chose qu'il sentait était le chatouillement des cheveux de Catherine dans son cou.
Catherine ne cherchait plus à apercevoir quelconque forme animale. L'unique chose qui attirait son attention était la main chaude de Newt sur la sienne.
Pour les deux jeunes gens, la seule et unique chose qui comptait était la chaleur qu'ils ressentaient dans leur cœur à partager ce moment avec l'autre. Même les vagues qui devenaient plus fortes et les cris joyeux qui commencèrent à se faire entendre derrière eux ne les ramenèrent pas sur terre.
Newt fut le premier à reprendre la parole. Sa voix, à peine plus forte qu'un murmure, appela Catherine. Il ne voyait pas de meilleur moment pour lui demander de rester avec lui. Il ne voyait pas de meilleur moment pour la convaincre de ne pas le quitter.
La tête légèrement penchée pour apercevoir la jeune femme brune, il attendit qu'elle lève la tête et pose ses yeux foncés sur son visage.
Son cœur se mit alors à battre plus fort, ce qu'il ne pensait pas être possible, et il se mit à ressentir une telle nuée de sentiments qu'il en fut étourdi pendant une seconde. De l'émerveillement, de l'appréhension et surtout un profond et fort sentiment d'affection pour elle. Inconsciemment, ses yeux se déposèrent sur les lèvres rosées de la jeune femme et son esprit fut assailli par toutes sortes de questions.
Ressentait-elle la même chose que lui ? Ressentait-elle, elle aussi, le besoin de sentir ses lèvres sur les siennes ? Serait-il même capable de tenter un tel geste ?
Newt ramena son regard sur les yeux en amandes de Catherine, espérant y voir quelque chose qui le conforterait dans l'idée qu'un tel geste romantique serait bien perçu par la femme à ses côtés mais il n'obtint ni confirmation ni désapprobation.
Catherine, la tête tournée sur sa droite, regardait par-dessus l'épaule de Newt quelque chose qui semblait accaparer toute son attention.
— Nous devrions peut-être faire quelque chose...
Catherine jeta un regard inquiet et interrogateur vers Newt et le sorcier se trouva bien incapable de comprendre le sens de sa question. Il tourna alors brusquement son visage vers le point que Catherine regardait quelques secondes auparavant et aperçut un couple d'une vingtaine d'années se bousculer joyeusement sur le pont. L'homme qui avait des cheveux blonds très clairs tenait une bouteille d'alcool à la main et chantait une chanson irlandaise, quant à la jeune femme, qui portait un long manteau en fourrure, elle commençait à escalader le garde-corps en criant joyeusement.
À la vue de la jeune femme se mettant ainsi en danger, Catherine se précipita vers elle pour intervenir, quittant la chaleur réconfortante du sorcier.
Newt l'observa s'éloigner de lui pendant un dixième de seconde. Un soudain manque jaillit aussitôt en lui. Le vent qui pénétrait sous sa veste le fit frissonner et il s'avança dans la direction du couple pour aider Catherine, ne ressentant rien d'autre qu'un vide monstrueux et se réprimandant pour ne pas avoir posé sa question bien plus tôt.
Il fallut à Catherine et Newt une bonne dizaine de minutes pour convaincre le couple de rentrer se mettre à l'abri et pour les raccompagner à leur cabine. Quelques minutes après, Catherine ouvrait la porte de sa cabine et tendait son manteau à Newt, mettant fin à leur soirée. Newt regarda avec une certaine tristesse la jeune femme lui sourire chaleureusement.
— C'était une soirée merveilleuse, Newt, merci.
Catherine ne rentra pas immédiatement dans sa cabine. Au contraire, elle se mit à jouer distraitement avec ses clés dans l'encadrement de la porte, les yeux pleins d'espoir, et Newt en déduit qu'elle attendait qu'il dise quelque chose.
— Je suis tout à fait d'accord.
Newt croisa le regard de la jeune femme et lui sourit avant de venir déposer un baiser rapide sur sa joue. Il se recula ensuite précipitamment, prenant conscience de son geste, mais avant qu'il ne tourne les talons et parte, il jeta un rapide coup d'œil à Catherine. Les joues rosies, elle le regardait avec une vive émotion et Newt fut soulagé par sa réaction. Il baissa les yeux et fronça les sourcils avant de plonger son regard dans celui de Catherine.
— Voudrais-tu... Serais-tu intéressée par la perspective de travailler avec moi ? J'aimerais beaucoup avoir des photographies de mes créatures et comme tu es photographe-
— Oui !, l'interrompit Catherine.
Elle se mordit aussitôt la lèvre avant de baisser la tête, gênée d'avoir montré un tel enthousiasme. Newt sourit timidement, sentant le soulagement parcourir tout son corps.
— J'adorerais cela, Newt. Merci.
Catherine lui sourit timidement à son tour et ouvrit la bouche avant de la refermer aussitôt. Newt l'observa et sourit en voyant ses joues passer du rose au pourpre. Il baissa les yeux sur ses pieds et lui souhaita bonne nuit, ne souhaitant pas prolonger son embarras. Puis, il se dirigea vers sa cabine d'un pas rapide, plus heureux qu'il ne l'avait été depuis bien des années.
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