- Chapitre 3 -
Mercredi 3 Septembre:
Mon réveil m'extirpa bruyamment de mon sommeil qui n'avait pas été des plus réparateurs.
À peine redressée que la scène d'hier soir tournait en boucle dans ma tête. Je poussai un long soupir, dans mes pensées, et inspirai profondément.
Je me levai de mon lit et me préparai promptement, sans un mot à ma famille. Sting ne devait surtout pas savoir qu'il était venu ici, hier. Il aurait été capable de le tuer.
À peine arrivée devant ma salle, toujours dans mes pensées, que je m'immobilisai soudainement. Pourquoi la classe ne rentre pas ? J'eus un frisson qui me longea l'entièreté de mon corps au moment où mon intuition m'alerta d'un mauvais pressentiment. Je déglutis avant de prendre mon courage à deux mains.
Je me frayai un chemin entre les personnes qui bloquaient le passage et ne pus que constater, pétrifiée.
Là. Il était là. En face de moi, me tournant le dos. Les curieux avaient entrepris une conversation avec lui et il ne paraissait pas spécialement paniqué. Mais je voyais bien qu'une lueur d'inquiétude brillait dans son regard. Il avait peur.
- Pourquoi...?
J'avais involontairement sorti cette question qui me brûlait la gorge, d'une voix tellement inaudible que je me demandais comment avait-il fait pour m'entendre.
J'avais tout bonnement l'impression que le monde entier était contre moi, qu'il m'abandonnait lui aussi.
Son regard croisa lentement le mien avant de subitement le détourner, embarrassé.
Je sentais que je n'avais pas l'énergie de combattre cette journée. De le combattre. Qu'est-ce qu'il attendait de moi ? Que j'accepte qu'il revienne comme une fleur dans ma vie, sans aucune animosité qui puisse me submerger en le voyant ? Je ne pouvais pas. Je ne pouvais pas le savoir dans le même lycée que moi, longeant les mêmes couloirs que moi. Je ne pouvais tout simplement pas concevoir le fait que je devais paraître épanouie alors qu'au fond, je ne souhaitais que hurler ma rancœur envers la vie.
Ces pensées m'achevèrent et épuisèrent mes dernières forces tandis que les images de cette soirée désastreuse tournèrent en boucle dans ma tête. Mon ventre se contracta douloureusement et ma vision se brouilla.
L'énergie me quitta brusquement et ma tête devint un poids trop lourd à supporter. Mes jambes tremblaient, affaiblies par tout ce remue-ménage. Mes yeux passèrent en revue la pièce que je trouvais à présent atrocement petite. Je me sentais étouffée. Je cherchais un endroit où me tenir.
Mes jambes flanchèrent et je tombai à la renverse, prestement rattrapée par le bras d'un garçon avant que mon crâne ne heurte le coin d'une table.
Je relevai lentement mes yeux vers les sombres cheveux de mon sauveur et les fermai soudainement, préférant me dire que tout n'était qu'un mauvais rêve. Je préférai ne pas résister plus longtemps et me laissai emporter dans les abysses du sommeil.
Ma respiration se calma et trouva une régularité déconcertante. Puis tout s'apaisa.
Un agréable silence régnait. Le calme planait. Je nageais dans un paisible néant où je me sentais enfin à ma place, loin de tous mes problèmes qui venaient de s'effondrer sur moi en si peu de temps.
Ma cadencée respiration prouvait que je ne faisais plus partie de l'animation du monde depuis un bout de temps déjà. Le temps s'écoulait sans que je ne connaisse pour autant la durée de mon sommeil. Mais peu m'importait.
Je me sentais si bien. Si bien parce que je me sentais inatteignable. Loin de mes soucis personnels, tout me semblait grotesque, absurde. Sa soudaine réapparition me paraissait insensée, superflue. Mais peu m'importait.
Je me sentais apaisée. Sereine et apaisée. J'étais devenue insaisissable. Là où je me trouvais, mes problèmes ne pouvaient plus me retenir.
Mes yeux tombèrent sur une salle blanche et dont la lumière réussit à ne pas à m'aveugler. La pièce ressemblait fortement à une chambre d'hôpital, mais lorsque j'aperçus le fameux affichage " Non contre les muqueuses vaginales ", la logique tilta en moi et je compris que je me trouvais à l'infirmerie.
Je me redressai et fus prise de court par un léger mal de tête. Personne à l'horizon à première vue. Je jetai un coup d'œil à l'heure sur mon téléphone et constatai que seules quinze minutes venaient de s'écouler. Je pris donc la sage initiative de remonter en classe, assurant à l'infirmière que mes vertiges venaient de me passer.
Devant ma salle de classe, j'observai ce qui me séparait encore de Grey et pris une profonde inspiration.
Après avoir toqué et attendu une réponse, j'actionnai la poignée de la porte et l'ouvris. Tous les regards rivèrent dans ma direction et rien que ma direction, comme si je revenais des Enfers.
- Je vais mieux du coup, elle m'a donnée l'autorisation de remonter.
Je m'assis au côté du rosé et déballai en silence mes affaires. Je jetai un regard à la salle de classe, à la recherche d'une touffe blonde qui n'apparut pourtant pas dans mon champ de vision. Je sentis mon ventre se tordre à petit feu.
Constatant mon désarroi, Natsu me tapota l'épaule, ce qui eut pour effet de me faire sursauter.
- Ça va pas ? Me demanda mon voisin de table.
- Non, tout va bien.
- Mmh... mouais. Ce serait pas un certain Grey le problème, par hasard ? Insista-t-il.
Je fronçai soudainement les sourcils et mon regard traduisit de mon étonnement.
- Com-
- J'étais là quand Sting a foutu une raclée à ce gars. Je te jure que c'était vraiment pas joli à voir...
Mon visage se décomposa et une mine peinée se peignit sur ce dernier. La culpabilité me gagna. Ça a merdé... comme toujours. Songeai-je, tristement.
Je m'appuyai contre le dossier de ma chaise et laissai basculer ma tête en arrière. Je lançai un coup d'œil à mon voisin de table avant de fixer le plafond.
- Alors ?
- Pour être honnête, ouais. Avouai-je.
- Tu veux m'expliquer ?
- J'croyais que tu faisais ton badboy mystérieux. Me moquai-je pour détendre l'atmosphère.
Il émit un léger rire qui réussit à me voler un sourire. Je me redressai, l'observant avec attention.
- Pas quand une jolie fille a besoin d'aide.
Ce fut à mon tour de ricaner. J'attrapai mon stylo et m'amusai avec l'appui qui faisait sortir la mine encrée.
- Tu dévoiles un peu trop tes pensées, je crois. Riotai-je.
- Sûrement. Répondit-il, un petit sourire au coin de ses lèvres. Bon, tu m'expliques ?
Je jetai un bref regard à Grey, qui tentait de dissimuler le fait qu'il me scrutait depuis un bout de temps, et remarquai l'hématome à son œil qui s'était formé. Il tenait aussi un mouchoir ensanglanté qu'il compressait contre son nez. Je préférai éviter de croiser son regard et déviai donc le mien.
- Tu vois le nouveau ?
- Le shtroumpf ?
- Quel schtroumpf ? L'interrogeai-je, déroutée.
- Bah le nouveau.
- Mais de quoi tu me parles toi ?
- Bah du nouveau. Répéta le rosé une seconde fois.
- Mais... Il est pas bleu.
- Mais il a les cheveux bleus.
- Il n'a pas non plus les cheveux bleus ! Tentai-je de lui faire comprendre. T'es sûr que t'es pas un peu con ?
- Alors déjà, j'te permets pas ! Mais tu me parles de qui toi ?
- De lui ! Dis-je en lui tournant sa tête dans la direction de Grey.
- Hein ? Aaah oui, pardon. J'suis perché moi.
- C'est bien ce que je disais... Marmonnai-je à moi-même, lui provoquant un froncement de sourcil.
- Gnegnegne. Grogna-t-il, me faisant lâcher un rire. Hum... Mais du coup ?
- C'est mon ex.
- Ah.
Je détournai le regard comme si je venais de dévoiler un secret des plus honteux. Je tapotais frénétiquement contre le bouton de mon stylo bleu.
- Ça s'est mal terminé ?
Je poussai un soupir qui répondait déjà à sa question mais acquiesçai tout de même d'un simple hochement de tête et tournai mon regard vers l'extérieur.
- Tu ne peux plus le voir en peinture ?
- Ouais.
- Il t'a fait du mal ?
Mon mutisme l'aida à comprendre que je ne voulais plus en parler et de ce silence, Natsu avait aussi obtenu sa réponse.
Je passais mon heure à écouter le cours et à m'éclater le poignet à force de prendre des notes toutes les trois minutes. J'avais oublié à quel point nous devions être attentif et sur l'aguet d'une prise de note improvisée. Pour autant, je restais à demi concentrée, jetant à certaines occasions quelques regards furtifs à Grey.
Ça en devenait une obsession qui me provoquait des maux au cœur. Je ne pouvais pas faire abstraction de son retour. Je ne pouvais pas oublier sa présence. Mais j'étais contrainte à combattre mes démons.
Le cours s'acheva et je pouvais enfin ramasser mes affaires pour sortir de cette salle. En face de la porte, une ferme main masculine m'empoigna le bras et, de par cette sensation qui me traversait l'échine, je reconnus mon tortionnaire.
- Lâches moi immédiatement. L'ordonnai-je, sèchement.
- Il faut qu'on discute, Lucy...
Je me tournai pour lui faire face, les sourcils froncés alors qu'il tenait toujours mon bras. Mon regard le dévisagea de dégoût avant qu'il ne se plante dans ses yeux.
- Qu'est-ce que tu fous ici !? Pourquoi tu viens foutre de nouveau ma vie en l'air ?! Mais laisse moi respirer, bordel !
- Mais justement ! Laisse moi te donner des explications !
S'empressa l'ébène de répliquer.
- Nan ! Je ne veux pas ! Lâches moi la grappe, putain !
Je le scrutai sans ciller, prête à forcer pour me détacher de lui.
- Grey ! Hurla ma meilleure amie aux longs cheveux écarlates. Bien décidée à en découdre, Erza se précipita dans notre direction et l'attrapa par le col, me dégageant de son emprise. Qu'est-ce que tu fous là ?!
- E-Erza... L'appela d'une faible voix Grey.
- Tu sais pas à quel point j'ai envie de te foutre une raclée...
Ma main se posa sur le bras de mon amie et, dans un murmure, je la suppliai de ne pas empirer la situation. Mon regard la dissuada d'entreprendre une quelconque connerie et elle lâcha Grey, lui lançant un dernier regard, muté par le mépris.
Je pris mes amies par le bras et les obligeai à quitter le couloir afin de pouvoir rejoindre le hall.
- Lucy ! Ça va ? J'y crois pas... Comment il peut se la ramener comme ça ? S'indigna Juvia.
- Et pourquoi tu ne m'as pas laissée le défigurer ? Renchérit l'écarlate.
- Parce que Sting l'avait déjà fait et que je ne voulais pas que tu te salisses les mains pour si peu.
- Si peu que t'es restée un an à te morfondre sur ta vie à cause de lui. Rétorqua-t-elle.
Je m'arrêtai, à deux doigts de craquer, et plantai mes yeux dans les leur.
- Mais merde quoi ! Fermez la ! Leur crachai-je, au bord de l'implosion. J'en ai ma claque de tout ça !
Elles me considérèrent un instant avant de se raviser toutes les deux alors que nous arrivions au gymnase du lycée pour un cours d'éducation physique et sportive. Des lycéens, qui avaient justement eu sport, sortaient du gymnase. Une tête bleue me valut un retournement et je détaillai le jeune homme, intriguée.
Je me retournai et l'observai quitter la cour extérieure comme un semblant de déjà vu. Je remarquai l'état quelque peu étrange d'Erza qui restait figée, fixant un point devant elle. Cette dernière sursauta à l'entente de ma voix.
Après avoir fait un détour par le vestiaire pour se changer sans un mot, notre professeur séléctionna les équipes.
Je me plaçai sur le terrain, observant mes chaussures, dans les nuages. Je me cognai contre Minerva, ce qui m'extirpa de mes pensées.
- Reste concentrée, Mistinguett, ou on va mordre la poussière. Affirma-t-elle, tout en m'adressant un clin d'œil.
Je hochai la tête, accompagnée d'un timide sourire. Elle éleva son pouce alors que Minerva s'éloigna pour se démarquer. Je passai au peigne fin l'équipe ennemie et me positionnai à un endroit précis du terrain.
Le coup de sifflet annonça le début du match. En un vif geste, je me précipitai à l'autre bout du terrain, là où aucun de mes coéquipiers ne se trouvait, tout en gardant mon regard planté sur la balle, et je bloquai l'attaque d'un de mes adversaires.
Je gardai une forte pression contre la balle et vérifiai que j'étais bien libre de tout mouvement. Je m'élançai et l'envoyai dans le carré noir avant qu'elle ne tourne deux fois, laissant un cri de joie m'échapper lorsqu'elle me fit le plaisir de rentrer.
Ce cours tombait réellement à pic.
J'appréciais le sport et ses bienfaits. Je pouvais souffler et j'arrivais plus facilement à me canaliser après. Le sport me permettait de garder un rythme de vie sain en toute circonstance et me distrayait ne serait-ce que quelque temps.
J'arrivais à me détendre et à passer un bon moment. Et c'était ce qu'il me fallait. Mon remède miracle.
Nous nous replacâmes et le match continua. Je suivis la balle du regard mais il ne fallut qu'un moment d'inadvertance pour que la balle ne se retrouve prête à s'entrechoquer contre mon crâne.
À peine retournée afin de faire face à la sphère orange, que je m'effondrai au sol, le postérieur en premier. La balle avait été interceptée avant qu'elle ne me touche par Natsu. Ce dernier se plaça à ma hauteur, attrapant de ses mains mon pied.
Il me déchaussa et à cet instant précis, je priai Sainte Chaussette de ne pas piétiner sur le peu de dignité qui me restait.
Le rosé retira ce qui me couvrait encore le pied et eximina ma cheville.
- Tu as mal ? Me demanda Natsu lorsqu'il affligea une pression contre mon pied.
Je grimaçai et inspirai profondément tout en lui répondant positivement. J'aperçus au loin Grey faire un pas dans ma direction avant qu'il ne se ravise à rester où il était.
- Je crois que j'ai simplement fait un faux mouvement. Lui répondis-je alors qu'il m'aidait à me relever.
- Tu as toujours quelque chose toi. Se moqua-t-il tandis que je continuais de scruter Grey, ce que remarqua le rosé.
Erza me rejoignit sur le banc de touche alors que j'observais le match se dérouler sans moi.
- Ça va ? S'inquiéta-t-elle, un sourire tout de même plaqué sur ses lèvres.
- Je vais juste laisser mon pied au repos un bon quart d'heure et je serai de nouveau sur pied !
- Beau jeu de mots. Rit l'écarlate.
- Merci !
Je bus une gorgée de ma bouteille d'eau et la passai à Erza qui se servit librement de ma boisson revigorante.
Je balançai ma jambe valide d'avant en arrière, observant ce mouvement musculaire tant l'ennui m'avait prise.
- Lucy ?
Je tournai mon regard dans sa direction et l'observai.
- Je suis désolée pour tout à l'heure. J'ai été égoïste et n'ai pas pensé aux conséquences.
Je lui jetai un dernier regard avant de laisser ma tête toucher le mur, contemplant le plafond. Je fermai les yeux un instant.
- Je ne t'en veux pas, Erza. Je me sens... perdue. J-je ne sais plus quoi faire... Réussis-je à dire, terminant par bafouiller à la fin.
- Tu veux quoi, Lucy ?
- Que tout se finisse enfin... J'en ai marre de me battre contre mon passé. Je voudrais avoir une fin heureuse. C'est tout ce que je demande...
Je restai les yeux clos afin de contrôler les larmes qui tentaient de se frayer un chemin. Sa main attrapa doucement la mienne, dans un signe de soutien, et je posai ma tête sur son épaule. Je laissai un sanglot m'échapper et Erza passa sa deuxième main dans mes cheveux. Tout mon corps se détendit peu à peu et je me laissai lentement aller.
Je me trouvais en face de ma porte d'entrée, prête à actionner la poignée.
Après le cours d'éducation physique, nous avions terminé et nous pouvions rentrer déjeuner et passer l'après-midi chez nous.
- Je ne vois absolument pas pourquoi tu as tant insisté à me raccompagner. Soufflai-je.
- J'avais rien d'autre à faire. Répondit Natsu.
- J'espère pour toi que tu habites près de ce quartier, sinon bonne chance pour le chemin du retour ! Lui souhaitai-je, fermant la porte derrière moi.
J'allais déposer mon sac sur le canapé du salon cependant on sonna. Je soupirai et fis demi tour. J'enclenchai l'ouverture de la porte et le considérai un instant.
- Ouais ?
- J'habite dans le quartier à côté pour te répondre. M'informa le rosé, un sourire amusé aux lèvres, alors qu'il quitta mon champs vision, se retournant une dernière fois dans ma direction.
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Credit to @danthreez_arts on insta
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