Chapitre 8 - Vendredi 09/04

Je m’assois à une table de libre et sors mes affaires de dessin, comme d’habitude. Je vais enfin pouvoir continuer mon porte folio, surtout que j’ai eu pas mal d’idées grâce à Andy, le serveur atypique.

Je ne sais pas trop si dessiner uniquement des vêtements des années cinquante porterait ses fruits, je pense que je devrais sûrement rajouter quelque chose à mes dessins, mais c’est déjà un bon début.

Je regarde ce que j’avais déjà commencé à dessiner, feuillette les pages de mon carnet de croquis, pour me réimprégner de mes dessins.

- Salut !, s’exclame encore et toujours le même serveur.

- Bonjour, je commence à répondre.

Mais je n’ai même pas le temps de continuer à parler qu’il pose une tasse de café bien fumant devant moi.

- Je l’ai déjà sucré comme vous l’aimez, me dit-il fièrement.

- Je mets toujours plusieurs sucres dedans.

- Oui, je sais, me répond-il en me faisant un clin d’œil.

Il se penche sur mon carnet à croquis en souriant, et il me dit que mes dessins sont jolis. Ça aussi, je pense que ça va devenir une habitude, si ça continue. Mais ce n’est pas pour me déplaire.

- Vous voulez devenir couturier ?, me demande-t-il.

- Non, pas vraiment, mais j’aimerais bien travailler dans la mode. Dans la conception de vêtements, surtout. Le design, tout ça… 

- C’est trop bien ! Vous en avez déjà créé ?

- Non, mais j’aimerais finir par le faire un jour, je lui réponds, en pensant à ma camarade d’hier qui m’a posée exactement la même question. 

- Et vous avez déjà cousu des trucs ?

- Non plus. J’ai déjà reprisé quelques vêtements abîmés, mais c’est tout. Rien d’extraordinaire.

- Votre talent est extraordinaire. Vous êtes extraordinaire.

Je sens mes joues rougir, et ça a l’air de l’amuser car il se met à sourire de toutes ses dents. Je crois qu’en fait, c’est pour ça qu’il agit bizarrement. Ça doit l’amuser.

- Bon, je vais retourner travailler. Bon courage !, me dit-il en s’éloignant doucement.

Je bois tranquillement mon café en dessinant quelques tenues, que ce soit des robes, des costumes… Mais même si c’est un peu cliché, je dois avouer que je préfère dessiner des vêtements pour femmes.

Je trouve qu’il y a plus de plaisir à dessiner de belles robes ou de belles combinaisons, de beaux ensembles, qu’à dessiner des vêtements d’homme. On peut être beaucoup plus imaginatif qu’en dessinant un simple costume.

Je rajoute quelques tenues à mon carnet de croquis, en essayant de dessiner chacun des ensembles sous des angles différents, comme un vrai professionnel le ferait.

Je finis par m’arrêter et par reregarder chacun de mes croquis. Même si j’aime bien mes dessins, je sais qu’il manque quelque chose. Ça ne suffira pas à m’assurer une bonne note pour mon porte folio. Le but étant de se démarquer, de montrer l’intégralité de son talent, je ne peux pas me contenter de dessiner uniquement des vêtements.

- Toc toc toc !, me lance mon serveur en tapotant mon épaule, ce qui me fait sursauter.

- Oui ?

Il tire la chaise en face de moi et s’y assoit, avant de poser ses coudes sur la table et de mettre sa tête dans ses mains, pour me regarder en souriant.

- Comment avancent les dessins ?

Je le regarde les sourcils haussés, étonné de le voir carrément s’asseoir à ma table. Quand je dis qu’il est spécial…

- Alors ?, insiste-t-il.

- Ça va, ça avance, je lui réponds en souriant.

Même s’il est très à l’aise et un peu bizarre, je ne sais pas… Son comportement est quand même attachant. Mignon, du moins.

- Je viens de m’en rappeler, continue-t-il, mais vous aviez votre oral sur le petit chat hier ! Alors, comment ça s’est passé ? 

- Vous vous en rappelez ?, je lui demande, encore plus étonné.

- Bien sûr ! Je fais très attention aux détails.

Je hoche lentement la tête, toujours sur le coup de l’étonnement. C’est vraiment perturbant. Je ne le connais absolument pas, je ne suis qu’un client du café dans lequel il travaille, et pourtant, il va jusqu’à se rappeler de mes devoirs de fac.

- Alors, comment ça s’est passé ?, répète-t-il. Vous avez eu une bonne note ?

- Euh… Ça a été. Je crois que même mon professeur a apprécié.

- Aah, tant mieux ! Mais qu’est-ce que vous deviez dire exactement ? En quoi ça consiste un oral en école d’art ?

Je ne peux pas m’empêcher de sourire avec toutes ses questions, et mon sourire est en partie dû à son visage. L’expression qu’il affiche est vraiment… Indescriptible. Tout ce que je peux dire, c’est qu’il est rayonnant.

Je lui explique comment s’est passée ma présentation d’hier et lui donne deux ou trois détails sur mon oral, en essayant de faire le plus simple possible. Il a étrangement l’air vraiment intéressé par ce que je raconte.

- J’adore…, marmonne-t-il. C’est trop cool. Vous avez vraiment un talent monstrueux.

- Merci.

- C’est vrai !, continue-t-il. On voit que vous êtes passionné par tout ça, que ce soit la mode ou le dessin.

- Oui, j’ai toujours aimé ça, depuis tout petit.

Cette fois-ci c’est à son tour de hocher la tête, puis il se met à me regarder fixement sans se démunir de son sourire. Au bout d’une trentaine de secondes qui me paraissent être interminables, son sourire s’accentue.

- En tout cas, si un jour j’avais la chance de me faire habiller par vous, je serais ravi, rajoute-t-il avec un clin d’œil. Bon, je retourne travailler.

Je n’ai pas le temps de le retenir, ni de lui demander d’éclaircir ses derniers propos. Déjà que ce qu’il dit porte à confusion, le fait d’accompagner ses paroles avec un clin d’œil… Ça ne fait qu’amplifier l’ambiguïté.

Le pire, c’est qu’avec tout ça, je commence à me demander si son comportement… N’est pas une sorte de technique de drague.

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