- Chapitre 14 -
Mercredi 6 Octobre :
Je m'étais avachie sur ma chaise pendant que Monsieur Shar Pei organisait son bureau, se soufflant des encouragements pour ce cours qui allait être, encore une fois, bien agité.
Natsu, lui, s'était mis à tresser une de mes mèches. Concentré sur le futile détail qu'était ma coiffure, son air enfantin m'amusait. Je l'observais faire, sans broncher.
- Je me demande vraiment pourquoi tu fais ça... Soufflai-je.
- Parce que tes cheveux sont doux. Plaisanta-t-il en serrant un élastique au bout de ma mèche blonde.
Je roulai des yeux, un sourire à la commissure des lèvres, accoudée à ma table.
- Bien ! Débuta le professeur d'histoire-géo, tentant de s'accaparer l'attention de ses élèves, avant que le cours ne commence, je vous annonce dès maintenant qu'un exposé sur le sujet de votre choix se tiendra dans deux semaines.
- La semaine avant les vacances ?! S'exclama un garçon aux cheveux bruns, coupant le prof dans ses explications.
- C'est exact. Il se déroulera le jeudi matin.
- Mais comment ça " un sujet de votre choix " ? Lui demanda Yukino, l'interrompant une nouvelle fois.
- Si vous me laissiez parler, vous le sauriez... Souffla le vieillard, excédé. Hum... donc, la seule contrainte c'est simplement que votre devoir relate un passage historique important ou une période en elle-même. Faites comme bon vous semble. Maximum trois par groupe et personne ne travaillera seul. Compris ?
Le rosé m'interpella du coude et je déviai mon regard dans sa direction. De ses yeux, je connaissais déjà la raison de son coup de coude.
- Ça te dit qu'on le fasse ensemble, Caramel ?
- Ne m'appelle PAS Caramel.
- D'acc', Caramel. Alors ?
Je levai les yeux au ciel et regardai mes amies à la dérobée qui m'incitèrent à les rejoindre.
Je soufflai et me tournai une seconde fois vers les filles, secouant de la tête dans un refus. Je posai ensuite mon regard sur Natsu qui avait baissé le sien. Ce dernier riva de nouveau le sien sur moi.
- Pourquoi tu ne demandes pas à un pote ?
- Parce que j'ai pas d'amis dans cette classe.
Je sourcillai devant sa réponse alors que le rosé, lui, ne réagit pas. Il restait impassible, comme si rester seul ne l'impactait pas.
- Ça fait pourtant plus d'un mois qu'on a repris les cours. Qu'est-ce qui cloche ?
- Je sais pas. Je ne les intéresse sûrement pas, ou ils ont peut-être pas remarqué ma présence.
- Impossible. On ne peut pas ne pas te remarquer quand même. T'as les cheveux roses, j'te signale.
Natsu souffla du nez. Il écrivait ce que Monsieur professeur marquait au tableau tout en me lançant de brefs coups d'œil. Je ne cillais pas.
- Je... mmh... j'fais une soirée samedi soir. Lâchai-je sans trop savoir ce que je disais. Je t'invite, et c'est hors de question que tu te désistes.
Il se redressa sur sa chaise, me scrutant un instant droit dans les yeux. Natsu considéra mon implicite ordre et ricana. D'un hochement de tête, le rosé accepta.
- Et sinon, tant pis pour l'exposé. J'me trouverai bien quelqu'un, hein ?
- Ah non ! Tu te chuts ! J'accepte. Tu viens à ma soirée, je me mets avec toi. Je lui tendis ma main. Marché conclu ?
Il pouffa devant ma détermination et me la serra.
À présent, je paniquais littéralement face à la connerie que je venais de proposer. Moi ? Organiser une soirée ? C'est le monde qui tourne à l'envers là... Il fallait que je trouve un moyen d'avoir la maison sans mes parents derrière mon dos. Il fallait que je trouve une excuse valable pour les faire quitter la maison samedi soir. Mais quoi ? Songeai-je, désespérée.
Je vérifiai la qualité gustative de mon appât et dissimulai ensuite la boîte de cookies, confectionnés par mes soins, dans un placard de la cuisine. Avant q'il ne rentre et ne se doute de quoique ce soit, je me hâtai à ma chambre.
Les pâtisseries étaient le point faible de Sting. Ceux qui pouvaient le faire parler. Et je devais le faire parler. Mon frère, depuis son rendez-vous comme prétendant pour sa belle serveuse, ne m'avait dévoilée que son prénom, Ava, et ce manque d'informations m'irritait depuis mardi. Je me devais de le faire chanter, et ces cookies étaient devenus mon plan sûr.
J'enfilai mes écouteurs et attrapai mon livre, posé à mon chevet.
Un roman fantastique où mages et sorciers se battaient pour le contrôle de l'Empire. Les mages se retrouvaient avantagés grâce à l'arrivée surprise d'une jeune terrienne à la chevelure de feu et aux immenses pouvoirs aussi bien redoutables qu'indomptables. Bien évidemment, une romance entre un sorcier du camp adverse et la magicienne de " l'autre monde " se tramait discrètement. Le suspens était à son comble. Elle, voulait fuir cet univers qu'elle ne percevait pas comme le sien et lui, voulait rester à ses côtés sans que sa vie ne soit mise à prix.
Une main me retira soudainement un écouteur, éclatant la bulle dont je m'étais enveloppée. Le blond fourra ce qu'il m'avait volée dans son oreille et grimaça.
- Je rêve ou t'écoutes de l'asmr ? S'indigna-t-il.
- Et alors ?
- J'ai toujours su que t'étais adoptée.
J'arquai un sourcil, dubitative face à sa connerie, et roulai des yeux. Je posai mon marque page au chapitre douze de mon bouquin et le refermai.
- Désolée de te l'apprendre, mais j'suis celle qui ressemble le plus à maman.
- Ouep, mais c'est moi qui ressemble à papa !
- J'préfère ressembler à maman.
- Oooh t'es entrain de dire que papa est moche... S'offusqua Sting.
- Je n'ai jamais dit ça, par contre... PAPA, STING A DIT QUE T'ÉTAIS MOCHE ! Hurlai-je de ma chambre pour que mon père puisse bien comprendre ce que je lui sortais d'où il se trouvait.
Le bois des escaliers craquèrent avant qu'un silence ne perdure encore quelques secondes. Mon papa ouvrit doucement la porte de ma chambre et toisa son fils.
- Tu me ressembles plus que ta sœur alors, si moi j'suis hideux, toi t'es aussi moche que la merde que j'ai chiée y'a cinq minutes. Lui cracha mon papounet d'amour que j'aimais tant.
Je riais dans ma barbe alors que Sting tentait de s'expliquer, sous le profond désintérêt de mon père.
- Tu mangeras dans la niche du chien ce soir.
- MAIS ON N'A MÊME PAS DE CHIEN. Cria le blond, exaspéré.
Je pouffai avant d'éclater subitement de rire lorsque mon papa quitta la pièce. J'en riais à gorge déployée, les larmes perlant au coin de mes yeux. Mon frère me lâcha un juron et je soufflai pour me calmer.
- Ok, ok... Si tu veux, Sting, j'peux essayer de dire à papa que j'ai inventé ça.
- Nope, dans tes rêves. Quand t'es sympa comme ça, c'est que tu vas me demander quelque chose.
- Rooh bah comme tu veux écoute... Mais tu sais tout comme moi combien papa peut être très TRÈS susceptible... Sting me jeta un regard sceptique. Il avait mordu à l'hameçon. Maintenant, fallait forcer... Nan mais tu sais, j'ai pas très envie qu'il croit que son fils pense ça de lui. Genre ouais, ça se fait pas. Ç'a dû le blesser au fond. Et je m'en veux. Tu mérites pas qu'il t'ignore des jours voire des semaines sans réelles raisons. Tu mérites mieux que ça, Sting.
- Ok, tu m'entourloupes. Tilta le blond.
Phrase de trop.
Désespérée, je lui sautai dessus, le plaquant au sol. Je me serrai contre lui et passai mes mains dans son dos. Point sensible activé.
Sting rit aux éclats lorsque mes doigts chatouillèrent sa colonne vertébrale. Mon frère gigotait dans tous les sens. Des goutelettes s'enfuyaient de ses yeux. Le blond suffoquait, à bout. Il me criait d'arrêter cette torture et je me réjouis face l'effet escompté.
- Stiiing ! Raconte moi ta PUTAIN de soirée avec Fiona !
- A-Ava ! Réussit à rectifier Sting.
Mon frère tenta de résister encore quelques secondes avant de s'avouer vaincu. Je me levai et fermai la porte à clé pour qu'il ne puisse plus avoir de moyen de s'échapper.
Sting reprenait peu à peu son souffle et se redressa avant de s'affaler sur mon lit. Je me précipitai afin de le rejoindre sur mon confortable matelat. Il débuta enfin son récit.
- Il y a rien de spécial à raconter hein...
- M'en fous, raboule les infos. L'ordonnai-je.
- Gnegnegne... Bah du coup, je l'ai attendue jusqu'à une heure du mat' puis on a fait le tour de la ville jusqu'à se trouver une pizzeria ouverte.
- Nickel mais déjà, c'est qui ? Ava, ça suffit pas là. Elle a quel âge ?
- Ava a 18 ans. Elle vient d'entamer ses études sup'. C'est pour ça qu'elle travaille. Elle voudrait avoir son appart' à elle.
- Ça te dérange pas d'être le bébé du couple ?
- Mais- Qui te dit qu'on va se revoir ? Et puis, on a qu'un an de différence hein !
Je mimai son baragouinage de ma main, levant les yeux au ciel. Sting m'insulta et reprit.
- Du coup... qu'est-ce que tu veux que je te dise ?
- De quoi t'as parlé avec elle ? Vous vous entendez bien ? Y'a quelque chose qui cloche ou qui t'intrigue chez elle, à part ses yeux oranges ?
Il roula des yeux et soupira. Puis le blond reprit son sérieux et son regard se perdit dans le vide.
- Honnêtement ? Elle est fantastique. Elle est souriante et agréable. Elle a tellement de maturité et de respect envers les gens qui l'entourent... Les sujets avec elle sont toujours ultra intéressants et j'ai l'impression d'être vu comme son égal et pas comme un imbécile qui fait juste rire. Je sais pas si tu comprends...
J'esquissai un petit sourire, ravie d'entendre ça. Mon frère remarqua le regard que je posais sur lui et il me sourit en retour.
- Ça me rassure... tu le sais ça, Sting ? Je suis contente de savoir ça. Et elle ? Elle s'est amusée ou non ? Tu penses qu'elle voudra te revoir ?
Mon frère soupira et leva les mains en l'air, s'allongeant sur mon lit et portant intérêt au plafond de ma chambre.
- Je sais pas... moi, elle me plaît vraiment. Elle a un de ces pouvoirs... elle m'attire comme le soleil attire la Terre. C'est fou. Par contre, elle, je sais pas. Après tout, ça m'étonnerait pas qu'elle ne veuille plus me revoir. Son regard s'assombrit avant qu'il n'enfouisse son visage dans un oreiller. Je suis beaucoup trop minable pour elle... Souffla mon frère, penaud.
Cette phrase me serra l'estomac. Je ne pouvais pas le laisser dire ce genre d'idioties totalement fausses. Je l'obligeai à se retourner et lui frappai le torse assez fort pour qu'il comprenne que je ne rigolais pas.
- N'ose même plus sortir cette merde de ta bouche, compris ? Comment tu peux dire ça... Tu... Sans toi, je ne serais pas là où je suis maintenant. J'aurais jeté l'éponge et me serais pendue avant qu'on ne puisse m'interner. Je dois te rappeler qui m'a retrouvée en sang dans la salle de bain ? Qui m'a portée jusqu'au cabinet médical le plus proche pour me faire soigner ? Franchement, Sting, ne te sous-estime pas comme ça alors que tu es la personne la plus géniale, la plus formidable que je connaisse.
Mes yeux brillaient d'une lueur qui ne laissait pas de place au doute sur mon ressenti pourtant, je gardai mon calme et inspirai un bon coup. Mon frère détourna le regard presque imperceptiblement tellement il se reprit de manière fulgurante, me fixant sans faillir. Sting exprima de par son plissement d'yeux de combien il se sentait honteux, voire coupable de m'avoir blessée.
- Je suis désolé... C'est sorti tout seul. Je sais que je suis pas parfait, je fronçai des sourcils, mais je vais faire des efforts pour m'améliorer et devenir la personne dont je serai fier d'admirer la beauté tous les jours ! S'empressa-t-il d'expliquer.
- Tu es sur la bonne voie déjà, Sting. Je sais que tu en es capable et je ne dis pas ça que parce que t'es mon frangin adoré mais parce que tu as prouvé ce que tu valais en tant que tel et en tant que personne à part entière.
Le blond m'adressa un petit sourire et acquiesça de la tête. Sting m'ouvrit ses bras et j'y fonçai, la tête la première.
- J'ai même pas eu besoin d'utiliser mes cookies... lançai-je.
Sting se raidit sur place.
- T'as dit... quoi ?
- Mais puisque j'en ai pas eu besoin... je vais les manger.
Mon frère me poussa brusquement et se jeta hors de mon lit. Il fila déverrouiller la porte et je le suivis de près. Le blond dévalait les escaliers alors que je gueulais son prénom dans toute la maison, oubliant que Tom se reposait à l'étage. Sting se précipita dans la cuisine et ouvrit tous les placards, mettant la pièce sans dessus dessous.
Je me hâtai au bon placard en silmutané avec Sting. Je me débattis de toutes mes forces pour attraper la boîte de pâtisseries et frappai mon frère avec une poêle. Ce dernier tomba à la renverse et je courus hors de la cuisine.
- CONNASSE, ÇA FAIT MAL ! Me hurla-t-il.
Je pouffai en le voyant, le dos embrassant le sol, le visage crispé par la douleur et la colère et les pieds en l'air. Je profitai de la situation et remontai dans ma chambre illico presto, prenant soin de fermer la porte à clef. Je dévorai alors mes petits biscuits sur mon bureau, les devoirs sortis et les écouteurs enfilés pour ne pas entendre le vacarme que causait mon frère.
J'installai Tom sur mes genoux tandis qu'il me scrutait de ses grands yeux noirs. Ses grands yeux qui me rappelaient les siens. Il m'observait de son petit air perdu et je le serrai fort contre moi, m'enfonçant dans le fauteuil. Je dégageai ses vilaines mèches rebelles et le contemplai un instant avant de commencer. Je soufflai et me bombai de courage.
- Tu sais, Tom... maman a elle aussi des parents. Une très gentille maman et... un super papa.
- Oui, papy et mamie ! M'interrompit-il, le sourire aux lèvres.
- C'est ça... et toi, tu m'as moi. Moi, ta maman que tu aimes et qui t'aime très fort et qui veut te protéger tout le temps. Mais... c'est aussi le rôle d'un papa de faire ça. Un papa peut t'apprendre aussi beaucoup et t'aimer très très fort. Tu mérites de connaître l'amour d'un papa, Tom...
- Moi a un papa ? S'interrogea alors le blondinet.
D'un doux regard, je lui caressais sa joue avant que je ne l'étreigne fort contre moi.
- Bien sûr, mon chou. Toi aussi, tu as un papa. Un papa qui veut être là pour toi.
- Où il est, où il est ? S'enthousiasma-t-il, impatient.
- Il est tout près... Ne t'en fais pas. Mais d'abord, si tu veux bien... je vais un peu te parler de lui, d'accord ? Quand j'ai rencontré ton papa... c'était il y a quelques années. On s'aimait beaucoup. Je ne voyais que lui et je l'aimais de tout mon petit cœur. Mais... hum, tu as bien le temps de connaître cette histoire. Par contre, je peux te dire que... tu sais, le grand garçon que avec qui tu as joué la dernière fois ?
- Oui ! Il était trop gentil ! S'enthousiasma Tom.
- Eh bien, justement, ce " gentil " monsieur, c'est lui ton papa.
Le bambin me scrutait d'un air interloqué. Je savais bien qu'il n'avait pas toutes les clés pour comprendre et même moi, lui expliquer le cycle de la vie à mon âge, c'était plus que compliqué. Je n'étais pas faite pour être mère. Je n'avais pas été préparée.
- Je me doute bien que tout ça c'est bizarre. Tu peux pas tout comprendre. Mais il faut juste que tu saches qu'un parent, comme mamie, papy, moi ou encore, Grey, c'est un pilier pour les p'tits gens comme toi. Lui expliquai-je en lui tapotant le bout du nez. C'est nous qui vous aidons à savoir pleins de trucs importants dans la vie et puis, pour grandir aussi, vous avez besoin de parents qui vous font pleins de bisous, pleins de câlins et qui vous aident à pas vous perdre ! Considère Grey comme ton repère. Je suis sûre qu'il a pleins d'amour à te donner.
- C'est vrai ? S'enquit de demander Tom, les étoiles pleins les yeux.
- On ne peut plus vrai, mon grand !
- Ouaiiiis ! J'ai un papa ! Un papa à moi !
- Mais ne m'oublie pas, hein ! Ou tu vas me rendre jalouse ! Moi aussi, je peux te faire plein de câlins, comme ça !
Je le serrai fort contre moi, provoquant le ricanement de mon fils. Je passai ma main dans son dos et la remontai jusqu'à sa chevelure. Je le berçai dans mes bras et ses yeux rencontrèrent les miens.
- Je t'aime, môma'...
Je sentis mon cœur se réchauffer dans ma poitrine et mon sourire s'illumina de plus belle. Je baisai sa joue.
- Et je t'aime aussi, petit coquin.
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Credit to @boz.kun on twitter pour le fanart
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